mercredi 29 juin 2022

Approches universelles en gestion du comportement et stratégies d’interventions antécédentes

Les enseignants excellents gèrent la classe de manière à maximiser les possibilités d’apprentissage. C’est le troisième des quatre dimensions du modèle Great Teaching (2020). Aucun modèle d’efficacité de l’enseignement ne saurait être complet sans la gestion de la classe. Les enseignants gèrent le comportement et les activités d’une classe d’élèves.

(Photographie : Anna Beeke)



L’imbrication des stratégies d’enseignement et de la gestion de classe


Un certain nombre d’aspects de la gestion de classe sont fonction de l’enseignement des contenus et des compétences pédagogiques essentielles :
  • Donner des instructions claires pour que les élèves comprennent ce qu’ils doivent faire.
  • Présenter le contenu du programme dans un format accessible pour les élèves qui disposent d’un maximum de temps pour s’y engager.

La manière de le faire est également un sujet de controverse, les différents enseignants ont des styles, des valeurs, des conceptions pédagogiques et des priorités très différents. 

L’angle à privilégier est celui d’une éducation fondée sur des données probantes.

Les stratégies d’intervention antécédentes à l’échelle de la classe qui sont l’objet de cet article ne représentent généralement qu’une composante du soutien global apporté aux élèves ayant des problèmes de comportement récurrents. 

Ces élèves ont également besoin d’un enseignement des compétences, de conséquences sur leur comportement problématique. Il est possible également qu’ils aient besoin d’un accompagnement plus soutenu.



Gérer efficacement le temps d'apprentissage en classe 


L’enjeu de gérer efficacement le temps d'apprentissage est de maximiser la productivité, d'optimiser l'organisation de la classe et de minimiser les distractions.

Les enseignants efficaces planifient les activités et les ressources de manière à ce que tout se passe pour le mieux :
  1. Le temps d’installation au début d’une leçon ou après une transition est réduit au minimum.
  2. Les élèves s’engagent de suite dans un travail significatif et travaillent jusqu’à la fin du cours.
  3. L’enseignant donne aux élèves des instructions claires et simples afin qu’ils sachent exactement ce qu’ils doivent faire à tout moment. 
  4. Les routines sont un élément central d'un enseignement de qualité et ont été enseignées explicitement.



Mettre en œuvre les règles, les attentes et les conséquences 


Nous devons nous assurer que les règles, les attentes et les conséquences en matière de comportement sont explicites, claires et appliquées de manière cohérente.

Prenons un enseignant qui enseigne un sujet difficile à une classe comprenant des élèves ayant des comportements perturbateurs persistants dans une école où les règles ne sont pas claires ou sont appliquées de manière incohérente. 

Il aura une manière d’être très différente avec un sujet facile et attrayant, une classe pleine d’élèves attentifs, calmes et posés et dans une école où le soutien au comportement est communément installé

Il importe qu’il y ait une application cohérente et équitable des règles :
  • Les règles et les attentes doivent être clairement comprises et acceptées par tous les élèves. 
  • Les violations doivent être rares, mais lorsqu’elles se produisent, elles sont traitées de manière équitable et appropriée. Elles le sont de la manière la plus cohérente possible, afin que les élèves sachent que des conséquences prévisibles s’ensuivront.



Prévenir, anticiper et répondre aux perturbations


En tant qu’enseignants nous devons prévenir, anticiper et répondre aux incidents potentiellement perturbateurs. Nous renforçons les comportements positifs des élèves. Nous sommes vigilants et signalons que nous sommes conscients de ce qui se passe dans la classe. Nous réagissons en retour de manière appropriée.

L’une des caractéristiques d’un bon enseignement est que les perturbations ne sont pas visibles. C’est souvent parce que l’enseignant a réussi à les anticiper, à les empêcher. Par là, il fait acquérir de bonnes habitudes à ses élèves. 

La gestion du comportement des élèves comporte deux dimensions : la prévention et l’intervention. 

Ce sont deux dimensions déjà bien développées dans nos pages, mais un autre élément mis en évidence est l’utilisation de stratégies antécédentes (Kern et Clemens, 2007), ciblées sur l’ensemble de la classe ou sur un élève. 



Le concept de stratégies d’interventions antécédentes en gestion de classe


Les enseignants mobilisent des stratégies d’interventions antécédentes pour créer un environnement de classe positif, ordonné, prévisible et motivant. Grâce à elles, ils préviennent les perturbations et gèrent le comportement des élèves. 

Les domaines de l’éducation et du comportement humain reconnaissent depuis longtemps la relation entre le comportement d’un individu et son environnement, celui-ci se manifeste à travers l’influence des antécédents sur le comportement. 

Malheureusement, bien souvent, les approches d’intervention adoptées par les enseignantes en classe ne vont pas dans le sens de cette compréhension. En d’autres termes, les enseignants privilégient trop souvent des stratégies d’interventions basées sur des conséquences. C’est-à-dire qu’ils visent à influencer le comportement des élèves surtout sous la forme de réponses punitives, lorsque des problèmes scolaires ou comportementaux surviennent.

Pourtant, de nombreux résultats de recherche montrent que ce n’est peut-être pas une approche tout à fait efficace, expéditive ou complète des problèmes scolaires et comportementaux.

Au lieu de cela, les stratégies d’intervention antécédentes sont plus susceptibles d’avoir un impact important et un effet durable. Elles visent à modifier les événements environnementaux qui engendrent les difficultés des élèves ou servent de déclencheurs aux comportements perturbateurs.



Nature des stratégies d’intervention antécédentes


Une approche du changement environnemental consiste à se concentrer sur les événements qui précèdent immédiatement le désengagement scolaire ou les comportements problématiques. 

Pour développer des interventions antécédentes, des informations sont obtenues sur les événements deux types d’environnementaux :
  • Ceux qui semblent propices aux occasions d’un comportement problématique
  • Ceux qui sont associés à un comportement souhaitable. 

Les modifications vont être deux types : 
  • Elles visent à éliminer les événements qui précèdent les problèmes d’une manière ou d’une autre afin qu’ils ne déclenchent plus le comportement perturbateur ou le désengagement dans le travail scolaire.
  • Elles renforcent les événements associés à un comportement souhaitable.
 
Les stratégies d’intervention antécédentes, sous la forme d’interventions à l’échelle de la classe, répondent aux besoins de la plupart des élèves d’une classe donnée. Dans le cas d’une classe généralement perturbée, ces interventions plus larges sont initialement recommandées. 

Toutefois, lorsque les problèmes persistent chez certains élèves, des interventions individualisées s’imposent. Plutôt qu’une approche par essais et erreurs, le processus d’analyse fonctionnelle du comportement permet d’isoler les variables associées au comportement problématique. Celles-ci sont ensuite traduites en interventions uniques et ciblées. De cette manière, les interventions deviennent de plus en plus efficaces et efficientes, car elles sont adaptées aux besoins individuels de l’élève. Cependant, elles mobilisent plus de ressources, c’est la raison pour laquelle une logique d’utilisation des ressources de type réponse à l’intervention devrait toujours être privilégiée.



Avantages et enjeux des stratégies d’intervention antécédentes


  • Les stratégies d’intervention antécédentes peuvent prévenir l’apparition d’un comportement problématique :
    • En supprimant ou en modifiant les événements environnementaux qui précèdent le comportement problématique, la probabilité de ce dernier est réduite ou éliminée. 
    • Ceci est important non seulement pour créer un environnement sûr, mais aussi pour créer une atmosphère propice à l’apprentissage. 
  • Les stratégies antécédentes ont tendance à avoir un effet rapide :
    • La suppression ou la modification des événements à l’origine du comportement problématique entraîne généralement une réduction immédiate de ce dernier. 
    • L’avantage évident se situe dans les cas de comportements dangereux ou destructeurs, mais l’élimination rapide de tout type de problème de comportement est souhaitable du point de vue de la gestion de la classe. 
  • Les stratégies antécédentes corrigent un environnement qui contribue au comportement problématique : 
    • Souvent, les comportements problématiques résultent d’une inadéquation entre l’environnement et les compétences, les forces ou les préférences d’un individu. Des tâches trop difficiles pour un élève sont une cause fréquente de comportement problématique en classe.
    • L’adaptation de l’enseignement aux compétences et aux performances de l’élève corrige ce problème environnemental. Nous pouvons faire une analogie avec l’action de déplacer un élève malvoyant vers l’avant de la classe pour pallier ses difficultés de vision. 
  • Les stratégies antécédentes peuvent améliorer l’environnement pédagogique :
    • Les événements antécédents associés au comportement problématique sont diminués ou éliminés tandis que ceux associés au comportement souhaitable sont augmentés. 
    • Ces changements environnementaux soigneusement élaborés peuvent créer des classes où les élèves ont envie d’être et sont motivés pour apprendre. 
    • Cette approche est prometteuse pour améliorer les résultats et la productivité des élèves, même en l’absence de comportement problématique. 

Si les stratégies antécédentes sont souvent efficaces et peuvent prévenir de nombreux comportements problématiques, voire la plupart, elles sont rarement suffisantes à elles seules. 

En effet, les comportements problématiques sont souvent le résultat de déficits de compétences ou de performances. C’est par exemple l’incapacité à résoudre les problèmes de mathématiques assignés ou l’absence des compétences sociales nécessaires pour participer à un jeu de groupe en cours. 

Ainsi, en plus des stratégies antécédentes, l’intervention nécessite généralement l’enseignement des compétences et connaissances déficientes.

De même, des conséquences restent nécessaires, si le comportement problématique se produit, pour s’assurer qu’il n’est pas renforcé. L’enseignement des compétences et les stratégies de conséquences sont toujours des éléments importants d’une approche d’intervention globale. 


Mis à jour 13/08/2023

Bibliographie


Coe, R., Rauch, C. J., Kime, S., & Singleton, D. (2020). Great Teaching Toolkit: Evidence Review. Evidence Based Education. 

Kern, L., & Clemens, N. H. (2007). Antecedent strategies to promote appropriate classroom behavior. Psychology in the Schools, 44(1), 65–75. https://doi.org/10.1002/pits.20206

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