Lorsqu’ils présentent des contenus en classe, les enseignants efficaces engagent leurs élèves dans des activités et des interactions qui stimulent leur réflexion.
(Photographie : Jeff Rich)
Dans le cadre du Great Teaching Toolkit, Rob Coe et ses collègues (2020) ont identifié quatre priorités pour les enseignants qui veulent aider leurs élèves à apprendre davantage :
- Comprendre le contenu qu’ils enseignent et la manière dont il est appris
- Créer un environnement favorable à l’apprentissage
- Gérer la classe pour maximiser les possibilités d’apprentissage
- Présenter des contenus, des activités et des interactions qui activent la pensée de leurs élèves.
Dans cet article, nous allons explorer la quatrième priorité.
La complexité de l’engagement des élèves dans un processus de réflexion en classe
Les enseignants efficaces amènent leurs élèves à réfléchir sérieusement à la matière qu’ils veulent leur faire apprendre. Cependant, il est complexe d’obtenir un retour d’information fiable sur l’efficacité de l’enseignement. L’apprentissage des élèves est par définition invisible, lent et non linéaire.
La plupart des comportements de l’enseignant efficaces pour activer la réflexion des élèves sont assez complexes. Il n’existe pas de recettes toutes faites pour développer la métacognition des élèves, par exemple, ou pour leur donner un retour d’information approprié et exploitable.
La même action de l’enseignant peut être bonne dans un contexte, avec des élèves d’un âge, d’un background et d’un niveau particulier de connaissance ou de compétence, en relation avec un travail donné. Elle peut être mauvaise dans un autre contexte.
De fait, il est peu aisé d’établir des priorités parmi toutes les pratiques que les enseignants peuvent adopter à ce niveau. Il se peut que certaines autres dimensions comme la connaissance de contenus, la motivation des élèves ou la gestion de classe soient des conditions préalables à une activation efficace de la réflexion.
De même, certains éléments de l’activation cognitive des élèves en classe peuvent être des défis à long terme pour des enseignants et le projet de toute une carrière.
Même un enseignant expérimenté et expert peut trouver de la valeur à améliorer certains aspects de sa pratique.
De plus, certaines approches comme l’évaluation formative ou l’enseignement explicite sont avancés comme sont susceptibles d’offrir le plus grand effet de levier pour une large majorité d’enseignants.
1) Structurer l’enseignement
Structurer l’enseignement par des objectifs d’apprentissage
Les enseignants efficaces partagent les objectifs d’apprentissage avec leurs élèves de manière à aider ces derniers à comprendre à quoi ressemblent les attentes en matière d’apprentissage et la réussite correspondante :
- Ils ne se contentent pas de simplement écrire les objectifs du cours ou simplement demander aux élèves de les recopier. Les déclarations abstraites des objectifs d’apprentissage peuvent être utiles, mais ne sont certainement pas suffisantes.
- Ils aident également leurs élèves à comprendre pourquoi une activité particulière a lieu et comment l’apprentissage actuel s’inscrit dans une structure plus large. Ils donnent du sens à l’apprentissage.
- Ils attirent l’attention de leurs élèves sur les idées clés et signalent les transitions entre les activités qui recouvrent différentes parties du parcours. Un objectif d’apprentissage est un élément intégré à un tout.
- Ils présentent les objectifs d’apprentissage comme des défis qui ne sont ni trop simples ni disproportionnés et qui se construisent au départ des connaissances préalables des élèves.
- Pour spécifier correctement les objectifs d’apprentissage, les enseignants doivent également disposer :
- D’exemples des types de problèmes, de tâches et de questions que les apprenants seront en mesure d’accomplir.
- Des exemples de travaux qui les démontrent, avec une explicitation sur la manière et la raison pour lesquelles chaque travail répond à chaque objectif.
- Ils précisent également les conditions et les critères en lien avec l’évaluation ultérieure de ces objectifs d’apprentissage.
Structurer l’enseignement par la planification de tâches adaptées au niveau des élèves
Les enseignants efficaces adaptent les tâches aux besoins et à l’état de préparation de leurs élèves :
- Les tâches doivent présenter un niveau de difficulté approprié pour chaque élève compte tenu des connaissances et des ressources existantes sur lesquelles ils peuvent s’appuyer :
- Les tâches sont suffisamment difficiles pour faire progresser les élèves dans leurs apprentissages.
- Les tâches ne sont pas trop difficiles pour que les élèves puissent y arriver.
- Les tâches doivent également favoriser une réflexion profonde plutôt que superficielle. Elles mettent l’accent sur l’abstraction, la généralisation, la connexion et la flexibilité des idées plutôt que sur la simple récupération de connaissances en mémoire ou l’application basique de procédures.
- Lors de la planification d’un programme :
- Les tâches doivent être séquencées de manière à ce que les connaissances et les compétences préalables soient accessibles et maîtrisées au moment où elles seront mobilisées.
- L’organisation et l’intégration régulière de révisions sont prévues pour assurer un apprentissage durable.
Structurer l’enseignement par un étayage qui soutient l’apprentissage
Les enseignants efficaces s’emploient à rendre les tâches accessibles à tous autant que possible :
- Ils reconnaissent que les tâches complexes nécessitent un étayage. Ils débutent par une version simplifiée ou limitée de la tâche pour la rendre gérable par les élèves.
- L’élément crucial de l’étayage est qu’il soit retiré à mesure que les idées et les procédures deviennent sûres, automatisées et fluides pour les élèves. À terme, tous les élèves atteignent le niveau requis de maîtrise.
- L’une des caractéristiques des enseignants efficaces est qu’ils exigent de tous leurs élèves qu’ils réussissent. Si l’étayage permet une entrée en matière plus douce, la destination reste la même.
- La connaissance des besoins individuels des élèves est importante. Celle-ci peut nécessiter une certaine différenciation, car différents apprenants peuvent commencer avec différents niveaux de préparation et différentes capacités d’apprentissage des nouveaux contenus. Le préenseignement peut être une piste pour répondre à cette problématique.
- Les élèves moins performants peuvent prendre plus de temps et nécessiter plus d’aide, mais l’objectif des enseignants efficace est d’augmenter la moyenne et de diminuer la variance de leurs classes.
Lorsque l’étayage perdure trop longtemps, il a été montré dans le cadre de la théorie de la charge cognitive qu’un effet d’inversion de l’expertise se manifeste et peut se révéler contreproductif pour l’apprentissage :
- Des stratégies comme la présentation d’un contenu limité et structuré et d’exemples résolus fonctionnent parfaitement pour les élèves qui sont novices. Ils n’ont pas encore les connaissances du sujet ou du domaine encodées dans des schémas dans la mémoire à long terme.
- Elles ne sont plus les plus efficaces pour les experts, dont le découpage et l’automatisation des éléments individuels leur permettent d’aborder et d’apprendre davantage en résolvant des problèmes entiers.
- L’utilisation de la résolution de problèmes comme stratégie d’enseignement est écrasante et inefficace pour les apprenants qui ne disposent pas des connaissances de base requises, mais devient optimale et nécessaire lorsqu’ils en disposent.
2) Expliquer les contenus
La présentation de bonnes explications n’est pas une compétence générique, comme serait celle d’un bon communicateur. Elle dépend d’une connaissance détaillée du contenu et des idées expliqués et de la manière dont ils sont appris en fonction de connaissances préalables et des caractéristiques des élèves.
Les explications sont claires, concises, adéquates et engageantes
Les enseignants efficaces présentent et communiquent les nouvelles idées clairement, avec des explications concises, adéquates et engageantes :
- Tous les enseignants présentent de nouveaux contenus et de nouvelles idées à leurs élèves, mais les meilleures présentations se caractérisent par des explications concises, appropriées et engageantes. Elles conviennent parfaitement aux élèves : ni trop courtes, ni trop longues, ni trop complexes, ni trop simples.
- Les principes issus de la théorie de la charge cognitive et de l’enseignement explicite appuient l’importance de bonnes explications.
- Lors de la présentation des contenus, les enseignants doivent prêter attention à la gestion de la charge cognitive de leurs élèves :
- Limiter le nombre et la complexité des nouveaux éléments
- Décomposer les idées ou procédures complexes en étapes plus petites
- Aider les élèves à assimiler les concepts au sein de leurs schémas existants qui vont s’étendre.
- Minimiser les éléments secondaires, extérieurs, non pertinents ou distrayants, qu’ils proviennent du contenu ou de l’environnement.
- Les présentations sont planifiées, élaborées et affinées, en utilisant l’expertise collective d’enseignants expérimentés et le retour sur expérience, afin de les rendre aussi efficaces que possible.
Les connaissances préalables sont diagnostiquées, réactivées, mobilisées et reliées aux nouvelles idées
Dans le cadre d'un enseignement explicite, les enseignants mobilisent, vérifient et activent les connaissances antérieures, les renforcent et y relient les nouvelles idées :
- Ils savent qu’une connaissance durable et flexible dépend de la connexion des idées entre elles, de la création et de la modification des schémas.
- Les connaissances antérieures sont structurées en schémas et le processus d’acquisition de nouvelles connaissances consiste à les intégrer dans des schémas existants ou modifiés et à établir des connexions entre eux.
- L’apprentissage dépend des liens que les apprenants établissent entre les nouvelles idées et ce qu’ils savent déjà.
- La mémoire à long terme structure, rend flexibles et connecte les connaissances, ce qui permet de les utiliser pour résoudre des problèmes ou effectuer des tâches complexes.
- Lorsqu’un élève dispose d’un bon stock de connaissances bien structurées, et de compétences automatisées et fluides, l’acquisition de nouvelles idées et procédures est beaucoup plus facile.
Le modelage utilise des exemples et contre-exemples de manière appropriée
Les enseignants efficaces utilisent des exemples (et des contre-exemples) de manière appropriée pour aider les apprenants à comprendre et à établir des liens :
- Les exemples peuvent rendre l’abstrait concret et favoriser la compréhension conceptuelle s’ils sont utilisés de manière appropriée.
- Les exemples fournissent du contenu aux processus de construction et de développement de schémas qui sont nécessaires pour que les nouvelles connaissances soient connectées, classées et stockées.
- Ces processus ont également besoin de contre-exemples, d’exceptions et de cas limites. Ils contribuent à définir les limites d’une règle ou d’une définition. Pour que les élèves puissent construire des schémas précis et profonds, ils doivent comprendre les limites entre ce qui correspond et ce qui ne correspond pas comme exemple.
- Il existe également de nombreuses preuves que l’étude de problèmes résolus peut être utile pour introduire de nouvelles idées. De même, les problèmes à compléter dans lesquels les élèves reçoivent des solutions partielles et doivent les compléter sont particulièrement efficaces. Ceux-ci peuvent aider les élèves à se concentrer sur les exemples, mais aussi à gérer le niveau de difficulté tout en conservant des tâches authentiques.
3) Vérifier la compréhension
Selon Smith et coll. (2008), les facteurs de différenciation les plus forts entre les enseignants experts et expérimentés sont :
- L’accent mis sur la promotion de l’apprentissage en profondeur à travers le questionnement
- La présentation efficace du contenu
- La création d’un climat d’apprentissage
- La qualité de la rétroaction
- La conviction que tous les élèves peuvent réussir.
Assurer la qualité du questionnement lors de la vérification de la compréhension
Le questionnement en classe est l’une des actions les plus courantes que font les enseignants. La clé n’est pas uniquement le nombre de questions, mais leur qualité, leur type et la manière dont elles sont utilisées.
Nous devons prendre en compte le temps accordé aux élèves pour y répondre et la profondeur de la réflexion qu’elles entraient ou suscitent. Leur impact dépend également de la manière dont les enseignants interagissent avec leurs élèves à partir de leurs réponses.
De même, il y a au fil du temps une progression :
- Des questions de simple récupération de connaissances, à privilégier au début d’une matière pour vérifier que les élèves sont engagés.
- Des questions de compréhension par la suite pour vérifier que les élèves traitent efficacement les informations.
- Des questions qui dans une dernière phase vont demander de l’élaboration et un traitement des connaissances, qui deviennent de plus en plus centrales quand les élèves progressent dans une matière. À ce stade, nous vérifions l’apprentissage et la capacité des élèves à faire des liens.
Les questions sont posées dans le but :
- De maintenir leur attention en les aidant à éviter les risques de distraction.
- De renforcer l’engagement des élèves en donnant une dimension dynamisante au cours.
- De favoriser la réflexion des élèves pour augmenter l’apprentissage en classe
- D’évaluer leurs progrès de manière à rendre l’enseignement plus adaptatif
Les enseignants efficaces vont :
- Utiliser le questionnement dans le cadre d’un dialogue formatif pour stimuler l’engagement et le traitement génératif des élèves.
- Utiliser le questionnement comme un outil pour promouvoir une pensée profonde qui stimule la création de liens entre différentes connaissances.
- Inciter les élèves à élaborer des explications et des justifications pour leurs réponses, ou simplement à améliorer une réponse initiale. Ils veulent les encourager, à décrire leurs processus de réflexion, à développer leurs réponses, à explorer les implications, les hypothèses et les liens avec d’autres idées et connaissances.
- Utiliser un éventail large d’activités pour promouvoir l’oralité et le dialogue. Ils peuvent également encourager les élèves à poser leurs propres questions.
- Offrir de multiples opportunités de récupération de connaissances précédemment apprises en classe
Assurer la qualité du questionnement et de sa mise en oeuvre dans une démarche d’évaluation formative
Les enseignants efficaces mobilisent le questionnement dans une optique d’évaluation formative :
1) La vérification de la compréhension se fait en profondeur et concerne tous les élèves :
- L’accent est mis sur la sollicitation et la vérification régulière de la pensée, des connaissances et de la compréhension des élèves.
- Les enseignants efficaces mettent également en œuvre des stratégies pour vérifier les réponses de tous les élèves.
2) La vérification de la compréhension est inscrite dans un cadre de dialogue formatif :
- Il est difficile de poser des questions ou de fournir des indices qui permettent de déterminer clairement si les élèves ont acquis les connaissances et la compréhension requises. Les réponses des élèves sont toujours équivoques et les interprétations sont probabilistes plutôt que certaines.
- Un questionnement interactif peut contribuer à surmonter ce problème si les suivis et les indices sont habilement utilisés pour clarifier les choses.
3) La qualité des questions en matière de retour d'information générée est essentielle :
- Il est essentiel de commencer par de bonnes questions qui fournissent un maximum d’informations. Lorsqu’elles sont utilisées à des fins d’évaluation formative, les questions doivent être considérées comme des outils permettant d’obtenir un retour d’information sur la pensée des élèves.
- Les questions fournissent des informations si elles font la distinction entre ceux qui savent et ceux qui ne savent pas encore. Qu’il s’agisse d’une simple question orale ou d’une évaluation écrite, les enseignants efficaces comprennent la quantité d’informations qu’elle fournit, son poids et les déductions et décisions qu’elle peut appuyer.
Les enseignants efficaces comprennent que ce qui a été appris n’est pas la même chose que ce qui a été enseigné (Nuthall, 2007). Ils savent ce qui a été enseigné et veulent suivre ce qui a été réellement compris et appris par leurs élèves. Par le suite, ils planifient et adaptent leur enseignement pour répondre à ce que leur dit l’évaluation formative.
L’évaluation est le seul outil dont nous disposons pour rendre ce qui a été appris visible, bien que ce soit de manière approchée et imparfaite.
Il est difficile de poser des questions pertinentes et appropriées qui ciblent l’apprentissage essentiel. Il n’est pas aisé de recueillir et d’interpréter les réponses de chaque élève et d’y réagir, le tout en temps réel dans le cadre d’une leçon. Cependant, les enseignants efficaces le font et c’est probablement une compétence qui s’apprend.
4) Offrir une rétroaction
La qualité des interactions et du retour d’information entre les enseignants et les élèves est essentielle au processus d’apprentissage.
La rétroaction a deux objectifs distincts :
- Un retour d’information aux enseignants qui éclaire leurs décisions
- Un retour d’information aux élèves qui les aide à apprendre.
Recueillir un retour d’information pour éclairer les décisions de l’enseignant
Les informations issues des réponses aux questions et aux évaluations constituent la base de ce retour d’information qui vise à éclairer les décisions de l’enseignant
C’est la manière dont l’enseignant réagit à ce retour d’information qui importe. Tout d’abord, les enseignants doivent comprendre et interpréter le résultat de l’évaluation de manière appropriée. Ils peuvent avoir besoin de contrôler ou de vérifier que leurs interprétations sont correctes. Ils doivent également évaluer le contexte avec précision, en étant sensibles aux besoins, à l’historique et aux dispositions de l’élève ou des groupes d’élèves concernés.
Les enseignants doivent ensuite identifier et décider parmi une série d’options d’action lesquelles sont pertinentes dans la situation actuelle. Les choix posés par l’enseignant comporteront des compromis entre, par exemple, le temps, l’effort et le bénéfice escompté.
Si certains élèves ont besoin de plus de temps et d’aide sur un sujet alors que d’autres sont prêts à passer à autre chose, par exemple, ce choix peut être difficile. Enfin, les enseignants doivent mettre en œuvre l’option choisie de manière efficace pour obtenir l’apprentissage souhaité.
Délivrer un retour d’information pour aider les élèves à apprendre
Si la rétroaction agit sur le pilotage de l’enseignant, ce qui agit indirectement sur l’élève, elle peut également agir directement sur l’élève.
Le retour d’information peut améliorer de manière efficace l’apprentissage. Nous savons également que les effets médiateurs des différentes combinaisons de types de retour d’information, des caractéristiques de l’apprenant et de la tâche et des différentes manières de donner un retour d’information sont extrêmement complexes.
Il n’existe pas de recettes simples pour donner un retour d’information efficace.
Le retour d’information peut aider en clarifiant ou en soulignant les objectifs ou les critères de réussite. Il dirige ainsi l’attention des élèves vers des objectifs productifs. Il peut attirer l’attention sur un écart entre les niveaux de performance réels et souhaités, ce qui, là encore, peut être positif si les objectifs sont stimulants, acceptés et accompagnés de sentiments d’auto-efficacité.
Le retour peut indiquer des attributions de succès ou d’échec à des raisons que l’élève peut contrôler, comme l’effort ou le choix de la stratégie. Il peut également indiquer les prochaines étapes productives dans lesquelles l’élève peut s’engager. Ce dernier mécanisme est peut-être le plus difficile à prévoir et à mettre en œuvre. C’est précisément parce qu’il s’agit d’une interaction complexe entre ce que l’apprenant sait déjà, ce qu’il doit savoir et sa volonté de faire ce qui est nécessaire pour combler l’écart.
Il faut également un jugement d’expert de la part de l’enseignant sur le type d’actions à entreprendre qui est le plus susceptible de générer le plus d’apprentissages, compte tenu de toutes ces variables. Les enseignants efficaces ont suffisamment de connaissances et d’expérience de situations similaires pour développer une intuition solide sur ce qui est susceptible de fonctionner le mieux pour les élèves. Toutefois, une telle intuition est difficile à exprimer déclarativement par des règles simples.
5) Viser des apprentissages intégrés et durables
Soutenir l’intégration des connaissances consiste à faire ce qui est nécessaire pour que l’apprentissage se maintienne durablement et gagne en profondeur.
L’importance de l’intégration de l’apprentissage repose sur une idée centrale de la théorie de la charge cognitive. La mémoire n’est pas seulement un espace de stockage de connaissance qui pourrait tout aussi bien être consulté sur un support écrit. Les schémas que nous utilisons pour organiser les connaissances en mémoire sont les éléments mêmes que nous utilisons pour penser et pour relier un nouvel apprentissage.
Il existe de nombreuses façons pour les enseignants efficaces d’œuvrer à l’intégration des apprentissages. L’une d’entre elles consiste à s’assurer que les élèves pratiquent régulièrement toutes les procédures qui leur sont demandées afin d’en développer une maîtrise fluide et précise. Le surapprentissage (le fait de continuer à s’exercer après que la performance a atteint une norme donnée) peut être important pour produire un apprentissage durable et flexible.
Les connaissances ou les schémas nécessaires à un apprentissage durable doivent être sûrs et facilement récupérables. L’oubli est normal, il est une part du processus, mais peut à terme être ralenti ou empêché par une révision et un examen périodique des connaissances et compétences.
Encodage, stockage, consolidation et intégration
Les grands enseignants veillent à ce que les élèves s’exercent jusqu’à ce que l’apprentissage soit fluide, automatique et sûr en leur offrant les conditions d’une pratique distribuée. Préalablement, il est important de noter ici que la pratique des élèves doit généralement être surveillée et guidée au départ.
Dans le cadre d’un nouvel apprentissage, il y a généralement une transition :
- Nous commençons par l’aide à l’apprentissage des connaissances, le développement de connexions et de la compréhension, et la construction de schémas. C’est l’encodage et le stockage.
- Nous poursuivons par la consolidation, l’acquisition de la confiance et de la fluidité. Au cours de cette phase, l’étayage est peu à peu supprimé, tout comme le besoin de conseils et de suivi de la part de l’enseignant, jusqu’à atteindre le surapprentissage.
- Nous terminons par l’intégration et la reconsolidation, où la pratique devient indépendante, fluide, précise et automatique.
Les enseignants efficaces comprennent et planifient cette transition, en surveillant et en soutenant le passage de chaque élève et en veillant à ce qu’il y ait suffisamment de temps pour chaque étape.
La pratique est particulièrement efficace si elle est distribuée dans le temps, avec des intervalles délibérés pour l’oubli. Une telle répartition de la pratique donne l’impression que l’apprentissage est plus difficile et réduit les performances pendant la pratique réelle, même si elle est plus efficace à long terme. C’est ce que Bjork et Bjork (2011) ont appelé une difficulté souhaitable.
Les enseignants efficaces donnent aux élèves l’occasion de s’exercer aux procédures et au rappel des informations qui doivent être apprises jusqu’à ce qu’elles soient fluides. Ils leur permettent de revenir dessus et de s’exercer à nouveau à plusieurs reprises après avoir laissé le temps d’oublier.
Tout au long du parcours, la pratique de récupération est un processus utile qui contribue largement à la réussite du processus. Nous demandons aux élèves de produire des réponses ou de rappeler des informations de mémoire dans un processus semblable par exemple lors d’une évaluation formative à faible enjeu. De nombreuses recherches montrent qu’il s’agit du moyen le plus efficace d’accroître la capacité de récupération à long terme, c’est-à-dire la capacité de se rappeler des informations ou des procédures après un délai. En outre, les avantages des tests ne se limitent pas à un simple rappel. Le fait de devoir chercher et générer des réponses renforce également les liens avec les informations connexes et la capacité de les retrouver.
Comme pour tout apprentissage, les élèves s’améliorent dans ce que nous leur demandons de faire. Il est donc important de leur demander de répondre à des questions qui vont au-delà du simple rappel et de la réflexion de surface. Les enseignants efficaces utilisent l’effet du test pour retarder l’oubli avec des questions qui demandent une réflexion profonde et connectée.
Il existe également d’autres pratiques qui, si elles sont bien appliquées, peuvent contribuer à garantir que l’apprentissage est intégré de manière durable et flexible :
- L’entremêlement
- La variation des conditions de la pratique
- L’élaboration et de l’auto-explication.
Les enseignants efficaces comprennent les principes qui sous-tendent ces effets et les contextes dans lesquels ils sont susceptibles d’être utiles. Ils disposent d’un éventail de stratégies pour les déployer dans la pratique, et en intègrent une utilisation appropriée et efficace dans leur enseignement.
6) Offrir un enseignement explicite de l’apprentissage autonome aux élèves
Nous voulons aider les élèves à devenir indépendants et efficaces dans leur travail à domicile. Pour cela nous leur enseignons explicitement comment planifier, réguler, étudier et contrôler leurs propres apprentissages.
L’opération consiste à leur faire acquérir des stratégies cognitives et métacognitives. Les élèves de tous âges devraient se voir enseigner explicitement des stratégies pour planifier, suivre et évaluer leur apprentissage, idéalement dans le contexte du contenu spécifique qu’ils apprennent.
Les enseignants efficaces attirent également l’attention sur leur propre planification et leur autorégulation lorsqu’ils modélisent le processus de réalisation de tâches complexes, et encouragent de la même manière les élèves à auto-expliquer leur pensée.
Mis à jour le 17/08/2023
Bibliographie
Coe, R., Rauch, C. J., Kime, S., & Singleton, D. (2020). Great Teaching Toolkit: Evidence Review. Evidence Based Education.
Smith, T. W., Baker, W. K., Hattie, J., & Bond, L. (2008). A validity study of the certification system of the National Board for Professional Teaching Standards. In R. E. Stake, S. Kushner, L. Ingvarson, & J. Hattie (Eds.), Assessing teachers for professional certification: The first decade of the National Board for Professional Teaching Standards (Vol. 11, pp. 345–378). Emerald Group Publishing Limited. https://doi.org/10.1016/S1474-7863(07)11012-7
Nuthall, G. (2007). The hidden lives of learners. NZCER Press.
Bjork, E. L., & Bjork, R. A. (2009). Making things hard on yourself, but in a good way: Creating desirable difficulties to enhance learning. In M. A. Gernsbacher & J. R. Pomerantz (Eds.), Psychology and the real world: essays illustrating fundamental contributions to society (pp. 55–64). Worth Publishers.
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