mardi 26 mars 2024

Agir sur l’auto-efficacité des élèves

Nous pouvons améliorer les résultats des élèves dans une certaine mesure en agissant sur 

(Photographie : flippantsmeagol)




L’auto-efficacité


Dans le cadre de la théorie sociale cognitive, les processus internes tels que les croyances, les attentes et les sentiments jouent un rôle de médiateur entre les forces externes et les comportements manifestes. 

L’auto-efficacité (ou sentiment d’efficacité personnelle) est un facteur interne important qui a fait l’objet d’une grande attention empirique (Bandura, 1977, 1997). 

L’auto-efficacité fait référence à un ensemble de croyances concernant la compétence d’une personne à formuler et à mettre en œuvre un plan d’action particulier. L’auto-efficacité est spécifique à une tâche et n’est pas conceptualisée comme une caractéristique globale de la personnalité. 

Par exemple, une personne peut avoir une grande efficacité personnelle pour résoudre des problèmes de mathématiques, mais une faible efficacité personnelle pour faire des discours en public (Pajares, 1996). 



L’impact de l’auto-efficacité


Les croyances en l’auto-efficacité peuvent influencer les individus de plusieurs manières importantes :
  • Elles peuvent influencer les choix d’orientation et de filières. Les individus tendent à préférer les environnements dans lesquels ils se sentent compétents et évitent ceux dans lesquels ils se sentent inadéquats. 
  • Elle influence la manière dont les individus font face à l’échec et gèrent l’adversité (Pajares, 1996 ; Sexton & Tuckman, 1991) :
    • Face à l’adversité ou à l’échec, une personne ayant des convictions élevées en matière d’auto-efficacité est plus susceptible de déployer des efforts plus importants. Elle reste plus concentrée sur le problème et persiste plus longtemps.
    • Face à l’adversité ou à l’échec, une personne ayant une faible auto-efficacité est plus susceptible de considérer la situation comme insurmontable. Elle est plus facilement frustrée et déprimée, elle risque d’abandonner plus rapidement et de se concentrer davantage sur ses émotions.
Multon, Brown et Lent (1991) ont effectué une méta-analyse de 36 études portant sur la relation entre l’auto-efficacité et les résultats scolaires. Ils ont constaté un effet global de r = 0,38, ce qui suggère qu’environ 14 % de la variation des résultats scolaires peut être attribuée aux croyances en l’auto-efficacité. Toutefois, la relation a été modérée par la matière (corrélations plus importantes pour les mathématiques) et par la spécificité des mesures (corrélations plus faibles pour les évaluations plus globales).



Quatre composantes d’une communication visant à soutenir le sentiment d’efficacité personnelle


Selon Bandura (1997), il existe quatre composantes mobilisables pour améliorer l’auto-efficacité dans un domaine : 
  1. Des expériences de réussite antérieures : si un élève a déjà réussi dans une situation donnée, il est plus susceptible de croire qu’il peut réussir à nouveau. 
  2. Des expériences vicariantes : le fait de voir ou d’entendre que d’autres élèves, avec lesquelles des points communs, ont réussi peut aider un élève à croire que le succès est à portée. 
  3. Des messages de persuasion verbale d’autres personnes : si d’autres personnes crédibles pour lui disent à un élève qu’il peut réussir, l’encouragent, le motivent et le rassurent, nous serons plus enclins à le croire nous-mêmes. 
  4. L’état psychologique actuel : Si un élève est plein d’énergie et heureux, il a plus de chances de croire en sa capacité à réussir que s’il est fatigué ou triste. Le fait de contribuer à réduire les signes physiologiques d’anxiété a un impact positif.



Soutenir l’auto-efficacité améliore les résultats


Dans une expérimentation, Jackson (2002) a étudié l’effet d’une communication conçue pour améliorer les croyances d’auto-efficacité des étudiants à un cours d’introduction à la psychologie.

Après une évaluation, tous les étudiants ont été invités à envoyer un courriel à l’auteur pour recevoir un point bonus. Parmi les étudiants qui ont répondu (76 sur 123), la moitié a reçu un message électronique destiné à renforcer leurs croyances en matière d’efficacité, tandis que l’autre moitié a reçu une note neutre. 

Jackson a tenté de manipuler leur auto-efficacité à l’aide de quatre composantes susceptibles d’améliorer l’auto-efficacité. Lors de l’examen suivant, les étudiants qui avaient bénéficié du renforcement de l’auto-efficacité ont obtenu de meilleurs résultats que ceux qui n’en avaient pas bénéficié. 

Le fait d’entendre leur professeur leur dire qu’ils avaient de bons résultats et des attentes élevées à leurs égards les a aidés à croire en eux, ce qui a amélioré leurs performances.

Les élèves qui ont confiance en eux sont plus enclins à s’engager dans des tâches difficiles, à travailler plus longtemps pour atteindre leurs objectifs et à utiliser de meilleures stratégies pour y parvenir.

Ces résultats confirment ceux d’une recherche plus ancienne. Tuckman et Sexton (1991) avaient demandé à des étudiants de premier cycle de rédiger des questions pour obtenir des points de bonus. Parmi les sujets qui avaient renvoyé, la moitié des étudiants ayant reçu une note encourageante de l’enseignant et l’autre moitié n’ayant reçu aucune note. Les étudiants qui ont reçu des encouragements ont obtenu de meilleurs résultats sur une mesure de l’auto-efficacité et ont par la suite gagné plus de points de performance que ceux qui n’ont pas reçu d’encouragements.

Ces résultats apportent un soutien, bien que limité, à la théorie selon laquelle il est possible d’améliorer les croyances d’efficacité personnelle des étudiants en utilisant des interventions systématiques (Bandura, 1997 ; McWhirter, Crothers, & Rasheed, 2000). L’idée est que ces croyances peuvent, à leur tour, stimuler les performances d’apprentissage (Chemers, Hu, & Garcia, 2001 ; Pajares, 1996).

Le fait de croire que l’on peut réussir peut avoir un impact important sur le comportement, ce qui peut conduire à de réelles améliorations. 
  • Hutchinson et ses collaborateurs (2018) ont montré que l’auto-efficacité joue un rôle majeur dans l’amélioration des performances et de la tolérance à l’effort physique.
  • Dans une méta-analyse, Merluzzi et ses collaborateurs (2019) ont montré que les attentes positives en matière d’auto-efficacité sont associées à l’amélioration de conséquences problématiques largement considérées comme cliniquement significatives chez des patients atteints de cancer. Ces conséquences problématiques sont la détresse émotionnelle, la fatigue et la douleur. Elles sont également liées à des comportements de santé positifs. Les changements dans les attentes en matière d’auto-efficacité sont positivement liés aux comportements futurs qui favorisent la santé et le bien-être.



Éléments d’une communication visant à soutenir le sentiment d’efficacité personnelle


Dans l’expérience de Jackson (2002), les quatre aspects de la note correspondent directement aux quatre facteurs qui, en théorie, contribuent à renforcer l’auto-efficacité. 

Le message abordait les points suivants :
  • Mettre l’accent sur les succès antérieurs de l’élève dans la classe et reconnaitre la qualité du travail, celle de la participation en classe ou la maîtrise des objectifs d’apprentissage.
  • Reconnaitre que la note n’est pas aussi élevée qu’espérée et déclarer que ce type de note est normal à ce stade en matière d’adaptation et que généralement de meilleurs résultats suivent. D’autres étudiants semblables à lui avaient réussi le cours et bien progressé dans le passé.
  • Faire preuve de persuasion verbale en encourageant l’étudiant à travailler dur et à rester concentré. Reconnaitre la capacité à faire des efforts supplémentaires pour la suite et à améliorer les résultats pour la suite. Encourager à étudier sérieusement et fournir le travail nécessaire pour améliorer les résultats.
  • Donner des conseils pour réduire le stress et encourager l’étudiant à contacter l’enseignant en cas de besoin :
    • Rester à l’aise durant l’évaluation et ne pas se sentir sous pression ou pressé, car il y a assez de temps.
    • Si l’une ou l’autre question pose problème, il vaut mieux les garder pour la fin.
    • Respirer profondément et rester positif, car en restant calmes, nos idées sont plus claires et la qualité des réponses est plus élevée.
    • Fournir des conseils sur la préparation aux évaluations : 
      • Il est préférable d’étudier régulièrement chaque semaine plutôt que d’essayer de tout faire la veille de l’examen. Le bachotage est plus stressant et épuisant et qu’il ne fonctionne tout simplement pas aussi bien.
      • Veiller à passer une bonne nuit de sommeil avant l’examen, pour réduire le stress et maximiser votre capacité de concentration.

Le contenu des notes était le même pour chaque élève de la condition « amélioration de l’efficacité », à l’exception du nom de l’élève. Chaque note était adressée sous la forme « Cher [prénom de l’élève] » et de la mention des réussites antérieures. 



Agir pour améliorer son auto-efficacité


Une manière de doper son auto-efficacité est de penser à ses réussites antérieures. Lorsque nous préparons ou lorsque nous complétons, une évaluation, il est utile de penser aux autres fois où nous avons fait des choses similaires et où nous avons réussi. 

Il est également utile de parler à d’autres personnes qui ont réussi ou de se rappeler simplement que beaucoup de gens comme nous réussissent la même épreuve. 

Travailler sur une représentation personnelle de la réussite est important. Le fait de voir des gens comme nous réussir dans les domaines qui nous intéressent nous aide à penser que nous pouvons réussir nous aussi. 

À ce titre, le soutien social est précieux. Nous avons tous des moments de doute et nous nous demandons si nous pouvons vraiment faire ce que nous voulons. Le fait d’échanger avec des amis, des membres de la famille ou des mentors qui croient en vous peut nous aider à nous rappeler que nous pouvons relever ces défis qui nous font face.

Le fait d’utiliser des autoaffirmations est également utile. Nous nous disons que nous pensons pouvoir atteindre notre objectif, même si nous gardons quelques doutes légitimes. L’idée est d’améliorer votre état psychologique pour pouvoir faire un meilleur usage de nos ressources.

L’était physiologique joue également un rôle positif indirect : 
  • Dormir suffisamment
  • Manger des aliments sains comme des fruits et des légumes
  • Faire de l’exercice pour améliorer notre état physique 
  • Envisager des techniques de réduction du stress.



Bibliographie


Megan Sumeracki, Cynthia Nebel, Carolina Kuepper-Tetzel, Althea Need Kaminske, Ace That Test, A Student’s Guide to Learning Better, Routledge, 2023

Bandura, A. (1977). Self-efficacy: Toward a unifying theory of behavioral change. Psychological Review, 84, 191–215. 252. The Journal of Experimental Education

Bandura, A. (1997). Self-ejicacy: The exercise of control. New York: Freeman.

Pajares, F. (1996). Self-efficacy beliefs in academic settings. Review of Educational Research, 66, 543–578.

Sexton, T.L., & Tuckman, B.W. (1991). Self-beliefs and behaviors: The role of self-efficacy and outcome expectation over time. Personality and Individual Differences, 12, 725–736.

Tuckman, B. W., & Sexton, T. L. (1991). The effect of teacher encouragement on student self-eficacy and motivation for self-regulated performance. Journal of Social Behavior and Personality, 6, 137–146.

Multon, K. D., Brown, S. D., &Lent, R. W. (1991). Relation of self-efficacy beliefs to academic outcomes: A meta-analytic investigation. Journal of Counseling Psychology, 38, 30–38.

Jackson, J. W. (2002). Enhancing self-efficacy and learning performance. The Journal of Experimental Education, 70(3), 243–254. https://doi.org/10.1080/00220970209599508

McWhirter, E. H., Crothers, M., & Rasheed, S. (2000). The effects of high school career education on social-cognitive variables. Journal of Counseling Psychology, 47, 330-34 1.

Chemers, M. M., Hu, L., & Garcia, B. F. (2001). Academic self-efficacy and first year college student performance and adjustment. Journal of Education Psychology, 93, 55–64.

Hutchinson, J. C., Sherman, T., Martinovic, N., & Tenenbaum, G. (2008). The effect of manipulated self-efficacy on perceived and sustained effort. Journal of Applied Sport Psychology, 20(4), 457–472. https://doi.org/10.1080/10413200802351151 

Merluzzi, T. V., Pustejovsky, J. E., Philip E. J., Sohl, S. J., Berendsen, M., & Salsman, J. M. (2019). Interventions to enhance self-efficacy in cancer patients: A meta-analysis of randomized controlled trials. Psychooncology, 28(9), 1781–1790. https://doi.org/10.1002/ pon. 5148

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