dimanche 19 décembre 2021

Planifier l’utilisation d’une rétroaction efficace, écrite ou orale

Il existe une complémentarité entre rétroaction écrite et orale. La première conserve une trace pour l’élève tandis que la seconde s’exploite plus directement en classe. Nous explorons ces deux formes de rétroaction dans cet article. 

(Photographie : Toudai)



Considérer le coût d’opportunité en lien avec la rétroaction


La correction individuelle par l’enseignant de productions ou d’évaluations formatives d’élèves et la génération d’une rétroaction détaillée et individualisée est rapidement coûteuse en temps et en ressources pour l’enseignant. Elle est susceptible d’avoir un impact sur le bien-être des enseignants et se fera à la place d’autres tâches portant sur la planification de l’enseignement et des activités d’apprentissage des élèves. 

Il y a lieu d’estimer le coût d’opportunité de la rétroaction en mesurant à quel point elle est réellement prise en compte par les élèves. Nous devons considérer comment elle se traduit en actions concrètes de leur part susceptibles de mener à une progression significative de leurs apprentissages et de leurs résultats scolaires.

Actuellement, la synthèse de la recherche sur la question par l’EEF suggère que le meilleur point de vue adopté est que le choix de la méthode (écrite ou verbale) devrait être laissé aux bons soins des enseignants. Ils sont mieux à même de juger ce qui est approprié pour leurs élèves une fois qu’ils sont formés et qu’ils ont assimilé les tenants et aboutissants d’une rétroaction efficace.

Le fait de donner un retour d’information sur le travail directement durant les cours est une économie substantielle. Cela signifie également qu’à la fin d’une journée scolaire, les enseignants peuvent consacrer du temps à la planification et à la préparation d’un enseignement efficace.




La rétroaction écrite


Le retour d’information écrit, qu’il s’agisse de commentaires écrits, de notes ou d’une combinaison des deux est traditionnellement au cœur des pratiques enseignantes. Il est généralement considéré comme un aspect fondamental de la profession.

Des interventions liées à un retour d’information écrit sont associées à une amélioration des résultats des élèves par rapport à l’absence de retour d’information ou dans le cadre une pratique habituelle. Le retour d’information écrit peut être utile s’il répond aux trois principes d’un retour d’information efficace décrits dans un précédent article.

Cependant, ces pratiques doivent être étroitement surveillées pour leur impact sur la charge de travail des enseignants. De même, il y a lieu de s’interroger pour déterminer si une partie de ce temps de travail ne peut pas être utilisé plus efficacement, par exemple à travers un retour d’information oral.




Techniques de rétroaction écrite


L’équation à résoudre est celle de produire une rétroaction écrite à la fois efficace dans son impact et économe en temps de travail pour l’enseignant. Nous visons l’efficience.

Une manière de procéder est de transférer une partie de la charge de la rétroaction directement dans les activités de classe ou une plus large partie sous la responsabilité directe des élèves. 

La correction et la rétroaction peuvent avoir lieu pendant le cours plutôt qu’après celui-ci. Elles peuvent être mises en œuvre de différentes manières de manière à correspondre à une approche efficace :

Elles peuvent être effectuées par les élèves de manière individuelle pendant l’enseignement en classe :

  • Elles peuvent être modélisées collectivement par l’enseignant face à l’ensemble de la classe à l’aide d’outils tels qu’un visualiseur, un projecteur ou simplement au tableau. 
  • L’enseignant doit tenir compte de l’apprentissage et s’assurer de la concentration de tous les élèves pendant cette période.
  • Nous devons veiller à ce que le retour d’information fourni soit réfléchi, précis et utile. 
  • Les élèves doivent avoir la possibilité de l’utiliser de manière concrète et ciblée. 
  • Cette approche doit également permettre l’inclusion d’interactions verbales supplémentaires avec les élèves, ce qui peut favoriser la compréhension du retour d’information.


L’enseignant peut développer des procédures de notation codées de la correction et de la rétroaction en identifiant quelques types spécifiques d’erreurs qui vont entrainer un traitement déterminé et programmé de la part des élèves.

Une autre manière de procéder est d’anticiper et de fournir un étayage au processus de correction et à la prise en compte de la rétroaction :

  • Avant que l’enseignant ne consacre des efforts importants à un retour d’information écrit ciblé, les élèves peuvent passer du temps à anticiper les commentaires de l’enseignant et à contrôler et revoir leur propre travail. 
  • Ils peuvent utiliser des supports et des modèles le cas échéant, que l’enseignant met à leur disposition, comme une grille de vérification.
  • Dès lors, le coût d’opportunité du retour d’information écrit sera probablement plus favorable à un apprentissage significatif. 
  • Ce faisant, l’enseignant s’assure que les productions de ses élèves correspondent déjà à la base à certaines normes de qualité sur lesquelles il ne doit plus intervenir (planification, structuration des réponses ou autres vérifications de base).


Le facteur crucial d’efficacité du commentaire écrit correspond à la mesure par laquelle il se traduit par des actions spécifiques et formatives de la part des élèves qui vont concrètement améliorer leurs apprentissages. 

L’essentiel est de réfléchir soigneusement :

  • À la pertinence du contenu spécifique de la rétroaction.
  • Au moment de la délivrer.
  • À la manière de la présenter et de la structurer.
  • À la manière dont les parents sont informés de la rétroaction et associés comme alliés.
  • À la façon dont nous pouvons contrôler leur prise en compte effective par chaque élève en fonction de ses besoins.




La rétroaction orale


Le risque lié à la rétroaction orale donnée en direct en classe est qu’elle peut se révéler très générale et peu utilisée par les élèves comme base pour de nouvelles démarches d’apprentissage autonomes. Elle peut ne pas être suffisamment ciblée sur les lacunes d’apprentissage des élèves et répondre à ceux qui ont le plus de difficultés manifestes. De plus, elle peut n’être que transitoire. Les élèves l’écoutent et l’oublient.

Un retour d’information oral efficace peut être dispensé de différentes manières :

  • Il peut être planifié et très structuré.
  • Il peut aussi être instantané et spontané, par exemple sous la forme d’un conseil rapide sur la tâche à accomplir.
  • Il peut s’adresser à un élève en particulier, à un groupe spécifique ayant des besoins d’apprentissage ou à l’ensemble de la classe. 
  • Il peut accompagner un retour d’information écrit, qu’il s’agisse de commentaires, de notes ou d’appréciations, ou bien il peut être indépendant.

Toutefois, premièrement pour être fonctionnelle, la rétroaction orale continue à imposer une évaluation formative initiale efficace à corriger par l’enseignant pour identifier les lacunes à combler.

Pour l’enseignant, le gain de temps se fait uniquement au niveau de la rétroaction donnée en classe. Il doit cependant veiller à ce qu’elle soit toujours être aussi riche sur le plan pédagogique. 

La rétroaction orale devient une extension de celle distribuée normalement dans le cadre d’un enseignement explicite.

Le réel gain ici est d’expliquer une fois pour toutes à l’ensemble de la classe une bonne part de ce qui devrait être détaillé sur de multiples copies. Deuxièmement pour être fonctionnelle, la démarche n’enlève pas le besoin d’une rétroaction écrite, mais la diminue fortement. Elle permet de mieux se focaliser sur les cas particuliers en économisant des ressources. 

La rétroaction orale n’est pas une alternative bon marché à la rétroaction écrite.

Les interventions de retour d’information verbal étaient associées à un impact positif sur les résultats des élèves, par rapport à l’absence de retour d’information ou à la pratique habituelle. Comme pour le retour d’information écrit, le retour d’information verbal peut avoir un impact s’il est délivré efficacement et répond aux trois principes d’une rétroaction efficace préalablement détaillés. Le choix de l’approche est laissé à l’enseignant. 

Certaines dimensions de la dimension conversationnelle du retour d’information oral pourraient aider les élèves à l’utiliser notamment l’aspect relationnel. Lorsque nous avons une conversation avec un élève, il prendra le contenu plus au sérieux que lorsqu’il lit simplement le même message rédigé sur une feuille.

Le caractère interactif permet de clarifier des commentaires que les élèves pourraient ne pas comprendre lors de la lecture individuelle. L’enseignant peut adapter le retour d’information oral à l’élève en fonction de sa compréhension du moment. 




Rétroaction orale à l’échelle de la classe


Le visualiseur est un outil particulièrement adéquat pour fournir un retour d’information à toute la classe. Au lieu de discuter du travail des élèves individuellement avec chacun d’entre eux, les enseignants peuvent utiliser un visualiseur pour montrer, partager et commenter face au collectif de la classe des productions d’élèves.

Les élèves peuvent trouver le retour verbal trop abstrait et trop éloigné de la tâche. L’enseignant peut plutôt proposer un retour d’information tout en montrant un travail précédemment réalisé ou en cours par un visualiseur. De cette manière, il peut à la fois maintenir un retour d’information ciblé sur la tâche tout en utilisant l’exemple pour modéliser et discuter des intentions d’apprentissage et des critères de réussite.

Selon le principe de la rétroaction à la classe entière, les enseignants regardent les productions formatives des élèves, mais n’y écrivent pas de façon exhaustive. Ils prennent plutôt note de manière structurée sur une feuille de commentaires qui résume les points forts et les objectifs pour l’ensemble de la classe. Ensuite, ils exposent certains de ces points forts et de ces points faibles, en utilisant le visualiseur pour les mettre davantage en évidence pour la classe.

Les commentaires généraux peuvent être collectifs. C’est sur la base de ceux-ci que les élèves sont ciblés avec les points qui les concernent. L’avantage est que chaque commentaire n’est rédigé qu’une seule fois par l’enseignant, mais peut concerner divers élèves, ce qui représente une économie d’échelle.

Certains exemples de résolution peuvent être anonymisés ou l’enseignant peut vérifier que l’élève est d’accord et expliquer pourquoi il s’agit d’une production réussie, car son travail aidera les autres à s’améliorer. Les réactions émotionnelles des élèves à ce retour d’information sont soigneusement gérées, car le retour d’information est soigneusement formulé.

Ces démarches correspondent à l’établissement d’une culture scolaire de l’apprentissage collectif. Les élèves ne se sentent pas menacés par l’utilisation de leur travail pour modéliser l’apprentissage ensemble, car cela peut les aider personnellement et aider les autres de la même manière.

Il est utile de cibler la rétroaction orale sur les intentions d’apprentissage et les critères de réussite :

  • L’utilisation d’une rétroaction orale gagne à mobiliser explicitement le langage défini dans les intentions d’apprentissage initiales, ce qui la rend plus ciblée et structurée. 
  • De cette manière, nous ramenons l’attention de nos élèves vers les intentions d’apprentissage. Nous augmentons leur compréhension et leur prise en compte de celles-ci.
  • Les critères de réussite peuvent être utilisés dans le cadre d’une liste de contrôle qui peut servir de support partagé à la vérification pour la rétroaction orale, ce qui permet une discussion ciblée et focalisée.

Un point faible de la rétroaction orale est sa nature transitoire :

  • Les élèves peuvent trouver difficile de traiter un retour d’information verbal détaillé.
  • Nous pouvons encourager les élèves à prendre des notes et à résumer les actions ou les objectifs résultant d’une rétroaction verbale détaillée
  • Par la suite, il est essentiel que les élèves aient ensuite la possibilité d’agir en fonction de ce retour d’information, de manière à fermer la boucle de rétroaction.

La pandémie mondiale de la COVID-19 a conduit les enseignants à s’adapter et à utiliser de nouveaux modes numériques de retour d’information, qu’ils peuvent continuer à utiliser. Certaines applications offrent aux enseignants les moyens numériques d’enregistrer le retour d’information verbal des élèves. Ces enregistrements ont l’avantage de délivrer aux élèves un retour d’information qu’ils peuvent consulter à nouveau dans son intégralité. La considération clé est de s’assurer que cette forme de rétroaction orale répond aux principes d’un retour d’information efficace.


Mis à jour le 08/05/2023


Bibliographie


EEF, Teacher Feedback to Improve Pupil Learning, 2021, https://educationendowmentfoundation.org.uk/tools/guidance-reports/feedback/

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