(photographie : An-My Lê)
Un apprentissage génératif est créateur de sens
L’apprentissage est largement considéré comme étant un changement en mémoire à long terme entrainé par les expériences que vit un individu.
Certaines théories, comme celle de l’apprentissage associatif, considèrent l’apprentissage comme le renforcement d’une réponse à un stimulus donné. D’autres théories valorisant le par cœur considèrent l’apprentissage comme un ajout fait à la mémoire à long terme, dans la perspective d’une récupération ultérieure.
Logan Fiorella et Richard E. Mayer privilégient une troisième conception, celle d’un apprentissage génératif, en tant que processus significatif, créateur de sens.
L’apprentissage significatif est une activité générative dans laquelle l’apprenant cherche activement à donner un sens aux contenus qui lui sont présentés, ce qui permet d’obtenir de meilleures performances ultérieures dans le cadre de transferts.
Ce que Fiorella et Mayer appellent apprentissage génératif, équivaut à ce que Chi et Wylie (2014) appellent apprentissage constructif.
Trois processus de traitement des connaissances liés à l’apprentissage génératif
- Sélectionner : les apprenants effectuent une sélection active des éléments pertinents parmi les informations présentées dans la source d’information (un livre, les explications d’un enseignant, une présentation multimédia…)
- Organiser : les apprenants élaborent une organisation mentale des éléments pertinents en une structure cognitive cohérente, grâce à leur mémoire de travail et à leur mémoire à long terme. Les idées importantes sélectionnées sont placées dans leur contexte et organisées en une structure cohérente qui établit des liens entre la nouvelle matière et les connaissances antérieures.
- Intégrer : Les nouvelles informations sont intégrées. Deux manières existent.
- Nous parlons d’assimilation (Piaget, 1977) lors d’ajouts dans les schémas de connaissances de la mémoire à long terme.
- Nous parlons d’accommodation (Piaget, 1977) lorsque les schémas de connaissances existants sont mis à jour sur la base des nouvelles informations (Mayer, 2014).
- Cette intégration à des connaissances antérieures pertinentes activées à partir de la mémoire à long terme est réalisée avec la mémoire de travail.
Si l’apprenant prête attention à certaines de ces informations fugitives dans la mémoire sensorielle, il les transfère à la mémoire de travail pour un traitement ultérieur. En mémoire de travail, il peut réorganiser mentalement les informations sélectionnées en représentations mentales cohérentes.
Il peut également activer les connaissances préalables pertinentes de la mémoire à long terme et les intégrer au contenu entrant dans la mémoire de travail.
Les connaissances traitées en mémoire de travail peuvent être stockées dans la mémoire à long terme pour une utilisation future. Elles peuvent être utilisées pour résoudre des problèmes rencontrés dans le monde extérieur.
Une implication pédagogique importante de ce modèle est que l’enseignant ne peut se contenter de présenter des informations. Il doit également s’assurer que ses élèves s’engagent dans un traitement cognitif approprié pendant l’apprentissage.
De même, l’élève ne peut se contenter de mémoriser les connaissances par cœur exactement comme elles lui sont présentées. Il s’investit dans un traitement cognitif approprié pendant l’apprentissage.
Des traitements cognitifs de l’information liés à un apprentissage génératif
Lorsque nous apprenons par cœur des contenus, par la suite, nous pouvons être capables de reconnaitre et même de manifester une certaine connaissance en expliquant certains termes. Mais nous ne serons pas capables d’appliquer ce que nous avons vu ni de montrer une certaine maitrise en transférant ces connaissances à des contextes voisins.
Comment devenir capable de pratiquer et de montrer une certaine maitrise ?
La solution est de s’engager dans des stratégies d’apprentissage génératif pendant l’apprentissage :
L’apprentissage est un processus génératif lorsque les apprenants génèrent activement leurs propres résultats d’apprentissage, en interprétant ce qui leur est présenté au préalable plutôt qu’en le recevant simplement tel quel.
- La stratégie d’apprentissage de l’élève :
- Traduire les contenus en une autre forme de représentation :
- Résumer le contenu pertinent avec ses propres mots
- Créer un résumé visuel du contenu sous forme de matrice ou de réseau
- Faire un dessin qui représente les idées principales du texte, ou simplement imaginer un dessin.
- Se soumettre à une élaboration sur les connaissances et compétences :
- S’entrainer à répondre à des questions et à résoudre un problème
- S’expliquer les contenus à voix haute pendant l’apprentissage
- Expliquer le contenu à quelqu’un d’autre
- La méthode d’enseignement de l’instructeur : la façon de présenter les contenus, par exemple à l’aide d’un organisateur graphique préalable qui résume les contenus avant qu’ils soient enseignés à proprement parler. Nous enseignons aux élèves comment et quand s’engager dans des activités qui exigent un traitement cognitif approprié pendant l’apprentissage.
Dès lors, un enseignement efficace ne peut se limiter à la simple présentation par l’enseignant des contenus à apprendre par l’élève. Il est également nécessaire de guider le traitement cognitif des contenus pertinents par l’élève durant l’apprentissage.
Des stratégies cognitives liées à un apprentissage génératif
Certaines stratégies sont dites génératives (également productives) parce qu’elles amènent les élèves à remodeler le contenu. Sur cette base, elles permettent aux élèves de créer leur propre résultat, comme un résumé ou un dessin.
En d’autres termes, en tant qu’apprenant, nous générons ou produisons nous-mêmes quelque chose sur la base de ce que nous avons appris, tout en allant plus loin ;
- Résumer : réaliser un résumé oral ou écrit de ce que nous sommes occupé à essayer de comprendre, comme une explication, un texte, un document multimédia, etc.
- Cartographier : réaliser une représentation graphique sous forme de réseau ou de hiérarchie de ce que nous sommes occupés à essayer de comprendre en mettant en évidence les liens signifiants entre les concepts centraux.
- Dessiner ou schématiser : réaliser une représentation graphique de ce que nous sommes occupés à essayer de comprendre.
- Imaginer : visualiser un dessin, se représenter mentalement une représentation graphique que nous réaliserions pour décrire, représenter ou illustrer ce que nous sommes occupés à essayer de comprendre.
- S’évaluer : répondre à des questions d’évaluation ou en créer au sujet de connaissances précédemment apprises.
- S’auto-expliquer : produire une explication écrite ou orale de ce que nous sommes occupés à essayer de comprendre.
- Expliquer à autrui : expliquer à autrui ce que nous sommes occupés à apprendre.
- Mettre en œuvre : manipuler des objets, réaliser des gestes techniques en lien avec ce que nous sommes occupés d’apprendre.
Pour chaque stratégie, dans leur livre, Mayer et Fiorella (2015) répondent aux questions suivantes :
- Qu’est-ce que la stratégie implique ?
- Quelle est la solidité des preuves scientifiques ?
- Pourquoi la stratégie est-elle efficace ?
- Comment la stratégie peut-elle être utilisée dans l’enseignement ?
- Quelles sont les limites possibles de la stratégie ?
Mis à jour le 21/08/2024
Bibliographie
Logan Fiorella & Richard E. Mayer, Learning as a generative activity, 2015, Cambridge University Press
André Tricot, L’innovation pédagogique, 2017, Retz
Michelene T. H. Chi & Ruth Wylie (2014) The ICAP Framework: Linking Cognitive Engagement to Active Learning Outcomes, Educational Psychologist, 49:4, 219–243, DOI: 10.1080/00461520.2014.965823
Paul A. Kirschner, Mirjam Neelen, Tine Hoof & Tim Surma, Let’s get to work with productive learning strategies: summarising, https://3starlearningexperiences.wordpress.com/2021/03/23/lets-get-to-work-with-productive-learning-strategies-summarising/
Mayer, R. E. (2014). Cognitive theory of multimedia learning in Mayer, R. E. (ed.) The Cambridge handbook of multimedia learning. 2nd edn. New York, NY: Cambridge University Press, 43–71.
Piaget, J. (1977). Problems of equilibration. In M. H. Appel & L. S. Goldberg (Eds.), Topics in cognitive development, Vol. 1 (pp. 3–14). New York: Plenum.
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