mardi 11 juin 2024

Poser les bases de la gestion de classe en début d’année scolaire

Si le début de chaque cours importe, le début de l’année scolaire, à travers la toute première leçon est particulièrement important.

(Photographie : Harry Callahan)




Il est important de se concentrer sur la dimension de la gestion de la classe au moment où s’établir la relation avec les élèves. La démarche est un ingrédient essentiel d’une classe bien gérée pour le reste de l’année scolaire.



Les premières minutes de l’entrée en classe en début d’année scolaire


À moins que nous débutions dans une école, avant que nous ne les rencontrions pour la première fois, il est très possible que nos nouveaux élèves aient déjà entendu parler de nous. 

Si nous sommes membres du personnel et évoluons dans les mêmes bâtiments, notre réputation nous précédera. Si les élèves étaient déjà à l’école, ils nous auront vus dans les couloirs ou à d’autres occasions. Leurs camarades, nos anciens élèves, leur auront parlé de vous. Cela peut jouer en notre faveur comme en notre défaveur, mais nous serons perçus comme appartenant à l’école.

Les élèves ont l’habitude de voir des enseignants. Ils se définissent ce qu’ils s’attendent de leurs enseignants, avant même que nous ne commencions à interagir avec eux. Nous sommes précédés par notre image. Cependant, les premières impressions que nous leur donnerons seront importantes et peuvent influencer ces idées préconçues. De toute manière, les élèves se créeront une image à notre sujet qui constituera une ancre durable.

Pour l’enseignant, un message est primordial à faire passer dès les premières minutes. Les élèves doivent percevoir, très rapidement, que la classe fonctionnera selon les règles de l’enseignant et non selon les leurs. 

À peine entrés en classe, les élèves commencent à porter des jugements sur nous, sur notre manière d’être et sur la façon dont nous nous comporterons avec eux. Tout ce qu’ils avanceront sera hypothétique. 

À ce stade, c’est à nous d’avancer stratégiquement pour faire une bonne impression. L’impression que nous établirons à ce moment-là sera la base de la perception qu’ils auront de nous, de la crédibilité et de la sincérité de nos instructions ultérieures.



Préparer le terrain avant l’arrivée des élèves en classe en début d’année scolaire


Il est utile de préparer le terrain avant l’arrivée des élèves en classe en début d’année scolaire. Si nous avons notre classe attitrée, le processus sera beaucoup plus facile. Si nous sommes mobiles et passons de classe en classe, comme c’est souvent le cas en début de carrière, nous devrons redoubler d’efforts à ce stade. 

Dans tous les cas, si nous le pouvons, il est toujours utile d’arriver systématiquement au moins cinq minutes plus tôt que les élèves en classe : 
  • La première chose à faire avant l’arrivée des élèves lorsque nous sommes seuls en classe est de vérifier son organisation et son état de propreté : 
    • Est-elle bien rangée et propre ? L’enseignant précédent a-t-il laissé la classe en bon état ? Si ce n’est pas le cas, et qu’il le fait régulièrement, il peut être utile d’en parler avec lui. Il s’agit d’une forme de courtoisie professionnelle à laquelle nous devrions pouvoir nous attendre. De plus, nous devons pouvoir la rendre à votre tour. 
    • Si elle n’est pas en état, il faut la ranger et la rendre plus propre.
  • Nous devons préparer tout le matériel et les supports dont nous avons besoin dans la classe.
  • Nous devons nous assurer d’avoir un bureau bien rangé et de cacher nos objets personnels. Notre propreté fixe la barre pour la classe. Si nous sommes désordonnés, comment pouvons-nous leur demander d’être ordonnés ?
  • Nous devons fixer à propos de nous-mêmes la norme à laquelle nous voulons que nos élèves aspirent tout en marquant la différence au point de vue de l’habillement et de la posture. Les élèves ont besoin que nous soyons un adulte et un professionnel.
  • Si nous le pouvons, nous devons réfléchir à la disposition des tables dans la classe de manière à faciliter l’apprentissage et à influencer positivement le comportement. La solution par défaut la plus simple et la plus utile est probablement un plan en rangées de deux élèves, et en colonnes, qui peut ensuite être adapté.
  • Nous réalisons un plan de classe en examinant toutes les données que nous pouvons récolter sur les élèves et sur leurs particularités auprès d’enseignants des années antérieures. En général, les élèves qui ont le plus besoin de soutien doivent être à proximité de l’enseignant.
  • Nous concevons des plans de cours précis et structurés. Nous adoptons des pratiques d’enseignement efficace. Les enseignants ont parfois l’impression de pouvoir improviser, ou ils ont observé d’autres personnes le faire et pensent qu’ils peuvent les imiter. En réalité, il faut beaucoup de pratique et de connaissances pour qu’une leçon qui semble improvisée fonctionne. De plus, les choix pédagogiques peuvent avoir un impact considérable sur le comportement même s’ils n’en sont jamais la cause première. Une leçon bien conçue et bien planifiée favorise le comportement. Les déficits dans ce domaine rendent le mauvais comportement plus probable. 



Se préparer avant l’arrivée des élèves en classe en début d’année scolaire


La scénarisation de notre propre comportement est essentielle avant notre première rencontre avec nos élèves. Nous devons avoir pleinement déterminé : 
  • Nos attentes en matière de comportement et de normes 
  • L’enseignement explicite des comportements attendus et routines.
  • Les conséquences appliquées en cas d’infractions aux attentes.
Ces aspects sont un cadre de fonctionnement indispensable pour un enseignant. Si nous maîtrisons cet aspect de notre rôle, tout le reste sera plus facile. Si nous nous trompons, tout le reste sera bien plus difficile. Il est très important pour un enseignant face à une nouvelle classe de faire cet investissement.

Il importe de réfléchir à ce que nous considérons être un comportement souhaitable. Nous devons prendre le temps d’y réfléchir. Nous devons nous demander ce que nous entendons par bonne conduite. Quels types de comportements attendons-nous ? Pourquoi les attendons-nous ? Que doivent faire les élèves pour s’épanouir dans nos classes ? 

Il s’agit alors d’examiner en détail les comportements spécifiques observables en classe qui découlent de ces réponses. Il est utile d’approfondir ces démarches tant qu’elles nous semblent nécessaires. Nous devons commencer à nous rendre compte qu’une grande partie de ce que nous attendons des élèves est assez difficile à obtenir si nous n’avons pas l’habitude de le faire. 

Nous réfléchissons à ce à quoi ressemblerait une bonne ou une mauvaise exécution de ces différents comportements. Nous nous demandons quels sont les comportements les plus importants, comment nous allons les communiquer et les justifier auprès des élèves.

Nous élaborons un enseignement explicite de ces comportements. Dès que nous commençons à considérer le comportement comme un programme d’études, nous commençons à comprendre comment améliorer le comportement. Nous voulons faire en sorte que les élèves se comportent, non pas en misant sur leur bonne volonté et sur la crainte de sanction, mais en considérant qu’il s’agit d’apprentissages. Tout cela se conçoit avant de les rencontrer.



Le danger ou l’opportunité de l’effet lune de miel lors de la rencontre avec une classe


Lors de la première rencontre, nous ne devons pas viser à atteindre la perfection. Les premières rencontres servent à définir et à poser le cadre sur lequel s’élaboreront les relations par la suite. 

Dans un premier temps, en classe, avec des élèves, nous bénéficirons de l’effet lune de miel. 
Les enseignants qui prennent en charge une nouvelle classe font souvent l’expérience d’un comportement raisonnablement bon pendant les premiers jours ou les premières heures et commencent à penser que tout va bien se passer. 

Il s’agit d’un réel piège pour l’enseignant. Les élèves ne sont pas certains des attentes du nouvel enseignant et peuvent eux-mêmes être en train de se situer dans le réseau social de la classe. Les élèves sont souvent prudents lorsqu’ils cherchent à savoir où se situent les limites d’un enseignant dans un premier temps. Cela peut donner un faux sentiment de conformité pour l’enseignant.

Le danger est que l’enseignant peut être encouragé à lever un peu le pied, à relâcher ses limites. Les élèves sont tous posés et bien élevés, peut-il penser. Il pense ne pas avoir besoin de définir ses attentes fermement et clairement. L’effet lune de miel ne dure qu’un temps. Rapidement, les élèves vont se mettre à tester les limites.

L’effet lune de miel peut également être une opportunité. Lorsque les élèves se montrent dociles et pacifiques, nous pouvons profiter de cet espace de calme pour poser les limites et définir les attentes dont ils ont besoin pour s’épanouir. Il s’agit dès lors de ne pas gâcher cette fenêtre de temps précieuse. Les lunes de miel sont plaisantes, mais croire que tout se passera bien est un excellent moyen de garantir que cela ne sera pas le cas. Nos illusions s’envoleront rapidement si nous ne faisons pas preuve de prudence.

Le temps de l’effet lune de miel est la bonne fenêtre pour remplir les objectifs suivants :
  • Se présenter et se montrer clair, confiant, précis et ambitieux.
  • Passer en revue toutes les règles de base de la classe avec les élèves. Il s’agit non seulement d’expliquer ce qu’elles sont, mais aussi d’expliquer pourquoi elles sont importantes.
  • Enseigner explicitement les attentes comportementales et les routines de classe.
  • Exprimer des attentes élevées et l’importance de l’engagement.
  • Présenter la classe comme un espace d’apprentissage.
  • Présenter la classe comme une communauté qui réussit et apprend ensemble.
Lors de leur enseignement et à sa suite, la compréhension des règles et routines doit être vérifiée. Cela peut prendre différentes formes en fonction du contexte : 
  • Questionner les élèves sur leur compréhension des attentes.
  • Demander aux élèves de démontrer leur mise en application.
  • Entamer une discussion de groupe sur les cas où les règles peuvent être difficiles à suivre, sur ce que nous pouvons faire pour les rendre plus faciles, etc. 
Après avoir vérifié la compréhension, l’enseignant peut demander aux élèves de mettre en pratique les habitudes et les routines attendues, et fournir une rétroaction aux élèves.

Toutes ces routines vont des attentes liées aux devoirs, jusqu’à la réception ou la distribution de feuilles. Elles concernent les retards, la façon de s’installer ou de s’asseoir en classe.  

Par exemple pour les devoir, cela consiste à expliquer :
  • Comment les faire.
  • Ce qu’ils impliquent.
  • Combien de temps doivent-ils normalement durer.
  • Ce qui est un devoir acceptable et ce qui ne l’est pas.
  • Ce qui se passe en cas de retard.
Nous devons leur apprendre comment nous indiquerons que nous voulons le silence et leur pleine attention. Nous devons leur apprendre le signe que nous donnerons pour l’obtenir. Nous devons le leur enseigner le temps nécessaire pour y parvenir.



Une forme de rétroaction spécifique préventive lors de l’établissement des règles et routines


Nous sommes dans une situation ou un enseignant en début d’année scolaire a expliqué clairement des règles et enseigné explicitement des attentes comportementales et des routines. Les élèves ont pu s’exercer. Nous passons alors à une forme de pratique autonome où l’enseignant vérifie et envoie en retour une rétroaction spécifique vers ses élèves.

Si lors du cours suivant, au moment où la routine ou la règle s’applique, si un élève risque de ne pas la respecter alors que les autres le font, il faut le mettre au défi.

Nous voulons que les élèves développent de bonnes habitudes. Pour cela, nous devons :
  • Directement leur demander de le faire.
  • Leur demander de reformuler ce qu’ils doivent faire pour vérifier leur compréhension.
  • Être vigilant durant le suivi des règles et des routines.
  • Les renforcer, leur réexpliquer ou corriger leurs erreurs éventuelles.
  • En cas d’erreur, leur demander de recommencer et de démontrer leur compréhension de la routine (par exemple pour poser une question, entrer ou sortir de classe comme attendu). 
Si nous voulons qu’ils comprennent les bases des routines et des règles, ils doivent les pratiquer et en démontrer une compréhension. Nous devons répéter le processus plusieurs fois si nécessaire.

Durant cette phase, l’idée n’est pas de sanctionner les élèves qui se trompent, mais de les aider à respecter les règles. S’ils ne comprennent pas l’attendu, il faut le leur expliquer. S’ils ont besoin d’aide, nous la leur fournissons. Toutefois, si la non-conformité persiste, il faut passer aux sanctions. En même temps, il faut mentionner constamment que nous avons des attentes élevées pour eux, que nous nous soucions de leur bien-être et de leur éducation, et que c’est pour cela que nous sommes si stricts.

Il importe de ne laisser aucun élève s’en tirer avec la non-conformité. Il faut une excuse à toute épreuve ou une sanction ou une autre forme de conséquence. Aucune exception n’est à tolérer. Nous devons leur apprendre que nous pensons ce que nous disons, dès le début.



Prendre le temps d’installer le cadre en début d’année scolaire


Nous devons consacrer à l’installation du cadre autant de temps que nécessaire. Dans le secondaire, cette étape devrait au moins constituer la majeure partie de la première leçon. Mais même après le premier jour de cours, il doit être développé dans les cours suivants.

Il s’agit d’un programme scolaire à part entière et il faut du temps pour l’assimiler, le mettre en pratique et l’intégrer. Certaines écoles peuvent consacrer une semaine entière à cette phase. Travailler sérieusement sur les fondations du cadre d’apprentissage en classe permet de construire un édifice plus stable.

Il est utile de consacrer une grande partie de notre première rencontre à l’explicitation des attentes en matière de comportement. Quels sont les comportements sociaux et ceux d’apprentissage attendus ? Quels liens avec les valeurs et missions de l’école qui nous rassemblent ? Quelles sont les raisons pour lesquelles nous nous comportons comme nous le faisons ? 

Nous concevons des activités de cours qui illustrent la manière dont elles devraient fonctionner. Nous renonçons temporairement au contenu du programme scolaire au profit de la clarté de l’enseignement et de la pratique comportementale.



Bibliographie


Tom Bennett, The Running the Room companion, John Catt, 2021

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