Comme l’ont montré Vansteenkiste et ses collaborateurs (2012) dans le cadre de recherches sur les conditions propices au développement de l’autonomie, les élèves bénéficient d’instructions claires de leur enseignant lorsqu’il présente les tâches et les règles.
(photographie : phlegmaphoto)
Un cadre clair et précis permet aux élèves de se sentir capables de répondre aux attentes. De plus, ce cadre se doit d’être responsabilisant plutôt que contrôlant. Dès lors, le comportement de l’élève devient un choix. Pour l’enseignant, il s’agit de fournir des justifications significatives pour les attentes qu’il exprime et reconnaitre que cela demande des efforts pour les élèves.
Comment concilier ces conclusions avec un cadre exigeant et cohérent en gestion de classe ? Une réflexion au départ d’un article de Pritesh Raichura (2018).
L’autonomie à long terme est le fruit d’une autodiscipline à court terme
Pour atteindre un objectif à long terme, il faut fournir des efforts. Il s’agit de s’engager dans une pratique délibérée et d’accepter pour cela de faire des sacrifices à court terme. Parfois, cela peut signifier s’engager dans des activités ou des tâches que nous n’apprécions pas.
Cependant, un sacrifice à court terme peut être récompensé par une maitrise et une aisance à long terme dans le domaine où les efforts sont consentis.
Dans un contexte scolaire, le devoir de l’enseignant, dans le sens de ses missions, est de prendre constamment des décisions sur ce que les élèves feront à un moment donné. L’objectif est de faire en sorte que les élèves acquièrent des connaissances et de compétences utiles, telles que précisées dans le programme scolaire.
Plus on possède de connaissances et de compétences dans un domaine, mieux on peut réfléchir et agir dans ce domaine. Mieux on peut y donner du sens, et plus on a de chances d’être heureux et de s’y épanouir. Ce sont des efforts répétés et cohérents qui permettent ces bénéfices à long terme.
L’importance de la cohérence dans les attentes en classe
La classe est un lieu où le fait de fournir des efforts correspond à une norme que nous voulons renforcer. Par conséquent, il importe d’être cohérent dans son obtention.
Nous pouvons imaginer une situation en classe où vers la fin d’une heure de cours, certains élèves ont terminé le travail attribué lors d’une pratique autonome tandis que d’autres sont encore occupés. Ils commencent à échanger à voix basse en chuchotant sur divers sujets.
Il peut être tentant de tolérer ce comportement en guise de reconnaissance du travail fait, mais cela entraine différents problèmes :
- Nous tolérons des bavardages qui constituent un comportement jugé normalement perturbateur en gestion de classe habituelle.
- Ces bavardages seront source de distraction pour les élèves qui rencontrent des difficultés. De plus, ces élèves ne seront jamais dans les conditions où ils peuvent bénéficier de telles récompenses. Ils risquent dès lors de baisser les bras plus vite.
En toute logique, c’est un comportement que nous ne pouvons tolérer chez les élèves concernés même si ce sont ceux qui réussissent le mieux en général. Dès lors, nous devons intervenir comme pour n’importe quel élève qui se mettrait à bavarder lors de la pratique autonome en classe.
Nous devons partir du principe que le temps de cours est une ressource précieuse et limitée. Chaque seconde compte et doit être utilisée pour réfléchir et maitriser le contenu de la matière. Si les élèves prennent l’habitude de se laisser distraire, ils perdent du temps. Si les enseignants autorisent la perte de temps, celle-ci commencera à s’infiltrer dans d’autres domaines de leur prise de décision. En fin de compte, les élèves seront dans l’incapacité de progresser autant qu’ils le pourraient dans notre matière. Or, nos normes et nos attentes doivent être élevées et cohérentes si nous voulons permettre à tous nos élèves de réussir.
Il peut sembler difficile ou excessif d’empêcher les élèves d’avoir quelques échanges alors qu’ils ont terminé la tâche qui leur a été confiée en respectant les consignes à la lettre. En réalité, c’est une question de norme à faire valoir, qui doit avoir été justifiée préalablement. C’est une manière d’exprimer et de mettre en œuvre des attentes élevées et de relever le niveau d’exigence. Cela peut permettre à tous les élèves de progresser dans un cours, car ils s’engageront tous pleinement du début à la fin. Pour des élèves en difficulté, voir d’autres élèves avoir terminé et bavarder est à la fois source de distraction et découragement. Les voir continuer à travailler permet de mieux soutenir leurs efforts.
En agissant de cette manière, nous pouvons façonner les habitudes des élèves par un enseignement bienveillant. Nous les soutenons dans le développement d’une autodiscipline nécessaire pour continuer à travailler jusqu’à la fin du cours. Avec ce type d’aptitude, ils obtiendront plus de résultats, connaîtront plus de succès et seront plus épanouis scolairement. De cette manière, nous pouvons mieux nous assurer que les heures de cours seront optimisées à 100 %.
La discipline à court terme permet des libertés à long terme. Faites de bons choix à court terme et les maintenir dans le temps permet un large bénéfice à long terme.
Les élèves doivent assumer la responsabilité personnelle de leurs choix
L’école définit un cadre de normes et d’attentes pour les élèves. Dans le cadre d’un enseignement explicite du comportement, les attentes sont complètement partagées et nous sommes assurés de la compréhension et de la connaissance des élèves à leur sujet. Dès lors, nous pouvons partir du principe que tout comportement est un choix et dès lors engage la responsabilité personnelle de l’élève.
Le niveau d’attente est un choix d’école. Il peut être envisageable que des élèves se voient infliger une sanction parce qu’ils n’ont pas apporté leur matériel scolaire ou lorsqu’ils arrivent en retard à l’école sans justification valable.
Les élèves ont la responsabilité d’être préparés pour l’école, car leur avenir en dépend. La retenue peut par exemple servir de conséquence pour rappeler aux élèves qu’ils doivent prendre leurs responsabilités. Cela peut s’appliquer au fait de ne pas faire ses devoirs correctement, de ne pas faire d’efforts suffisants en cours, de bavarder en classe, etc. Tout est une question de choix et de priorités à l’échelle de l’école.
Cela ne signifie pas pour autant que la moindre erreur, le moindre oubli doit se transformer en sanction, mais sa répétition systématique le justifie. En tolérant des manquements, nous n’aidons pas les élèves à s’organiser ou à assumer la responsabilité de leurs choix et de leur préparation.
L’enjeu est que les élèves soient dans les meilleures conditions pour apprendre. Par exemple, nous pouvons nous assurer qu’ils peuvent suivre un cours malgré un oubli, en leur prêtant du matériel. De même, parallèlement, nous les aidons à être organisés en leur attribuant une sanction, par exemple une retenue pour leur apprendre à mieux se préparer. De cette manière, ils peuvent profiter de l’enseignement et bénéficient d’une incitation supplémentaire pour éviter d’oublier à nouveau.
Il est nécessaire d’expliquer constamment aux élèves que leurs comportements et leurs réponses aux situations sont des choix qui leur appartiennent. S’ils réagissent avec colère à un enseignant qui leur a fait une remarque ou donné une sanction, c’est leur choix. Ils choisissent de perdre le contrôle de soi et en acceptent les conséquences.
Les élèves doivent prendre leurs responsabilités et faire preuve de maitrise de soi dans de telles situations et faire le meilleur choix en réagissant calmement. Nous devons leur faire comprendre ce message. Lorsque les attentes ne sont pas respectées, il est normal d’en assumer les conséquences.
L’adoption de cette logique de responsabilisation des élèves vise chaque fois à atteindre trois avantages :
- Dans la gestion de la perturbation, l’enseignant doit pouvoir poursuivre son cours sans perturber l’apprentissage du reste de la classe.
- L’élève doit pouvoir autant que possible continuer à apprendre pendant ce cours et par conséquent adopter le comportement attendu.
- Les élèves doivent apprendre à faire face à des circonstances difficiles et à agir avec stoïcisme.
Développer cette capacité chez les élèves leur donne un état d’esprit qui leur permet de réussir et de mieux faire face à diverses circonstances de la vie qu’ils ne peuvent pas contrôler. Nous voulons que les élèves réalisent qu’ils peuvent contrôler leurs réactions et leurs efforts, ce qui les fera passer du statut de fournisseurs de justifications et d’excuses potentielles à celui d’acteurs maitres de leur propre destin.
Les élèves ont besoin d’une approche cohérente — en particulier ceux pour qui la « maison » manque de limites appropriées, de défis stimulants et d’une cohérence infaillible.
Mis à jour le 09/07/2024
Bibliographie
Pritesh Raichura , The influence of Michaela, 2018 https://bunsenblue.wordpress.com/2018/02/26/the-influence-of-michaela/
Vansteenkiste, M., Sierens, E., Goossens, L., Soenens, B., Dochy, F., Mouratidis, A., Aelterman, N., Haerens, L., & Beyers, W. (2012). Identifying configurations of perceived teacher autonomy support and structure: Associations with self-regulated learning, motivation and problem behavior. Learning and Instruction, 22(6), 431–439. https://doi.org/10.1016/j.learninstruc.2012.04.002
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