dimanche 1 juin 2025

L’influence des interactions et des politiques scolaires sur la culture du personnel

Poursuite de l’exploration de l’excellent livre de Ruth Ashbee (2024) sur la gestion de la culture d’une école.


(Photographie : cornbelt)



La culture d’une école émerge de l’ensemble des interactions


Les interactions au sein d’une école prennent de nombreuses formes :
  • Les conversations informelles
  • Les échanges dans le cadre du travail sur un projet donné, l’expérience des contributions ou du retour d’information entre collègues
  • Les présentations générales
  • Les réunions d’équipe
  • Les comportements observés, les emails, et toute autre forme de communication écrite
  • Les moments où deux ou plusieurs collègues sont impliqués d’une manière ou d’une autre dans une collaboration.
Chaque interaction qu’un individu rencontre sur son lieu de travail alimente :
  • Son sentiment propre sur le fait de travailler à l’école
  • Son sentiment sur la façon dont les choses s’y font normalement.
Dans l’autre sens, le monde interne de chaque individu influence également la manière dont il participe lui-même aux interactions, et donc la manière dont il contribue à la culture du groupe.



L’engagement dans les interactions professionnelles dans le cadre de l’école


Lorsqu’un individu participe à des interactions dans un cadre professionnel, il y a un échange et une interaction constante entre : 
  • Le monde interne de chacun des participants
  • Les interactions dans lesquelles ils sont impliqués. 
La culture est constituée des expériences et des actions des individus. Elle émerge de ces expériences partagées en interaction avec les interprétations personnelles de chacun.

Une conséquence directe est que chaque interaction comporte une part d’incertitude. La difficulté des interactions réside dans le fait que nous ne pouvons jamais être certains de la manière dont elles se déroulent. Les conséquences involontaires et l’imprévisibilité sont toujours présentes. Une seule communication ou action peut avoir des significations très différentes selon les individus. 

D’un autre côté, cette complexité intrinsèque est le revers de la médaille de notre humanité, elle en est une richesse. La complexité peut être accablante et intimidante. L’alternative d’une simplicité lisse est pauvre et ennuyeuse. 

Au-delà, aucune interaction n’a lieu de manière isolée. Il existe toujours une multitude de contextes et de mondes internes individuels détaillés qui influencent la situation et s’influencent entre eux. Le monde interne d’une personne est mis en jeu dans une interaction entre son expérience et ses actions. L’autre personne dans l’interaction peut avoir un point de vue différent sur une expérience. La nature de l’interaction influencera à son tour la vision des différentes personnes impliquées selon la manière dont elle se déroule. 



Agir sur les interactions professionnelles dans le cadre de l’école


L’écoute peut être une valeur de la culture de l’école. Elle peut soutenir l’empathie et la volonté de comprendre la position de l’autre. Ces démarches peuvent mener à l’établissement d’un consensus et influencer en retour les mondes internes sur le respect d’une vision commune. 

L’implication, l’écoute, la collaboration peuvent aider à mieux comprendre le point de vue de l’autre. Cela peut contribuer à modifier les attentes quant à la manière dont les projets et actions se conçoivent dans la culture de l’école. 

Dans le cadre d’un projet, cela peut mal se passer comme cela peut bien se passer. Les résultats sont complexes et imprévisibles.

Cela peut mal se passer. Nous ne pouvons pas contrôler la réaction des gens parce que nous ne connaissons pas les détails de leur monde intérieur. Chacun a une raison de réagir, aussi irrationnelle qu’elle puisse paraître de l’extérieur. 

Toutefois, nous ne devons pas accepter n’importe quelle réaction. Nous devons chercher à les comprendre comme faisant partie d’un tableau plus large de perceptions, d’attentes, d’expériences, comme le reflet de la diversité des mondes intérieurs des personnes.

Dans le cadre d’un projet, cela peut bien se passer. Un des interlocuteurs peut être expérimenté, à l’écoute et convaincant. Il peut avoir une connaissance approfondie d’un sujet qui lui permet de faire une présentation crédible et engageante. Il peut observer les comportements du groupe et adapter sa présentation en conséquence. 

Les réactions peuvent être enthousiastes comme elles peuvent être apathiques au sein d’une équipe. Les critiques peuvent fuser, les doutes peuvent émerger comme le découragement. À l’opposé, l’enthousiasme ou l’adhésion peuvent être présents. 



Influencer l’engagement dans les interactions par la culture


Il existe une dimension directe et une dimension indirecte dans la manière dont nous pouvons influencer les interactions à travers la culture de l’école. 

Chaque fois que nous interagissons avec un collègue, nous influençons la culture à la fois directement et indirectement : 
  • L’influence directe sur la culture : les effets que nous avons sur le monde intérieur de la personne avec laquelle nous avons interagi. C’est ce qu’elle ressent et ce qu’elle fera à la suite de l’interaction.
  • L’influence indirecte sur la culture : la manière dont nous pilotons les interactions avec nos collègues influence la manière dont ils se comporteront dans d’autres situations, sans que nous soyons présents.
L’idée est d’installer des routines dans les interactions et avoir des consignes ou consignes spécifiques dans le cadre d’échanges. Cela passe également par modélisation et au renforcement qui découlent de nos propres interactions.

Dès lors, il faut soigner la rétroaction, éviter chaque fois de viser négativement les personnes, mais se montrer toujours constructif, ouvert et positif. Nous recherchons le consensus et rencontrons les autres en explorant les nuances et en recherchant des éléments de compréhension commune. 

En procédant ainsi, les personnes ont plus de chances de se comprendre mutuellement et moins de chances de se sentir menacées ou ignorées à la suite de cette interaction.

La manière d’interagir des personnes, de collaborer et de faire preuve de cohérence a plus de chances d’être positive dans ce scénario. C’est l’influence directe de cette interaction sur la culture.

Les personnes font ainsi l’expérience d’interactions constructives comme d’une norme de fonctionnement et deviendront plus susceptibles de les adopter elles-mêmes. Un désaccord respectueux peut mener à une ouverture et à la remise en question. Cela lui permet de s’attendre à ce type d’interaction ultérieurement et de disposer de certains outils pour y parvenir. Il s’agit là de l’influence indirecte de cette interaction sur la culture.

Nous ne pouvons échapper à l’incertitude et à l’absence de contrôle sur les interactions et les interprétations dans le cadre d’une culture d’école. Nous pouvons internaliser et nous approprier les idées suivantes : 
  1. Toute interaction peut avoir de nombreux résultats.
  2. Il n’y a pas une seule manière d’interpréter une réalité. Les individus peuvent interpréter et interpréteront les interactions de différentes manières.
  3. La manière dont les personnes interprètent les interactions et y contribuent est influencée par leur monde intérieur.
  4. Les interactions contribuent à l’expérience individuelle et à la culture dominante.
  5. Nous ne pouvons pas contrôler le déroulement des interactions, mais nous pouvons les influencer par des expériences positives antérieures.
Nos comportements en matière de modélisation et d’explication des interactions constructives avec nos collègues peuvent avoir un impact considérable sur la culture du personnel. Nous pouvons agir à la fois par des voies directes et indirectes, même si ce n’est pas de manière totalement fiable ou prévisible.

Des interactions réussies et exemplaires peuvent contribuer à la culture scolaire. 



Systèmes, structures et pratiques


La manière dont on ressent le travail et la manière de s’y engager sont également fortement influencées par les systèmes, les structures et l’environnement physique de l’école. 

Lorsqu’un membre du personnel suit une politique instituée par l’école, et travaille dans une pièce froide ou à l’acoustique défaillante, il n’interagit pas avec un autre individu. Il est très impliqué dans une expérience qui peut affecter son univers interne et sa façon de faire les choses.

De même, un enseignant peut ne pas se sentir en phase avec la politique d’évaluation des apprentissages ou de gestion du comportement de l’école, pour des raisons de conviction personnelle. L’enseignant va suivre la politique de l’école pour des raisons professionnelles, mais ne va pas être convaincu de sa pertinence. Le monde interne que l’individu apporte à la situation affecte le déroulement de l’interaction.

À la différence des interactions entre personnes, une politique scolaire n’a pas de monde interne, mais elle a des caractéristiques. Elle peut nécessiter beaucoup de temps et d’effort de la part de l’enseignant, sans reposer sur des preuves d’impact évidentes. Cette situation peut agacer, angoisser ou rendre apathique. D’un autre côté, lorsqu’un enseignant adhère à la politique, il peut l’apprécier, car c’est l’occasion de s’engager visiblement et de manière appliquée dans son travail. 

À l’opposé, il peut aussi s’agir d’une politique claire et fondée sur des données probantes. Cela peut être gratifiant pour l’enseignant réticent au départ, peu découvrir qu’il peut utiliser son temps efficacement. Il peut également être en difficulté s’il en faisait beaucoup plus dans ce domaine et qu’il a l’impression de perdre certains repères importants. 

Les caractéristiques de la politique influencent le déroulement de l’expérience des enseignants au travail, par ce biais, la culture qui en résulte.

Comme pour les interactions humaines, nous ne pouvons pas savoir avec certitude quel sera le résultat de l’interaction des membres du personnel avec une politique scolaire.

Nous pouvons cependant être stratégiques, prudents et méthodiques dans nos actions visant à façonner les politiques et l’environnement physique.

Tout comme nos interactions avec le personnel peuvent contribuer à façonner la culture, les actions autour des systèmes et des structures qui façonnent la vie professionnelle des enseignants peuvent également le faire.

Nous devons être sensibles aux éléments suivants : 
  • Aux possibilités de résultats nombreux et involontaires liés à une politique scolaire.
  • À la possibilité d’influencer les expériences des collègues et la culture qui en découle.
  • À la manière dont les mondes internes des individus peuvent interpréter les politiques scolaires ou l’environnement de travail. 
  • À la manière dont les expériences de mise en œuvre des politiques ou de l’environnement scolaire peuvent être vécues.
Nous pouvons devenir conscients de ces mécanismes. Cela nous permet de réfléchir aux systèmes, aux politiques ou aux aspects de l’environnement physique de l’école. C’est important, car ces éléments pourraient avoir des effets négatifs sur l’expérience du personnel et sur la culture qui en découle.



Un réseau d’interactions entre personnes et d’influence des politiques dans l’environnement scolaire


L’école fonctionne comme un vaste réseau d’interactions entre personnes et d’influences des politiques dans l’environnement scolaire.

Nous ne pouvons considérer ces interactions comme uniques et isolées. En réalité, des milliers d’interactions ont lieu chaque jour à l’école, et nombre d’entre elles s’influencent mutuellement de manière complexe et sont pour une part imprévisible. Nous ne pouvons pas les contrôler globalement. 

Nous ne devons pas et ne devons pas désespérer face à cette situation. C’est avant tout à l’image de la richesse et de la diversité de notre espèce en des termes adaptatifs.

Nous devons avoir une conscience marquée de la complexité à laquelle nous sommes confrontés et un sentiment d’incertitude dans tout ce que nous faisons. Nous devons fournir des efforts pour soutenir le défi que cela représente. La culture du personnel d’une école est un domaine difficile à développer. C’est notamment le cas parce qu’elle dépend de notre propre développement. Elle doit être modelée depuis le sommet afin de donner à une équipe la confiance nécessaire pour faire du bon travail. 


Mis à jour le 06/06/2025

Bibliographie



Ruth Ashbee, School staff culture, Routledge, 2023

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