(Photographie : Christopher Soukup)
Lorsque les indices de récupération interfèrent avec l’effet test
Lorsque nous voulons vraiment que nos élèves répondent correctement à une question, il est facile de leur donner des indices pour les aider à trouver, voire à deviner la réponse.
Finalement, ils arrivent à donner une réponse approximativement exact. Eux comme nous pouvons avoir le sentiment d’une mission accomplie.
Mais, il y a un danger, en facilitant l’effort de récupération, on risque de le fausser. Donner trop d’indices est susceptible d’entraver plutôt que d’aider les élèves à renforcer leurs apprentissages. De fait, tous les indices de récupération ne sont pas égaux : certains sont plus utiles que d’autres, d’autres vont annihiler l’effet de test.
En effet, ils peuvent permettre aux élèves d’éviter de penser ou de comprendre tout en leur permettant de donner une réponse. Ils peuvent fournir un étayage excessif qui ne permet pas de rendre leurs connaissances flexibles et facilement mobilisables dans différents contextes.
De plus, lors des évaluations, ces indices supplémentaires ne seront pas présents. Donner trop d’indices de récupération peut ainsi créer des illusions de connaissance chez les élèves.
Les enjeux d’une pratique de récupération élaborée
Une bonne exploitation de la pratique de récupération comme stratégie cognitive d’apprentissage implique que les élèves en comprennent les enjeux.
Il devient plus facile d’aider les élèves à encoder de nouvelles connaissances à mesure qu’ils prennent conscience des avantages de la pratique de récupération.
Des quiz réguliers et espacés dans le temps contribuent à ancrer les idées clés dans la mémoire à long terme des élèves. Si la récupération factuelle est aisée, l’élaboration est plus ambitieuse. La mise en relation des nouvelles idées entre elles et avec les connaissances antérieures qui peut s’avérer plus difficile à réaliser.
Frederick Reif (1981) suggère qu’enseigner de nouveaux éléments de connaissance qui ne sont pas reliés entre eux et qui sont mal organisés est un non-sens. Cela revient en fait à augmenter la difficulté de trouver une information spécifique dans une botte de foin plus grande.
Imaginons que nous avons enseigné aux élèves le fonctionnement du système immunitaire en biologie. Si les élèves ont considéré chaque élément de ces processus de manière indépendante, ils risquent de tout mélanger lors d’une question qui demande de faire des liens.
L’objet d’une pratique de récupération élaborée revient à poser aux élèves régulièrement lors du modelage des questions de vérification de la compréhension qui les amènent à faire des liens entre les éléments. Ce faisant, nous aidons les élèves à organiser la botte de foin en un ensemble de connaissances bien structurées, fonctionnel et organisé, en un réseau interconnecté de connaissances. Stocker des connaissances est une chose, mais les retrouver au moment où l’on en a besoin et en faire bon usage est sans doute la partie la plus difficile.
Un élève peut mémoriser un grand nombre de connaissances, mais les écrira-t-il toujours en les associant correctement, en réponse à une question qui exige une explication élaborée ?
Pour aider les élèves à se souvenir des éléments pertinents au moment opportun, l’enseignant doit bien comprendre le principe des indices de récupération. Il est important de considérer l’utilisation des indices de récupération comme un moyen d’aider les élèves non seulement à encoder les connaissances, mais aussi à encoder les liens entre elles.
Par ce biais, nous pouvons aider nos élèves à retrouver plus facilement les bonnes idées au bon moment et à rendre leurs connaissances plus flexibles, plus disponibles et plus transférables.
L’importance du bon usage des indices de récupération
La récupération se fait en réponse à des indices présents dans la question.
Cette connexion est rendue possible parce que l’enseignant a fermement établi des liens entre tous les concepts connexes dans une matière. L’association des indices doit permettre aux élèves de cibler les réponses.
En fonction de la qualité des indices appris, les connaissances retrouvées sont plus ou moins restreintes et précises.
La démarche est utile et adaptative. Dans une situation qui exige une information précise, nous ne voulons pas que les élèves soient submergés par une myriade de pistes de réponse. Les indices doivent contribuer à réduire le nombre de réponses possibles à une seule.
La difficulté d’aider les élèves à organiser les informations est liée à la qualité et aux types de questions que nous pouvons leur poser pour les aider à assimiler de nouvelles idées.
Si nous donnons trop d’indices aux élèves, il y a de fortes chances qu’ils donnent une réponse correcte. Le danger apparait lorsque les élèves commencent à se fier à des indices qui ne les aident pas à comprendre, mais les amène à deviner quelle est la réponse attendue en se fiant à des détails superficiels.
Les indices doivent être liés aux idées principales et centrales, aux concepts qui doivent être mobilisés pour guider la réflexion. Par conséquent, plus nos questions seront liées à ces indices fonctionnels, plutôt qu’à des indices artificiels, plus nous les aiderons à retrouver ces informations de manière significative.
Lorsqu’un ou plusieurs élèves bloquent sur la réponse à apporter à une question, les indices doivent les guider vers ces concepts centraux. Ce type d’indices se révèlera beaucoup plus utile aux élèves, même s’ils n’obtiennent pas la bonne réponse au départ, parce qu’ils les amèneront à réfléchir à des idées connexes et significatives. Le fait de dire par quelle lettre commence le terme recherché ou que le sujet a été abordé lors du dernier cours ou dans une vidéo projetée en classe est une erreur. Cela ne les incite pas à réfléchir au sens de la question.
Il est tentant, lorsque nous voulons vraiment que vos élèves donnent la bonne réponse, de continuer à ajouter des indices. Cela doit être fait de manière à ce qu’ils réfléchissent au contenu lui-même plutôt qu’à des indices artificiels qui leur permettent de deviner la réponse. Dans le cas contraire, ils extraient des informations sans contexte et se comportent comme des exécutants, au lieu de démontrer qu’ils ont compris. Ils (se) donnent l’illusion de comprendre, ce qui les empêche d’établir des liens utiles entre les différents éléments d’information.
Cette idée est également essentielle pour établir des liens entre les différents thèmes de notre matière. Plus nous nous concentrons explicitement sur l’établissement de liens dans et entre les matières, plus nous multiplions le nombre d’indices de récupération qui mènent à un fait particulier. Grâce à cela, nos élèves auront de chances de se souvenir avec succès d’une connaissance particulière en réponse à une question particulière. Plus l’information est organisée, plus l’idée correcte est susceptible d’être rappelée.
En résumé, il s’agit d’aider les élèves à établir des liens entre différents faits en utilisant des indices liés au contenu, plutôt que des indices qui incitent à deviner la réponse. Nous devons enseigner explicitement les liens entre différents faits et idées. Nous voulons que le réseau de connaissances connexes se développe pour mieux ancrer les connaissances et augmenter les chances de réussite de la récupération en réponse aux indices qu’ils pourraient rencontrer lors d’un examen. De même, nous devons poser des questions sur les liens entre connaissances proches ou éloignées.
Mis à jour le 21/07/2024
Bibliographie
Pritesh Raichura, Retrieval Cues: Do Your Questions Help or Hinder?, 2018, https://bunsenblue.wordpress.com/2018/03/19/retrieval-cues-do-your-questions-help-or-hinder/
Frederick Reif; Teaching problem solving‐A scientific approach. Phys. Teach. 1 May, 1981 ; 19 (5) : 310 – 316. https://doi.org/10.1119/1.2340790
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