dimanche 21 avril 2024

Mettre en œuvre le coaching pédagogique en école à l’échelle des équipes

Lorsque les écoles s’inscrivent dans une politique d’amélioration ou recherchent une cohérence d’ensemble et une cohésion dans l’équipe éducative se pose la question de la définition puis de la diffusion de pratiques communes. 


(Photographie : forgottenflickr)



Le coaching pédagogique (ou accompagnement pédagogique) parait à ce titre être une piste prometteuse pour la diffusion de pratiques communes. Il repose sur l’idée que des enseignants sont conseillés pour certains domaines de compétences donnés, pour lesquels ils présentent des faiblesses, par des collègues plus expérimentés et formés eux-mêmes à cette démarche.



L’accompagnement pédagogique, un processus inscrit dans un cadre


L’accompagnement ou coaching pédagogique nécessite une série d’interactions soutenues dans le temps si l’on veut qu’il puisse permettre à un enseignant d’enseigner plus efficacement.

Un cadre déficient ou trop de précipitation peuvent annihiler l’impact et les bonnes intentions de départ. 

À partir du moment où nous voulons que l’accompagnement fonctionne, les coachs et les enseignants accompagnés ont besoin de temps dédié. Les interactions doivent être raisonnablement fréquentes. Les enseignants et les accompagnateurs concernés doivent considérer le coaching comme un processus et non comme un événement ponctuel ou un passage obligé. 

Il est possible d’organiser des séances de coaching ponctuelles, thématiques ou isolées les unes des autres. Cependant, il est peu probable qu’elles aient un impact notable si l’enseignant concerné n’est pas engagé dans un cycle plus large de réflexion itérative et de retour d’information. 

Si nous voulons que l’accompagnement fasse partie du processus d’amélioration dans une école, il est nécessaire de lui accorder le temps nécessaire. Il doit être structuré de telle manière qu’il puisse résister aux urgences récurrentes ou aléatoires qui bouleversent régulièrement la vie quotidienne de l’école.



Penser l’accompagnement collectif comme collectif plutôt qu’individualisé


Si nous pensons au terme coaching, assez spontanément vient l’idée d’une échelle individuelle entre un coach et la personne qui bénéficie d’un accompagnement. Cependant, comme dans tout cadre d’enseignement et d’éducation, si le tutorat fonctionne bien, il est également extrêmement coûteux en matière de ressources.

Par conséquent, l’idée est plutôt de le considérer dans le cadre d’un système de soutien à différents niveaux (MTSS, ou réponse à l’intervention). L’accompagnement pédagogique est un processus qui peut être mis en œuvre avec succès dans des groupes de différentes tailles. Il ne doit pas être individuel. 

Des processus d’équipe bien établis peuvent se traduire en processus de coaching assez simplement et ces démarches ont plus de chances de générer un résultat que l’idée de partir dans un accompagnement individuel. Un processus d’équipe ou par petits groupes aide à intégrer la réflexion sur des contenus plus large et exploite le pouvoir de l’effort collectif et d’un plus grand nombre d’interactions.

De plus, un bon processus d’équipe a un fort aspect motivationnel, d’adhésion et d’appartenance. On joue sur la vicariance et sur les liens sociaux. Les difficultés et la vision sont communes, les pistes gagnent à se construire ensemble en cohérence avec un projet d’école, sa culture et ses valeurs.

L’accompagnement individuel n’a lieu que lorsqu’il est nécessaire et ne peut se faire en collectif. Sur un projet et sur les aspects de sa mise en œuvre, il est important que les enseignants n’aient pas l’impression de travailler de manière isolée. La dimension collective et celle de la culture de l’école doivent prendre le dessus sur la dimension individuelle.



Des difficultés liées à la mise en œuvre de l’accompagnement pédagogique


Différentes difficultés apparaissent lors de la mise en œuvre d’un accompagnement pédagogique en école :

Il est nécessaire d’avoir des personnes compétentes et disponibles pour assurer l’accompagnement pédagogique qui disposent de la confiance de l’équipe, ou d’en former pour compléter l’équipe. 

Il y a une période où cela peut sembler un peu bancal. Tout le monde tâtonne, se familiarise avec le processus. Il faut un temps avant que les bénéfices puissent se rencontrer. Cela demande du temps et de la persévérance.

Il faut trouver une manière de trouver le temps pour le coaching. Il n’est pas toujours facile de trouver une structure de temps durable qui permet à l’accompagnateur et aux enseignants accompagnés de maintenir les boucles de planification, d’observation et de révision sur lesquelles repose le coaching. C’est particulièrement le cas lorsque l’on souhaite que tous les enseignants soient impliqués, et pas seulement un groupe sélectionné. 

L’accompagnement ne paie réellement qu’à long terme, lorsque les relations se construisent et que le processus aboutit à une phase de changement d’habitude. Certains processus d’accompagnement peuvent impliquer des interactions si éloignées dans le temps les unes des autres qu’il ne s’agit pas vraiment d’un processus, mais simplement d’une série de sessions ponctuelles de retour d’information.

Le coaching doit venir s’intégrer à d’autres projets ou d’autres dispositifs qui incluent eux-mêmes un développement professionnel et qui pourraient créer une forme de concurrence. L’accompagnement peut entraver ou être entravé par le fonctionnement d’autres systèmes déjà en place en concurrence pour la disponibilité des enseignants.



La structure des réunions d’équipe


Une structure commune à la plupart des environnements scolaires est celle des réunions d’équipe programmées. Elles peuvent avoir lieu toutes les semaines, toutes les deux semaines, trois ou quatre semaines.

Elles ont un rythme, elles ont une thématique, une raison d’être. Elles ont un temps réservé où toutes les personnes concernées sont attendues à se rassembler. 

Les réunions impliquent des personnes autour de questions intrinsèquement communes. Le contexte et les enjeux sont proches. Il y a une forte compréhension mutuelle des défis, mélangeant les spécificités du programme, le profil des élèves et les outils pédagogiques. Il y a un esprit de collaboration et une énergie naturelle qu’il s’agit d’exploiter autour d’un ensemble d’objectifs qui rassemblent.

Pour l’intégration d’un accompagnement pédagogique, il y a un intérêt réel pour des raisons de cohérence, de disponibilité et d’existence d’habitudes de collaboration à exploiter ces structures existantes. Il est bien moins aisé de se tourner directement vers un système plus large ou spécifique. Ce dernier peut éventuellement être envisagé dans un second temps quand les compétences sont disponibles. 



Inclure une dimension de développement professionnel dans le cadre de réunions d’équipe 


Lors d’une réunion d’équipe, dans un premier temps, l’objectif d’amélioration est discuté :
  • Des connaissances sont présentées par le biais de modèles et de pratiques fondées sur des données probantes.
  • Un objectif d’action à mettre en œuvre est établi.
  • Le sentiment d’un objectif commun décidé collectivement crée une motivation et développe l’adhésion
  • Un processus générateur de retour d’information est convenu.
L’échéance de la réunion suivante crée un impératif pour s’engager dans les activités convenues et générer le retour d’informations. Chacun sait quand aura lieu la prochaine réunion. Il dispose d’un calendrier, d’un plan, d’un objectif.

Pour cela, différentes options sont possibles afin d’informer la réunion suivante : 
  • Des observations peuvent être planifiées
  • Des observations spontanées par les pairs peuvent être organisées
  • Des auto-observations par enregistrement vidéo ou audio peuvent être envisagées
  • Des listes de contrôle peuvent être proposées.
La réunion de suivi permet aux responsables et aux enseignants de délivrer un retour d’information, de réfléchir aux mesures spécifiques qu’ils ont prises et de planifier la prochaine itération. 

Les réunions d’équipe permettent une approche collective du développement des techniques d’enseignement. Les participants peuvent s’inspirer les uns des autres. Ils peuvent s’engager dans diverses formes de développement et d’adaptation de ressources. 

Le processus tourne en boucle, ce qui permet d’ancrer la pratique. Entre chaque réunion, le responsable de l’équipe ou un coach pédagogique peuvent voir la pratique en action et en rendre compte lors de la réunion. Cela permet d’aligner l’agenda de l’équipe et celui de chaque enseignant.



Utiliser des mécanismes d’accompagnement pédagogiques au sein des réunions d’équipe


L’utilisation d’un cadre de fonctionnement est essentielle au succès de ces réunions dans le cadre de l’intégration de démarches de coaching pédagogique. 

Certaines techniques du cadre de coaching pédagogique individuel peuvent être transposées et adaptées au cadre d’une équipe. C’est le fait de donner une rétroaction spécifique positive, de songer, d’identifier un problème et une action concrète, de pratiquer délibérément et de planifier la mise en œuvre. 

L’équipe semble le niveau idéal pour mettre cela à l’œuvre dans le cadre d’un système de soutien à différents niveaux (MTSS). En effet, au-delà même des ressources, certains de ces éléments peuvent être difficiles à mettre en œuvre en tête-à-tête, surtout au début. 

Dans un contexte d’équipe, tout le monde agit selon les mêmes objectifs. La rétroaction positive spécifique et les conseils précis peuvent s’appuyer dans le cadre d’observation d’un coach en classe, ainsi que sur l’auto-évaluation individuelle de chaque enseignant et sur les observations de ses pairs. 

Les enjeux et les difficultés rencontrées sont partagés collectivement et chaque personne peut définir ses propres mesures et présenter ses démarches contextuelles. Une pratique collective est beaucoup plus facile à mettre en œuvre qu’une pratique individuelle. La planification est une entreprise commune. Tout le monde s’y met et compte sur l’implication et la collaboration des autres. Les participants peuvent convenir d’un format sous forme de rapport pour consigner les mesures à prendre.

Les contenus développés prennent la forme de pratiques en classe ou de ressources partagées. Il existe une compréhension commune alimentée par l’utilisation des techniques codifiées, qui se traduit par des avancées complémentaires qui permettent à chacun de bénéficier de conseils pour avancer plus vite. 

L’approche d’équipe permet de créer une compréhension publiquement partagée du système de coaching lui-même. Elle implique que les responsables de la dimension d’accompagnement utilisent le langage de manière explicite :
  • Qu’est-ce qui fonctionne vraiment bien et pourquoi ?
  • Où voyons-nous des difficultés ? 
  • Quelles techniques peuvent être affinées et améliorées ?
  • Quels sont les profils d’élèves qui ne répondent pas autant qu’espérés aux interventions ?
  • Quels sont les principaux problèmes à régler, les ajustements à apporter ou les mesures à prendre ?
Dans le cadre d’une approche MTSS, une part de coaching individuel reste nécessaire. Un bon accompagnant peut se rapprocher des besoins individuels d’un enseignant qui ne sont pas rencontrés par le reste du groupe. Cependant, dans de nombreux contextes, c’est difficile à mettre en œuvre, car c’est exigeant en ressources. La démarche devrait être réservée lorsque le niveau de l’équipe n’est pas suffisant.



Bibliographie


Tom Sherrington, 10 Lessons learned about instructional coaching within a CPD programme, 2023,https://teacherhead.com/2023/05/14/10-lessons-learned-about-instructional-coaching-within-a-cpd-programme/

Tom Sherrington, Team Meetings as Team Coaching. A pragmatic, effective solution for sustained CPD., 2022, https://teacherhead.com/2022/03/12/team-meetings-as-team-coaching-a-pragmatic-effective-solution-for-sustained-cpd/

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