jeudi 12 septembre 2024

Favoriser le bon comportement en classe

Certains élèves ont plus de mal à adopter les comportements attendus que d’autres ce qui demande de combiner persuasion et dissuasion. Voici une exploration de cette question autour de la vision qu’en développe Tom Bennett (2021).


(Photographie : omenalehto)

Nous devons aider les élèves à adopter les comportements attendus. Il s’agit dès lors de les aider à y arriver. Pour ce faire, nous visons à éliminer tous les obstacles qui les empêchent de prendre de meilleures habitudes. 

Nous les renforçons dans leurs efforts pour répondre aux attentes comportementales de l’école et nous les confrontons quand ils s’en éloignent. Nous créons des conditions pour rendre les comportements attendus satisfaisants et les comportements perturbateurs insatisfaisants.



La gestion des perturbations mineures


Les perturbations mineures sont susceptibles d’avoir un impact non négligeable sur l’apprentissage en classe. C’est la forme la plus courante de comportements perturbateurs. Le danger vient du fait que les enseignants peuvent les tolérer, ce qui se traduit par des pertes de temps. Elles viennent s’accumuler au fil du temps pour atteindre des durées conséquentes. Or le temps est sans doute la ressource la plus précieuse pour l’enseignant en classe.

La meilleure façon de gérer les perturbations mineures est :
  • D’établir des normes et des routines
  • D’enseigner explicitement les comportements attendus
  • D’exprimer des attentes claires et élevées
  • D’exercer une vigilance de tous les instants
  • De renforcer les comportements attendus des élèves lorsqu’ils sont en progrès
  • D’intervenir selon un continuum en cas de non-respect des attentes comportementales
  • De faire des rappels en cas de besoin.
Tous ces éléments peuvent minimiser les perturbations mineures. Plus les perturbations mineures sont dissuadées, moins elles ont de chances de devenir la norme. Dès lors, elles deviennent de moins en moins fréquentes. 

Plus nous nous concentrons sur ces démarches, moins il y a de risques que la situation en classe aboutisse à des écarts de conduite plus importants et plus graves.



En gestion des perturbations mineure, le diable est dans les détails


Certaines démarches de base sont essentielles pour établir un bon comportement en classe :
  • Être vigilant
  • Faire bon usage de la prévention
  • Intervenir dès la première perturbation
  • Agir en profondeur, de manière discrète, appropriée et ferme 
  • Ne jamais ignorer, sauf de manière stratégique, pour ne pas renforcer un comportement
L’enjeu pour les enseignants est de réagir aux comportements perturbateurs lorsqu’ils sont encore naissants et rares. Nous évitons de devoir lutter contre des habitudes installées, car cela nécessiterait un plus haut niveau d’investissement pour corriger la situation.

Ignorer un comportement perturbateur isolé lorsqu’il se produit en faisant le pari qu’il est une exception et qu’il disparaitra bien vite est avant tout une erreur. Cela revient à se mentir à soi-même, faire preuve d’un optimisme déplacé et s’apprêter à faire face bientôt à des situations bien plus complexes à gérer. 

Nous devons nous attaquer aux écarts comportementaux avant qu’ils ne deviennent une norme et nécessitent des interventions et des efforts bien plus importants et bien plus incertains.

En tant qu’enseignants, nous devons développer des routines et des réponses automatiques face aux écarts mineurs de comportement. Nous connaissons la norme que nous voulons obtenir et nous devons la partager, l’enseigner, la rappeler et la maintenir avec conviction.

Nous voulons que nos élèves sachent pourquoi c’est important de bien se comporter et comment le faire. Ils reconnaissent qu’il y aura des conséquences s’ils ne le font pas.

Un bon comportement général à l’école est composé d’une panoplie de comportements spécifiques qui chacun doivent être appris, pratiqués et maintenus.

Il est fondamental d’agir. En effet, ce que l’on va accepter comme comportement en classe va vite devenir acceptable par les élèves. Nous ne devons pas attendre que les perturbations mineures prennent une certaine ampleur avant d’agir. Il serait alors trop tard. En n’intervenant que lorsque la situation devient problématique, nous suggérons tacitement aux élèves que tout ce qui n’est pas un écart de conduite majeur est en principe tolérable s’il reste discret et dans des proportions mineures. 

Le manque de réactivité de l’enseignant normalise les écarts de conduite de moindre importance. Cela soutient le développement de mauvaises habitudes auprès des élèves. 



Être garant de l’espace de la classe


Il est important que chaque élève réalise qu’un climat de classe calme, apaisé et coopératif est la norme à atteindre. La classe est un lieu où l’apprentissage, le respect et la sérénité priment, où l’effort et l’engagement sont valorisés. Ce n’est en rien un espace de détente ludique où les élèves décident s’ils vont s’investir ou non dans les activités d’apprentissage.

Notre rôle en classe n’est pas de faire plaisir aux élèves ou d’éviter de les décevoir. Notre rôle est d’être un adulte de référence et un enseignant compétent. Les élèves ont besoin de nous pour apprendre, même s’ils peuvent parfois avoir du mal à comprendre nos attentes élevées envers eux. Nous ne sommes pas là pour être aimés, mais pour faire ce qui est positif pour leurs progrès dans les apprentissages scolaires.



Un usage modéré de l’ignorance planifiée


Nous pouvons ignorer un écart de comportement mineur, mais uniquement dans des situations très spécifiques. 

Par exemple, un élève peut présenter deux écarts de comportements mineurs récurrents et bien identifiables. Nous pouvons viser d’agir dans un premier temps sur un des deux. Lorsque des améliorations du premier comportement se manifestent, nous pouvons pour un temps renforcer l’élève et stratégiquement ignorer l’occurrence du second comportement. Mais ceci ne fonctionne que dans un cadre très précis souvent dans le cadre d’élèves présentant des troubles comportementaux ou des élèves qui se montrent résistants aux interventions habituelles. La démarche gagne à être pensée dans le cadre rigoureux d’une analyse fonctionnelle du comportement. 

Plus régulièrement, nous pouvons utiliser l’ignorance planifiée lorsque l’élève connait le comportement attendu, mais exprime le comportement perturbateur dans le cadre d’une recherche d’attention. Dans ce cas, en ignorant de manière planifiée le comportement perturbateur, nous le coupons de son renforçateur qui est l’attention de l’enseignant, dans le cadre de l’ignorance planifiée. Cela peut contribuer à l’extinction de ce comportement perturbateur.

En dehors de cela, lorsqu’un élève présente deux comportements perturbateurs récurrents, nous pouvons lui offrir une rétroaction positive spécifique par rapport à l’amélioration d’un comportement. Nous lui rappelons immédiatement ce qu’il devait faire pour le second comportement perturbateur. Pour celui-ci, nous suivons le continuum de stratégies indirectes puis directes. Ce type d’approche est plus susceptible d’être bénéfique que le fait de tolérer un des deux comportements perturbateurs tout en intervenant pour l’autre.

Si malgré les stratégies indirectes puis directes, rien ne change, nous commençons à appliquer doucement, tranquillement, les conséquences. 



Temporiser certaines interventions


Ignorer un comportement perturbateur mineur doit toujours se faire de manière délibérée et intentionnelle.

Si nous choisissons d’ignorer tactiquement les mauvais comportements, il s’agit d’un acte qui sert un objectif plus important. Nous le faisons avec l’idée que nous nous occuperons plus tard de ce comportement, mais d’une autre manière.

Certains élèves sont plus susceptibles d’adopter un comportement de passage à l’acte en fonction de leur état d’esprit, en fonction du contexte de la classe et de la présente d’autres élèves spectateurs. Imaginons que pour ce profil d’élèves nous constatons une perturbation mineure qui ne dérange pas spécifiquement le cours et que nous sommes en plein travail avec une classe engagée. 

Nous savons que si nous agissons directement, avec ce profil d’élève, nous courons le risque d’une escalade qui pourrait déranger réellement le cours et le stopper un certain temps. 

Dans ce cas, il peut être judicieux d’ignorer tactiquement ce comportement isolé parce qu’il ne perturbe pas les autres à ce stade. Nous continuons à enseigner. 

Entre-temps, l’élève concerné a stoppé sa perturbation mineure et s’est engagé dans le cours. La fin du cours arrive, les élèves s’apprêtent à sortir ou à attendre l’arrivée d’un autre enseignant. Dans ce cas, à ce moment-là nous demandons à l’élève concerné de rester en classe tandis que les autres élèves partent ou de nous accompagner une minute à l’extérieur si c’est nous même qui partons. 

Dans cette situation, nous pourrons revenir auprès de l’élève dans un contexte moins susceptible de générer une escalade et traiter la problématique d’une manière cohérente avec les attentes comportementales et les conséquences établies dans l’école. Nous montrons par là notre vigilance et nos attentes élevées envers l’apprentissage en classe et envers tout élève. 

Le choix doit toujours être bien pesé. Dans la grande majorité des cas, il est plus judicieux d’agir de suite selon le continuum d’interventions. L’enjeu est de renforcer le lien entre l’action et la conséquence pour avoir plus d’impact.

Cependant, certains élèves peuvent présenter des troubles du comportement qu’il faut prendre en compte. Ignorer tactiquement une perturbation est une question de jugement professionnel et de rapport coûts/bénéfices. Nous ne devons pas oublier que nous avons une classe entière qui compte sur vous pour ces apprentissages. Ce qui compte pour nous est de maintenir le mieux possible leur engagement dans le cours.



Éviter le sentiment impuissance et le biais de négativité 


Ce qui est fondamental pour un enseignant est d’éviter de se sentir impuissant dans ses démarches face à des comportements perturbateurs récurrents dans une classe.

Dans ces situations, l’enseignant finit par ressembler à une marionnette. Certains élèves s’amusent à en tirer les ficelles en jouant sur des perturbations mineures récurrentes tolérées par défaut, sans pour autant dépasser certaines limites qui mèneraient aux perturbations majeures. 

Ce phénomène s’observe dans les classes où les élèves sont réticents à certaines directives qu’ils trouvent trop exigeantes de la part de leur enseignant. L’enseignant devient peu à peu exaspéré ou blasé face aux écarts de conduite de ses élèves qui deviennent communes et bien plus complexes à gérer.

L’enseignant ou ses élèves peuvent alors devenir victimes du biais de négativité. Il se manifeste lorsque des individus sont davantage marqués par les expériences négatives que par des expériences positives. Ils prennent davantage en compte les informations négatives que les positives pour interpréter une situation. Ce biais a probablement une origine évolutive pour nous alerter de dangers potentiels.

L’enseignant et les élèves ont tendance à réagir davantage à tout ce qui indique une menace, une alarme ou un danger. 

Les élèves peuvent interpréter les règles et l’exaspération de leur enseignant face à leur non-respect comme une menace. D’un autre côté, un enseignant peut ressentir chaque perturbation mineure comme une alarme et un danger.

Un premier point à relativiser est que lorsque nous enseignons, nous n’obtiendrons jamais un comportement parfait de la part de tous les élèves. Il y aura inévitablement de petites perturbations. Ce que nous devons faire, c’est ne pas laisser ces comportements souhaités s’étendre. Au contraire, nous devons tâcher à tendre vers une amélioration de ceux-ci.

La pleine disparition des comportements perturbateurs peut nous paraitre illusoire, mais une amélioration progressive est réaliste. Pour y arriver, l’enseignant doit, à juste titre, attirer l’attention sur les mauvais comportements afin de les corriger, mais il doit également veiller à ne pas se focaliser entièrement sur eux. C’est le principe de distribuer trois à cinq renforcements positifs pour un renforcement négatif. 

Si nous ne maintenons pas cet état d’esprit et si nous cédons à l’agacement et à l’exaspération, certains élèves sentiront que nous pouvons être facilement distraits ou ennuyés. Le biais de négativité risque de les contaminer également. Ils sauront que leur comportement perturbateur déclenchera une forte réaction négative de leur enseignant. Certains en viendront à le faire pour s’amuser, pour se mettre en valeur même négativement, pour éviter de travailler ou se sentir influents.

Les enseignants inexpérimentés peuvent voir leur concentration et leur équilibre aspirés dans la tourmente du sentiment d’impuissance et du biais de négativité, sans s’en rendre compte. 

Les enseignants expérimentés apprennent à équilibrer le renforcement positif face au renforcement négatif. Ils ne se concentrent pas uniquement sur les événements négatifs qu’ils vont traiter en temps et en heure en gardant toute la maîtrise de la situation. 

Les enseignants expérimentés gardent en tête que pour faciliter l’apprentissage des élèves, ils ne doivent pas se comporter eux-mêmes de manière à perturber le cours. Il est important de bien gérer nos propres ressources limitées et celles des élèves en matière d’attention, d’efforts et de temps.



Des pistes pour garder la pleine maîtrise de soi dans le cadre des interventions


Rester neutre et garder la maîtrise de soi dans le cadre des interventions en gestion de classe ne doit pas rester un vœu pieux, mais doit être rendu effectif. 

Nous devons être pleinement conscients de nos propres réactions et éviter les jugements à l’emporte-pièce, les prises de décision émotionnelles et les accès d’anxiété. 

Différentes pistes peuvent nous aider à mieux gérer notre propre comportement :
  • Dans la mesure du possible, à partir de notre connaissance des différentes perturbations mineures qui peuvent apparaitre, nous pouvons préalablement avoir réfléchi à des réponses types et les avoir rédigées. Cela nous permet de déterminer exactement ce qu’il nous faudra prononcer lorsque nous devrons réagir à un comportement perturbateur type.
  • Avoir bien en tête la procédure type et les discours à tenir lorsqu’il s’agit d’exclure un élève du cours.
  • Prendre le pli en cas d’infraction de toujours rappeler clairement les règles aux élèves au lieu de se montrer imprécis ou confus.
  • Prendre le temps d’être prêt avant de réagir et ne pas agir dans la précipitation, à moins qu’il n’y ait un besoin urgent de réagir immédiatement. Ce besoin urgent peut prendre la forme d’une menace imminente pour un élève, d’un mauvais comportement grave comme le racisme ou la violence, des jurons, etc.
  • Traiter les problèmes et réagir aux difficultés en fonction du temps disponible. Nous réagissions lorsque nous en avons le temps. Nous gardons en tête que le cours doit continuer à avancer et qu’une gestion immédiate du comportement ne doit pas non plus le mettre en péril.


Le cas de perturbations lors de la pratique autonome


Lors de la pratique autonome, un enseignant en profite pour donner des explications supplémentaires à un élève qui rencontre des difficultés particulières.

À l’autre bout de la classe, l’enseignant perçoit quelques remous. Un élève ou l’autre s’agite et semble bien plus s’amuser que travailler sur les tâches données.

L’élève avec lequel nous échangeons est anxieux, il n’a pas participé aux cours depuis un certain temps et sa réussite est potentiellement en danger. Il a besoin d’explications pour pouvoir retravailler le cours chez lui afin de préparer une évaluation à venir. De plus, il ne reste que quelques minutes avant que le cours ne se termine.

Pour un enseignant, la situation est un dilemme :
  • Nous pouvons stopper ce que nous sommes en train d’expliquer à l’élève en difficulté qui a besoin de notre soutien. Nous pouvons partir à l’autre bout de la classe pour réprimander l’autre élève, vérifier ce qu’il fait, réorienter son comportement ou lui demander s’il a besoin d’aide. Si nous procédons de la sorte, nous allons intervenir auprès d’un élève dont le comportement le justifie, mais nous allons priver le premier élève d’un soutien dont il a réellement besoin. Le premier élève va être perdant, l’autre élève aura gagné la plus limitée de nos ressources, notre attention et notre temps. Il est même possible que cet autre élève soit en recherche d’attention de la part de l’enseignant en adoptant un comportement inapproprié. Ce faisant, nous risquons même de renforcer ce comportement problématique.
  • L’autre option est de ne pas s’affronter immédiatement à ce problème de comportement et de décider de continuer à soutenir scolairement le premier élève. Cependant, en prenant cette option, il est possible que le comportement de l’autre élève s’amplifie et dérange réellement le travail d’autres élèves dans sa périphérie et la situation n’est pas tolérable. Dans ce cas, nous faisons ce que nous avons à faire, nous intervenons. Mais nous nous assurons de réserver du temps ailleurs pour le premier élève au-delà du cours. 
Dans ces situations, il est nécessaire de réfléchir aux messages que nous envoyons à tous les élèves par nos actions :
  • En intervenant, les élèves peuvent comprendre que se comporter mal est le meilleur moyen d’attirer notre attention sur eux.
  • En n’intervenant pas, les élèves peuvent très bien se dire qu’ils peuvent abandonner les tâches demandées tout simplement parce qu’ils ne veulent pas se donner la peine de le faire. 
Nous pouvons choisir d’ignorer tactiquement le comportement perturbateur, seulement s’il ne cause pas trop de perturbations et si nous estimons que l’élève soutenu en bénéficiera plus que la perte globale. Dans ce cas, nous nous dirigeons vers l’élève concerné à la fin du cours. Nous lui demandons de rester tandis que les autres partent, ou nous lui demandons de sortir avec nous à la fin du cours pour lui parler dans le couloir.

Nous pouvons également avoir institué une forme d’appel différent où nous signifions à distance à l’élève concerné que nous voudrons le voir à la fin du cours tout en restant près de l’élève que nous soutenons. Cette forme d’action doit avoir été expliquée auparavant sous forme de routine. L’élève perturbateur doit savoir que s’il ne veut pas de sanctions, il doit dès lors bien se comporter jusqu’à la fin du cours. La situation sera évaluée lors d’un entretien individuel en fin de cours. 

Dans tous les cas de figure, il importe de rester en pleine maîtrise de nous-mêmes. Il nous faut éviter nos propres débordements émotionnels. Cela peut sembler être la bonne chose à faire, le fait de s’énerver peut avoir un certain impact à court terme, agir selon un effet de surprise, mais ce n’est presque jamais la bonne chose à faire. Des effets négatifs sont probables à moyen et long terme. De plus, c’est également ce que veulent certains élèves que nous devenions une source de spectacle. Voir l’enseignant perdre ses moyens, s’emporter ou s’effondrer, c’est surprenant et ça devient un sujet de conversation ultérieur entre eux. Au-delà de cela, nous pouvons légitimer le fait que les élèves eux-mêmes laissent libre cours à leurs émotions en classe, en cas de tension avec l’enseignant.

Plutôt que de nous laisser emporter par le moment présent, nous pouvons décider ce que nous voulons vraiment : suivre calmement les procédures prévues.



Le cas d’une perturbation majeure lors du modelage ou de la pratique guidée


Imaginons que l’enseignant est face à la classe complète lors d’un modelage ou d’une pratique guidée. Il peut avoir été amené à gérer des perturbations mineures selon un continuum d’interventions.

Soudainement, dans le cadre du suivi d’une intervention au sujet d’une perturbation mineure ou indépendamment, un élève s’emporte. Il dit d’une voix suffisamment forte pour que de nombreux élèves et l’enseignant l’entendent, il se fout de ce cours ou énonce quelque chose d’équivalent.

L’enseignant l’interpelle pour lui signifier une sanction ou une exclusion de classe. Au lieu d’obtempérer, il entame une conversation bruyante et animée sur le fait que tout le monde est toujours contre lui dans cette école. Il en a ras le bol, il ne comprend rien à ce cours, qui est mal expliqué ou énonce d’autres éléments équivalents.

Le principal danger à ce moment-là est de se retrouver piégé dans le cadre d’une conversation avec l’élève sur ces thématiques. Pendant ce temps, le cours est suspendu et tous les élèves observent avec curiosité, ennui ou amusement la scène qui se déroule devant leurs yeux. L’apprentissage s’arrête pour tout le monde.

Dans ce cas, il faut s’en tenir au plan. Si la décision n’avait pas encore été prise d’exclure l’élève en fonction de la politique de l’école, elle devrait maintenant être clairement franchie. Nous ignorons ce que dit l’élève et nous lui demandons de quitter la classe et de se rendre au lieu approprié. Si la procédure le veut, nous prévenons le membre du personnel chargé de ce cas de figure pour lui demander de venir chercher l’élève en question.

L’élève provoque de manière stratégique. C’est une diversion, nous ne devons pas tomber dans le piège, mais simplement lui demander calmement et de manière claire, précise et spécifique de quitter la classe et de se rendre au lieu prévu pour les exclusions. S’il tarde à réagir ou refuse de partir, nous lui faisons savoir ce qui se passera. Ce n’est pas une négociation. Nous informons l’élève et nous restons sur nos positions.

L’élève doit être exclu de classe, son comportement l’a justifié. Nous ne devons pas reculer. Nous ne changeons pas notre décision, même si l’élève se fond en excuses et parait regretter sincèrement ses actions.

Il est important que les élèves comprennent que s’ils enfreignent les règles et se confrontent à un enseignant, ils devront quitter la classe. Avec cette rigueur et cette transparence, nous les encourageons à ne pas recommencer. Si nous acceptons leurs excuses et leur permettons de rester en classe, nous les invitons à réitérer ce comportement, avec nous ou avec un collègue. Nous encourageons les autres à faire de même lorsqu’ils en ont envie. 

Ce n’est pas différent du parent qui commence par dire « non » à un enfant qui demande un bonbon à l’heure du coucher. Cependant, après dix minutes de cris et de hurlements, il cède et se dit qu’il a vraiment bien fait de résister pendant dix minutes. L’idée est que l’enfant sait maintenant qu’en hurlant suffisamment, il peut faire changer d’avis. La bataille a été perdue, pas gagnée. 

En reculant, nous activons les mécanismes de coercition qui se retourneront contre nous de toute façon à un moment ou un autre.



Une cohérence compassionnelle


En gestion de classe, nous devons démontrer notre compassion de manière cohérente. Celle-ci implique d’être rigoureux :
  • De ne pas reculer et de rester sur nos positions face à l’application des règles liées à la gestion de classe
  • De penser ce que nous disons et de toujours faire ce que nous avons dit que nous ferions.
  • De toujours assurer un suivi sans faille de nos décisions.
Une telle description pourrait évoquer pour certains des niveaux disproportionnés de punition et d’autoritarisme. Mais cette démarche est simplement synonyme de justice et de cohérence. Il s’agit d’être fiable et régulier. Cette démarche est ce qui peut rendre la gestion du comportement efficace à l’échelle d’une école.

Donner une sanction dans cette perspective, c’est faire preuve de compassion. Elle permet à l’élève de sortir de l’infraction et d’améliorer son comportement. Nos réponses aux perturbations sont stratégiques, fondées et bénéfiques. Elles ne sont pas des actes de pression, de coercition, de rétribution et de menace.


Mis à jour le 13/09/2024

Bibliographie


Tom Bennett, The Running the Room companion, John Catt, 2021

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