vendredi 21 octobre 2022

Le pilotage du temps scolaire et du temps d’apprentissage autonome des élèves

Le temps d’apprentissage effectif des élèves se partage entre des activités en classe guidées par l’enseignant et d’autres faites à domicile par les élèves en autonomie.

 
(Photographie : Jeanette Spicer)



Le facteurs influençant le temps d’apprentissage


Le temps alloué à l’apprentissage peut être considéré comme un multiplicateur direct de la quantité d’apprentissages effectués par les élèves. 

Le temps alloué à l’apprentissage correspond à la fois :
  • Au nombre d’heures de cours consacrées effectivement à l’apprentissage du contenu 
  • Au temps que les élèves consacrent effectivement à des activités d’apprentissage significatives en dehors de la classe.

Ces deux éléments ne sont pas indépendants. Nous pouvons considérer :
  • La qualité et quantité des devoirs à domicile fixés et effectués 
  • L’intégration entre les activités d’apprentissage en classe et hors de la classe 
  • Le soutien de l’école fourni par l’école pour la réalisation des devoirs. Ce sont par exemple la mise en place d’une école des devoirs, l’encouragement d’un soutien qualitatif apporté par les parents, des incitations et des sanctions, etc. 

Le temps alloué à l’apprentissage est en lien également avec la fréquentation scolaire des élèves :
  • Le taux de fréquentation scolaire 
  • La mesure dans laquelle les élèves décident, choisissent ou se réjouissent d’aller à l’école et de s’engager dans les apprentissages. 

De même, le temps alloué à l’apprentissage prend en compte les perturbations des cours :
  • La mesure dans laquelle l’absence de l’enseignant perturbe l’apprentissage prévu. 
  • La mesure dans laquelle le temps de cours est perdu à cause des interruptions organisationnelles. 
  • La mesure dans laquelle d’autres activités d’apprentissage remplacent les leçons programmées. Ce sont par exemple des voyages scolaires, des visites, des rencontres ou des évènements non directement liés aux apprentissages. 
  • La mesure dans laquelle la gestion du comportement permet d’établir un climat de coopération en classe.



Maximiser le temps d'apprentissage scolaire


La plupart des modèles liés à l’apprentissage scolaire considèrent le temps que les élèves consacrent en classe aux activités d’apprentissage comme l’un des facteurs essentiels. 

Par exemple, le modèle de Carroll (1963) présente l’apprentissage comme une fonction du temps réel passé à apprendre par rapport au temps nécessaire pour apprendre. 

Si nous prenons un cours de cinquante minutes, ces cinquantes minutes ne sont jamais entièrement consacrées à des activités d'apprentissage. Du temps peut être perdu ou détourné pour de multiples raisons et ne peut plus être disponible pour l'apprentissage.  Dès lors, si 50 minutes sont nécessaire pour apprendre un objectif d'apprentissage, une heure de cours de 50 minutes ne suffira pas.

Le temps passé sur le cours est ensuite décomposé comme un produit du temps alloué et de l’engagement ou de la persévérance de l’élève. Allouer plus de temps n’augmente l’apprentissage que si les élèves restent engagés dans les tâches d’apprentissage. Si les élèves sont inattentifs ou désengagés, le temps d'apprentissage n'est pas optimisé

Le temps nécessaire pour apprendre un objectif d'apprentissage est déterminé par :
  • Le temps dont l’apprenant aurait besoin pour apprendre le contenu visé dans des conditions idéales.
  • La qualité de l’enseignement fourni
  • La sensibilité de l’apprenant à la qualité de l’enseignement. 
Le temps alloué à l’apprentissage peut être considéré comme un multiplicateur direct de la quantité d’apprentissages qui aura lieu. 

Les conditions sont que les niveaux d’engagement des élèves, la qualité de l’activité d’apprentissage et la qualité des interactions pédagogiques avec l’enseignant soient maintenus. 

L’utilisation efficace du temps de cours est largement sous le contrôle de l’enseignant, celui-ci doit : 
  • Maximiser le temps d'apprentissage en classe
  • Délivrer un enseignement efficace
  • Soutenir l'engagement de ses élèves



L’utilité des devoirs


Les devoirs comprennent tout temps d’apprentissage en dehors des leçons formelles qui contribue directement ou indirectement aux apprentissages scolaires 

Les devoirs sont des tâches confiées aux élèves par leurs enseignants et à réaliser en dehors des cours habituels. Les activités liées aux devoirs varient considérablement, en particulier entre les élèves plus jeunes et plus âgés. Elles peuvent comprendre, mais sans s’y limiter, les activités de lecture à domicile, les projets ou des productions plus longues, ou des travaux plus dirigés et plus ciblés tels que la révision pour les tests.

Le temps d’apprentissage a lieu également en dehors de la classe formelle. En partie, ce temps d’apprentissage est également sous le contrôle de l’enseignant de la classe : 
  • Il choisit les devoirs à faire.
  • Il gère les incitations pour que les élèves les fassent

L’impact des devoirs dépend également du soutien plus large de l’école. Les écoles peuvent avoir une politique générale en matière de devoirs :
  • Elles peuvent fournir un soutien aux élèves pour qu’ils travaillent. Cela peut prendre la forme d’une école des devoirs en fin de journée après le temps scolaire.
  • Elles peuvent appliquer des conséquences si le travail requis n’est pas fait. Cependant, des données plus générales suggèrent que les devoirs ne devraient pas être utilisés comme une punition ou une sanction en cas de mauvais résultats ou de désimplication. S’ils sont perçus de cette manière, il y a peu de chances que leur contribution soit positive.

Les devoirs ont potentiellement un impact élevé pour un coût très faible, mais les preuves issues de la recherche sont limitées. 

La difficulté à établir des preuves sur l’impact général des devoirs est que celui-ci peut être très variable en fonction de leur conception pédagogique et de leur soutien effectif à l’apprentissage des élèves.

L’étendue du temps passé à faire des devoirs est moins importante que les types d’activité et le degré d’intégration des devoirs à l’apprentissage en classe.



L’atout d’une école des devoirs intégrée


Les élèves issus de milieux socioéconomiques défavorisés peuvent rencontrer des obstacles supplémentaires dans la réalisation de leurs devoirs. Les élèves issus de milieux défavorisés sont moins susceptibles de disposer d’un espace de travail calme. Ils ont moins de chances d’avoir accès à du matériel adapté à l’apprentissage.

Ils sont moins susceptibles de recevoir un soutien parental moindre pour faire leurs devoirs et développer des habitudes d’apprentissage efficaces. Ces difficultés peuvent accroître au fil du temps l’écart de résultats des élèves défavorisés.

Cependant, lorsque ces obstacles peuvent être surmontés, ils peuvent en bénéficier tout autant et en tirer des avantages supplémentaires.

Il est important que les écoles réfléchissent à la manière dont l’apprentissage à la maison peut être soutenu. Une manière de le faire est de conseiller les parents, mais encore faut-il qu’ils soient disponibles en fin de journée. Une approche plus efficace peut être de proposer une école de devoirs aux élèves.

Les écoles de devoirs peuvent aider à surmonter ces obstacles en offrant aux élèves les ressources, les conseils, le cadre et le soutien nécessaires pour faire leurs devoirs ou réviser dans de bonnes conditions. 



L'impact des devoirs au primaire et secondaire


Les devoirs à domicile dans les écoles primaires


L’impact moyen des devoirs à la maison est positif. Les activités courantes liées aux devoirs à la maison dans les écoles primaires sont généralement la lecture ou la pratique de l’orthographe et de calculs. Elles peuvent également inclure des activités plus étendues pour développer des compétences de recherche ou un travail plus dirigé et plus ciblé, comme la révision pour les tests.

La mise en place de devoirs à l’école primaire a un impact plus faible en moyenne et a été beaucoup moins étudiée que la mise en place de devoirs à l’école secondaire. 



Les devoirs dans les écoles secondaires


Les effets positifs des devoirs sont plus importants pour les élèves du secondaire que pour ceux du primaire.

Les activités de devoirs les plus courantes dans les écoles secondaires comprennent : 
  • L’achèvement des tâches assignées pendant les cours
  • La préparation des tâches des cours à venir
  • Des tâches routinières qui n’ont pas de valeur ajoutée en classe
  • La révision pour les tests et les examens.

La mise en place de devoirs dans les écoles secondaires a été beaucoup plus étudiée que dans les écoles primaires et a un impact positif plus élevé en moyenne.



Soutenir une politique de mise en œuvre des devoirs 


Les devoirs ont un impact en permettant aux élèves d’entreprendre des démarches d’apprentissage autonome dans le but de pratiquer et consolider des compétences, de préparer un cours ou réviser pour des examens. 

Par rencontrer un impact pour les devoirs, les écoles doivent prendre en compte les ingrédients actifs de l’approche, qui peuvent inclure les éléments suivants :
  • Considérer la qualité des devoirs plutôt que leur quantité.
  • Utiliser des tâches bien conçues qui sont directement liées à l’enseignement en classe et aux intentions d’apprentissage.
  • Expliquer clairement aux élèves les objectifs des devoirs.
  • Comprendre et traiter tout obstacle à la réalisation des devoirs, comme l’accès à des ressources ou à un cadre propice.
  • Enseigner explicitement les stratégies d’apprentissage autonome.
  • Fournir un retour d’information de qualité pour améliorer l’apprentissage des élèves.
  • Contrôler l’impact des devoirs sur l’engagement, les progrès et les résultats des élèves.

Les enseignants doivent s’efforcer d’éviter les approches qui laissent percevoir et utiliser les devoirs comme une sanction en cas de mauvais résultats. Au contraire, ils doivent souligner l’impact positif de la bonne réalisation des devoirs sur l’apprentissage pour les élèves et sur leur réussite.

Le coût relatif à l’établissement des devoirs à la maison est faible pour une école en matière de ressources mobilisées. Il est essentiellement basé sur le développement de ressources et le suivi effectué par les enseignants en matière de planification et de rétroaction.

Les directions doivent réfléchir à la manière de maximiser l’efficacité des devoirs à domicile. Cela passe par le biais du développement professionnel des enseignants, afin de promouvoir l’utilisation de tâches bien conçues pour compléter l’apprentissage en classe et un retour d’information de qualité pour améliorer l’apprentissage des élèves. 

Les écoles doivent surveiller l’impact des différentes approches des devoirs — telles que la fréquence, l’objectif et la variété des tâches — sur l’engagement et les résultats des élèves.



La fréquentation scolaire


La fréquentation scolaire est un autre facteur déterminant du temps consacré à l’apprentissage. Pour les élèves, il existe une forte association entre une mauvaise fréquentation scolaire et une série de résultats indésirables, tels qu’un faible niveau scolaire et la délinquance (Cooper et coll., 2022). 

Il existe des preuves que les écoles peuvent intervenir pour améliorer l’assiduité des élèves. Par exemple, elles peuvent utiliser des approches ciblées de communication et d’engagement des parents. Cependant, la qualité générale et la pertinence de cette base de preuves sont actuellement assez faibles (Cooper et coll., 2022). 

Il est actuellement difficile d’établir des conseils pratiques ou spécifiques destinés aux chefs d’établissement pour travailler sur ce facteur. Néanmoins, il semble probable que le manque d’assiduité, tant au niveau individuel qu’au niveau de l’école, constitue un obstacle important à l’apprentissage et à la réussite des élèves. Les directions doivent y prêter attention. 



Les perturbations planifiées des cours


Un dernier déterminant du temps d’apprentissage est la mesure dans laquelle les cours sont perturbés par des interventions planifiées.

Par exemple, en cas d’absence d’un enseignant, des dispositions peuvent être mises en place pour amenuiser les pertes en matière de temps alloué à l’apprentissage, comme des récupérations dans d’autres matières. En ce sens, la politique et les pratiques de l’école peuvent atténuer ce problème. 

De plus, les effets cumulatifs des petites interruptions telles que les annonces des systèmes de sonorisation (Kraft & Monti-Nussbaum, 2021) ou le bruit extérieur à la classe peuvent également être considérables. 

Des cours programmés dans l’horaire des élèves peuvent être remplacés par des activités d’apprentissage alternatives, telles que des voyages scolaires ou de classe, des visites, des stages professionnels, des sports, des réunions d’enseignants, etc. 

Ces activités peuvent être un choix délibéré et avoir une grande valeur éducative ajoutée. Il n’est donc pas question de les interdire. Les directions doivent comprendre qu’elles ont un coût en matière de temps pris sur les cours prévus. 



Mécanismes à l’origine de la relation entre le temps et l’apprentissage


Les mécanismes que nous supposons être à l’origine de la relation entre le temps et l’apprentissage sont les suivants : 
  • Le temps supplémentaire passé par les élèves dans des activités d’apprentissage de haute qualité (significatives, intégrées, engagées, interactives) en dehors de la classe leur permet d’apprendre davantage. 
  • Encourager des taux élevés de fréquentation scolaire augmente le temps d’apprentissage en classe. 
  • Les élèves dont l’assiduité est intermittente monopolisent une part de l’attention et du soutien de l’enseignant, réduisant celles des autres élèves. 
  • Les dispositions prises pour pallier l’absence des enseignants peuvent être moins efficaces pour l’apprentissage. 
  • Des interruptions régulières, mais légères des cours sont susceptibles d’entrainer un effet perturbateur cumulatif sur l’apprentissage. 
  • Si le temps de cours est détourné d’une matière du programme pour d’autres activités, l’apprentissage dans cette matière sera nécessairement réduit. 

Plus d’infos sur :

Mis à jour le 07/10/2023

Bibliographie


Coe, R., Kime, S., & Singleton, D. (2022). A model for school environment and leadership (School environment and leadership: Evidence review). Evidence Based Education. 
https://evidencebased.education/school-environment-and-leadership-evidence-review/

Cooper, H., Robinson, J. C., & Patall, E. A. (2006). Does homework improve academic achievement? A synthesis of research, 1987–2003. Review of Educational Research, 76(1), 1–62. https://doi.org/10.3102/00346543076001001

Carroll, J. B. (1963). A model of school learning. Teachers College Record, 64(8), 723–733.

Kraft, M. A., & Monti-Nussbaum, M. (2021). The big problem with little interruptions to classroom learning. AERA Open, 7, 233285842110288. https://doi.org/10.1177/23328584211028856

0 comments:

Enregistrer un commentaire