vendredi 6 octobre 2023

Théorie de la charge cognitive, psychologie évolutionniste de l’éducation et théorie de la charge de l'attention et du contrôle cognitif

Une introduction brève de trois théories en psychologie ayant des implications pour l’éducation.

(Photographie : Dillon Jenkins)


La théorie de la charge cognitive


La théorie de la charge cognitive a pour but de développer des procédures d’enseignement efficaces. Elle est basée sur une combinaison de la psychologie de l’évolution et de l’architecture cognitive humaine.

Fondée sur une solide base de données probantes, la théorie de la charge cognitive fournit un appui théorique et empirique à des modèles explicites d’enseignement.


La recherche en théorie de la charge cognitive démontre que les techniques d’enseignement sont plus efficaces lorsqu’elles sont conçues pour s’adapter à la façon dont le cerveau humain apprend.

Une prémisse de la théorie de la charge cognitive est qu’un guidage explicite et une rétroaction de la part de l’enseignant sont plus efficaces pour enseigner aux élèves de nouveaux contenus et de nouvelles compétences. Les laisser découvrir de nouveaux contenus par eux-mêmes avec des indices minimes sera moins efficace. La théorie de la charge cognitive soutient la méthode d’enseignement explicite.

La théorie de la charge cognitive ne modélise pas non plus l’esprit humain comme un ordinateur. Elle le modélise comme un système naturel de traitement de l’information. Un trait distinctif du modèle de mémoire de travail proposé dans la théorie de la charge cognitive est l’absence de tout exécutif central, ces fonctions étant prises par des schémas dans la mémoire à long terme. De ce fait, cette théorie n’appartient pas au champ des neurosciences.



Quinze conseils pour enseigner fondés sur la théorie de la charge cognitive proposés par André Tricot (2020)



Voici une liste de 15 conseils basés sur la théorie de la charge cognitive, proposés par André Tricot (2020)


Lorsque nous réfléchissons, nous utilisons trois ressources clés pour réfléchir : 
  • L’environnement : il représente tout ce qui se trouve en dehors de notre esprit, c’est l’internet, les livres, les magazines, les connaissances facilement partagées par les autres, et plus encore. L’environnement est une réserve externe d’informations illimitée.
  • La mémoire à long terme : elle est l’endroit où tous nos souvenirs sont conservés. Cela inclut les souvenirs d’événements de la vie (connaissances épisodiques), les informations factuelles telles que les noms de pays (connaissances sémantiques) et les souvenirs de processus tels que la façon de nouer un lacet de chaussure (connaissances procédurales). La mémoire à long terme est un stockage interne illimité d’informations, mais mémoriser peut prendre du temps et ce processus est sensible à l’oubli.
  • La mémoire de travail : elle est le lieu de notre conscience, c’est là que le processus de pensée a lieu. La capacité de la mémoire de travail est limitée à environ quatre, plus ou moins un, éléments. La mémoire de travail est un système de pensée limité. La mémoire de travail est le goulot d’étranglement de notre pensée.
Les humains utilisent l’environnement (illimité), la mémoire de travail (limitée) et la mémoire à long terme (illimitée) pour penser.

Il nous arrive de nous sentir confus. Nous pouvons avoir l’impression que notre tête va exploser à cause d’un trop plein d’idées ou de pensées. Nous pouvons avoir du mal à suivre ce que nous lisons ou à comprendre ce que quelqu’un nous l’explique. La raison est que dans ces conditions, la capacité limitée de notre mémoire de travail est surchargée. Dans la théorie de la charge cognitive, le concept de charge cognitive représente tout ce qui occupe la capacité de la mémoire de travail. Nous parlons de surcharge lorsque la capacité de la mémoire de travail est dépassée, ce qui rend impossible tout traitement.



La distinction entre connaissances biologiques primaires et secondaire issue de la psychologie évolutionniste de l’éducation



La théorie de la charge cognitive concerne l’acquisition de connaissances secondaires, selon le modèle de David C. Geary. De ce fait, la théorie de la charge cognitive s’appuie sur le processus d’évolution.

Comme l’écrit André Tricot (2017), les apprentissages scolaires obéissent à des contraintes spécifiques, qui les rendent très différents des autres apprentissages. On peut qualifier ces autres apprentissages comme adaptatifs.

Selon cette approche, les humains apprennent de manière très différente selon que les connaissances biologiques apprises sont :
  • Primaires : elles sont présentes chez Homo Sapiens depuis les débuts de l’espèce (par exemple la reconnaissance des visages, la parole)
  • Secondaires : elles sont apparues récemment chez Homo Sapiens (par exemple les mathématiques ou la langue écrite).



Théorie de la charge de l’attention et du contrôle cognitif


À côté de la théorie de la charge cognitive, une seconde existe, la théorie de la charge de l’attention et du contrôle cognitif de Nilli Lavie (et coll., 2014). Cette dernière reste moins centrée sur la mémoire de travail et s’intéresse de manière très directe à l’attention. Elle distingue entre deux types de charges :
  • Une charge perceptive qui décrit le traitement ascendant des sensations aboutissant à des perceptions.
  • Une charge cognitive qui s’intéresse à la mémoire de travail.
Cette théorie s’intéresse à la divergence de nos performances, en relation avec notre d’attention : 
  • Dans certaines circonstances, nous sommes capables d’être très sélectifs.
  • Dans d’autres circonstances, nous pouvons faire preuve d’un niveau élevé de distraction.
La théorie de la charge de l’attention et du contrôle cognitif s’intéresse à la mesure dans laquelle les gens peuvent concentrer leur attention face à des distractions non pertinentes. Cela dépend du niveau et du type de charge d’information impliqués dans leur tâche actuelle. 

La mesure dans laquelle l’information visuelle non surveillée est perçue dépend de la charge perceptive de la tâche accomplie. L’augmentation du niveau de la charge perceptive dans la tâche diminue le traitement des stimuli sans rapport avec la tâche. 

Le contrôle cognitif joue également un rôle important : le chargement du contrôle exécutif entraîne une augmentation du traitement des stimuli non pertinents. 

Un attrait de cette théorie est qu’elle aide à démêler les impacts positifs ou négatifs de la charge sur l’apprentissage. La charge de travail est une variable importante pour comprendre le traitement des messages selon les différents niveaux d’attention. 

Par exemple, Wang & Duff (2016) ont montré que si l’augmentation de la charge perceptive diminue la mémorisation d’une publicité, une augmentation de la charge cognitive par contre peut augmenter son apprentissage. 


Mis à jour le 03/03/2024

Bibliographie


Lavie, Nilli & Hirst, Aleksandra & W de Fockert, Jan & Viding, Essi. (2004). Load Theory of Selective Attention and Cognitive Control. Journal of experimental psychology. General. 133. 339-54. 10.1037/0096-3445.133.3.339. 

Zongyuan Wang & Brittany R. L. Duff (2016): All Loads Are Not Equal: Distinct Influences of Perceptual Load and Cognitive Load on Peripheral Ad Processing, Media Psychology, DOI: 10.1080/15213269.2015.1108204

André Tricot. Les contraintes spécifiques des apprentissages scolaires. Psychologie et Éducation, AFPEN, 2017. hal-01628833

André Tricot, Qu’est-ce que la charge cognitive, 2020, https://synapses-lamap.org/2020/01/07/interview-quest-ce-que-la-charge-cognitive/

Oliver Lovell, Sweller’s Cognitive Load Theory in Action, John Catt, 2020

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