samedi 15 février 2025

Concevoir une planification de l’enseignement à rebours

Le processus de conception de l’enseignement est de la responsabilité de l’enseignant. Il est préalable à l’enseignement à proprement parler. 


(Photographie : uroko)




L’enjeu d’une conception à rebours pour l’enseignement


L’enjeu de la conception à rebours est de partir d’un objectif pédagogique global et d’aboutir par raisonnement à des objectifs d’apprentissage plus petits et plus simples à gérer.

Le contenu des étapes, les objectifs pédagogiques, la segmentation et le séquencement ne doivent pas nécessairement être compréhensibles pour les élèves. Cependant, il est important que l’enseignant suive le processus de conception et comprenne les activités et produits qui en résultent ainsi que leur positionnement au sein du programme d’enseignement lui-même. Pour l’enseignant, la conception est la navigation qui donne une direction aux actions en classe.

Il est important que la conception de l’enseignement se réalise à rebours en analysant la progression escomptée avec la ligne d’arrivée en tête



Formuler les objectifs pédagogiques 


L’objectif de cette étape est de nous demander ce que les élèves devraient être capables de faire de manière autonome à la fin de ce chapitre, de module ou de cette période de cours.

Une bonne conception commence toujours par la clarté de ce que nous cherchons à atteindre et de ce à quoi cela ressemble : les objectifs pédagogiques.

Dans une conception cohérente, non seulement les activités d’enseignement et d’apprentissage ont une séquence logique, mais ces activités sont également liées entre elles, en ce sens qu’elles visent la même finalité décrite par des objectifs pédagogiques.

Ces objectifs pédagogiques possèdent toujours une dimension commune propre à l’éducation. Nous voulons permettre à nos élèves de mobiliser leurs connaissances et d’activer leur compétence de manière autonome, faire quelque chose de manière indépendante en dehors du contexte d’apprentissage dans lequel il a été appris. 

Nous devons par exemple d’être capable d’écrire une argumentation de manière autonome ou d’effectuer certaines procédures de calcul dans de nouveaux contextes. 



Formuler les objectifs d’apprentissage 


Les objectifs d’apprentissage vont préciser le domaine d’application et les situations concernées, incluant le transfert des connaissances et compétences, le tout d’une manière compréhensible par les élèves.  

Pour avoir une idée plus précise de ce qu’un élève devrait être capable de faire en matière d’objectif pédagogique, et à quel niveau, il est important de formuler pourquoi il a exactement besoin de cette compétence. 

Les objectifs d’apprentissage incluent une logique de transfert, c’est-à-dire que les élèves peuvent les mobiliser dans une variété de contextes

Les deux dimensions qui rendent un objectif d’apprentissage difficile à atteindre sont :
  • L’autonomie de l’élève 
  • La transférabilité des acquis
L’acquisition de l’autonomie est tout sauf automatique :
  • L’autonomie et le transfert ne sont pas des compétences génériques, mais spécifiques à un ou plusieurs domaines dans lequel nous avons acquis suffisamment de connaissances factuelles, de compétences et d’expérience de pratique. 
  • Plus nous développons d’expertise dans un domaine spécifique, plus nous pouvons accomplir une variété de tâches de manière autonome des tâches de manière indépendante dans celui-ci. Par exemple, nous devenons capables dans ce domaine de nous autoévaluer, de résoudre des problèmes, de réfléchir de manière critique et d’être créatifs. 
L’atteinte des objectifs d’apprentissage peut être mise en parallèle avec le développement de l’auto-efficacité. L’atteinte des objectifs d’apprentissage requiert une compréhension profonde, c’est-à-dire des schémas fermement développés dans la mémoire à long terme. Dans ces schémas, également appelés structures de connaissances, les connaissances factuelles, les compétences et les expériences sont intimement liées.

De la même manière, l’acquisition de la capacité de transfert est tout sauf automatique. Le transfert réussi de ce qui a été appris dans le domaine (transfert proche) n’est possible que si : 
  • Les connaissances nouvelles sont suffisamment ancrées dans la mémoire à long terme.
  • Les connaissances antérieures existantes sont bien exploitées.
  • Des liens sont activement établis entre les différents éléments de connaissance au cours du processus d’apprentissage.



Modeler le cadre de ce qui doit être compris


Qu’est-ce que les élèves doivent bien comprendre pour correspondre à l’objectif pédagogique ? Quels concepts doivent-ils maîtriser ?

Nous réfléchissons à ce qu’un élève doit comprendre pour être capable de démontrer de manière autonome l’objectif d’apprentissage en dehors du contexte dans lequel il a été appris. 

Il est important de saisir qu’une compréhension flexible est différente d’une connaissance inflexible. Cependant, la compréhension flexible a besoin de se fonder sur une acquisition préalable de connaissances. Un élève devra établir des liens entre des connaissances factuelles, des compétences et des expériences pour parvenir à une compréhension propre à un contexte spécifique. 



Définir des questions d’ordre cognitif


Quelles sont les questions qu’un expert se pose à lui-même pour être capable de maîtriser l’objectif d’apprentissage ? Quelles sont les questions que les élèves devraient donc commencer à se poser ?

Pour être en mesure de faire quelque chose de manière autonome, en tant qu’experts, nous nous posons régulièrement, implicitement ou explicitement, des questions pour nous ajuster. 

Si les élèves doivent être capables de faire quelque chose de manière autonome, comme formulé dans l’objectif d’apprentissage, il est important qu’ils se posent également ces questions. 

Mais en tant qu’experts, victimes de la malédiction de la connaissance, nous ignorons souvent ces questions. 

Dans cette étape, nous pensons explicitement aux questions d’ordre cognitif qu’un élève se pose afin de s’ajuster (et donc d’atteindre l’autonomie). 

Nous pouvons considérer les questions cognitives suivantes :
— Quelle est la marge d’erreur acceptable pour ce résultat ? 
— Ma réponse est-elle plausible ? 
— Quelle est la manière de structurer ma réponse ?
— Est-ce que ma solution peut être simplifiée ou développée davantage ?
— Quel ordre des opérations dois-je appliquer ici ?



Définir des questions d’ordre métacognitif


Quelles questions les élèves doivent-ils se poser pour permettre le transfert de ce qu’ils ont appris ? Sur quoi devraient-ils réfléchir et s’évaluer ?  

Comme mentionné, l’objectif final est toujours que les apprenants soient capables de faire quelque chose de manière autonome en dehors du contexte dans lequel ils l’ont appris. 

Le transfert proche est un enjeu exigeant. Nous pouvons aider les élèves en les faisant réfléchir explicitement à la manière dont le transfert peut avoir lieu.

Nous pouvons considérer les questions métacognitives suivantes :
  • Quels parallèles pouvons-nous établir entre deux domaines différents pour établir des analogies ?
  • Quelles sont les implications des règles, des lois et des principes utilisés, appris et pratiqués dans un domaine ou un contexte donné pour un domaine ou un contexte nouveau proche ?
  • Comment puis-je évaluer mon travail en lien avec les objectifs d’apprentissage correspondants ? 
Les questions d’ordre cognitif et métacognitif peuvent également être utiles dans le retour d’information que l’enseignant partage avec ses élèves dans le cadre du coaching didactique.



Décomposer suffisamment l’objectif pédagogique global


Un point utile est de décomposer l’objectif pédagogique global en objectifs d’apprentissage singuliers qui décrivent le parcours et peuvent aboutir à une carte des connaissances.

Il y a trois dimensions dans leur mise en œuvre :
  • Les connaissances factuelles : que doit savoir exactement un élève ou un étudiant par cœur ?
  • Les compétences : que doit être capable de faire un élève avec ces connaissances ?
  • Les expériences ou occasions de pratique : quelles expériences un apprenant doit-il avoir vécues pour développer réellement une bonne compréhension ?


Mis à jour le 16/02/2025

Bibliographie


René Kneyber, Dominique Sluijsmans, Valentina Devid, Blanca Wilde López, Formatief handelen, van instrument naar ontwerp, Phronese, 2022

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