Une synthèse sur différents principes, outils, stratégies, processus et méthodes pour gérer les écarts de comportements hors de la classe (Baye et coll., 2020).
(Photographie : Jinjoo Hwang)
Une perspective éducative sur le comportement dans les lieux communs de l’école
Les interventions dans le cadre du soutien au comportement ne se limitent pas à poser une punition dès qu’un comportement perturbateur apparait. On parle bien d’un changement de paradigme vis-à-vis d’une approche de la discipline scolaire centrée sur la sanction.
Le processus démarre bien plus tôt :
- Tout commence par une définition des comportements attendus qu’il sera nécessaire d’enseigner.
- Les comportements attendus sont alors enseignés explicitement aux élèves en les justifiant à partir des valeurs de l’école.
- Ces comportements sont présentés dans le cadre d’un modelage qui montre le comportement attendu en milieu scolaire, de sorte que les élèves voient ce qu’il faut faire.
- Les différentes étapes du comportement sont parcourues dans l’ordre avec les élèves. Ils ont l’occasion de les pratiquer dans le lieu où ces comportements sont à adopter. Il est très important que les élèves s’entrainent à ce comportement et démontrent à la personne responsable de la supervision qu’ils maitrisent vraiment la ou les compétences visées.
- Après le modelage et la pratique guidée, c’est au tour de la pratique autonome. Les élèves expriment le comportement en conditions authentiques sous la supervision d’un adulte qui leur délivre une rétroaction positive spécifique ou corrective selon la pratique correcte ou non du comportement attendu à l’école.
À partir de là, les élèves se retrouvent dans un contexte où ils connaissent normalement les comportements attendus et s’y sont exercés.
Si les élèves se comportent mal, le premier point à vérifier est toutefois que les élèves connaissent le comportement attendu. S’il apparait au surveillant que les élèves ne comprennent pas précisément ce que nous attendons d’eux et adoptent un comportement inadéquat, la première démarche sera d’enseigner à nouveau le tout.
Dans le sens de cette démarche, il est très important de tester la connaissance du comportement enseigné. En cas de perturbation, nous devons demander aux élèves de le montrer ou le leur montrer nous-mêmes.
Dans tous les cas de figure, une fois la prise en charge du comportement inapproprié réalisée, il sera important de féliciter l’élève lorsqu’il démontre le comportement attendu à l’école, dans le même contexte.
De manière plus générale, il nous faut prêter principalement attention aux élèves qui satisfont les comportements attendus en milieu scolaire que nous voulons voir se généraliser. Pour cela, nous cherchons systématiquement les élèves qui les démontrent et nous le renforçons positivement.
Dans ce cadre, il importe également d’accorder une attention particulière aux élèves à risque qui font des tentatives et essais d’amélioration de leurs comportements. Chez certains élèves, un seul renforcement ne suffira pas et ils devront être soutenus plus souvent avant qu’ils ne manifestent le comportement adéquat et qu’ils le maitrisent pleinement.
Intervenir sans tarder face à une perturbation dans les lieux communs de l'école
Pour tout élève, en cas de perturbation, il est nécessaire que les erreurs soient corrigées directement. Nous devons nous assurer que l’élève connaisse le comportement attendu et si besoin le lui enseigner à nouveau. De même, l’élève doit être conscient des conséquences d’un comportement inapproprié.
En dehors de cela, il faut toujours prendre conscience du fait qu’un comportement est inscrit dans un contexte. En cas de difficultés avec un élève ou l’autre, il est fortement conseillé d’en discuter avec ses collègues qui sont également en contact avec lui. Cela peut se faire pour signaler des problèmes ou pour mettre en évidence des améliorations. Cela permet, en échangeant des informations, d’adapter ses actions en en tenant compte.
L’identification d’un comportement perturbateur mineur induit un continuum d’interventions qui sont susceptibles de mener à des conséquences éducatives.
Les conséquences éducatives doivent :
- Suivre directement le comportement
- Correspondre à la gravité du comportement
- Être neutres, non empreintes d’émotions
- Être spécifiques au comportement
- Être systématiques
- Être cohérentes tant par rapport au comportement que par rapport aux membres du personnel.
Adopter un continuum dans l’intervention
Lorsqu’un comportement perturbateur est exprimé, il importe de bien objectiver les faits et de poser un cadre adéquat pour traiter la situation.
Un premier principe est d’éviter autant que possible de traiter la situation avec des élèves spectateurs autour de nous. Nous prenons de préférence l’élève à part, en privé, en postposant éventuellement brièvement la rencontre, ce qui lui donne un temps pour réfléchir. Il faut éviter de réagir au comportement d’un élève en présence d’autrui pour ne pas lui donner une audience et l’attention de celle-ci, ni le mettre dans l’embarras et ainsi préserver sa face.
Une fois dans un cadre propice et isolé, nous disons calmement à l’élève de façon impersonnelle et neutre ce qui a été vu. Nous visons le comportement, jamais la personne. À ce stade, nous n’entamons pas une discussion avec l’élève.
Une fois le comportement perturbateur objectivé, nous demandons à l’élève de reconnaitre que ce comportement était inapproprié et de décrire quel aurait été le comportement attendu à l’école dans cette situation. S’il ne peut ou ne veut pas le mentionner, nous l’expliquons nous-mêmes et nous lui demandons de le reformuler. Nous discutons alors de l’importance pour l’élève de se tenir à ce comportement-là en lien avec la valeur correspondante.
Par la suite :
- Si l’élève fait le bon choix et adopte le comportement attendu, nous le renforçons positivement par la suite.
- Si l’élève ne fait pas le bon choix, nous donnons à l’élève le choix entre la conséquence ou l’adoption du comportement attendu à l’école. Si l’élève fait le bon choix, nous le renforçons par la suite.
- Si l’élève ne fait pas le bon choix, nous lui attribuons la conséquence corrective. Durant ce temps, le surveillant appelle un autre membre de l’équipe qui prendra le relai et continuera la supervision active.
La règle des deux minutes pour régler un comportement inapproprié
Dans les lieux communs se trouvent souvent rassemblés de nombreux d’élèves, qui sont occupés à des activités libres avant ou entre des périodes de cours.
Les élèves sont notoirement plus nombreux que les surveillants. Les élèves se retrouvent ensemble après avoir passé plusieurs heures assis en classe.
Les élèves sont susceptibles d’être agités et sont contents de se retrouver entre eux. Les surveillants ont comme mission de stopper rapidement, efficacement et d’une manière pratique les comportements problématiques.
Pendant une récréation de quinze à vingt minutes, le surveillant a d’ordinaire cinquante à cent élèves à tenir à l’œil.
Si un surveillant passe plus de deux minutes avec un élève ou un groupe d’élèves à résoudre un problème de comportement, il ne peut pas en même temps superviser les autres élèves et leurs activités.
Le fait qu’un surveillant doive réagir aux comportements et pour ce faire interrompre sa supervision a mené au développement de la règle des deux minutes :
- Si un surveillant ne peut pas remédier à un comportement inadéquat dans les deux minutes, la solution du problème doit être déplacée à un autre moment ou doit être transposée à une autre personne.
- Si un élève se conforme à la remédiation ou à une autre conséquence, l’entièreté du processus ne peut pas prendre plus de deux minutes chrono.
- Si l’élève s’oppose à l’intervention du surveillant, ne montre pas de respect et ne se conforme pas aux règles en vigueur, il faut un renfort. Il est peu probable que le surveillant puisse remettre l’élève sur les bons rails dans un délai raisonnable.
Cette option de renfort doit par conséquent être organisée et pensée au niveau de l’école.
Travailler en équipe, prendre des décisions et intervenir sur base de faits
La dernière composante d’un programme de supervision systématique et efficace est la collaboration au sein de l’équipe de supervision, qu’il s’agisse d’enseignants, d’éducateurs ou d’autres intervenants de l’école.
Les interventions individuelles des surveillants basées sur les décisions consensuelles prises par l’équipe sont ainsi renforcées et c’est aussi grâce à l’équipe que les activités relatives aux comportements sont plus durables et plus logiques.
L’équipe de supervision remplit les trois tâches importantes suivantes :
- Collecte des données relatives aux comportements et analyse ces dernières.
- Prise de décisions, développement et implémentation de plans et d’activités concernant des interventions sur base des analyses menées ;
- Communication auprès de tous les intervenants de l’école sur les données en lien avec les comportements et sur la manière d’agir.
Tout comme l’équipe gérant le soutien au comportement positif à l’échelle de l’école, l’équipe de supervision travaille de manière pratique sur base des cinq éléments suivants :
- La supervision active fait partie intégrante du programme de soutien aux comportements à l’échelle de l’école
- Le soutien de la part de la direction
- La possibilité de se réunir régulièrement
- La récolte et analyse des données concernant les comportements et les interventions menées
- La communication des informations aux autres intervenants.
Pour garantir une culture d’école positive, l’élément premier et le plus important d’un programme de supervision systématique, efficace et durable, est le soutien inconditionnel de la direction, et ce, dans tous les domaines. Sans le soutien, le dévouement et la participation du leadership, ce sont l’efficacité, la validité et la durabilité qui sont menacées. Le programme tout entier peut perdre sa force.
L’organisation régulière de réunions avec l’ensemble des surveillants est aussi essentielle pour les tâches de l’équipe. C’est d’autant plus le cas lorsqu’il s’agit de récolte et d’analyse de données relatives aux comportements ainsi qu’aux réactions qui s’en sont suivies, et à l’implémentation de programmes d’intervention. Si ces tâches ne sont pas remplies de manière adéquate, les mesures prises pour infléchir au maximum les comportements pourraient réussir par le plus grand des hasards, mais pourraient tout aussi bien être dommageables.
Une autre tâche de l’équipe de supervision est de transmettre les informations à toute l’équipe éducative de l’école. Les stratégies efficaces de soutien aux comportements sont basées sur des programmes à l’échelle de l’école. Cela signifie qu’idéalement tous les intervenants de l’école se sont concertés à propos du programme. C’est de cette manière que l’on peut garantir que tout le personnel de l’école réagira de la même manière dans des situations similaires ; être cohérent est en effet un élément indiscutable.
Mis à jour le 11/011/2024
Bibliographie
Ariane Baye, Valérie Bluge, Caroline Deltour, Aurore Michel et Fabian Pressia, La méthode du Soutien aux Comportements Positifs niveau 1, Manuel pour la mise en place du niveau 1, 2020
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