lundi 24 juillet 2017

Importance et caractéristiques de la rétroaction

La rétroaction (ou feedback ou retour d’information) est une composante essentielle de l’enseignement. Elle intervient dans le cadre de l’évaluation formative, de la pratique de récupération ou de la vérification de la compréhension. Elle est également à l’œuvre dans tout autre retour diagnostic sur l’apprentissage ou les stratégies cognitives mobilisées par les élèves.


(Photographie : Evelyn Dragan)

 

Paramètres du processus de rétroaction


L’enjeu de la rétroaction devrait toujours être d’améliorer l’élève, pas la production sur laquelle elle porte. Le but de la rétroaction délivrée par l’enseignant est de rapprocher l’élève de l’acquisition d’un objectif d’apprentissage.

Lorsqu’il reçoit une rétroaction, un élève a globalement de modes de réaction possible, il peut : 
  1. Augmenter ses investissements en matière d’effort d’apprentissage ou améliorer ses stratégies d’apprentissage.
  2. Revoir ses objectifs d’apprentissage personnels à la baisse, en ne s’investissant pas plus ou en diminuant ses efforts. 
À la suite de la conception et de la délivrance de la rétroaction, un enseignant peut : 
  1. Délivrer tout le soutien nécessaire en matière de tâches supplémentaires ou de formation à des stratégies d’apprentissage autonome utiles.
  2. Diminuer ses attentes, tout en mobilisant des objectifs d’apprentissage plus adaptés et moins exigeants pour ses élèves.
Dans une perspective d’enseignement explicite au service d’attentes élevées, et d’une évaluation soutien d’apprentissage, il est évident qu’il est souhaitable de voir la première option chaque fois sélectionnée. 

De manière évidente, l’élément le plus important en matière de retour d’information est qu’il soit de qualité et que l’élève en fasse quelque chose de productif. Le but de la rétroaction doit toujours être d’améliorer l’élève d’une manière ou d’une autre, et ces questions doivent permettre de progresser vers l’objectif que l’enseignant a à l’esprit.



Paramètres influençant l’impact de la rétroaction


Qu’on l’appelle rétroaction, feedback ou retour d’information, son impact positif ou négatif dépend à la fois du contexte et de son contenu. 

Le contexte est fonction :
  • Des résultats de l’élève
  • De la difficulté des tâches en lien avec l’objectif d’apprentissage
  • Des connaissances préalables de l’élève
  • De la perception de compétence de l’élève ou de son sentiment d’efficacité personnelle
  • De la culture d’apprentissage et du climat de coopération au sein de la classe
La confiance   élèves dans la qualité de leurs productions peut influencer la manière dont ils abordent la rétroaction reçue et leurs actions à partie de celle-ci. Lorsqu’ils sont convaincus que leur réponse à une tâche est correcte, mais qu’ils sont informés qu’ils se sont trompés, ils réalisent des gains d’apprentissage plus importants. C’est l’effet d’hypercorrection. 

Si les élèves n’ont pas confiance en leur réponse initiale, le retour d’information correctif peut avoir moins d’effet. Les élèves les plus faibles vont bénéficier grandement d’une rétroaction ciblée et pratique, et d’un accompagnement dans sa mise en œuvre. Les élèves qui ont déjà un bon niveau de maîtrise pourront traiter les contenus de la rétroaction en autonomie. 

Le contenu de la rétroaction est fonction de l’expertise de l’enseignant envers l’apprentissage et l’enseignement de la matière, et de sa compréhension du contexte des élèves.

De manière générale, une rétroaction qui porte sur le quoi, le comment et le pourquoi d’une difficulté diagnostiquée dans une évaluation sera plus efficace que la simple fourniture de la bonne réponse correspondante. 

Le retour d’information gagne à être délivré immédiatement lorsque les élèves en sont au début de l’acquisition de l’information, qu’il a un niveau faible ou que la tâche est très complexe. Dans ce cas, le mode privilégié est une vérification de la compréhension en classe suivie d’une rétroaction orale immédiate.

Le retour d’information bénéficie d’un certain délai lorsque les élèves ont déjà bien progressé dans les apprentissages. Dans ce cas, la correction d’une production individuelle ou d’une évaluation formative en classe, bénéficie à être suivie un peu plus tard d’une rétroaction écrite vers la classe entière accompagnée de quelques éléments d’individualisation. 

Des dimensions culturelles et personnelles existent pour la rétroaction, ce qui fait quand dans certains contextes une rétroaction plus indirecte fonctionnera mieux et que dans d’autres contextes une forme plus personnalisée aura plus d’impact. Le fait est cependant qu’une rétroaction à l’échelle d’une classe demandera moins de ressources à un enseignant que sa personnalisation pour chaque élève. La connaissance du contexte et celle du degré d’autonomie des élèves permettent d’ajuster la forme et l’utilisation de la rétroaction et son cadre d’exploitation pour en maximiser l’impact.



Échapper aux constats et offrir des pistes d’amélioration


Pour offrir réellement des pistes d’amélioration, la rétroaction :
  • Être formative et non post-mortem :
    • L'élève a de réelles perspectives de progrès qui lui permettront d'améliorer ses résultats.
  • Guider l’apprentissage autonome et ne pas se substituer à l’enseignement :
    • Le but est de suppléer aux difficultés d'apprentissage et non au déficiences éventuelles de l'enseignement.
  • Offrir des pistes concrètes et ne pas être un simple renforcement :
    • Sa mise en oeuvre démarre en classe et se poursuit en autonomie


D’une rétroaction post-mortem à une rétroaction formative


L’importance, l’impact et la place prise par la rétroaction dans l’enseignement vont dépendre des approches pédagogiques privilégiées par l’enseignant et de sa situation dans un continuum vers la responsabilisation des apprentissage :
  • Lorsqu'elle est située à la fin de ce continuum, il existe une distinction claire entre l’instruction et le retour d’information. 
    • La rétroaction arrive au terme des apprentissages après une évaluation sommative. Elle fonctionne avant tout comme un verdict et un constat post-mortem.
    • L'enseignant justifie la résultat de l'élève pour une note qu'il ne peut améliorer dans la situation actuelle.
    • Son utilité est faible et au-delà de sa dimension de commentaire, sa nature réelle de rétroaction peut être questionnée. 
  • Lorsqu'il s'intègre pleinement dès le début de ce continuuum, le retour d’information peut se retrouver finement amalgamé aux pratiques d’enseignement et de soutien à l'appentissage : 
    • C’est cette dimension que proposent la vérification de la compréhension en enseignement explicite, le modèle de l’évaluation formative ou avec la pratique de récupération.
    • La rétroaction est profondément formative dans le sens où elle permet à l’enseignant d’adapter son enseignement et à l’élève d’être guidé dans la poursuite de son apprentissage autonome.
    • Dans cette perspective, la rétraction agit directement dans la perspective d'un enseignement adaptatif. Lorsqu'elle est bien conçue, son impact est élevé sur l'apprentissage des élèves.


L’objet de la rétroaction


La rétroaction peut actionner :
  • Des processus affectifs, tels que des efforts, de la motivation ou un engagement accru
  • Des processus cognitifs : approfondir la compréhension, vérifier les réponses, corriger des erreurs, donner des pistes, des indices, adopter de nouvelles stratégies cognitives
  • Des processus métacognitifs tels que l’analyse de la qualité de la mise en œuvre ou la réflexion sur la pertinence des stratégies employées. 

Pour qu’il soit efficace, le retour d’information doit répondre à un contexte d’apprentissage. Il est le plus efficace lorsqu’il permet de corriger des interprétations erronées, et non pas tenter de combler un manque total de compréhension qui lui nécessite un nouvel enseignement. Il offre des pistes concrètes d’amélioration et n’est pas un simple constat. L’élève devrait pouvoir répondre aux pistes offertes par un apprentissage autonome ou dans sa pratique en classe. La mise en oeuvre de la rétroaction ne pas dépendre d’un nouvel enseignement, car des difficultés de cet ordre doivent être anticipées dans le cadre d'un processus d'enseignement explicite.


La rétroaction n’est pas un renforcement ou une punition


Le retour d’information ne se réduit pas à un renforcement tel que décrit dans le cadre du béhaviorisme. 

Il peut être accepté, modifié ou rejeté, car il induit un traitement cognitif. Il n’est pas seulement donné, mais il peut également être recherché par les élèves ou autogénéré.

Comme l’indiquent Hattie & Timperley (2007), les tailles d’effet rapportées dans les méta-analyses de retour d’information montrent une variabilité considérable, ce qui indique que certains types de retours d’information sont plus efficaces que d’autres. 

Les études présentant les tailles d’effet les plus élevées impliquent que les élèves reçoivent un retour d’information sur une tâche et sur la manière de l’accomplir plus efficacement, et s'engagent dans son traitement. 

Les tailles d’effet plus faibles étaient liées aux éloges, aux récompenses et aux punitions. 





Favoriser la conscienciosité 


Deux concepts régulièrement associés à la rétroaction sont ceux de l’état d’esprit de développement (de Carol Dweck) et celui du cran (de Angela Duckworth), mais ils sont contestés. La conscienciosité représente une alternative intéressante.

L’état d’esprit de développement (growth mindset) est un concept relativement malmené et peu aisé à manipuler à l’échelle d’un groupe ou à travers des interventions générales. La situation du cran (« grit ») est encore plus précaire. Les problèmes et limitations de ces concepts ont été explorés dans le cadre des articles suivants :

Voir articles :
Heureusement, des concepts alternatifs existent et sont soutenus par des données probantes. Les enseignants peuvent les utiliser pour accompagner leur rétroaction. Il s’agit de l’auto-efficacité, de la perception de compétence ou des attributions que se font les élèves. Tous trois ont déjà été explorés dans des articles de ce blog. Une autre option est celle de la conscienciosité. 


La notion de conscienciosité 


La conscienciosité est un trait de personnalité mis en évidence dans le cadre du modèle des Big Five ainsi que du modèle HEXACO.

Pour le modèle OCEAN :

  • (O) Ouverture : appréciation de l'art, de l'émotion, de l'aventure, des idées peu communes ou des idées nouvelles, curiosité et imagination

  • (C) Conscienciosité : conscience morale, autodiscipline, respect des obligations, organisation plutôt que spontanéité, orientation vers des buts

  • (E) Extraversion : énergie, émotions positives, tendance à chercher la stimulation et la compagnie des autres

  • (A) Agréabilité (amabilité) : une tendance à être compatissant et coopératif plutôt que soupçonneux et antagonique envers les autres

  • (N) Neuroticisme ou névrosisme : contraire de stabilité émotionnelle : tendance à éprouver facilement des émotions désagréables comme la colère, l'inquiétude ou la dépression, vulnérabilité.

Pour le modèle HEXACO onHEXACO se décompose en 6 facteurs qui eux-mêmes se subdivisent en 4 facettes :

  • (H) Honnêteté-humilité : sincérité, équité, évitement de la cupidité, modestie

  • (E) Émotivité :appréhension, anxiété, dépendance, sensibilité

  • (X) Extraversion : amour propre social, audace sociale, sociabilité, vitalité

  • (A) Agréabilité : indulgence, gentillesse, flexibilité, patience

  • (C) Conscienciosité : organisation, diligence, perfectionnisme, prudence

  • (O) Ouverture : appréciation esthétique, curiosité, créativité, non-conventionnalité

Ce à quoi s'ajoute une échelle interstitielle : altruisme / antagonisme

La conscienciosité est un trait qui regroupe différentes caractéristiques désirables en milieu scolaire :
  1. Être consciencieux consiste à naturellement privilégier la profondeur, la prudence, la vigilance. Cela implique un désir naturel de bien faire une tâche.
  2. Les personnes consciencieuses sont généralement efficaces et organisées par opposition à d’autres qui privilégieraient le travail vite fait et désorganisé oui qui auraient une tendance marquée à la procrastination. 
  3. Les individus consciencieux,
    • Présentent une tendance à l’autodiscipline
    • Agissent loyalement
    • Prennent au sérieux leurs obligations et leurs engagements envers les autres
    • Visent la réalisation des objectifs
    • Manifestent par des comportements caractéristiques comme le fait d’être soignés et systématiques, de même que la prudence, la rigueur, et la délibération (la tendance à réfléchir avant d’agir).

À travers la rétroaction que l’enseignant va délivrer lors de la réalisation de tâches par l’élève, il peut influencer grandement la façon dont celui-ci considère et conçoit :
  • Ses investissements en matière de travail.
  • Ses conceptions en matière d’intelligence.
L’élève consciencieux a confiance en ses capacités de travail, d’apprentissage et de progrès. S’investir est naturel pour lui. À travers ses interactions et sa rétroaction, l’enseignant a intérêt à renforcer ce type d’attitudes chez ses élèves, plus particulièrement chez ceux pour qui ces attitudes ne sont pas toujours naturelles en milieu scolaire. Nous gagnons à favoriser le développement de bonnes habitudes chez nos élèves.


Soutenir la consciensiosité dans un cadre scolaire


Pour l’enseignant, favoriser chez ses élèves la conscienciosité se traduit dans son propre langage et ses attitudes lorsqu’il communique aux élèves. Il doit manifester auprès d’eux qu’il entretient à leur égard des attentes élevées de réussite.

Développer de telles conceptions influence les comportements et la communication de l’enseignant envers ses élèves. Ne pas les posséder revient à considérer qu’il y aurait une hiérarchie d’intelligence stable entre les élèves, une conception normative du niveau des élèves. Dès lors, l’enseignant risquerait de développer des interactions différentes avec les élèves en fonction de leur position sur l’échelle (élèves doués, moyens ou faibles). Cela serait néfaste pour les progrès et l’auto-efficacité des plus faibles.

À l’opposé, un enseignant qui prend en compte les capacités de chaque élève à progresser et favorise la conscienciosité, va considérer que :
  • Chaque élève possède un réel potentiel d’amélioration. Ce qui compte c’est de comparer les résultats actuels d’un élève à ses résultats antérieurs et ultérieurs escomptés dans une dynamique de progrès, pas de comparer les élèves entre eux.
  • Les différences entre les résultats des élèves sont inévitables, mais sont susceptibles d’être largement atténuées et résorbées au fil du temps.
  • Les erreurs et les difficultés rencontrées par les élèves font partie du processus d’apprentissage et indiquent sur quels aspects fournir des efforts supplémentaires.
  • Les élèves qui rencontrent le plus de difficultés sont aussi ceux susceptibles de s’améliorer le plus et qui sont les plus susceptibles de profiter d’un soutien individualisé.
  • Les élèves peuvent se soutenir et se renforcer mutuellement comme ressources pour l’apprentissage de leurs pairs.
  • L’enseignement explicite de stratégies d’apprentissage efficaces et le soutien au développement de bonnes habitudes de travail se traduiront avec certitude par des améliorations.
  • L’expertise, la responsabilité et l’efficacité de l’enseignement se trouve dans sa capacité à soutenir concrètement les élèves les plus faibles en adaptant les approches pour atténuer les écarts en maintenant les exigences liées au niveau attendu.




Caractéristiques d’une rétroaction efficace qui soutient la motivation des élèves


Soutenir la motivation à travers le langage employé 


Il est utile de prendre conscience, en tant qu’enseignant que la forme du langage exprimé est un puissant vecteur d’expression pour communiquer des attentes élevées et nos croyances dans la capacité de nos élèves. 

À tout moment, nous devons veiller à utiliser un vocabulaire approprié pour favoriser la motivation des élèves.

Il est utile d’y penser dès la phase de planification. Durant celle-ci, l’enseignant s’assure que les mots d’encouragement et de renforcement choisis et mobilisés en classe atteignent leur cible et sont crédibles et signifiants pour les élèves. Le but est de soutenir l’amélioration du sentiment d’efficacité personnelle des élèves.

Par exemple :
  • Il convient d’éviter de qualifier une tâche de facile et une autre tâche de difficile. 
    • Lorsque des élèves rencontrent des difficultés avec une tâche facile, ils risquent de l’interpréter comme une preuve d’un manque de capacités intellectuelles avec un impact négatif sur leur sentiment d’efficacité personnelle. 
    • À l’opposé, des élèves risquent de ne pas vraiment s’investir dans une tâche difficile, car ils vont estimer que celle-ci dépasse leurs capacités. Ils risquent de mobiliser des stratégies d’évitement, ce qui a des conséquences négatives pour l’apprentissage. 
  • Il convient de sélectionner une expression qui véhicule que pour tous les élèves :
    • Il est possible de réussir ces tâches moyennant des efforts qui peuvent être variables.
    • Il est important d’apprendre à maîtriser les bonnes stratégies au bon moment. Certains aspects demandent d’être exercés pour devenir fonctionnels et efficaces. 
    • La fluidité et l’aisance ne passent que par une pratique délibérée prolongée.
    • S’engager et faire preuve de persévérance dans l’exécution des tâches attribuées est le plus sûr moyen de générer un apprentissage effectif, précieux et utile


Caractéristiques de la rétroaction


La rétroaction, faite par l’enseignant vers un élève :
  • Gagne à être distribuée dans le temps.
  • Vise à réduire les écarts entre les élèves.
  • Se transmet de manière explicite, par écrit sur les travaux réalisés, ou de vive voix. 
  • Indique l’écart entre le niveau atteint et le niveau de référence en rapport avec les objectifs d’apprentissage. 
    • Il s’agit de rendre les élèves conscients du décalage entre :
      • Le niveau de référence à atteindre, c’est-à-dire le but de leur apprentissage
      • Leur niveau de compréhension, de performance et d’apprentissage actuel. 
    • Le but de la rétroaction est d’établir une opérationnalisation entre :
      • Ce que l’élève sait déjà faire : 
        • Les objectifs d’apprentissage actuellement atteints et qui vont devoir faire l’objet de récupérations espacées.
      • Ce qui va nécessiter un investissement supplémentaire de la part de l’élève : 
        • Les objectifs d’apprentissage non encore atteints, qui doivent être explicités par l’enseignant et pour lesquels de nouvelles activités pratiques gagnent à être définies.
  • Constitue un moyen privilégié pour aider l’élève à acquérir de nouveaux savoirs, savoir-faire, savoir-être en matière de stratégies cognitives et métacognitives :
    • Elle communique sur les changements à apporter si besoin est, dans la façon de travailler, de s’organiser, dans les stratégies mises en œuvre et dans la planification. 
    • Elle fournit aux élèves des indications concrètes sur les moyens de progresser.
  • Renseigne ou interroge sur les facteurs qui sont à l’origine des difficultés observées chez l’élève.
  • Gagne à informer et à impliquer les parents en tant que soutiens pour leur enfant :
    • L’efficacité de la rétroaction augmente généralement lorsque les parents sont également informés de son contenu et des pistes recommandées.
    • La communication de résultats de l’évaluation formative et des processus de remédiation enclenchés alerte les parents sur les indicateurs préalables au passage de l’évaluation sommative. Il est encore temps pour eux de réagir et ils ne sont pas mis par l’enseignant devant le fait accompli comme c’est le cas lors d’un commentaire « post-mortem » délivré au terme d’une évaluation sommative.
    • Informer les parents leur permet de jouer pleinement leur rôle préventif d’accompagnement. Ils partagent le quotidien des élèves, les connaissent bien dans leurs aptitudes et leurs centres d’intérêt et peuvent les stimuler et les soutenir.
  • Peut déboucher sur des actions de remédiation pertinentes :
    • Il s’agit par exemple de rattrapage, d’un soutien pédagogique, d’une guidance, d’un tutorat, etc.
    • Elles sont proposées par l’enseignant en fonction des services de ce type organisés structurellement dans l’établissement concerné, idéalement sous la forme d’une approche de type réponse à l’intervention. 
  • Bien qu’il y ait une base de recherches qui montrent que les élèves bénéficient d’une rétroaction immédiate, des recherches plus récentes tendent à montrer que retarder la rétroaction pourrait être plus utile dans certaines situations. Cela s’expliquerait par un effet d’espacement (Weinstein, 2019). De manière générale, au début des apprentissages dans une matière, la rétroaction doit être immédiate et au fur et à mesure de la progression, elle gagne à être délivrée avec un certain délai.


Dimension affective


Il est important durant la progression de l’enseignement d’une matière, de faire intervenir les élèves et leur faire prendre la responsabilisation des apprentissages. Nous favorisant les échanges entre pairs dans une dynamique de tutorat et progressivement des processus d’autoévaluation. 

Nous les encourageons :
  • À assumer la responsabilité de leurs apprentissages,
  • À être fiers de leurs réussites, à discuter des difficultés rencontrées et des stratégies mises en place pour y faire face avec leurs camarades et leurs parents.
Les élèves ont besoin d’être soutenus et reconnus de manière générale dans leur volonté d’améliorer efficacement leur rendement.

Les élèves profitent davantage de la rétroaction lorsqu’elle offre aussi une forme de suggestion, de questionnement ouvert, de dialogue de la part de l’enseignant — plutôt que de la rétroaction plus normative, directive, définitive. La rétroaction doit laisser et inciter les élèves dans la marge de manœuvre qui s’offre à eux. 

Ils gardent, in fine, la possibilité de décider et d’agir, plus ou moins, en fonction de ce qui est significatif pour eux. L’enseignant ne connait pas tous les paramètres concernant l’élève et doit donc s’abstenir de généraliser trop vite s’il ne dispose pas de données factuelles.

Les résultats des élèves s’améliorent mieux lorsqu’ils travaillent sur des objectifs de processus et de maîtrise, et pas seulement sur des objectifs ponctuels de performance. Les élèves doivent s’engager à suivre leur progrès vers la réalisation des objectifs d’apprentissage dans leur ensemble. 

Certains élèves en difficulté vont bénéficier d’un accompagnement individualisé et d’un étayage temporaire dans la reconnaissance et parfois dans la définition et le suivi de leurs objectifs personnels. Il peut être utile de reconnaitre leur part de subjectivité (leur parcours personnel) et leurs projets pour stimuler leur engagement.



Un triple impact temporel pour la rétroaction


L’effet de la rétroaction peut se distribuer dans le temps selon trois modes différents :
  • La rétroaction prend en compte le passé : 
    • La rétroaction prend en compte le passé et la qualité des apprentissages antérieurs dans la suivi de la fonction diagnostique de l'évaluation.
    • Elle permet un retour sur les tâches non réussies d’une séquence d’apprentissage, pour lesquelles l’enseignant peut modifier ses interventions selon les difficultés observées. 
    • La rétroaction, qui suit une évaluation diagnostique, amène à la sélection des moyens et des démarches servant à corriger ou surmonter les difficultés d’apprentissage rencontrées par les élèves :
      • L’enseignant peut revenir sur des contenus non compris ou non appris par le biais d'un préenseignement ou d'une remédiation. 
      • De même, il peut guider ses élèves vers des tâches supplémentaires à réaliser de manière autonome.
  • La rétroaction agit sur le présent : 
    • Elle permet un ajustement en direct. Les interactions entre enseignant et élèves favorisent une régulation de l’apprentissage et de l’enseignement en permettant aux protagonistes une prise de conscience du niveau d’acquisition actuel des objectifs d’apprentissage. 
    • Cela consiste en des mises au point continues qui s’effectuent par le biais d’échanges informels, d’interactions entremêlées d’observations dans le cadre d'un dialogue formatif.
    • Dans ce cadre, la rétroaction intervient en modifiant le déroulement des activités d’apprentissage. 
    • Elle s’inscrit plus spécifiquement dans le cadre de la vérification de la compréhension en enseignement explicite. 
  • La rétroaction vise à améliorer le futur 
    • La rétroaction vise à améliorer la qualité de l’apprentissage à venir pour l’élève et la qualité des activités d’enseignement ultrieure.
    • Les données de l’évaluation formative peuvent être utilisées par l’enseignant pour planifier ses futures activités didactiques qui concerneront de nouveaux groupes d’élèves. 
    • La prise en compte de la rétroaction permet l’élaboration de nouvelles activités d’enseignement élaborées en fonction des différences entre élèves. 
    • De même, grâce au retour d'information, l’enseignant peut décider de sensibiliser et de former ses élèves à de nouvelles stratégies d’apprentissage autonome. Ces démarches peuvent rendre leur méthode de travail plus efficace en vue des nouveaux contenus enseignés.

En résumé, la rétroaction est un moyen qui permet à l’enseignant :
  • De réfléchir à la manière de combler des lacunes dans les connaissances préalables.
  • D’adapter l’enseignement en direct
  • D’améliorer la capacité :
    • Des élèves à aborder efficacement de nouveaux contenus et à dépasser certaines difficultés.
    • De l’enseignant à jouer son rôle plus efficacement encore à l’avenir.



Privilégier une rétroaction autoréférencée et proscrire une rétroaction normative


Les comparaisons sociales sont à éviter 


La rétroaction normative correspond à comparer socialement les performances d’un élève avec celles d’autres élèves. Elles sont encouragées par la distribution des notes établissant une hiérarchie entre élèves, ce type de démarche met l’accent sur l’importance de dépasser ses condisciples.

Paradoxalement, cette forme de compétition réduit le niveau des résultats scolaires.

Les comparaisons sociales amènent les enseignants à attribuer les différences entre élèves à des différences de capacités et à penser que celles-ci sont extrêmement stables dans le temps. Les élèves à résultats médiocres auront toujours des résultats médiocres, alors que les bons élèves auront toujours de bons résultats dans leur scolarité.

Les élèves qui ont des résultats décevants vont avoir tendance à attribuer leurs échecs à un manque de capacité. 

Dès lors, ils s’attendent à obtenir de mauvais résultats à l’avenir. Ils feront preuve d’une motivation réduite pour les tâches suivantes et d’une diminution de leur confiance en soi, de leur sentiment d’efficacité personnelle.

Il vaut mieux proscrire toute comparaison entre les résultats d’un élève et ceux d’autres élèves dans la classe. Cela pourrait arriver en évoquant des différences de niveau ou le fait d’avoir de meilleurs ou de moins bons résultats que d’autres. Dans les deux cas, des conséquences négatives sont possibles.
L’évaluation formative est personnelle et individualisée. Elle permet d’informer l’élève sur son évolution propre et ne doit pas comparer son savoir-faire et ses comportements à ceux de ses condisciples. 



La comparaison individuelle est à promouvoir


La rétroaction autoréférencée correspond une comparaison individuelle des performances actuelles d’un élève avec ses performances antérieures de manière à mettre en évidence la progression.

Par rapport à la rétroaction normative, la rétroaction autoréférencée entraine des attentes plus élevées en matière de performances futures et des attributions accrues à l’effort fourni par l’élève. Par exemple, « J’ai réussi parce que j’ai fait des efforts en travaillant ». Les attributions aux capacités (par exemple, « J’ai réussi parce que je suis intelligent ») ne produisent par contre que peu d’effets.

Dans cette optique, il est conseillé de prodiguer une rétroaction stratégique auprès d’un élève :
  • En décrivant en premier ce qui a été acquis puis en détaillant ce qui est encore à acquérir. 
  • L’accent est mis sur l’amélioration personnelle, l’effort, l’usage de stratégies et l’apprentissage.
  • Un lien personnalisé gagne à être réalisé entre ses résultats antérieurs et ses objectifs à court et à moyen terme, afin de clarifier les actions à mener et de les identifier en tant que défis accessibles. 
Il faut également tenir compte de l’intérêt à prodiguer une rétroaction affective auprès d’un élève :
  • L’élève est sensible. Il est susceptible de réagir positivement à toute amélioration éventuelle de sa performance. La rétroaction qui fait référence aux progrès d’un élève et aux possibilités d’amélioration de son travail peut aider à compenser l’effet négatif des comparaisons sociales inévitables.
  • Le fait que les enseignants évoquent les progrès graduels des élèves a des effets positifs. Ce type de comparaison individuelle a un effet positif marqué sur les élèves les plus faibles.
  •  Ce facteur est susceptible d’améliorer sa perception compétence et son auto-efficacité. Ces facteurs sont favorables à ses performances ultérieures, car ils facilitent ses investissements, sa motivation intrinsèque, ses attributions causales et sa persévérance. 
La rétroaction ne sera pas toujours positive. Les enseignants félicitent les élèves dont le travail leur permet de progresser avec le temps et critiquent de manière constructive ceux qui stagnent ou régressent. 

En conclusion, les élèves peu performants ne devraient pas recevoir un retour d’information normatif. Ils devraient recevoir un retour d’information autoréférencé qui concentre leur attention sur leurs propres progrès. En outre, les élèves plus performants ne sont pas affectés négativement par une rétroaction autoréférencée plutôt que normative.





Centrer la rétroaction sur des variables modifiables et objectives, et non sur l’ego ou sur des suppositions


Il ne sert à rien et il est contre-productif de diriger la rétroaction sur des facteurs non modifiables concernant les élèves. La rétroaction doit se focaliser sur des facteurs modifiables en suggérant des actions concrètes portant sur ceux-ci.


Une rétroaction efficace centrée sur le résultat des efforts fournis 


Un enseignant peut attribuer les mauvais résultats scolaires à des causes que l’élève peut contrôler, voire modifier, tels que le manque d’efforts ou la sélection d’une stratégie inadéquate. Ce faisant, il donne ainsi aux élèves l’espoir que la situation sera différente à l’avenir moyennant certains efforts définis.

À ce titre, l’effet de la rétroaction va dépendre des conceptions qu’entretiennent les élèves sur :
  • Les buts généraux des apprentissages scolaires
  • Les risques, difficultés ou enjeux potentiels à s’investir de telle ou telle manière ou à sortir de leurs habitudes.
  • Leurs croyances sur ce en quoi consiste un apprentissage scolaire.
Les investissements personnels demandés doivent leur sembler plausibles et acceptables. Les conceptions des élèves influent toutes sur leur motivation à agir dans un sens ou dans l’autre et sur la nature de leur engagement dans la ligne de conduite choisie. 

Les enseignants doivent se donner pour but d’inculquer à leurs élèves la conception que la réussite tient à des facteurs spécifiques internes fluctuants et maitrisables. Les enseignants peuvent ainsi encourager les élèves à penser qu’ils sont susceptibles de progresser grâce à l’effort et à la mise en place de stratégies plus appropriées. Nous sommes proches ici de l’idée d’un état d’esprit de développement défendu par Carol Dweck. L’élève croit qu’il peut s’améliorer moyennant certains efforts prédéfinis.


Il s’agit par exemple :
  • De valoriser l’effort fourni par les élèves et leur usage de stratégies adéquates.
  • De minimiser l’impact de facteurs généraux stables tels que la compétence personnelle ou le niveau d’intelligence (fluide)
  • D’éviter tout ce qui pourrait être interprété de l’ordre de la préférence ou d’une subjectivité biaisée de l’enseignant pour certains élèves plutôt que pour d’autres. 
L’importance que les enseignants attachent à l’effort fourni en temps et en utilisation de nouvelles stratégies, plus qu’à l’aptitude, joue un rôle non négligeable dans l’image que les élèves se créent d’eux-mêmes.

Lorsque les élèves pensent que leurs résultats peuvent être améliorés, cela peut apporter la motivation et la persévérance nécessaires pour aborder des problèmes ou des matières complexes et exigeants.



Une rétroaction inefficace centrée sur l’ego ou les capacités supposées de l’élève


Il est une tentation bien réelle, mais dangereuse de personnifier l’élève à la production qu’il a fournie. L’enseignant félicite alors l’élève pour ses capacités ou lui laisse sous-entendre qu’il le considère comme faible ou peu capable dans le domaine considéré.

Le fait est que tant des félicitations que des critiques adressées à la personne de l’élève plus qu’au travail fourni sont susceptibles de générer des résultats paradoxaux que l’enseignant ne contrôle pas.

Attribuer l’échec au manque de compétence, conduit souvent les élèves à baisser les bras :
  • La rétroaction qui sollicite l’ego au lieu de porter sur la tâche concernée peut nuire aux performances. L’élève peut conclure de la remarque de l’enseignant qu’il est intrinsèquement intelligent ou stupide. 
  • À l’opposé, il peut estimer que l’enseignant se trompe sur son interprétation. Dans chacun des cas, le commentaire sur la personne est susceptible de n’amorcer aucune réflexion ou démarche chez l’élève. 
La rétroaction de l’enseignant sur l’ego est susceptible d’avoir un effet parfois contre-productif, dans la mesure où :
  • Les félicitations peuvent avoir des effets négatifs, alors que les conséquences de la critique peuvent être positives. 
  • Les félicitations ne débouchent pas automatiquement sur une augmentation de la compétence perçue et les critiques ne débouchent pas automatiquement sur un recul de la compétence perçue.
Par exemple, si l’enseignant en mathématiques utilise une rétroaction basée sur les capacités intellectuelles supposées :
  • L’élève performant encensé pour son intelligence et non pas pour son travail, va considérer qu’il réussit grâce à son talent et pas à son travail. 
    • Il développera une conception statique de ses capacités et ne sera pas incité à faire des liens directs entre le développement de celles-ci et une assiduité au travail. 
    • Tout échec ultérieur sera perçu comme une remise en cause des capacités et non comme un manque de travail, il sera considéré comme stressant et non comme une invitation à travailler plus ou mieux.
    • Le processus est susceptible de générer de l’anxiété et même de pousser l’élève à tricher ou à masquer la réalité dans certains cas pour sauver les apparences. 
  • L’élève peu performant dénigré pour son manque de capacité supposé va considérer que cette situation est inéluctable  :
    • Travailler est dès lors de toute façon inutile, car il restera éternellement faible en mathématiques. 
    • Il aura par conséquent tendance à se désinvestir.
La rétroaction sur l’ego a un aspect roulette russe qui peut faire plus de mal que de bien. Il convient dès lors de l’éviter. Flatter l’ego ou le blesser n’est pas utile. Bien qu’il soit tentant de la faire, il vaut mieux s’en abstenir pour le bien de l’élève.

L’enseignant joue sur les attributions que se fait ou se fera l’élève. Or, l’enseignant ne connait pas ces attributions. L’effet de la rétroaction sur l’ego est fonction de leur interprétation par l’élève.
  • Si les félicitations sont attribuées à la capacité, la perception de compétence est susceptible d’augmenter. 
  • Si les félicitations sont attribuées à l’effort, la perception de compétence peut même le cas échéant diminuer, si l’effort soutenu est perçu comme indicateur d’une faible capacité, surtout après des tâches simples.



L’importance de l’expression d’attentes élevées à travers la rétroaction


Un enseignant peut féliciter un élève en lui disant « Tu excelles ! » ou « Tu es intelligent/capable ! », après que l’élève a terminé une tâche facile ou lorsqu’il a répondu rapidement à une question relativement simple. Il risque à ce moment-là, par inadvertance, d’encourager l’élève à associer l’intelligence avec la rapidité, l’aisance et la facilité.

Ces associations deviennent problématiques lorsque les élèves devront plus tard faire face à des matières ou exercices plus complexes et qui demandent plus de temps, d’effort ou des approches différentes.

Il y a lieu d’être particulièrement prudent dans les félicitations. L’enseignant doit s’assurer qu’elles sont bien liées à une performance spécifique qui est le résultat d’efforts fournis et consentis, et de la mobilisation de stratégies exercées délibérément et maîtrisées.

Il importe qu’il y ait une relation entre effort et résultat. En effet, des signaux indirects d’encouragement subtils relatifs à des compétences médiocres, qui privilégient l’effort au résultat peuvent être malencontreusement envoyés par les enseignants. Cela a lieu spécialement lorsqu’ils essaient de protéger la confiance en soi d’un élève en échec scolaire. Ils peuvent laisser transparaitre à l’élève que l’enseignant a de faibles attentes à son égard.

Féliciter un élève d’avoir réussi un devoir relativement facile peut ne pas avoir l’effet rassurant ou encourageant désiré. En effet, ces louanges peuvent diminuer la motivation parce que cela suppose que l’élève n’a pas les capacités pour réussir un devoir plus difficile.

Pour véhiculer et entretenir des attentes élevées, l’enseignant s’assure qu’ :
  • Il donne des tâches complexes et exigeantes, mais bien calibrées à un investissement qui reste à la portée des élèves.
  • Il habitue ses élèves à des situations où ils relèvent des défis qui nécessitent des efforts dirigés, prolongés et entretenus.
  • Il se place alors dans une situation favorable où il peut être vigilant pour débusquer toutes attitude ou démarche minimaliste de l’élève. 
  • Il enseigne explicitement les stratégies attendues et renforce positivement et spécifiquement les attitudes et les comportements qui les accompagnent.
  • Il reconnait le droit de l’élève à l’erreur :
    • Il montre qu’il peut avoir besoin de plus de temps et de plus de pratique. 
    • L’enseignant communique le message que fournir des efforts est la clé pour amener à accéder à la maîtrise. 
    • À aucun moment, il ne semble douter des capacités d’un élève à y arriver.
Grâce à ces démarches soutenues, les élèves développent leurs capacités de persévérance. Lorsque l’élève aboutit à la réussite et à la maîtrise attendue, cela l’incite à réitérer la démarche et à l’internaliser, ce qui l’inscrit dans une démarche générale de progrès personnels.

Chaque fois, la critique doit être constructive face à un échec, qui reste une issue possible dans le dispositif. De cette manière, les élèves auront davantage tendance à attribuer leurs mauvais résultats à un manque d’effort ou à l’usage de stratégies inadéquates. 

Les élèves feront confiance aux enseignants qui leur disent qu’ils feront mieux à l’avenir et leur prodiguent des conseils concrets et leur proposent des stratégies à appliquer. Ce faisant, l’enseignant utilise son expertise pour permettre à ses élèves de progresser.

Tout ce dispositif rentre dans une logique de réciprocité entre l’enseignant et ses élèves. L’enseignant offre son soutien et l’élève fournit des efforts en rapports. 

Sans cela, il y a des risques si un élève reçoit de l’aide sans l’avoir demandée. Il y en a aussi s’il n’en ressent pas le besoin ou lorsqu’il perçoit un encouragement compatissant de la part d’un enseignant à la suite d’un échec. Ce sera surtout lorsque les autres élèves n’en reçoivent pas. Le soutien est fonction des besoins d’apprentissage et s’applique à tout élève indifféremment en fonction de sa situation.

Lorsqu’un élève se sent singularisé, cela pourra être interprété comme des signaux indirects et subtils, révélateurs des faibles attentes que l’enseignant a pour eux. À ce titre, l’élève en difficulté est toujours une priorité pour une rétroaction efficace. C’est auprès de lui que l’efficacité et l’expertise de l’enseignant sont fondamentales pour fournir l’étayage qui va lui permettre de rattraper ses retards. 



Rédaction et conception de la rétroaction


Un commentaire ne doit pas décrire la valeur de la performance de l’élève. Il ne doit pas contenir des réponses génériques. Celles-ci sont du style : « tu dois travailler plus », « tu dois étudier plus en profondeur », « attention au soin/à la structure/à l’orthographe/à ne pas tout mélanger/à être complet », « relis-toi », « respecte les consignes », etc.

Le problème de ces commentaires est qu’ils sont flous et nébuleux et n’ont pas d’interprétation pratique ou aisée pour les élèves. Ils pourraient les rédiger eux-mêmes. L’élève ne voyant pas comment agir directement et pratiquement a toutes les chances de ne pas en tenir compte, car le manque de spécificité n’incite pas à une action directe.

Un commentaire efficace précise en référence aux objectifs d'apprentissage et aux critères de réussite :
  1. Ce qui est actuellement maîtrisé dans la performance analysée.
  2. Ce qui n'est actuellement pas maîtrisé dans la performance analysée et pourquoi. 
  3. Des tâches et des démarches concrètes et spécifiques à suivre pour combler l'écart actuel, consolider et approfondir les connaissances.  
Une rétroaction efficace donnée aux élèves à la suite d’une évaluation formative  :
  • Est circonstanciée et propre aux moyens de franchir une étape ou surmonter un obstacle, le comment faire
  • Est attachée à des critères explicites relatifs aux objectifs d’apprentissage
  • Rend les processus plus transparents en lien avec l’alignement curriculaire
  • Guide vers l’usage de stratégies d’apprentissage adéquates
  • Comprend des conseils concrets et spécifiques sur les moyens de s’améliorer.
Plutôt que de chercher à toucher l’élève, les enseignants doivent se concentrer stratégiquement sur l’attribution de tâches qui apportent une réponse aux difficultés spécifiques qu’ils ont repérées dans leurs productions.

Les commentaires de la rétroaction doivent être positifs, constructifs, spécifiques et liés aux résultats d’apprentissage. Ils transmettent des attentes élevées sur la réussite de l'élève et des pistes de soutien pour y arriver.


Mise en activité de l’élève


Un rétroaction stratégique et efficace pour un enseignant est un commentaire (oral ou verbal) que l’élève traduit immédiatement par une action qui améliorera l’apprentissage :

Celle-ci doit être :
  1. Précise : l’élève identifie directement le point de matière ou la compétence est mobilisée
  2. Concrète : il n’y a pas d’incertitude sur ce qui est attendu
  3. Délimitée : le temps nécessaire ne doit pas être trop élevé
  4. Spécifique : cible une difficulté précise  
  5. Vérifiable : l’élève peut facilement montrer qu’il l’a fait et l’enseignant peut facilement le vérifier. 

On parle de rétroaction actionnable. Il est intéressant de passer en revue ce que peuvent être ces activités de mise en oeuvre de la rétroaction.

Formes de mise en activité


1) Refaire ! 

Refais cet exercice en corrigeant tes calculs, réécris ce paragraphe avec un langage correct…, réponds à nouveau en tenant compte des consignes exactes, en incluant les éléments manquants… 


2) Réentrainer ! 

Certains savoir-faire demandent de la pratique pour être automatisés et certaines capacités de discrimination pour choisir la bonne méthode. Celles-ci ne peuvent passer que par une pratique extensive.

Il s’agit de pointer alors l’élève vers une série d’exercices qui recouvrent ce niveau de difficulté. Par exemple, on lui dit « Fais l’exercice 5 et 6 p 65 du livre dans ton cahier ».

Cela fonctionne très bien dans des cours qui demandent de faire appel à une dimension logico-mathématique ou scientifique ou dans un cours de langues pour exercer telle ou telle règle grammaticale ou structure de phrase.

Il est important d’être précis sur le nombre d’exercices et la consigne à respecter sans cela l’élève manquera de repères. Il faut poser le bon niveau de difficulté et le bon nombre d’exercices diversifiés/répétés en fonction de leur niveau pour s’assurer que l’objectif sera rempli. Un corrigé des exercices peut être consultable par l’élève.


3) Résumer et réexaminer

Quand certains objectifs ne semblent pas complètement assimilés ou confus, on peut demander aux élèves de rédiger une synthèse de la partie du cours que recouvrait en partie cette question ou d'en faire des flashcards. 

Une alternative est de leur demander de répondre dans un premier temps sans cours à une série de réponses qui portent sur les mêmes objectifs. Par la suite, ils vérifient leur réponse à cours ouvert.

Dans les deux cas, la production peut être supervisée par l’enseignant. Un corrigé des questions peut être consultable par l’élève ultérieurement.


4) Étudier et se tester à nouveau

Quand le résultat de l’évaluation est catastrophique et que cela est envisageable, on peut demander à l’élève de reprendre la matière, de la retravailler, de l'étudier à nouveau et de le réévaluer. L’enseignant fournit la nouvelle évaluation et donne accès à un correctif. Il ne doit pas forcément la corriger lui-même.


5) Approfondir la question

Quand une tâche complexe est bâclée, on peut demander à l’élève de la reprendre en réfléchissant à sa stratégie, en lui pointant un modèle de résolution et en lui demandant de s’exercer sur une tâche similaire en se servant de cette référence. Dans ce cas, un corrigé peut également être accessible à terme.

Ces approches ont comme avantage d’instrumentaliser le commentaire et de lui donner une utilité pratique et corrective basée sur l’expertise de l’enseignant en ce qui concerne les objectifs d’apprentissage.



Quelle rétroaction pour les tests à choix multiples ? 


Un des soucis souvent évoqués en ce qui concerne les tests à choix multiples est que les élèves pourraient sélectionner une mauvaise réponse. Ils vont penser qu’elle est vraie et à partir de ce moment-là la mémoriser comme étant la bonne réponse.

C’est un danger bien réel, mais qui peut être aisément contourné en fournissant une rétroaction de correction spécifique pour ce type de questionnaire. Cela suffit généralement à combattre ces risques (Weinstein, 2019). Il suffit de s'assurer que les élèves reçoivent les informations concernant les raisons pour lesquelles certaines options de réponse sont erronées. 





Consulter des correctifs détaillés et présenter des productions exemplaires pour anticiper la rétroaction


En lien avec l’effet de test, un élève qui donne une réponse erronée en étant persuadé de sa justesse a toutes les raisons de récidiver par la suite si la question lui est à nouveau soumise. L’impact est encore bien plus général si l’élève ne bénéficie d’une rétroaction positive spécifique qui intervient rapidement ou qui lui donne dans la foulée des opportunités de récupérer des réponses correctes. 

Lors de pratique guidée, l’enseignant exerce une vigilance rapprochée. En dehors de ce temps, lors de la pratique autonome, lors des évaluations formatives ou lors de l’exécution des devoirs, les élèves sont potentiellement susceptibles de commettre des erreurs. Celles-ci peuvent rester un certain temps non détectées ce qui leur fait courir un risque de consolidation.

Pour pallier ce risque, deux étapes sont utiles :
  1. Une sensibilisation des élèves aux principes de la pratique de récupération et de l’effet de test qui signifie que :
    1. Dans un premier temps, il est toujours très productif de prendre le temps d’essayer de répondre à une question ou de résoudre un exercice avant d’aller cherche de l’aide pour trouver la solution.
    2. Dans un second temps, il est toujours très utile et judicieux d’aller vérifier ses réponses auprès des notes de cours. Cette démarche se fait dans une optique de rétroaction, pour corriger ses erreurs et apprendre en fonction pour ne plus les répéter.
Une fois les élèves sensibilisés à ces démarches, il devient très utile de leur mettre des correctifs détaillés à dispositions. Ils vont les consulter après avoir résolu des tâches ou répondu à des questions lors d’un devoir, d’une pratique autonome ou à l’issue d’une évaluation formative. 

Dans ce cadre, nous demandons aux élèves après qu’ils ont effectué les tâches demandées, de corriger activement et de manière autonome leurs copies pour passer à travers ces erreurs sérieusement. Cela induit une nouvelle élaboration de correction autour de ces erreurs qui pourra servir d’inhibition par la suite. La probabilité que les élèves progressent dans leurs apprentissages, s’ils jouent le jeu, est plus élevée que lorsque c’est l’enseignant qui relit leurs copies et corrige leurs erreurs. 

En outre, certains types d’erreurs spécifiques sont rarement des cas isolés et ont tendance à se répéter chez plusieurs élèves chaque année. Grâce à son expertise, l’enseignant les connait à l’avance. Ces erreurs spécifiques et communes gagnent alors à être traitées préventivement par l’enseignant. Il a tout à gagner à générer une rétroaction sur celle-ci à l’échelle de la classe. L’enseignant insiste bien sur ces points et ces risques déjà au moment de la pratique guidée et lors d’un retour en pratique autonome ou suite à une évaluation formative, un devoir ou un quiz.

Parallèlement, cette situation peut être anticipée dès l’introduction et les explications des contenus de la matière. C’est-à-dire dès l’introduction des objectifs d’apprentissage et lors du modelage. Dans cette optique, l’enseignant montre aux élèves des exemples de productions remarquables anonymisées provenant d’élèves des années précédentes. Ce faisant, les élèves visualisent et comprennent mieux ce qui est attendu. De même, l’authenticité des exemples leur envoie comme message qu’ils sont à même de relever le défi. 

Fournir des correctifs détaillés et anticiper par des productions exemplaires permet d’économiser du temps lors des temps de rétroaction ultérieurs.



Éviter la note chiffrée d’une épreuve formative


Une forme de "rétroaction" courante est la note chiffrée. Lorsqu’un enseignant corrige une production d'élève ou une test, il traduit souvent son appréciation par un nombre qui sert d'indicateur pour l’élève de la qualité générale de son travail. Chaque question, chaque partie peut être évaluée sur plusieurs points. La somme de ces points obtenue peut être comptabilisée sur 20 par exemple et détermine l'échec ou la réussite. 

Deux élèves peuvent avoir la même note, par exemple un 12/20 alors que les éléments maîtrisés ou non sont essentiellement différents. Une telle note chiffrée sans information additionnelle offre une appréciation générale peu aisée à décoder pour l'élève.

En réalité, s’il est utile d’évaluer ainsi une épreuve sommative pour des raisons normatives, cela devient moins pertinent quand l’apprentissage est encore en cours :

1) Les mauvaises notes démotivent très souvent les élèves en particulier ceux qui fournissent des efforts, mais qui rencontrent des difficultés. Il ne suffit pas de mettre en évidence uniquement ce que l’élève échoue à faire. Il faut insister également sur le chemin déjà parcouru, sur ce que l’élève sait déjà faire et mettre en évidence toute progression et toute réussite. Ne pas mettre de points, mais donner un commentaire écrit ou une simple distinction, entre ce qui est correct et incorrect, met plus d’emphase sur ce qui est réussi pour les élèves faibles que des points. Face à un énième échec dans une évaluation formative, un élève peut avoir envie de jeter les gants et n'a plus forcément le courage de comprendre où se situent ses faiblesses.

2) Pour les élèves, les notes peuvent être l’équivalent d’un salaire. Elles récompensent leurs mérites et permettent le passage dans la classe supérieure et l’estime de leurs parents. Utiliser l’évaluation formative sans note chiffrée permet de désamorcer en partie et mettre l’accent sur l’apprentissage plutôt que sur la performance. Le rôle de la rétroaction est de donner des indicateurs sur l’acquisition des objectifs d'apprentissage visés non sur la réussite ou l’échec. 

3) L’élève garde une marge d’action à l’issue de l’évaluation formative. La note chiffrée à l’issue de l’évaluation formative n’a rien de déterminant. Ce qui l’intéresse c’est de voir ce qu’il sait faire et ce qu’il ne sait pas encore faire. Cela lui permet d’évaluer la qualité de sa préparation. Il garde la possibilité d’agir sur ces observations, ce qui peut améliorer ses résultats sommatifs. Pour une évaluation formative, une notation chiffrée n’apporte pas de sens ou de valeur ajoutée dans un processus d'amélioration en cours. 

4) S’il n’y a pas de note, l’élève ne sait pas s’il aurait réussi l’épreuve dans un cadre sommatif. Son attention est uniquement centrée sur ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. Si la note d’une épreuve formative montre une réussite chiffrée, certains élèves seraient susceptibles de s’en contenter et de ne pas réinvestir dans la matière en visant un résultat similaire à l'évaluation sommative.

5) Les commentaires portés sur les copies aident les élèves à apprendre. Il faut les accompagner d’une note ou d’une marque de classement réduit leur portée. C’est dû au fait que les élèves ont alors tendance à ignorer ce commentaire au profit de la note chiffrée. Un commentaire seul a plus de poids et d’influence qu’un commentaire accompagné d’un résultat chiffré.

6) Pour l’enseignant, l’absence de note chiffrée pure impose de proposer une alternative et un accès à des indicateurs d’amélioration pertinents et généraux. Des procédures amenant les élèves à s’investir en fonction de ces commentaires doivent être intégrées au processus d’apprentissage global. Cela ne sous-entend pourtant pas une différenciation en fonction des élèves, la rétroaction à la classe entière permet par exemple à l'enseignant de mieux gérer ses ressources limitées.



Mise à jour 14/10/2021



Bibliographie



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Morrissette, J. « Un panorama de la recherche sur l’évaluation formative des apprentissages. Mesure et évaluation en éducation », 33 (3), 1-27. (2010)

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2 commentaires:

  1. Bonjour

    Pour faire le suivi de tes élèves dans une classe de 30 élèves Comment tu t'organises ?

    Merci

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    1. => https://par-temps-clair.blogspot.com/2018/07/retroaction-lensemble-de-la-classe-un.html

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