Gérer efficacement les comportements inappropriés est un des défis que le soutien au comportement positif propose de relever à l’échelle de l’école.
(Photographie : Missed Mile Markers)
Aborder les interventions d’un point de vue systémique
Il s’agit d’une facette constitutive du soutien au comportement positif avec l’enseignement explicite du comportement, le renforcement positif et les approches préventives en gestion de classe. Les comportements perturbateurs font l’objet d’interventions.
Un des fondements se trouve au niveau la prévention des comportements perturbateurs qui diminuent dès lors en fréquence.
L’idée est de remplacer les traditionnelles sanctions ou punitions, qui ne génèrent que peu de sens pour les élèves. Elles engendrent un sentiment d’injustice et peuvent favoriser le décrochage scolaire. Le soutien au comportement positif propose de répondre aux comportements problématiques par des conséquences éducatives.
Les conséquences éducatives sont en lien direct avec le comportement manifesté. Elles sont graduées selon la gravité des faits et adaptées à leur nature.
La cohérence doit primer. Tous les membres du personnel adopteront la même ligne de conduite, envers tous les élèves. Elle aura été développée dans le cadre de la mise en œuvre du soutien au comportement positif. Cette uniformité renforce la cohésion et l’alignement des membres de l’équipe éducative, et améliore en retour le sentiment de justice perçu par les élèves.
Le soutien au comportement positif s’accompagne d’un renforcement et d’une clarification des normes et limites. Le renforcement des comportements positifs et les conséquences pour les comportements inappropriés constituent les deux faces d’une même pièce. L’efficacité du système n’est possible que si ces deux dimensions sont équilibrées pour répondre adéquatement aux défis comportementaux que rencontre l’école.
Différents outils sont développés à l’échelle de l’école afin de garantir une ligne de conduite commune chez tous les acteurs de l’école :
- La classification des comportements problématiques selon quatre niveaux de gravité
- Le recours à un arbre décisionnel pour savoir comment agir et quand exclure un élève
- L’utilisation de rapports pour documenter les comportements inadéquats.
Ces documents sont adaptés aux spécificités de chaque école par l’équipe responsable du soutien au comportement positif avant le lancement.
La classification des comportements
Une première étape dans la gestion des écarts de comportement est d’établir une classification précise de ces comportements. Pour y arriver, les écarts de comportements mineurs sont différenciés des écarts de comportements majeurs.
Les perturbations mineures sont de petits problèmes de comportements ou un comportement inapproprié, qui ne nuisent pas au bon fonctionnement de l’activité s’ils restent rares et ponctuels. Ils n’empêchent pas l’enseignant de donner son cours ou les autres élèves d’apprendre.
Typiquement, il peut s’agir de bavardages ponctuels, d’une arrivée tardive, d’une infraction au code vestimentaire, de l’oubli du matériel scolaire, etc.
Ces écarts de comportements mineurs sont gérés par le membre du personnel qui les constate.
Les perturbations majeures nuisent au bon déroulement de l’activité dans son ensemble. Elles empêchent les autres élèves d’apprendre et l’enseignant de donner son cours (violence physique ou verbale, vol, dégradation, harcèlement, etc.). La gestion des conséquences de ces comportements doit, dans certains cas, être confiée à la direction. Elle nécessite que l’élève soit retiré de son environnement. On parle alors plus couramment d’exclusion de classe.
Il est nécessaire de préciser qu’une perturbation mineure qui se répète malgré des interventions différenciées sera considérée comme une perturbation majeure.
Par interventions différenciées, il faut entendre des interventions de différentes natures :
- Recourir quatre fois à la même intervention, par exemple un rappel verbal, par exemple, constitue une seule et même intervention. Il ne s’agit pas d’une intervention différenciée et elle est à éviter.
- Le comportement mineur n’entre pas dans la catégorie majeure avant d’avoir d’abord suivi le continuum d’interventions par rapport au comportement inapproprié. Ce continuum d’interventions est différencié.
Dans le cadre du soutien au comportement positif, l’équipe responsable du soutien au comportement positif devra opérer une classification des comportements mineurs et majeurs en fonction des valeurs de l’établissement ainsi que du règlement d’ordre intérieur.
Afin d’éviter toute ambigüité, chaque comportement doit être défini clairement, ce qui permet à chaque membre du personnel de savoir ce qui est considéré comme « agression physique » ou « refus d’autorité », et donc de réagir en conséquence.
Pour aller un pas plus loin, et en vue de la création ultérieure d’un arbre décisionnel, il est ensuite proposé de classer l’ensemble des comportements inappropriés que les élèves pourraient manifester en quatre niveaux.
- Les comportements mineurs de niveau 1 sont ceux qui nuisent uniquement à l’élève : ne pas faire ses devoirs, arriver en retard, ne pas avoir son matériel…
- Les comportements mineurs de niveau 2 nuisent à l’élève et à quelques autres élèves autour de lui : circuler dans la classe sans permission, chuchoter sans permission, gêner le passage…
- Les comportements majeurs de niveau 3 sont ceux qui nuisent à l’ensemble du groupe : lancer des objets dangereux, bousculer tous les élèves du rang, répondre avec impolitesse à l’enseignant…
- Les comportements majeurs de niveau 4 sont illégaux ou dangereux : se bagarrer, consommer de la drogue, fuguer, faire trébucher un autre élève… Ces comportements de niveau 4 doivent systématiquement être pris en charge par la direction.
En regard de cette classification, l’équipe restreinte propose et développe, pour chacun des quatre niveaux établis, un éventail d’interventions et de conséquences qui peuvent être appliquées.
L’idée ici est bien que chaque membre du personnel puisse réagir de la même manière face à un même comportement, et soit outillé pour pouvoir mettre ne place des interventions différenciées et des conséquences justes et proportionnées.
L’accent est mis sur les gestes réparateurs (réparer ce qui a été brisé, présenter des excuses à la personne blessée…).
La recherche de cohérence dans les motifs d’exclusion de classe
La méthode usuelle pour faire face aux comportements inappropriés est d’exclure temporairement de la classe les élèves dont le comportement perturbe l’ensemble de la classe. Cela se fait le plus souvent avec une note pour se présenter à la direction ou à un éducateur.
La mise en œuvre de cet aspect demande de la prudence. En règle générale, hors soutien au comportement positif, différents enseignants peuvent utiliser des motifs et procédures variables pour exclure un élève de leur classe. Dès lors, un nombre d’exclusions de classe élevé ne signifie pas que les élèves se conduisent plus mal que dans d’autres écoles où le taux d’exclusions de classe est plus faible. Le même comportement d’élève peut appeler différentes réactions auprès de différents enseignants et dans différentes écoles.
La mise en œuvre de cet aspect dans le cadre du soutien au comportement positif va demander de travailler sur la cohérence au sein d’un établissement. Tous les enseignants doivent s’aligner sur les raisons d’exclure un élève d’un cours et sur la procédure à suivre dans ce cas-là.
Réagir face à un comportement inapproprié
Nous arrivons au stade où les comportements inadéquats ont été classés. Des interventions différenciées et des conséquences proportionnées ont été définies. L’étape suivante pour l’équipe responsable du soutien au comportement positif est de construire un arbre décisionnel pour l’école.
L’arbre décisionnel est un outil qui va aider le membre du personnel qui constate un comportement inapproprié à réagir de façon adéquate. Il lui permet de savoir à partir de quel point une exclusion se justifie, ou s’il faut référencer l’élève à la direction.
Cet arbre inclut également la procédure d’exclusion de la classe (où se rend l’élève, qui le reçoit avec quelle prise en charge, quels rapports remplir, qui prévenir, document, comment peut il est réintégré à la classe…).
L’arbre décisionnel a pour enjeu d’établir une politique commune de gestion des comportements inappropriés à l’échelle de l’école. Par ailleurs, il vise à diminuer les occurrences d’exclusions de classe pour des motifs inadéquats (en lien avec la classification des comportements et le rapport d’incident).
Si un élève est exclu de la classe, cette exclusion doit absolument être documentée par un rapport d’incident, car cela permet la prise de décision sur base d’une récolte de données factuelles. Cela signifie que si l’on veut prendre des mesures disciplinaires pour un élève, ou décider de le faire bénéficier d’une intervention de niveau supérieur, il faut avoir des données sur lesquelles se baser. Ces données peuvent être le nombre d’exclusions, le type de comportement inapproprié, les raisons de ces comportements ou certains antécédents.
Documenter les écarts de comportement pour appuyer la prise de décision
Lorsque les perturbations sont mineures, l’enseignant intervient lui-même, en appliquant les conséquences prévues dans les leçons de comportement et la classification des comportements et l’arbre décisionnel.
Il est cependant important que ces incidents mineurs comme majeurs soient consignés de manière à ce que l’équipe responsable du suivi puisse les analyser et proposer aussi vite que possible le soutien adéquat aux élèves.
Pour cette raison, beaucoup d’écoles utilisent un rapport d’incident, pour pouvoir inventorier les écarts de comportement qui se répètent malgré des interventions différenciées.
Les rapports d’incident sont plus qu’une simple base de données sur le comportement des élèves. On peut aussi y trouver des informations concernant la cohérence et l’adéquation des réactions des adultes face aux comportements inappropriés.
Le gros avantage de ces rapports est qu’ils peuvent servir d’outil de communication avec les parents. Ils documentent les interventions et conséquences mises en place. Ils représentent une source d’informations permettant de déterminer si une intervention a des effets positifs ou non.
L’utilité de la récolte de données
Documenter et récolter des données concernant les exclusions de la classe et d’autres mesures liées aux perturbations mineures est utile pour découvrir :
- Les schémas de fonctionnement dans la manière de sanctionner les élèves
- Les effets des interventions menées en classe ou dans toute l’école
- Les besoins de l’équipe en matière de formation professionnelle en gestion.
Exploiter et analyser les données est relativement simple. Cependant, pour pouvoir les récolter de manière complète et correcte, il est important que tous les membres du personnel s’accordent sur l’utilisation et l’émission de rapports. Ceux-ci sont complétés en cas de perturbations majeures ou de perturbations mineures menant à une conséquence éducative.
Des notes ou des formulaires préexistants peuvent directement être mobilisés. Pour répondre aux attentes du soutien au comportement positif, ils devront parfois être remaniés.
L’équipe de pilotage du soutien au comportement positif devra concevoir des rapports adaptés à la réalité de l’école et en lien avec la classification des comportements inappropriés. Elle devra également déterminer une procédure claire, sans contradiction avec le règlement d’ordre intérieur, sur la manière dont les élèves sont exclus de la classe.
L’équipe devra également déterminer la façon dont ces données recueillies seront compilées, analysées et utilisées, en vue de pouvoir prendre des décisions objectives.
Le soutien au comportement positif ne fonctionne bien que si des procédures de récoltes de données faciles d’emploi, claires et techniquement responsables (c’est-à-dire réalistes, faisables et durables) sont utilisées. C’est en effet sur cette base que des décisions pertinentes pourront être prises.
Bibliographie
Ariane Baye, Valérie Bluge, Caroline Deltour, Aurore Michel et Fabian Pressia, La méthode du Soutien aux Comportements Positifs niveau 1, Manuel pour la mise en place du niveau 1, 2020,
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