lundi 25 juillet 2022

Utiliser stratégiquement des conséquences correctives en gestion de classe

Lorsque les stratégies d’intervention au niveau des perturbations mineures en gestion de classes sont épuisées, l’étape suivante est de recourir à une conséquence corrective. Comment choisir et utiliser stratégiquement des conséquences correctives supplémentaires ?

(Photographie : Keith Yahrling)



La notion de conséquence corrective et sa différence avec la punition


La notion de conséquence corrective


Dans le modèle ABC (antécédent, comportement [behaviour] et conséquence), les conséquences correctives sont des réponses qui suivent un comportement donné. Elles ont pour enjeu de réduire les occurrences futures de ce comportement inapproprié. 

Dans la perspective traditionnelle de la gestion de classe, elles soient appelées punitions ou sanctions. Dans la perspective du soutien au comportement positif, ces conséquences correctives ne sont pas conçues pour être punitives, mais se conçoivent comme pédagogiques. Elles sont conçues comme un moyen d’aider l’élève à apprendre le comportement approprié. 

Les enseignants utilisent régulièrement des conséquences correctives en réponse à un comportement inapproprié, en particulier lorsque le comportement inapproprié est répétitif ou ne répond pas ou plus aux seules stratégies d’enseignement et de prévention.



Les conséquences correctives ne sont pas punitives


Les conséquences correctives s’associent à l’enseignement d’un comportement alternatif ou souhaitable. Elles ont pour objet de renforcer le changement de comportement. Les conséquences efficaces ont pour enjeu d’entrainer un meilleur apprentissage.

Les conséquences correctives impliquent souvent des tâches ou des opportunités d’apprentissage directement liées au comportement inapproprié et orientant vers le comportement alternatif ou souhaitable. 

Une analogie éclairante pour comprendre les conséquences correctives est de les comparer à ce que nous faisons lorsque les élèves ne font pas de progrès scolaires dans les contenus de matière que nous leur enseignons. Nous trouvons des pratiques ou des activités supplémentaires parfois plus intensives pour les aider à apprendre. 

Des exemples de conséquences efficaces basées sur l’apprentissage sont :
  • Le jeu de rôle ou la pratique de la compétence en situation.
  • La réflexion sur le comportement inapproprié et le comportement alternatif ou souhaitable.
  • L’organisation d’une situation permettant à l’élève de démontrer la compétence
  • La réparation d’un comportement qui a eu un impact sur les autres.

Les conséquences efficaces préservent la dignité de l’élève et l’invitent à assumer la responsabilité de son comportement et à prendre une part active à la solution. 

Cependant, si les conséquences d’un comportement inapproprié sont destinées à être éducatives, elles sont également légèrement aversives. Elles exigent un effort de la part des élèves concernés et ne doivent certainement pas inciter à répéter le comportement inapproprié. 



La certitude de la conséquence corrective prime sur sa sévérité


Ce n’est pas la sévérité de la conséquence corrective qui renforce le changement de comportement, c’est plutôt la certitude que le comportement inapproprié l’entraine.

Il s’agit là d’un malentendu pédagogique courant. Les éducateurs recherchent souvent une conséquence plus importante, qui marque le coup afin d’avoir une plus grande assurance qu’elle mettra fin au comportement. Ils cherchent à se rassurer plus qu’à réfléchir en matière d’impact à long terme.

Il est important que des élèves susceptibles de courir dans les couloirs constatent que tous les membres du personnel arrêtent systématiquement les élèves qui le font pour remédier de manière cohérente aux mêmes violations des procédures. Cela les rendra plus enclins à adopter le comportement attendu. Si une fois sur trois, ils courent le risque d’une conséquence corrective plus grave, mais y échappent deux fois sur trois, l’effet sur leur comportement ne sera pas aussi marqué.

De plus, la sévérité d’une conséquence corrective s’accompagne d’un risque, celui de favoriser un comportement antisocial. Une importance excessive accordée à la punition concentre l’attention de l’élève sur la conséquence imminente et limite sa prise en compte de l’effet de son comportement sur les autres ou sur lui-même (Alberto & Troutman, 2012). 



Les conséquences correctives sont choisies en fonction de l’individu


Les conséquences sont plus appropriées lorsqu’elles sont choisies en fonction de l’individu, du comportement et du contexte spécifiques, de l’historique, de la fréquence ou de la gravité du comportement. 

Ce qui convient à un élève peut ne pas convenir à un autre. La norme visée doit être respectée, mais les conséquences sont personnalisées pour correspondre à la difficulté rencontrée et apporter un soutien à l’apprentissage du comportement alternatif ou souhaité. 

Les écoles se laissent souvent emporter par le désir d’être justes et d’imposer les mêmes sanctions pour les mêmes comportements perturbateurs. Paradoxalement, le résultat peut mener à moins d’équité et de cohérence. Ce qui compte ce n’est pas le comportement inadéquat, mais l’obtention du respect des attentes et des normes. Le besoin de cohérence et l’équité se rapportent au chemin à parcourir pour atteindre cette obtention.

Les conséquences du respect de ces normes peuvent être différentes en fonction de l’élève, car elles doivent indiquer le meilleur chemin vers l’amélioration du comportement. L’équité ne signifie pas que tout le monde obtient la même chose. L’équité signifie que chacun reçoit ce dont il a besoin pour réussir et intégrer les normes dans son comportement. 



Éviter le coût de la réponse


Nous parlons de coût de réponse lorsque la conséquence corrective retire un avantage précédemment acquis par le bon comportement de l’élève. Des points, des jetons, des privilèges ou d’autres renforcements déjà accordés à un élève sont retirés en fonction des occurrences d’un ou plusieurs comportements spécifiques. C’est une dimension à proscrire, car elle est contreproductive.

Avec un continuum de stratégies, il est préférable d’utiliser la conséquence la moins intrusive pour la fréquence ou la gravité du comportement et d’augmenter nos efforts d’enseignement. Le coût de la réponse peut à lui seul décourager les élèves. 

Les élèves qui ont des problèmes de comportement social peuvent avoir l’impression qu’ils ne peuvent pas atteindre les objectifs ou les attentes et donc abandonner. Ils ne recueillent pas le prix de leurs efforts et par conséquent ceux-ci leur paraissent vains et inutiles. Le coût de la réponse peut en fait augmenter la probabilité d’un comportement inapproprié plutôt que de le réduire. Le coût de la réponse est susceptible de favoriser le développement de comportements problématiques chroniques.



Développer la dimension éducative de la conséquence corrective


La restitution, la réparation ou le dédommagement


La restitution, la réparation ou le dédommagement sont des conséquences correctives logiques. Elles sont déterminées au départ d’une analyse rationnelle du comportement de l’élève. Elles ont l’objectif de faciliter et de rendre explicite dans l’esprit de l’élève le lien entre le comportement et la conséquence.

La démarche consiste à demander à l’élève de réparer les dommages ou de faire amende honorable à la suite du comportement inapproprié. Par exemple, nous donnons un devoir à faire à la maison lorsqu’un élève ne termine pas son travail en classe. Lorsqu’un élève court dans le couloir, il doit revenir sur ses pas et marcher. Lorsqu’il écrit sur les bancs, il doit nettoyer des bancs.



Autres conséquences à portée éducative


D’autres conséquences courantes ayant une pertinence éducative sont : 
  • L’apprentissage d’une démarche de résolution de problèmes et sa mobilisation.
  • Un nouvel enseignement et des occasions de pratique supplémentaire pour une compétence sociale ou comportementale.
  • Le rattrapage du travail manqué.
  • La médiation.
  • Une note envoyée à la maison. 
  • Un appel téléphonique ou une rencontre avec les parents.
  • Un contrat de comportement.
  • Un plan de soutien comportemental.
  • Etc.



L’élaboration d’un menu de conséquences spécifiques


L’élaboration d’un menu ou d’un continuum de conséquences spécifiques à chaque zone hors classe ou pour chaque procédure en classe aide à éviter les conséquences illogiques. Ces conséquences sont dites illogiques, car leur impact est incertain et non avéré.

Ce sont par exemple la suppression de la récréation ou l’organisation de retenues, qui ont tendance à être surutilisées dans de nombreuses écoles.

Nous utilisons les conséquences selon les besoins pour aider les élèves à modifier leur comportement inapproprié. 

Deux points d’attentions sont de : 
  • Veiller à associer toute conséquence supplémentaire à l’enseignement du comportement alternatif ou souhaitable.
  • Conserver un rapport de 4 pour 1 entre la rétroaction positive spécifique et la rétroaction corrective. 

Nous devons également prendre conscience que certaines conséquences correctives sont inefficaces. Si un enseignant remarque qu’il utilise une conséquence à plusieurs reprises pour le même comportement et que cette conséquence ne change pas le comportement en question, il est probablement temps d’employer une conséquence différente. Par exemple, certains élèves peuvent éprouver une fierté à se retrouver régulièrement en retenue.

Une activité utile est de considérer chaque procédure en classe ou hors classe. Nous dressons alors une liste des conséquences possibles correspondante d’un comportement inapproprié. Nous tâchons d’être précis et explicites. Nous vérifions ensuite que les conséquences établies sont pédagogiques et logiques. Nous nous assurons qu’elles aident l’élève à apprendre, à faire ou à pratiquer le comportement souhaité. Lorsque cette liste est complète, nous classons les conséquences par ordre croissant de poids.



Lorsque les élèves ne répondent pas aux conséquences correctives


Nous avons besoin de détecter et de suivre les élèves qui ne répondent pas aux efforts que le personnel déploie pour enseigner, encourager ou corriger les mauvais comportements mineurs.

Ces élèves ont besoin d’un suivi renforcé ou les enseignants concernés ont besoin d’un soutien en gestion de classe. Nous voulons avoir un moyen systématique de déplacer notre planification le long du continuum et d’accéder au personnel et aux services spécialisés disponibles. 

Une collecte de données sur les perturbations mineures favorisera cette intervention précoce et aidera les enseignants à autoévaluer l’efficacité de leurs stratégies. 

Ces données peuvent également aider le personnel à identifier des compétences spécifiques ou des paramètres scolaires qui nécessitent plus d’enseignement, de supervision ou d’encouragement. 

Les mauvais comportements mineurs et les corrections de l’enseignant se produisant fréquemment au cours de la journée, il serait impossible de garder une trace de chaque occurrence. 

La question est de savoir quand entamer une procédure de documentation pour un élève. 
Chaque école doit définir le moment où la décision de surveiller un comportement mineur doit être prise. 

Certains signes avant-coureurs de cette nécessité sont le fait que :
  1. L’élève perd régulièrement du temps d’enseignement à cause de son comportement.
  2. Le comportement est fréquent et demande beaucoup de temps à l’enseignant pour son suivi.
  3. L’intensité du comportement attire l’attention des élèves qui se trouvent à proximité et perturbe leurs activités d’apprentissage. 

Lorsque ces types de situations ou des situations similaires se produisent, il est utile que le personnel conserve des traces liées aux occurrences des comportements problématiques. Cela peut aider à prendre des décisions sur le moment d’engager d’autres soutiens plus intensifs et spécifiques pour résoudre le problème. 

La collecte de données n’a pas besoin d’être fastidieuse ou de prendre du temps. Les rapports d’incident peuvent disposer d’un emplacement pour notifier également ces types de comportements mineurs.

L’enseignant peut également utiliser des formulaires spécialement conçus pour compter ou cocher les comportements mineurs au fur et à mesure qu’ils se produisent
 
Il est important d’établir en école la règle sur le moment où il faut commencer à recueillir des données mineures et déterminer un format pour recueillir les informations. À ce moment-là, il est également essentiel de créer un système pour analyser les données. 

Pour établir un tel système, nous devons identifier une personne qui sera chargée de collecter les données auprès de l’ensemble du personnel selon un mode défini. Ensuite, il est nécessaire d’établir un processus pour analyser et partager les résultats basés sur les données avec les autres parties prenantes appropriées de manière à activer les services d’aide supplémentaire.


Mis à jour le 24/08/2023
 

Bibliographie


Missouri Schoolwide Positive Behavior Support, Tier 1, Team Workbook, 2018–2019

Alberto, P. A., & Troutman, A. C. (2012). Applied behavior analysis for teachers (8th ed.). Upper Saddle River, NJ: Pearson.

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