lundi 26 décembre 2022

L’effet positif de l’augmentation du taux de renforcement positif par l’enseignant en classe

L’effet positif du renforcement positif dans un contexte de gestion de classe a été largement établi. Différentes études ont eu lieu, les élèves y participant varient en âge, en culture et en statut de handicap, elles ont confirmé le caractère universel du phénomène. Elles ont permis de mieux comprendre l’interaction entre les comportements des enseignants et des élèves et l’importance de l’établissement de relations positives.

(Photographie : Ulrike Biets)







Caldarella et ses collègues (2020) se sont plus particulièrement intéressés à la règle des trois à cinq commentaires positifs pour un négatif. Ils ont voulu mettre en évidence comme la variation de ce taux influençait le climat général en classe. 



Différentes notions liées au renforcement positif


La notion de louange, de félicitation, d’éloge, de renforcement positif et de rétroaction positive spécifique


Le point faible des études en école portant sur le taux de commentaires positifs par rapport aux commentaires négatifs des enseignants est qu’elles ne s’accordent pas sur une définition universelle de la louange. Le terme de louange est d’ailleurs interchangeable à des nuances près, d’un auteur à l’autre, avec eux de félicitation, de renforcement positif et de rétroaction positive spécifique. Ces démarches peuvent porter à la fois sur le comportement et sur l’apprentissage.

Cette imprécision peut rendre difficile la comparaison des résultats de la recherche sur la louange entre les études. 

Dans le cadre de leurs recherches, Caldarella et ses collègues (2020) ont défini la louange comme une indication verbale d’approbation à la suite du comportement de l’élève plutôt que destiné à la reconnaissance d’une réponse correcte. 

Les caractéristiques suivantes peuvent être mises en évidence :
  • L’éloge a été reconnu comme la stratégie de gestion de classe la plus simple à mettre en œuvre. Il a également été noté comme un outil pour renforcer le comportement des élèves et une occasion de reconnaître l’engagement des élèves.
  • Les rétroactions positives spécifiques à un comportement, lors desquelles un comportement précis et la manière dont il a répondu à une attente de l’enseignant sont énoncés, sont considérées comme une pratique potentiellement fondée sur des preuves.
  • L’utilisation de louanges a été corrélée à des résultats scolaires et sociaux positifs.
  • Son degré d’utilisation est corrélé à l’auto-efficacité des enseignants. Les enseignants qui se sentent les plus efficaces sont aussi ceux qui délivrent plus de renforcement positif vers leurs élèves.



Le constat d’un déficit patent de louanges


Des taux relativement faibles de louanges de l’enseignant (louanges générales ou louanges spécifiques au comportement) ont été régulièrement observés dans des contextes d’enseignement général lors d’observations naturelles de classes entières. Ils ont également été mis en évidence lors d’observations d’élèves spécifiques présentant des comportements perturbateurs. 

Les recherches suggèrent que les louanges sont largement sous-utilisées dans les écoles, et que leur utilisation tend à diminuer à mesure que les élèves vieillissent.



Notion de réprimande et constats sur son impact


La notion de réprimande


Comme c’est le cas pour les félicitations ou les louanges, il n’existe pas de définition universelle des réprimandes. 

Les réprimandes ont été qualifiées de communication négative ou de punition contingente.

Caldarella et ses collègues (2020) ont défini la réprimande comme étant une désapprobation verbale :
  • Lorsque l’enseignant menace ou gronde un élève en réponse à un comportement inapproprié.
  • Lorsqu’il donne une instruction selon laquelle le comportement actuel de l’élève doit cesser.


Des constats sur l’usage et le manque d’impact des réprimandes sur le comportement des élèves

Un nombre relativement faible de recherches a été consacré aux réprimandes des enseignants, la plupart de ces recherches montrant les associations négatives des réprimandes avec le comportement des élèves.

Nous pouvons mettre en évidence que :
  • Les réprimandes des enseignants prédisent la non-conformité et le comportement négatif des élèves.
  • Les réprimandes ont été corrélées positivement avec le comportement problématique des élèves et l’épuisement émotionnel des enseignants (burn out).
  • La fréquence des réprimandes dans les classes est plus élevée que celle des louanges
  • Alors que les félicitations ont tendance à diminuer à mesure que le niveau scolaire augmente, il semble y avoir une augmentation parallèle des réprimandes.



L’utilité des réprimandes lorsqu’elles sont associées à des retours positifs réguliers et fréquents


Il est utile de comprendre comment les réprimandes de l’enseignant et ses félicitations interagissent et sont liées au comportement de l’élève en milieu scolaire.

Recourir à des réprimandes spécifiques occasionnelles de la part de l’enseignant peut s’avérer nécessaire. Une approche consistant à féliciter tous les élèves n’est peut-être pas réaliste, ni être la plus efficace pour gérer leur comportement en tant qu’approche unique.

Pfiffner et ses collègues (1985) ont mené une étude dans laquelle ils ont examiné les changements de comportement à la tâche chez huit élèves du primaire présentant des problèmes de comportement dans trois conditions : 
  • Retours positifs réguliers (par exemple des félicitations, la mise en évidence du travail bien fait) et retours négatifs (par exemple, réprimandes, retrait de privilèges).
  • Retours positifs réguliers sans retours négatifs
  • Retours positifs renforcés (par exemple des félicitations avec des activités spéciales à la récréation, des temps de chansons ou de dessin) sans retours négatifs. 
Le comportement à la tâche était le plus élevé dans la condition positive et négative régulière. Il était le plus faible dans la condition positive régulière. Cela indique que les conséquences positives seules ne paraissent pas efficaces pour maintenir le comportement à la tâche dans la classe. 

L’effet de la condition de retours positifs renforcés se rapprochait davantage des niveaux de comportement à la tâche maintenus dans la condition avec des positifs et des négatifs réguliers. 

Dans cette étude, les positifs et les négatifs réguliers étaient accompagnés de plus de félicitations et de moins de réprimandes. Il y avait environ 3,5 félicitations pour une réprimande, bien que ce chiffre variait d’un élève à l’autre. Si nous nous référons à la recherche, ce taux peut ne pas être une condition habituelle chez de nombreux enseignants.



Atténuer les effets négatifs potentiels des réprimandes en augmentant la fréquence du renforcement positif


Le constat est que les réprimandes peuvent parfois s’avérer nécessaires. Il est recommandé aux enseignants d’utiliser la pratique fondée sur les preuves que représente l’usage des félicitations pour atténuer les effets négatifs potentiels des réprimandes.

L’étude du taux de commentaires positifs par rapport aux commentaires négatifs des enseignants présente un intérêt pour la promotion d’un meilleur comportement des élèves. Il s’agit d’une stratégie ou d’une intervention simple qui consiste à comparer le nombre de louanges données au nombre de réprimandes données. Divers taux idéaux sont discutés théoriquement dans la littérature, allant de 3/1 à 5/1.

Les enseignants recherchent des interventions fondées sur des données probantes qui répondent aux besoins de leurs élèves. Les interventions qui donnent des résultats positifs et qui ne nécessitent que peu ou pas d’investissement, comme ce taux, sont particulièrement encourageantes. 

Les chercheurs ont constaté que les taux sont corrélés négativement avec le comportement perturbateur des élèves et positivement avec leur enthousiasme en classe et leur comportement à la tâche (Leff et coll., 2011). Il a été démontré que lorsque le taux augmente, le comportement des élèves à la tâche augmente (White, 2010). 

Ainsi, la modification du taux pourrait être un outil permettant d’influencer le comportement des élèves. Il a également été démontré que l’augmentation de ces taux améliore l’efficacité des interventions de gestion du comportement à l’échelle de la classe (Caldarella, Williams, Jolstead et Wills, 2017). 



Une preuve de l’impact d’une augmentation du taux de renforcement positif (Caldarella et coll., 2020)


Pendant trois années, Caldarella et ses collègues (2020) ont recueilli des données dans trois états des États-Unis (19 écoles élémentaires pour 151 classes). Leur objectif était d’analyser l’effet de cette règle appliquée par les enseignants sur le comportement de leurs élèves au cours de diverses activités en classe et de plusieurs niveaux scolaires. Les chercheurs ont utilisé des définitions opérationnelles claires tout en mesurant simultanément le comportement à la tâche des élèves. 

Dans le cas de leur étude, le taux a été calculé. Il représente le total des déclarations de félicitations de l’enseignant divisé par la somme du total des déclarations de félicitations de l’enseignant plus le total des réprimandes de l’enseignant. Cela a permis de créer un coefficient échelonné entre 0 et 1.




La moitié des enseignants ont été tirés au sort pour suivre une formation qui les encourageait notamment à augmenter le rapport entre le nombre de compliments et de réprimandes qu’ils donnaient. Ces enseignants sont représentés sur le graphique par les cercles, alors que ceux qui n’ont pas suivi la formation sont représentés par les points. 

Ceux qui n’ont pas suivi la formation démontrent généralement un taux moindre de compliments pour une réprimande, alors que ceux qui l’ont suivi, les cercles, donnent en moyenne trois compliments pour une réprimande. 

Les cercles sont globalement au-dessus des points sur l’axe des y. Par conséquent, leurs élèves sont plus concentrés sur les tâches scolaires que ne le sont ceux des enseignants qui n’ont pas suivi la formation. 

Cette expérience permet de répondre à l’interrogation sur le sens de la causalité. C’est bien lorsque le rapport compliments/réprimandes augmente que la concentration des élèves augmente, et pas simplement le contraire. 

Nous constatons que les commentaires négatifs ne produisent les effets désirés que dans un contexte qui est globalement positif, rassurant, motivant. Dans ce contexte, le bon engagement et les bons comportements sont eux aussi reconnus à leur juste valeur et récompensés. 

Plus généralement, augmenter le rapport compliments/réprimandes est un bon moyen de cultiver des relations plus positives avec ses élèves et d’améliorer le climat de classe. 

Cette étude montre que plus le taux de commentaires positifs par rapport aux commentaires négatifs des enseignants était élevé, plus le pourcentage de comportement à la tâche des élèves était élevé. Ils ont constaté une relation linéaire entre le comportement des élèves et taux des enseignants ce qui suggère que plus le taux augmente, plus le comportement des élèves s’améliore de manière linéaire et prévisible. 

Ils n’ont mis en évidence aucune valeur seuil pour le rapport où le comportement s’améliorerait de façon spectaculaire. Par contre, ils ont mis en évidence une relation linéaire positive évidente.

Les résultats suggèrent que toute augmentation du taux peut avoir un impact favorable sur l’engagement des élèves. Cette connaissance peut être utile aux enseignants, car certains ont du mal à maintenir continuellement des taux élevés de louanges.

Si les enseignants peuvent simplement féliciter davantage et progressivement réprimander moins, le comportement des élèves est susceptible de s’améliorer. Cette approche est plus simple que d’essayer d’atteindre un taux cible spécifique.



L’importance d’améliorer le taux de soutien au comportement positif


Selon la théorie de l’intervention et du soutien en matière de comportement positif, il est réaliste de s’attendre à ce qu’environ 80 % des élèves répondent à un niveau de soutien de niveau 1 ou universel. 

Les enseignants doivent donc s’attendre à ce que 80 % des élèves de leur classe réagisse à l’utilisation d’une intervention universelle telle que l’augmentation du taux. 

Dans le cadre de leur recherche, Caldarella et ses collègues (2020) ont constaté qu’à mesure que le taux augmentait, les élèves s’amélioraient pour atteindre le niveau souhaité de comportement à la tâche. Cependant, il est peu probable que le taux seul permette d’atteindre des niveaux élevés et constants de comportement à la tâche pour tous les élèves. Il faut également utiliser des techniques d’enseignement judicieuses et d’autres stratégies de gestion de classe fondées sur des données probantes.

Si l’augmentation du taux des enseignants peut améliorer le comportement à la tâche des élèves, d’autres stratégies de gestion de la classe sont également recommandées en parallèle :
  • L’enseignement explicite de routines et de règles.
  • Le rappel aux élèves des attentes de la classe par une rétroaction positive spécifique au fil du temps. 
  • L’augmentation des occasions de répondre lors des activités en classe (opportunités d’engagement dans un traitement significatif des contenus à apprendre).
  • L’utilisation d’un continuum de stratégies pour reconnaître les comportements appropriés et inappropriés.
  • La gestion des transitions et l’optimisation de l’usage du temps en classe.

Mis à jour le 09/11/2023

Bibliographie


Caldarella, P., Larsen, R. A. A., Williams, L., Downs, K. R., Wills, H. P., & Wehby, J. H. (2020). Effects of teachers’ praise-to-reprimand ratios on elementary students’ on-task behaviour. Educational Psychology, 40(10)

Caldarella, P., Williams, L., Jolstead, K. A., & Wills, H. P. (2017). Managing student behavior in an elementary school music classroom: A study of class-wide function-related intervention teams. Update: Applications of Research in Music Education, 35(3), 23–30. doi: 10.1177/8755123315626229 

White, R. L. (2010). Demonstration of the effects of an increased praise ratio on student on-task behavior (Doctoral dissertation [or Master's thesis]). Retrieved from ProQuest Digital Dissertations. (AAT 577644399) 

Leff, S. S., Thomas D. E., Shapiro E. S., Paskewich B., Wilson K., Necowitz-Hoffman, B., & Jawad, A. F. (2011). Developing and validating a new classroom climate observation assessment tool. Journal of School Violence, 10, 165–184. doi:10.1080/15388220.2010.539167 

Pfiffner, L. J., Rosén, L. A., & O'Leary, S. G. (1985). The efficacy of an all-positive approach to classroom management. Journal of Applied Behavior Analysis, 18, 257–261. doi:10.1901/jaba.1985.18-257 

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