dimanche 24 octobre 2021

Concevoir l’amélioration comme un processus à l'échelle d'un établissement

Dans le cadre du plan pour un enseignement d’excellence, les écoles en Fédération Wallonie-Bruxelles sont tenues de mettre en œuvre des actions afin de faire mieux pour les élèves dont elles ont la charge. 

(Photographie : Toshiaki Otsuki)



Cadre des plans de pilotage


Ces actions s’inscrivent dans le cadre d’un plan de pilotage élaboré par l’école dans le cadre d’une dynamique collective mise en place au sein de l’équipe pédagogique et éducative. Le plan de pilotage contractualise sur six années une série d’objectifs spécifiques que l’école se propose de mettre en œuvre à travers des stratégies et des actions.

L’enjeu global est que les écoles poursuivent les objectifs d’amélioration du système éducatif fixés par le gouvernement (circulaire 7434) :

  1. Améliorer significativement les savoirs et compétences des élèves.
  2. Augmenter la part des jeunes diplômés de l’enseignement secondaire supérieur.
  3. Réduire les différences entre les résultats des élèves les plus favorisés et ceux des élèves les moins favorisés d’un point de vue socio-économique.
  4. Réduire progressivement le redoublement et le décrochage.
  5. Réduire les changements d’école au sein du tronc commun.
  6. Augmenter progressivement l’inclusion des élèves à besoins spécifiques dans l’enseignement ordinaire.
  7. Accroître les indices du bien-être à l’école et de l’amélioration du climat scolaire.


Ce faisant, les écoles sont amenées à adopter de nouvelles pratiques et approches. Elles cherchent à tirer des enseignements de leurs expériences et s’efforcent d’adopter et d’intégrer les pratiques qui fonctionnent le mieux.




Une éducation éclairée par des données probantes


Avec les progrès de la recherche en éducation et en sciences cognitives, les écoles sont mieux placées actuellement pour juger de ce qui fonctionnera dans leurs classes. 

Nous disposons d’un accès à des données de plus en plus étayées sur les stratégies d’enseignement et d’apprentissage susceptibles d’être efficaces auprès de nos élèves.

Cependant, peu importe la qualité d’une idée ou d’une intervention pédagogique sur le papier. Ce qui compte vraiment, c’est la manière dont elle est mise en œuvre de manière effective dans le travail quotidien des enseignants. La mise en œuvre est un ensemble de processus dans lesquels les écoles s’engagent pour s’améliorer, pour changer et devenir plus efficaces. 

Dès lors, la question centrale est la manière d’y arriver. Quelles sont les bonnes pratiques et les bonnes approches liées à la gestion de l’amélioration ? Comment modifier efficacement les pratiques d’enseignants dans un établissement scolaire ?

Trop souvent, le qui, le pourquoi, le où, le quand et le comment sont négligés. Cela signifie que la mise en œuvre risque de devenir une tâche supplémentaire à laquelle il faut s’attaquer en plus du travail quotidien. Cela peut lui donner une position périphérique et mener à des rejets ou à des changements effectifs limités. 

La conséquence est que des projets lancés avec les meilleures intentions du monde risquent de s’évanouir dans la réalité du contexte. Les écoles ont du mal à gérer ces priorités concurrentes, d’autant plus que leurs tâches courantes répondent à des missions claires et évidentes.

Dès lors, la mise en œuvre des plans de pilotage doit s’éclairer elle-même d’une politique d’actions fondées sur des données probantes.




Une mise en oeuvre de l'amélioration à piloter adéquatement


L’une des caractéristiques qui distinguent les écoles efficaces des moins efficaces, outre ce qu’elles mettent en œuvre, est la manière dont elles mettent ces nouvelles approches en pratique. 

Souvent, les écoles et derrière elles les directions et les équipes éducatives qui réalisent une bonne mise en œuvre le font par instinct, ou ce que nous pourrions appeler le bon sens. Malheureusement, la bonne mise en œuvre occupe un espace rare de bon sens qui est peu commun.

L’objectif exploré dans cette série d’articles à venir est de se baser sur le guide de l’ Education Endowment Foundation (2019) comme d’un fil conducteur pour décrire la gestion de l’amélioration en contexte scolaire. L’idée est de l’utiliser à la manière d’une pratique professionnelle à l’échelle d’un établissement scolaire.

Nous allons tâcher d’explorer, de décrire et de documenter les étapes que les écoles efficaces suivent pour bien gérer le changement et mettre en œuvre de nouveaux projets et des pratiques fondées sur des données probantes.




Démarche globale de gestion de l’amélioration


Nous devons :

  • Commencer par la création de conditions favorables à la mise en œuvre
  • Puis suivre un processus structuré de planification, d’exécution et de maintien du changement.


Nous visons à rendre explicites les dimensions implicites du processus dans son ensemble :

  • Donner de la clarté et un but aux processus existants.
  • Recadrer ce que nous faisons déjà, améliorer, apporter de nouvelles pratiques et en arrêter d’autres.
  • Éviter de simplement mettre en place tout un nouvel ensemble de procédures qui viendra surcharger le processus de fonctionnement plutôt que de l’améliorer.


Cette démarche globale de gestion de l’amélioration des écoles se doit de reposer sur des données probantes. Elle est soutenue par une culture de l’amélioration continue et de l’apprentissage collaboratif. 




La mise en œuvre comme un processus


Nous devons traiter la mise en œuvre comme un processus, et non comme un événement. 

Nous ne devons pas concevoir l’amélioration comme un événement unique qui se produit lorsque la décision d’adopter une nouvelle pratique d’enseignement est prise, ou le jour où une formation en développement professionnel commence. 

Le processus de mise en œuvre d’une amélioration dans une école commence bien avant cette décision d’adoption et durera longtemps après. La mise en œuvre d’une amélioration doit être planifiée et exécutée par étapes sur une période prolongée.

Prenons, par exemple, l’élaboration de nouvelles stratégies d’enseignement par le biais du développement professionnel. Un développement professionnel efficace comprend généralement une formation initiale et des activités de soutien et de suivi dans l’école.

C’est nécessaire pour acquérir une compréhension approfondie du raisonnement qui sous-tend une nouvelle approche et pour que le personnel soit en mesure d’appliquer les stratégies et les connaissances qui en résultent dans la pratique. 

Inévitablement, tout cela prend du temps, de l’expertise et des ressources. Le développement professionnel par exemple est nettement plus efficace lorsqu’il est distribué dans le temps plutôt que donné sous forme de sessions ponctuelles d’un jour ou deux.




Concevoir la mise en œuvre


La mise en œuvre peut être décrite comme une série d’étapes avec des activités liées à la réflexion, à la préparation, à la mise en œuvre et au maintien du changement.

Ces processus se chevauchent, la planification de la mise en œuvre est une caractéristique cruciale.

Nous devons prévoir suffisamment de temps pour une mise en œuvre efficace, notamment lors de la phase de préparation. Nous devons établir des priorités appropriées.

Il n’y a pas de délais fixés pour un bon processus de mise en œuvre. 

Sa durée dépendra :

  • De l’intervention elle-même : complexité, adaptabilité et capacité d’utilisation
  • Du contexte local dans lequel elle sera intégrée. 


Il n’est pas inhabituel de consacrer entre deux et quatre ans à un processus de mise en œuvre d’initiatives complexes concernant l’ensemble de l’école.

L’une des implications de ce délai est que les écoles doivent considérer la mise en œuvre comme un engagement majeur et établir leurs priorités en conséquence. 




Poser des choix de manière réfléchie


Les écoles ont une tendance naturelle à entreprendre trop de projets simultanément et à sous-estimer l’effort nécessaire pour mettre en œuvre efficacement les innovations. 

Les écoles devraient probablement limiter leur nombre de choix, tout en les rendant plus stratégiques, de manière à pouvoir les poursuivre avec diligence. 

La dynamique de l’amélioration implique qu’il peut être nécessaire de revoir et d’arrêter certaines pratiques existantes avant d’en introduire de nouvelles, de manière à redistribuer des ressources par définition limitées. 

Il est rarement facile de changer les habitudes et les pratiques existantes, car elles sont généralement profondément ancrées. La transition liée à l’arrêt de certaines approches doit être traitée avec le même soin et la même attention que la mise en œuvre de nouvelles.




Préparer le terrain dans le pilotage de l'amélioration


L’enjeu de la mise en évidence du processus de gestion de l’amélioration est de commencer par mettre l’accent sur les activités qui se déroulent dans les phases d’exploration et de préparation. 

Différents éléments doivent être préparés et en place avant la mise en œuvre effective d’un nouveau programme ou d’une nouvelle pratique. Il en découle qu’il est à la fois difficile et rare de prévoir suffisamment de temps pour préparer la mise en œuvre dans les écoles. 

Néanmoins, investir du temps et des efforts pour réfléchir, planifier et préparer soigneusement la mise en œuvre portera ses fruits plus tard. Plus nous préparons le terrain, plus les racines auront de bonnes chances de s’implanter.

De plus, nous devons reconnaitre que la mise en œuvre ne suit pas toujours un processus net et linéaire. Elle peut être pleine de surprises, d’échecs et de changements de direction et, parfois, ressembler davantage à un art habile qu’à un processus systématique. Nous devons garder ces dynamiques à l’esprit tout en progressant dans un processus de mise en œuvre car cela peut aider à gérer les frustrations. Les revers et les obstacles sont des caractéristiques naturelles des processus de gestion de l’amélioration.




Questions à se poser dans l'optique du pilotage de l'amélioration


  • Mettons-nous en œuvre les changements dans l’ensemble de l’école de manière structurée et échelonnée ? 
  • Prenons-nous suffisamment de temps et d’attention pour préparer la mise en œuvre ?
  • Y a-t-il des possibilités de prendre moins de projets de mise à mettre en œuvre, de se lancer dans moins d'actions, mais de les rendre plus stratégiques, et de les poursuivre dès lors avec plus d’efforts et de ressources ?
  • Y a-t-il des pratiques moins efficaces qui peuvent être arrêtées pour libérer du temps et des ressources aux enseignants afin qu’ils s’investissent dans d’autres pratiques, plus efficaces ?



Mise à jour le 13/04/2023


Bibliographie


Education Endowment Foundation, Putting Evidence to Work – A School’s Guide to Implementation, https://d2tic4wvo1iusb.cloudfront.net/guidance-reports/a-schools-guide-to-implementation/EEF_Implementation_Guidance_Report_2019.pdf , 2019 

Circulaire 7434 du 15/01/2020, Information à destination des écoles concernant l’élaboration de leur plan de pilotage, https://www.gallilex.cfwb.be/document/pdf/46684_000.pdf

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