lundi 24 juillet 2023

Importance du cadre, de l’équité et de la qualité de l’environnement en gestion de classe

L’approche écologique en gestion de classe met l’accent sur la qualité de l’environnement de la classe et sur l’importance du cadre en tant que facteur d’équité. 

(Photographie : Jian Xu)






L’apport de l’approche écologique


L’approche écologique fournit le socle des conseils donnés aux enseignants portant sur la meilleure façon d’organiser et de structurer leurs classes afin de faciliter l’enseignement et de prévenir les mauvais comportements.

Ces recherches ont atteint leur apogée dans les années 1980. Une grande partie d’entre elles faisant partie de la recherche sur l’efficacité des écoles, en particulier celle concernant la gestion de la classe. Elles ont montré que ce qui différenciait le mieux les enseignants qui avaient une bonne gestion de classe par rapport à ceux inefficaces n’était pas la façon dont les enseignants corrigeaient les comportements perturbateurs. C’était la façon dont ils empêchaient les comportements perturbateurs de se produire en premier lieu, de s’intensifier et de se propager. L’accent sur la prévention est au cœur de l’approche écologique.

Paul Gump (1920-2003) et Jacob Kounin (1912–1995) ont été parmi les premiers psychologues de l’éducation à décrire les caractéristiques des gestionnaires de classe les plus efficaces sur la base de recherches réelles.

Les gestionnaires de classe les plus efficaces établissent un cadre fondé sur des normes claires et raisonnables au cours des premiers jours de l’année scolaire et les maintiennent par la suite. 

Les comportements conformes à leurs attentes sont enseignés directement, modélisés, discutés, réappris au besoin, mis en pratique, renforcés et associés à des mesures de soutien et à des conséquences lorsqu’ils ne sont pas respectés. 

Des attentes élevées sont appliquées à tous les élèves, et ces attentes tiennent compte des différences de développement et des différences individuelles (y compris culturelles). 

Les enseignants utilisent largement pour communiquer leurs attentes élevées et pour faciliter l’ordre dans la classe : 
  1. des procédures et des routines prévisibles et efficaces
  2. des règles et des conséquences claires et équitables.
Ces différents points ont été largement développés dans ce blog. Nous allons ici développer plus spécifiquement deux dimensions spécifiques à l’approche écologique :
  • La perception de l’équité.
  • L’importance de l’environnement physique.



La perception de l’équité


Les élèves qui perçoivent les règles comme étant claires et équitables, y compris l’équité des conséquences imposées en cas de violation des celles-ci, ont tendance à mieux se comporter. Ils ont une opinion plus favorable de leurs enseignants et de leur école.

La perception de l’équité par les élèves peut être tout aussi importante, voire plus, que la clarté pour déterminer leur comportement. 

Dans une étude américaine portant sur plus de 30 000 élèves, Richard Arum (2003) a constaté que les perceptions d’équité des élèves étaient associées à de multiples résultats positifs. 

Une relation curviligne entre l’équité et la sévérité a été démontrée. Les règles sont perçues comme étant les plus équitables lorsqu’elles ne sont ni trop indulgentes, ni trop sévères.
 
Les perceptions d’équité des élèves ont tendance à être corrélées positivement et significativement avec leur volonté d’obéir aux règles.  

Quand les règles sont trop indulgentes ou trop sévères, elles semblent moins équitables et les élèves ont moins envie d’y obéir :
  • Lorsque les règles sont perçues comme équitables, les élèves sont non seulement plus enclins à les respecter, mais aussi plus susceptibles d’obtenir de meilleures notes. 
  • Lorsque les règles sont perçues comme strictes et injustes, il y a 35 % de chances que les élèves expriment une volonté de désobéir aux règles.

Arum (2003) a souligné que les règles modérément strictes sont particulièrement efficaces lorsque les élèves les perçoivent comme étant imposées par des adultes ayant une autorité morale légitime. Ce sont des adultes que les élèves respectent et considèrent comme justes, solidaires et pas trop contrôlants. 

La recherche sur le développement moral, en particulier la théorie du domaine social (Turiel, 2007), soutient également l’importance de la perception de l’équité par les élèves. 

Ces recherches montrent que les enfants et les adolescents perçoivent les règles comme étant plus justes, justifiant des sanctions plus sévères en cas de violation des règles : 
  • Lorsqu’elles concernent des comportements relevant du domaine moral : jugements prescriptifs et principes universels relatifs au bien-être humain, aux droits et à la justice.
  • Dans une moindre mesure, du domaine social conventionnel : règles et règlements modifiables qui régissent le comportement et les interactions sociales dans un contexte social donné. 
  • C’est lorsque les règles concernent des comportements perçus comme relevant du domaine personnel (par exemple, l’habillement, la coiffure, les aliments à manger) qu’elles sont les plus susceptibles d’être considérées comme injustes et donc non respectées.
Par conséquent, développer la justification morale et les liens avec les valeurs dans le cadre des règles et des comportements attendus en école est utile. La démarche susceptible d’avoir un effet favorable sur la perception de leur équité et sur leur respect par les élèves.



L’importance de l’environnement physique pour la gestion du comportement


En général, l’agression et la violence sont plus susceptibles de se produire dans des environnements surpeuplés, peu attrayants et inconfortables (par exemple, mauvaise climatisation, chauffage, sièges) (Berkowitz, 1989). 

La promiscuité ou la proximité physique avec les pairs sont un problème courant dans les écoles, surtout lorsque la supervision des adultes fait défaut. Les problèmes de comportement sont plus susceptibles de se produire dans ces circonstances (Astor, Benbenishty, Marachi et Meyer, 2006). 

Les enseignants et les écoles sont souvent limités dans la mesure où ils peuvent modifier leur environnement physique. C’est par exemple, augmenter la taille de la salle de classe ou de la cour de récréation, ou améliorer la température de la pièce. Les enseignants efficaces et les écoles performantes font de leur mieux pour adapter l’environnement physique afin de prévenir les problèmes de comportement. 

Les bonnes pratiques incluent la disposition du mobilier nécessaire et du matériel adéquat, le contrôle de la circulation des élèves par le biais de l’emploi du temps et de la supervision active. Cela comprend le fait de rendre les classes et les lieux communs généralement plus attrayants, sans être distrayants (Hunley, 2008).



L’apport de l’approche comportementale


Le soutien au comportement positif est emblématique de l’approche comportementale en gestion du comportement.

L’approche comportementale se concentre principalement sur les antécédents observables des problèmes de comportement, en démontrant notamment comment les enseignants peuvent manipuler les antécédents pour améliorer les comportements observables. 

Beaucoup de techniques privilégiées par l’approche comportementale sont les mêmes que celles privilégiées dans l’approche écologique. 

Ce que l’approche comportementale a ajouté, c’est la démonstration des relations causales entre les antécédents et le comportement. Elle a montré que ces techniques ne caractérisent pas seulement les enseignants efficaces, mais sont des actions, des associations ou des événements modifiables qui déterminent réellement l’efficacité des enseignants à établir l’ordre, l’engagement et la conformité. 

Une autre contribution majeure a consisté à identifier les caractéristiques spécifiques de chaque technique et les étapes de sa mise en œuvre. 



La définition du cadre par la matrice comportementale


Lynass et ses collaborateurs (2012) se sont intéressés dans le cadre du soutien au comportement positif aux types et la fréquence des attentes sociales et des indicateurs de comportement d’écoles primaires américaines (155). Pour ce faire les chercheurs ont analysé les matrices de comportement produites par ces écoles.




Lors de la mise en œuvre du SCP, les écoles établissent trois à cinq attentes générales pour l’ensemble de l’école, telles que : être en sécurité, être respectueux et être coopératif. 

Les attentes de l’école sont censées refléter les valeurs de la culture sociale de l’école. Les valeurs sont les grands concepts qui guident le programme comportemental et les normes sociales de l’école. Les attentes sont formulées de manière positive et fournissent un langage commun au personnel pour aborder le comportement des élèves. 

Les attentes sont ensuite placées sur une matrice de comportement. Le personnel de l’école identifie les indicateurs de comportement pour chaque attente dans tous les environnements scolaires (par exemple, la cafétéria, les couloirs, la cour, la bibliothèque, la classe, etc.). Les indicateurs comportementaux sont des comportements souhaités pour chaque environnement qui illustrent les attentes. 

Les interventions SCP utilisent souvent les attentes à l’échelle de l’école comme objectifs ciblés pour les élèves recevant des services de niveau 2. Par exemple, les attentes sociales sont généralement utilisées comme objectifs sur les bulletins de progrès quotidiens (Check In/Check Out) dans les interventions de niveau 2. 

Lynass et coll. (2012) ont montré dans leur analyse des matrices que trois attentes sociales se démarquaient nettement par leur fréquence, suivies d’une quatrième également notable :
  • Le respect (88,7 %)
  • La responsabilité (72,2 %)
  • La sécurité (64,3 %)
  • Être prêt à apprendre (26,6 %)

Les résultats de cette étude suggèrent que les attentes sociales et les indicateurs de comportement dans les écoles primaires américaines sont plus semblables et homogènes que différents.

Cela remet en question le concept selon lequel les attentes sociales et les indicateurs de comportement créés par les écoles contiennent un contenu diversifié, localement pertinent ou contextuellement significatif pour les élèves. Le respect et la responsabilité soient des attentes sociales presque omniprésentes, quel que soit le contexte géographique ou démographique. 

Le caractère de ces attentes sociales étant assez homogène, amène à se demander dans quelle mesure la dimension culturelle et spécifique d’une école est réellement abordée en dehors de quelques variations contextuelles. 

Ce résultat peut être attribué à l’influence de l’approche liée à la mise en œuvre du soutien au comportement positif. Il est possible que le dialogue entre les participants dans une école génère une confluence de pensées. D’une école à l’autre les problématiques sont fort voisines, quoiqu’à des intensités diverses et les missions de l’enseignement se rejoignent. Les attentes sociales qui émergent répondent le plus souvent aux plus grandes préoccupations des écoles en matière de comportement problématique et de climat scolaire.

Le contenu des attentes sociales et des indicateurs comportementaux semble également mettre l’accent sur la conformité des élèves. Les données ont révélé une tendance à attendre des élèves qu’ils respectent l’autorité de leurs enseignants, qu’ils soient préparés aux activités de la classe et qu’ils se comportent de manière sûre et calme. 




Une étude antérieure de Lynass et ses collaborateurs (2010) indique que les enseignants ont du mal à évaluer avec précision la capacité des élèves à répondre aux attentes en matière de respect et de responsabilité. Les auteurs ont émis l’hypothèse que ces attentes sociales sont quelque peu ambiguës pour les enseignants, que leur signification se chevauche et qu’il leur est difficile de les définir et de les distinguer clairement en classe. 

Les résultats de l’étude de Lynass et coll. (2012) suggèrent qu’il est nécessaire pour les écoles d’examiner attentivement et de définir clairement leurs attentes sociales et d’étudier soigneusement les indicateurs comportementaux correspondants. 

Dès lors, la valeur ajoutée du soutien au comportement positif en matière de clarification des attentes est précieuse et représente un facteur d’efficacité majeur de l’intervention. Le cadre est ainsi rendu explicite et le lien avec les valeurs de l’école est un gage d’équité.


Mis à jour le 30/01/2024

Bibliographie


Bear, G. G. (2015). Preventive and classroom-based strategies. In E. T. Emmer & E. J. Sabornie (Eds.), Handbook of classroom management (2nd ed., pp. 15–39). New York, NY: Routledge

Arum, Richard. Judging School Discipline: The Crisis of Moral Authority. Harvard University Press, 2003. http://www.jstor.org/stable/j.ctv1pncp77.

Berkowitz, L. (1989). Situational influences on aggression. In J. Groebel & R. A. Hinde (Eds.), Aggression and war: Their biological and social bases (pp. 91–100). Cambridge University Press.

Astor, R. A., Benbenishty, R., Marachi, R., & Meyer, H. A. (2006). The social context of schools: Monitoring and mapping student victimization in schools. In S. R. Jimerson & M. Furlong (Eds.), Handbook of school violence and school safety: From research to practice (pp. 221–233). Lawrence Erlbaum Associates Publishers.

Hunley, S. A. (2008).Best Practices for Preparing Learning Space to Increase Engagement. In A. Thomas & J. Grimes (Eds.), Best Practices in School Psychology V. Bethesda, MD: National Association of School Psychologists.

Turiel, E. (2007). The Development of Morality. In Handbook of Child Psychology (eds W. Damon, R. M. Lerner and N. Eisenberg). https://doi.org/10.1002/9780470147658.chpsy0313

Lynass, Lori & Tsai, Shu-Fei & Richman, & Cheney, Douglas. (2012). Social Expectations and Behavioral Indicators in School-Wide Positive Behavior Supports: A National Study of Behavior Matrices. Journal of Positive Behavior Interventions. 14. 153-161. 10.1177/1098300711412076.

Lynass, L., Cheney, D., Mielenz, C., McGuire, C., & Iwaszuk, W. (2010). An analysis of the reliability of teacher ratings on the daily progress report card in a tier two behavior intervention. 

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