L’usage de l’humour est un conseil récurrent dans la préparation d’une présentation. Commencer l’exposé par une blague permet d’attirer l’attention de l’auditoire et de rendre la présentation plus mémorable.
Mais est-ce que la présence de l’humour dans une présentation a un impact sur la mémoire tant pour le stimulus humoristique (c.-à-d. la blague) que pour le contenu environnant (c.-à-d. le contenu présenté) ?
Si l’impact est positif, il suffirait dès lors d’ajouter une dimension humoristique aux contenus pour les rendre plus mémorables.
Une première limite est que la manipulation de l’humour est assez délicate. L’humour n’est pas universel. Ce qui est drôle pour une personne ne l’est pas forcément pour une autre.
L’effet de l’humour sur la mémorisation
Différents chercheurs ont tenté d’expliquer les avantages mnémoniques de l’humour en faisant appel à divers mécanismes connexes.
La surprise ou l’émotion ressentie à la rencontre d’un contenu humoristique, distinctif ou même bizarre peut conduire à :
- Un traitement plus profond et plus significatif
- Une plus grande élaboration autour des contenus
- Une meilleure connexion avec la mémoire à long terme par des liens avec d’autres connaissances et évènements antérieurs.
- À une répétition ou une redite supplémentaire du contenu
- Au stockage d’informations contextuelles supplémentaires en lien avec le stimulus unique, c’est-à-dire que l’évènement laisse une trace dans la mémoire épisodique elle-même.
D’autres explications suggèrent que le bénéfice mnémonique de l’humour provient de l’excitation émotionnelle ou physiologique plus grande qui accompagne l’humour. L’explication n’est, en elle-même, pas très différente de la précédente, si nous supposons que de tels effets vont intensifier la récupération et l’élaboration autour de cet évènement de manière répétée.
L’effet de mémorisation de la blague
Ce que la recherche a clairement établi c’est que les processus cognitifs impliqués dans l’humour améliorent généralement la mémoire des évènements ou du contenu humoristique lui-même.
La recherche a montré que si l’humour est plus susceptible d’avoir un effet sur l’apprentissage fortuit, c’est-à-dire par effet de surprise, les effets sont également observés dans les tâches intentionnelles.
C’est-à-dire que si nous trouvons un élément humoristique, nous allons mieux le mémoriser. De même si nous pouvons adjoindre une dimension humoristique à un élément d’information initialement neutre nous pouvons également en améliorer sa mémorisation.
L’effet de mémorisation du contenu annexe à la blague
Les contenus humoristiques sont plus distinctifs que les contenus non humoristiques dans la mémoire. Le contenu humoristique se démarque du contenu non humoristique qui se retrouve en arrière-plan.
L’effet d’attraction du contenu humoristique présente également un danger potentiel. Le traitement privilégié supplémentaire dont bénéficient les contenus humoristiques pourrait se faire au détriment des contenus non humoristiques environnants. En bref, nous pourrions nous souvenir très bien de la blague, mais moins bien de tout de ce que disait le présentateur d’intéressant avant et après celle-ci.
La présence d’humour dans une présentation pourrait avoir un impact négatif sur la mémoire du contenu annexe. Toutefois, le lien entre les contenus humoristiques et les contenus non humoristiques pourrait être un facteur atténuant.
Est-ce qu’introduire de l’humour dans une présentation va rendre les contenus plus ou moins mémorables ?
Baldassari et Kelley (2012) ont tenté de répondre à cette question avec différentes expériences, ils en sont arrivés aux conclusions suivantes :
- Il y a bien un effet positif significatif de l’humour sur la mémoire du contenu humoristique lorsque le rappel libre est testé.
- Cependant, les effets résiduels (positifs ou négatifs) de l’humour sur le reste du contenu ne sont pas statistiquement significatifs.
- Ils ont montré dans leurs expériences que la position, la présence ou l’absence de l’humour au sein du contenu ne semble pas avoir d’influence notable. Elle n’influence pas l’intérêt des participants pour le contenu annexe et ne semble pas les distraire.
Par conséquent, l’effet de l’humour semble ne se manifester que sur les éléments humoristiques et non sur les contenus non humoristiques.
Les résultats de cette étude remettent en question les explications de l’avantage humoristique fondées sur l’encodage. Celles-ci semblaient prédire que l’attention supplémentaire (ou la répétition) accordée au matériel humoristique se ferait au détriment du matériel environnant immédiat.
Il semble que nous n’allons pas mieux retenir un contenu non humoristique, qu’il soit agrémenté de notes d’humour ou pas. Si l’adjonction d’humour peut rendre une présentation plus appréciable, il ne rend pas les contenus annexes plus mémorables pour autant.
Bibliographie
Baldassari, M. J., & Kelley, M. (2012). Make ’em laugh? The mnemonic effect of humor in a speech. Psi Chi Journal of Psychological Research, 17, 2–9.
Schmidt, S. R. (2002). The humour effect: Differential processing and privileged retrieval. Memory, 10, 127–138.
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