jeudi 10 juin 2021

Reconsolidation et devenir des connaissances en mémoire à long terme

Que se passe-t-il entre le moment où un élève est confronté une première fois à un nouveau concept et le moment où il en a développé une compréhension durable et approfondie ?

(Photographie : Franziska Schrödinger)



Une modélisation du développement d’un apprentissage durable


Efrat Furst (2020) en propose une modélisation : 

Sur celle-ci :

  • Les points représentent des neurones et symbolisent des connaissances.
  • Les connecteurs représentent des synapses et symbolisent la compréhension. 
  • Le gris représente l’état inactif.
  • La couleur représente l’état actif. 
  • Les formes sont un modèle très simplifié des représentations de la mémoire et des trajets qui les relient. 


Quatre étapes sont distinguables dans la progression d’une connaissance




Comprendre l’encodage


L’élève assiste à un modelage présenté par son enseignant. Les nouvelles informations provenant de l’environnement sont traitées par le cerveau. 

Les neurones du cerveau sont activés pour percevoir et traiter le stimulus qui représente des éléments d’informations isolées dans un premier temps. Celles-ci sont symbolisées par les points orange. 

Nous situons un nouveau concept en fonction de concepts que nous connaissons déjà, comme expliqué ici. L’enseignant s’assure de la présence des connaissances préalables chez ses élèves et s’assure de les activer.

La nouvelle information est située dans le contexte de connaissances préalables symbolisées par les points turquoise reliés entre eux. 

À ce stade, les connaissances restent très sensibles à l’oubli. La compréhension n’a pas été pleinement établie.




Comprendre la consolidation


Nous donnons un sens au nouveau concept en le connectant, en le comprenant et en l’expliquant en lien avec des concepts que nous connaissons déjà.

La consolidation est l’étape où ce à quoi nous pensions pendant l’encodage est stabilisé. Des connexions sont formées entre les composants activés de la nouvelle représentation symbolisés par les points orange et les connaissances antérieures activées symbolisées par les points turquoise. 

Les représentations qui sont activées simultanément et connectées de manière significative ont de meilleures chances de subir une consolidation.

La consolidation dépend d’un processus biologique qui peut prendre des heures ou des jours, et qui est encore renforcé par le sommeil.




Comprendre le stockage


Au terme de la consolidation, les connaissances et leur compréhension sont considérées comme stabilisées et stockées. Les connexions ont été formées, elles sont dans un état inactif symbolisé par la couleur grise. 




Comprendre la récupération


Des connaissances stockées peuvent être potentiellement réactivées lors de la récupération.

Le processus de récupération est initié par un indice interne ou externe. Celui-ci déclenche une réaction en chaîne par association qui se traduit par une activation des représentations neuronales. 

La récupération est réussie lorsque nous activons de proche en proche la cible, ou ratée si nous n’y parvenons pas. 

La récupération est un processus qui peut être laborieux :

  • Tout dépend de la force de récupération et de la force de stockage des informations.
  • Il a lieu régulièrement en plusieurs étapes. 
  • Il dépend essentiellement des associations existantes qui peuvent mener au concept recherché, d’où l’intérêt de construire de multiples voies d’associations en les comprenant, en leur donnant un sens et en les pratiquant.




Comprendre l’effet de test et la pratique de récupération


La récupération n’est pas un phénomène neutre. Quand nous récupérons des connaissances en mémoire et les utilisons, de nouvelles informations peuvent être présentées ou générées. Il peut s’agir :

  • D’une réponse à une question
  • D’informations contextuelles supplémentaires
  • De la confirmation que ce que nous avons récupéré est correct, pertinent, utile, ou ne l’est pas. 

Nous encodons de nouvelles informations symbolisées en orange, en relation avec les connaissances antérieures que nous venons de récupérer symbolisées en turquoise. 

Ce nouveau complexe peut être stocké à son tour pour un usage futur.




Comprendre l’évolution des connaissances


L’ajout d’informations aux connaissances initiales stockées lors de la récupération se traduit par une mise à jour de la mémoire à long terme. 

La représentation symbolisée en turquoise peut être vue comme une entité biologique qui évolue au fil des récupérations et réactivations.

La vision d’une mémoire stable et fixe après sa création est par conséquent erronée.




Comprendre le phénomène de reconsolidation


Les traces de mémoire qui ont été encodées et consolidées redeviennent malléables lors de la réactivation au moment de la récupération. Elles dépendent d’une reconsolidation biologique pour la stabilisation à long terme.

L’activation lors de la récupération est un événement critique. Lorsque les connaissances sont activées, elles peuvent être reconsolidées :

  • Après l’encodage, une nouvelle connaissance peut être stabilisée par le processus de consolidation. Elle est stockée à long terme sous une forme inactive. 
  • Lorsqu’elle est réactivée par la récupération, la trace existante est déstabilisée et peut être soumise à une reconsolidation. Tout ce qui a été activé est théoriquement sujet à des modifications. 

Le fait de comprendre les conditions dans lesquelles les connaissances sont reconsolidées après leur récupération peut nous permettre d’utiliser ces processus pour concevoir des activités d’apprentissage, des pratiques en classe et des stratégies d’apprentissage plus efficaces.

La consolidation est le processus biologique initial de formation des connexions après l’apprentissage.

L’effet de reconsolidation dans l’apprentissage déclaratif humain dépend de façon critique de deux composantes :

  • La réactivation de la trace existante, immédiatement avant d’apprendre quelque chose de nouveau.
  • Un temps suffisant pour que la trace soit consolidée dans sa forme actualisée.

La reconsolidation intervient lorsque des connaissances déjà consolidées deviennent malléables lors de leur récupération et dépendent, à nouveau, d’un processus biologique de recâblage neuronal. Pour mettre à jour les connaissances, les connexions existantes dans le cerveau sont recâblées. 

Un exemple de reconsolidation est celui lié au concept de nombre stocké en mémoire sémantique, il va passer par les stades suivantes :. 

  • Une conception intuitive basée sur le nombre d’objets
  • Une définition formelle des entiers naturels
  • Une extension aux entiers relatifs et aux nombres décimaux réels, puis même complexes

La reconsolidation permet aux apprentissages d’être, non seulement intégrés les uns sur les autres, mais aussi d’induire des changements conceptuels. 

L’effet de reconsolidation souligne l’importance d’activer les connaissances antérieures avant d’enseigner de nouvelles informations connexes. Il est fondamental de s’assurer que chaque élève récupère activement ses connaissances antérieures avant d’apprendre quelque chose de nouveau. 

Nous devons également assurer l’exercice de connexions explicites et significatives entre les nouvelles connaissances et les connaissances antérieures.

De plus, nous devons laisser du temps pour la consolidation et la reconsolidation avant de tenter de vérifier que l’apprentissage a bien eu lieu. Cela va dans le sens de l’application d’un programme espacé de révision et de pratique. Cela montre également l’importance du repos et du sommeil pour la consolidation et la reconsolidation de la mémoire.


Mise à jour le 29/12/2023

Bibliographie


Efrat Furst, 2020, Reconsolidation The “life” of a memory trace, Learning in the brain, 2020 https://sites.google.com/view/efratfurst/reconsolidation

La psychologie pour les enseignants, 2021, https://www.fun-mooc.fr/en/cours/la-psychologie-pour-les-enseignants/

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