dimanche 27 octobre 2024

Mobilisation pratique de stratégies d’apprentissage génératif

S’engager dans un apprentissage génératif par le double codage, des représentations graphiques, le questionnement élaboré ou le résumé Cornell : différentes pistes explorées par Hoof, Surma et Kirschner (2021).

(Photographie : William Rugen)



Développer une représentation graphique comme apprentissage génératif


Lorsqu’il assure le traitement des supports d’un cours pour en apprendre les contenus, l’idée est qu’un élève crée des représentations graphiques. Celles-ci intègrent des dessins, du texte et des éléments de lien.

Ce type de démarche est utile pour représenter la structure d’une définition, les composantes d’un processus ou les étapes d’une procédure. Jouer sur les deux aspects à la fois rend plus explicites les liens et facilite la mémorisation en conjuguant les dimensions verbales et visuelles.

L’élève démarre des supports du cours (texte dans un manuel, notes de cours ou vidéo pédagogique…) qu’il croise avec les objectifs d’apprentissage et la table des matières. Il veille à se faire progressivement une idée de la structure d’ensemble et de la place de chaque élément.

L’élève lit attentivement quelques paragraphes ou regarde une première partie de la vidéo. Selon la complexité du thème, il peut travailler par un ou plusieurs paragraphes ou progresser par section. 

Ensuite, il laisse le support de côté et traite ce qu’il vient de lire et comprendre par le biais d’une représentation graphique. Il veille à ce que tout soit clair pour lui. Il élabore des dessins qui clarifient les contenus. Il combine mots et images. Ce processus permet un meilleur traitement de l’information d’une manière qui optimise l’usage de nos ressources cognitives. Cela permet de mieux analyser les contenus, de mieux les fixer en mémoire et de nous en souvenir plus facilement. 

Par la suite, le dessin devient un support pour expliquer, récupérer ou élaborer directement sur le processus, la procédure ou le concept. De cette manière, nous nous testons à nouveau. La représentation graphique devient un support pour soutenir l’apprentissage ultérieur et la consolidation.

Durant et au terme du processus, il est utile de vérifier si le contenu est correct et complet. Comme cette stratégie est axée sur un apprentissage génératif, la dimension esthétique de la représentation est secondaire, au contraire de la clarté et de la précision qui sont centrales.

Cette stratégie possède un avantage indéniable et une complémentarité évidente face à d’autres stratégies comme le résumé Cornell ou la réalisation de flashcards. Les élèves sont obligés de s’éloigner du support d’apprentissage en transformant les mots en dessin. En outre, les élèves combinent les mots et les images, ce qui constitue une stratégie d’apprentissage efficace. 

Nous pouvons offrir un étayage aux élèves en aidant à sélectionner les éléments à traiter par exemple en mettant à leur disposition une liste des mots-clés qu’ils doivent absolument incorporer dans leur support graphique. 

Nous pouvons également modeler la façon dont ils peuvent mettre un processus particulier sous la forme d’un dessin et raisonner à haute voix pendant que nous construisons le dessin étape par étape.

Nous leur proposons ensuite un exemple concret. Lors d’un cours ultérieur, nous pouvons demander aux élèves d’utiliser leur dessin pour récupérer activement leurs apprentissages. Nous leur demandons de s’expliquer le processus à eux-mêmes ou à quelqu’un d’autre à l’aide du dessin.



Procédure pour développer une représentation graphique des contenus à apprendre


Le principe est de créer un diagramme visuel qui met en évidence les liens entre les différents éléments constituant un apprentissage à maitriser dans un contexte donné. Cette stratégie d’apprentissage générative amène à créer une représentation spatiale des idées clés d’une matière qui a été précédemment enseignée.

La forme la plus familière de représentation graphique est la carte mentale. Nous pouvons également travailler avec des cartes conceptuelles, des diagrammes ou des tableaux à colonnes. Certaines matières se prêtent très bien à la création de tableaux comparant des concepts.

Nous pouvons utiliser la cartographie pour résumer ce que nous avons compris et appris, mais aussi pour retrouver nos connaissances antérieures. 

Nous pouvons nous demander : que sais-je encore sur ce sujet de cours ? Grâce à la représentation graphique, nous pouvons également clarifier les liens entre différents concepts, éléments ou étapes.

Processus à suivre : 
  • S’assurer d’avoir une idée approximative de la structure du contenu à traiter en consultant la table des matières du chapitre, en analysant les objectifs d’apprentissage correspondants ou en observant les titres et sous-titres des sections.
  • Partir des supports pédagogiques (manuel, notes de cours ou vidéo pédagogique), les lire attentivement et en profondeur.  
  • Faire autre chose pendant quelques minutes ou quelques heures.
  • Prendre une feuille blanche et écrire le thème principal du contenu au milieu de la feuille pour une carte mentale ou en haut pour une carte conceptuelle. Celui-ci est souvent en évidence dans le titre de la section.
  • Autour de cet élément central, noter en lien différentes idées clés (souvent présentes dans le titre principal ou dans l’énoncé de l’objectif d’apprentissage correspondant).
  • Pour chaque idée clé, ajouter d’autres ramifications avec des concepts, des listes, des exemples, etc.
  • Les flèches menant aux concepts sont nommées, ce qui indique clairement qu’il s’agit (dans ce cas) de causes et d’effets.
  • Un élément important pour garder la dimension d’un apprentissage génératif est de ne pas construire cette représentation avec le support pédagogique devant les yeux, en recopiant certaines parties. Si nous sommes bloqués durant ce processus sans doute que les deux premières étapes portant sur la lecture et l’analyse du contenu n’ont pas été assez approfondies.
  • À la fin du processus, nous vérifions la pertinence de la représentation graphique en reprenant le support pédagogique de départ et en le comparant avec le résultat obtenu : 
    • Tous les éléments clés sont-ils bien intégrés ?
    • Les liens entre les différents éléments sont-ils clairs ?
    • Y a-t-il des erreurs, des manques ou des approximations ?

Une fois validée, la production obtenue devient elle-même un support d’autoévaluation ou d’auto-explication des contenus.



Auto-expliquer ou expliquer à quelqu’un des apprentissages


Lorsqu’un élève génère une explication, nous devons l’encourager à la compléter par de nombreux détails et lui demander de relier explicitement les nouvelles informations à ses connaissances antérieures.

Le bénéfice de l’opération est d’autant plus important qu’elle traite ces informations de manière plus approfondie. Le processus ne doit pas se limiter à une simple répétition telle quelle de nouveaux contenus.

En tant qu’enseignants, nous pouvons modéliser ce processus pour nos élèves. En tant qu’experts, nous expliquons avec un haut-parleur sur notre pensée, certains concepts ou certaines résolutions d’exercices :
  • « Lorsque je lis cette question sur un concept, je me demande ce qu’il signifie vraiment et si je peux penser à l’un ou l’autre exemple concret. » 
  • « Lorsque je lis cet énoncé pour un problème, j’en déduis de quel type d’exercice il s’agit, car je repère les éléments suivants… Je sais quelle formule ou quelle procédure je dois appliquer, parce que… »
L’enseignant peut expliquer pourquoi aborder les différents éléments chacun de telle manière. C’est précieux pour les novices que sont les élèves, car ils ont des schémas de connaissances moins riches, moins aboutis et moins développés que les experts que sont les enseignants.

Après le modelage, l’enseignant propose alors à ses élèves une pratique guidée de cette stratégie d’apprentissage génératif en classe. Il les incite à réfléchir en profondeur lorsqu’ils expliquent quelque chose : 
  • Pourquoi dites-vous cela ?
  • Que savez-vous déjà à ce sujet ?
  • Quelles preuves pouvez-vous citer à l’appui de cette explication ?
  • Quels exemples pouvez-vous donner pour ce concept ?
  • Quelles sont les conséquences de cet élément ou de cette étape ? 
Par une pratique régulière en classe, nous encourageons les élèves à expliquer un sujet de manière complète et détaillée. Nous insistons également sur la fonction métacognitive de cette stratégie d’apprentissage générative. Si les élèves ne parviennent pas à expliquer ce qu’ils ont appris, c’est qu’ils n’ont pas (encore) suffisamment approfondi et compris la matière. Ils peuvent alors, par exemple, relire leurs supports d’apprentissage, refaire des exercices, chercher un exemple, ou poser l’une ou l’autre question en vue d’obtenir des éclaircissements.



Un enseignement explicite de l’explication à soi-même ou à quelqu’un d’autre


Le principe pour l’élève est d’expliquer les contenus d’un support d’apprentissage lorsque ceux-ci sont refermés. L’explication peut concerner un exercice, un concept ou un processus. Le destinataire de l’explication est une autre personne ou l’élève lui-même.

La valeur ajoutée de l’explication vient du fait qu’elle amène à réfléchir en profondeur. À ce titre, il existe une valeur ajoutée au fait d’expliquer l’apprentissage à quelqu’un d’autre. Cette personne peut également nous poser des questions, ce qui oblige à creuser plus en profondeur les contenus de l’apprentissage.

Le processus peut démarrer d’une simple question d’évaluation. Il peut également s’appuyer sur un organisateur graphique ou sur une autre représentation. Il peut être mobilisé dans le cadre de la résolution d’un exercice ou dans l’analyse d’un texte.

Processus : 
  • Nous partons d’un support d’apprentissage (texte, représentation, question, énoncé d’exercice ou vidéo).
  • Nous lisons attentivement ce support et traitons l’information. Selon la complexité du sujet, nous pouvons travailler étape par étape.
  • Nous nous expliquons, ou nous expliquons à quelqu’un d’autre le résultat de notre réflexion. Lors de ce processus, nous expliquons à haute voix chacune des étapes de notre raisonnement et les justifions.
  • Après notre explication, nous en vérifions la justesse en nous référant aux supports d’apprentissage, nous rectifions si nécessaire et corrigeons nos erreurs ou approximations éventuelles.
En aucun cas, l’explication ne peut se résumer au fait de répéter telle quelle des connaissances préalablement mémorisées.



Enseigner explicitement la réalisation d’un résumé Cornell


Nous pouvons enseigner explicitement à nos élèves comment mobiliser la stratégie du résumé Cornell en suivant ces étapes : 
  • Demander aux élèves s’il leur arrive de résumer, comment ils le font, quelles sont les difficultés qu’ils rencontrent.
  • Expliquer pourquoi un résumé Cornell peut être une manière plus efficace de résumer et quels sont les avantages de cette stratégie.
  • Modéliser la création d’un résumé Cornell à partir d’une matière enseignée récemment. Demander à nos élèves de simplement nous observer pendant que nous préparons la structure et remplissons la première partie. C’est le principe du haut-parleur sur la pensée : le novice suit le raisonnement explicité de l’expert.
  • Demander aux élèves de s’engager dans une pratique guidée du résumé Cornell en fournissant guidage et étayage :
    • À ce stade, les élèves ont peu de connaissances préalables sur le résumé Cornell. 
    • Certains élèves peuvent avoir besoin d’un accompagnement plus poussé, car ils peuvent encore n’avoir qu’une connaissance superficielle du thème sur lequel il porte. 
    • Pour les élèves ayant très peu de connaissances préalables, il sera difficile de sélectionner les informations les plus pertinentes. Nous pouvons donc travailler avec eux pour sélectionner les idées clés et les inscrire dans la colonne de droite. Nous pouvons aussi leur proposer un modèle de résumé dans lequel nous avons déjà rempli la colonne de droite et où ils complètent la colonne de gauche. Nous pouvons également les aider à s’organiser en préparant la structure. 
  • Nous proposons aux élèves de s’engager dans une pratique autonome du résumé Cornell. Nous les laissons utiliser cette stratégie d’apprentissage individuellement (ou avec un camarade). Ensuite, ils comparent, leur résumé avec celui d’un camarade ou avec un exemple fourni.
  • À ce stade, il peut être utile de présenter des variantes de l’utilisation du résumé Cornell : 
    • Son utilisation comme support pour des autoévaluations ultérieures.
    • La possibilité de démarrer immédiatement des supports pédagogiques, en soulignant et en notant des mots-clés ou des questions dans la marge pour chaque paragraphe afin de pouvoir facilement se tester. 



Créer un résumé Cornell dans une perspective d’apprentissage génératif


Le principe du résumé Cornell consiste à représenter les plus importantes d’un texte, d’une vidéo ou d’une présentation en les reformulant avec vos propres mots :

Phase 1 : conception 
  • Nous prenons une feuille de papier et nous la divisons en trois colonnes comme dans l’exemple ci-contre : 
    • Une colonne droite large,
    • Une colonne gauche plus étroite,
    • Un espace d’écriture en bas.
  • Nous inscrivons le sujet de la leçon en haut.
  • Nous prenons de brèves notes dans la colonne de droite, au fur et à mesure que nous parcourons le support d’apprentissage ou pendant la leçon. Nous travaillons de manière schématique et structurée, avec des puces, des mots-clés, des abréviations…
  • Ensuite, dans la colonne de gauche, nous notons les questions ou les mots-clés qui se rapportent à la matière de la colonne de droite. Nous cherchons les liens.
  • Nous résumons brièvement l’essentiel du sujet de la leçon et écrivons ce résumé concis au bas de la page.
Phase 2 : Usages
  • Dans le cadre d’une pratique de récupération distribuée, nous couvrons la colonne de droite. Nous nous testons sur la base des concepts de la colonne de gauche. L’objectif est de pouvoir se rappeler les contenus notés dans la colonne de droite.
  • Nous vérifions notre réponse et réétudions en cas de nécessité. 
  • Le processus se répète de session espacée en session espacée.
Une condition importante du processus est de reformuler les contenus et de ne pas simplement les recopier. Il doit s’agir d’un processus véritablement cognitivement actif et génératif. 

De plus, le plus grand gain d’apprentissage réside dans l’usage du résumé Cornell dans le cadre d’une pratique de récupération distribuée.


Mis à jour le 28/10/2024

Bibliographie


Hoof, T., Surma, T., & Kirschner, P. A. (2021). Leer studenten studeren met succes. Antwerpen : Thomas More-hogeschool.

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