dimanche 11 février 2024

L’impact du format de questions pour la pratique de récupération en classe et à domicile

La pratique de récupération associée à la rétroaction est particulièrement efficace en tant que méthode d’apprentissage. 

(Photographie : zocher)









A priori, il ne semble pas nécessaire de réfléchir très longuement à la manière de la mettre en œuvre. Globalement, nous devons juste leur fournir des questions et assurer un suivi en cas de difficultés rencontrées. Toutefois, une précision utile est de s’intéresser à la variation de l’impact en fonction du type de questions posées et de leur forme de délivrance.



L’impact de la pratique de vérification varie en fonction du type de questions


Dans le cadre de recherches sur la pratique de récupération, Roediger et Butler (2007) ont montré que tous les types de tests ne sont pas égaux. Dans une expérience, ils ont demandé à des étudiants d’observer trois cours d’histoire de l’art de 30 minutes, accompagnés de diaporamas, répartis sur trois jours. 

À la fin de chaque cours, les étudiants ont été placés dans l’une des quatre conditions suivantes : 
  1. Passer un test à réponses courtes sur la matière qu’ils venaient d’apprendre
  2. Passer un test à choix multiples sur la matière qu’ils venaient d’apprendre
  3. Réétudier certains des contenus clés du cours d’histoire de l’art qu’ils venaient de suivre
  4. Sortir sans autre activité
Un retour d’information (réponses correctes) a été fourni pour la moitié des réponses aux tests à choix multiples et aux tests à réponses courtes. Le retour d’information n’a sans doute pas eu d’effet sur la rétention, probablement en raison du haut niveau de performance de ces tests initiaux.

Les étudiants sont revenus trente jours après le dernier des trois cours pour passer un test final à réponses courtes sur la matière. Dans cette expérience, les étudiants n’avaient aucune raison ou occasion de revoir le matériel de cours pendant l’intervalle de 30 jours entre les cours et l’examen final.

Voici les résultats obtenus :
  1. Les étudiants qui ont passé les tests à réponses courtes directement après les cours ont obtenu les meilleurs résultats à l’examen final, soit 47 %.
  2. Les étudiants qui ont passé des examens à choix multiples et qui ont eu du temps d’étude supplémentaire ont obtenu des résultats à peu près équivalents, soit 36 %.
  3. Les étudiants qui n’ont eu aucune activité ont obtenu environ 20 %.
Ce résultat est une démonstration puissante de la manière dont les tests (en particulier les tests de rappel) peuvent améliorer la rétention de la matière après de longs intervalles de rétention.

Les étudiants qui ont obtenu les meilleurs résultats sont ceux qui ont dû réfléchir le plus activement pour face à des questions à réponse courte. Ce format de questions exige des élèves qu’ils formulent des réponses avec leurs propres mots. Cela leur a demandé de passer plus de temps à répondre que lors d’un questionnaire à choix multiples. Ils ont dû récupérer des connaissances directement dans leur mémoire à long terme plutôt que de simplement les reconnaitre sur le papier.



Implications pédagogiques pour le format des questions lors de la pratique de récupération


D’après Roediger et Butler (2007), les questions à réponses courtes semblent particulièrement pertinentes dans le cadre de la pratique de récupération. Ces questions à réponses courtes sont en quelque sorte l’équivalent de l’utilisation autonome de flashcards par des élèves.

Si l’impact de la mémorisation semble important, un autre facteur d’importance est la similitude de format entre les questions de récupération et celui des questions utilisées lors de l’évaluation un mois plus tard. 

Il ne s’agit pas non plus de condamner d’emblée les questions à choix multiples. Il faut simplement que pour pouvoir y répondre les élèves soient amenés à récupérer des informations en mémoire pour les traiter comme dans le cas des questions à réponses courtes.

Le fait de répondre à une question à choix multiples peut consister simplement à reconnaitre la bonne réponse parmi les différentes options. Dans ce cas, il n’est guère étonnant que l’effet des questions à choix multiples soit proche de celui d’une relecture ou d’une réétude ciblée. Dans les deux cas, il s’agit d’une reconnaissance. 

Par conséquent, si l’avantage est aux questions à réponses courtes, il ne faut toutefois pas condamner les tests à choix multiples dans l’exercice de la pratique de récupération. Deux éléments peuvent être mis en avant :
  • Premièrement, il vaut mieux un test à choix multiples que pas de pratique de récupération du tout.
  • Deuxièmement, la faiblesse mise en évidence ici est la reconnaissance de la bonne réponse. Une manière de contourner cela est de proposer des questions qui vont nécessiter un raisonnement et une récupération d’information pour déterminer la bonne option. Dans ce cas, le traitement sera nettement plus profond et le bénéfice deviendra plus important.



Mode d’organisation de la pratique de récupération en classe


Les deux bons moments dans un cours où procéder de la sorte sont l’ouverture et la clôture du cours, car à ce moment, il n’y a pas de risque d’interférences avec ce qui est enseigné. Leur mise en œuvre ne demande pas beaucoup de créativité ou de temps de préparation, car ces questions portent sur les contenus enseignés précédemment. L’enseignant doit se concentrer sur les concepts clés qu’il veut que les élèves retirent du cours. 

Le format écrit des réponses est également avantageux, car il demande une plus grande implication de la part des élèves et un meilleur bénéfice. 

Un facteur important lorsque nous nous engageons dans ce type de processus basé sur la récupération est de bien informer les élèves. Nous devons leur expliquer pourquoi nous allons leur interdire de chercher les réponses dans leurs notes de cours ou leurs manuels. En effet, les laisser agir de la sorte annihilerait l’essentiel du bénéfice de la démarche pour la mémorisation.

Nous devons leur expliquer que nous les aidons à se souvenir des informations, et cela ne leur sera bénéfique que s’ils prennent le temps de puiser ces informations dans leur cerveau et non dans un support. 

Même si les élèves ne se souviennent que de la moitié des réponses, ce sera plus utile que de les laisser chercher dans leurs feuilles.

Il est utile de créer, de trouver ou de construire à plusieurs une réserve de questions aussi diversifiée que possible et recouvrant toute la matière que nous souhaitons qu’ils apprennent durablement. 

La fréquence est importante, plus les élèves pratiquent la récupération, mieux ils apprennent. La fréquence est importante. La façon la plus simple de mettre en place une pratique fréquente est de faire des quiz réguliers. Nous ne devons pas hésiter à en faire un à chaque cours. 

Quel que soit le type de tâches impliquant de la mémorisation que nous demandons à nos élèves lors de nos évaluations à enjeux élevés, elles devraient apparaître dans la pratique de récupération que nous utilisons. 

Il est également important que les questions de récupération impliquent de la réflexion ou de l’élaboration. Nous nous souvenons de ce à quoi nous pensons. 



Soutien à la pratique de récupération en apprentissage autonome


La classe n’est pas le seul lieu pour amener les élèves à s’engager dans la pratique de récupération. Comme l’explique Miller (2014), nous pouvons leur proposer des auto-évaluations en ligne ou leur fournir des listes de questions types à mobiliser lors de leur pratique autonome.

Le défi de la mise en œuvre de la pratique de récupération dans ces situations est que les élèves ne travaillent généralement pas en classe. 

Les questionnaires en ligne sur des plateformes numériques peuvent permettre de laisser des traces et délivrer des notifications. Un enseignant peut accéder à un rapport qui lui indique quels élèves ont réalisé l’auto-évaluation et quand ils l’ont fait. Cela peut contribuer à la responsabilisation des élèves.

Le fait de bien utiliser la pratique de récupération en classe et d’y sensibiliser les élèves peut leur éviter de commettre certaines erreurs. La plus fréquente est de se contenter de chercher les réponses dans leurs notes ou dans un manuel scolaire, ce qui annihile l’effet de test.

Fournir des ressources pour la pratique de récupération peut les inciter à s’y engager. Ne pas le faire ne le peut pas. Le fait de ne pouvoir garantir une conformité totale dans leur utilisation ne doit pas nous arrêter d’en proposer.

Les devoirs sont également une piste à explorer. À la fin d’une unité de matière, nous pouvons donner aux élèves un questionnaire à répondre en ligne fondé sur des questions de pratique de récupération. Nous devons faire en sorte alors que les élèves ont la responsabilité de réaliser ce devoir dans un délai donné.



Bibliographie


Butler, A. C., & Roediger, H. L. III. (2007). Testing improves long-term retention in a simulated classroom setting. European Journal of Cognitive Psychology, 19 (4–5), 514–527. https://doi.org/10.1080/09541440701326097

Miller, M. (2014). Minds online: Teaching effectively with technology. Cambridge, MA: Harvard University Press

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