(Photographie : Poppel Yang)
Prendre en compte la nécessaire prise de jugement en formation
Une piste d’action est liée à la prise de jugement. S’engager dans une prise de jugement est susceptible de provoquer la confrontation entre de nouvelles informations et des conceptions antérieures qu’elles contredisent.
La recherche sur la cognition sociale montre que des individus qui suivent une formation qui comporte la réfutation de certaines de leurs conceptions invalidées ne vont pas tous réagir de la même façon.
Intégrer et encadrer la prise d’un jugement personnel au sein de la formation peut se révéler être une stratégie efficace pour favoriser l’évolution des conceptions.
Selon les stratégies spontanées ou provoquées par la formation, le jugement personnel n’a pas toujours lieu au même moment. Il y a deux cas de figure, il est :
Si nous prenons en considération les conséquences de l’effet du retour de flamme (voir article), il paraît évident que le moment du jugement peut avoir une incidence importante. Il s’agit de pouvoir réduire ce type d’erreurs et de biais.
Les stratégies liées au moment de la prise du jugement des apprenants lors d’une formation deviennent susceptibles d’influencer le succès de celle-ci en ce qui concerne la mise à jour des conceptions.
Le fait de prendre un jugement immédiat ou postposé va influencer la qualité et la pertinence de celui-ci. Le facteur pris en compte ici est l’influence du moment où les jugements sont réellement formés.
Les jugements immédiats sont formés lors de la réception de nouvelles informations. Les apprenants peuvent prendre une position argumentée sur une question au moment où ils rencontrent des informations à son sujet qui mettent en évidence des contradictions avec leurs conceptions antérieures. Une fois établi, ce jugement personnel est lui-même stocké en mémoire.
Plus tard, si nous demandons aux apprenants, qui ont utilisé cette stratégie, quelle est leur opinion sur le sujet considéré, ils vont se rappeler le jugement formé précédemment. Il est probable qu’ils ne se souviendront plus des arguments qui les ont conduits initialement à se positionner. Ces arguments peuvent être oubliés ou deviennent confus.
Le fait de porter des jugements pendant la réception de nouvelles informations peut ainsi réduire le risque d’un effet de retour de flamme. La mémoire sur leur jugement immédiat servira de point d’ancrage et d’indice de récupération pour énoncer à nouveau leur avis sur la question.
Les jugements basés sur la mémoire ne sont pas réalisés lors de la formation. Les individus ne prennent pas position lorsque des informations nouvelles qui leur font douter sont présentées. Les jugements basés sur la mémoire sont réalisés plus tard quand ils sont confrontés à la question et doivent clarifier leur position.
La principale caractéristique de cette stratégie de formation de jugement est que les gens vont avoir encodé et stocké une partie de l’information contradictoire préalablement présentée en formation. Cependant, ils n’ont pas porté de jugement à ce moment-là, ils ne se sont pas personnellement positionnés.
Cette stratégie s’applique particulièrement lorsque la personne n’est pas consciente que l’information reçue en formation lui sera nécessaire dans une situation future. Son traitement n’a dès lors été que partiel.
Comme le jugement postposé est fondé principalement sur des arguments dont les personnes peuvent se souvenir au moment où il est demandé, les positions qui en résultent peuvent être assez instables.
Il peut en résulter des positions différentes sur la même question à différents moments dans le temps puisque les jugements fondés sur la mémoire sont sujets à des effets de récence, de disponibilité et de saillance des arguments. La probabilité que la personne n’ait plus accès à tous les arguments de la formation ou que ceux-ci soient en partie déformés est importante.
En vue avec les objectifs de la formation initialement donnée, le jugement basé sur la mémoire va avoir tendance à perdre en fidélité et diminuer l’efficacité visée par celle-ci. Il est probable que les personnes ne modifient pas leur position initiale malgré les doutes suscités en formation.
La raison de l’influence de la nature du jugement en fonction du moment où il est posé s’explique par une hypothèse des deux mémoires qui illustre les différents phénomènes suivants :
Par contre si la personne avait pris un jugement immédiat, le poids des arguments contraires dont elle va se rappeler plus tard sera nettement amoindri. Le fait que des personnes qui s’étaient formées un jugement se souviennent d’arguments déformés ou aient oublié des arguments favorables, ne va que peu affecter leur avis. Celui-ci sera fortement influencé par la mémoire de leur jugement immédiat. S’ils ont adopté une attitude positive à l’égard d’une question présentée, ils conserveront cette attitude, peu importe ce dont ils se souviennent.
L’effet des mécanismes de retour de flamme est de même amoindri si un jugement immédiat a été posé en formation.
Il y a une divergence de qualité entre un jugement immédiat et un jugement basé sur la mémoire. Dès lors, il est utile et pertinent d’amener les apprenants qui suivent une formation à former un jugement lors de celle-ci, après qu’ils ont été confrontés au contenu de la réfutation.
La réfutation de conceptions erronées demande d’argumenter et d’amener les apprenants à se saisir des informations pour étayer leur position. Il est donc nécessaire qu’ils soient placés dans une démarche active.
Le gain en ce qui concerne l’efficacité de l’information est que la trace du jugement immédiat est stable et solide en mémoire. Cela reste le cas même quand la plupart des arguments qui y auront mené lors de la formation auront été oubliés. Dès lors, le moment de la formation continuée est le moment idéal pour construire un jugement avec tous les arguments pertinents disponibles immédiatement.
Lorsque nous demandons plus tard aux apprenants qui ont appliqué cette stratégie quelle est leur position par rapport au contenu de la formation, ils se souviennent de la position qu’ils ont arrêtée. Ils ne se rappellent plus forcément des détails de la réflexion et des arguments qui y ont mené.
Peter, C., & Koch, T. (2016). When Debunking Scientific Myths Fails (and When It Does Not): The Backfire Effect in the Context of Journalistic Coverage and Immediate Judgments as Prevention Strategy. Science Communication, 38(1), 3–25.
La recherche sur la cognition sociale montre que des individus qui suivent une formation qui comporte la réfutation de certaines de leurs conceptions invalidées ne vont pas tous réagir de la même façon.
Ils peuvent :
- Se positionner et porter un jugement personnel sur la véracité de manières divergente.
- Retenir certains arguments, être dans le doute et ne pas se positionner.
Intégrer et encadrer la prise d’un jugement personnel au sein de la formation peut se révéler être une stratégie efficace pour favoriser l’évolution des conceptions.
L’influence du moment de la prise de jugement sur sa qualité
Selon les stratégies spontanées ou provoquées par la formation, le jugement personnel n’a pas toujours lieu au même moment. Il y a deux cas de figure, il est :
- Immédiat et formé soit à la suite de la réception d’informations en formation
- Postposé au moment où il sera nécessaire à l’enseignant de se positionner.
Si nous prenons en considération les conséquences de l’effet du retour de flamme (voir article), il paraît évident que le moment du jugement peut avoir une incidence importante. Il s’agit de pouvoir réduire ce type d’erreurs et de biais.
Les stratégies liées au moment de la prise du jugement des apprenants lors d’une formation deviennent susceptibles d’influencer le succès de celle-ci en ce qui concerne la mise à jour des conceptions.
Le fait de prendre un jugement immédiat ou postposé va influencer la qualité et la pertinence de celui-ci. Le facteur pris en compte ici est l’influence du moment où les jugements sont réellement formés.
Le jugement immédiat
Les jugements immédiats sont formés lors de la réception de nouvelles informations. Les apprenants peuvent prendre une position argumentée sur une question au moment où ils rencontrent des informations à son sujet qui mettent en évidence des contradictions avec leurs conceptions antérieures. Une fois établi, ce jugement personnel est lui-même stocké en mémoire.
Plus tard, si nous demandons aux apprenants, qui ont utilisé cette stratégie, quelle est leur opinion sur le sujet considéré, ils vont se rappeler le jugement formé précédemment. Il est probable qu’ils ne se souviendront plus des arguments qui les ont conduits initialement à se positionner. Ces arguments peuvent être oubliés ou deviennent confus.
Le fait de porter des jugements pendant la réception de nouvelles informations peut ainsi réduire le risque d’un effet de retour de flamme. La mémoire sur leur jugement immédiat servira de point d’ancrage et d’indice de récupération pour énoncer à nouveau leur avis sur la question.
Le jugement postposé
Les jugements basés sur la mémoire ne sont pas réalisés lors de la formation. Les individus ne prennent pas position lorsque des informations nouvelles qui leur font douter sont présentées. Les jugements basés sur la mémoire sont réalisés plus tard quand ils sont confrontés à la question et doivent clarifier leur position.
La principale caractéristique de cette stratégie de formation de jugement est que les gens vont avoir encodé et stocké une partie de l’information contradictoire préalablement présentée en formation. Cependant, ils n’ont pas porté de jugement à ce moment-là, ils ne se sont pas personnellement positionnés.
Cette stratégie s’applique particulièrement lorsque la personne n’est pas consciente que l’information reçue en formation lui sera nécessaire dans une situation future. Son traitement n’a dès lors été que partiel.
Comme le jugement postposé est fondé principalement sur des arguments dont les personnes peuvent se souvenir au moment où il est demandé, les positions qui en résultent peuvent être assez instables.
Il peut en résulter des positions différentes sur la même question à différents moments dans le temps puisque les jugements fondés sur la mémoire sont sujets à des effets de récence, de disponibilité et de saillance des arguments. La probabilité que la personne n’ait plus accès à tous les arguments de la formation ou que ceux-ci soient en partie déformés est importante.
En vue avec les objectifs de la formation initialement donnée, le jugement basé sur la mémoire va avoir tendance à perdre en fidélité et diminuer l’efficacité visée par celle-ci. Il est probable que les personnes ne modifient pas leur position initiale malgré les doutes suscités en formation.
Une hypothèse des deux mémoires en faveur de la prise de jugement immédiat
La raison de l’influence de la nature du jugement en fonction du moment où il est posé s’explique par une hypothèse des deux mémoires qui illustre les différents phénomènes suivants :
- Les arguments individuels sont stockés dans un système de mémoire différent de celui du jugement proprement dit.
- Les positions prises par une personne, lors de la réception de l’information durant la formation, sont plus stables dans le temps et indépendantes des arguments qui y ont mené.
- Même si le souvenir des arguments s’estompe, les gens peuvent encore se rappeler du jugement personnel qu’ils ont formé.
- Les personnes qui ont un jugement immédiat en mémoire vont l’utiliser comme indice de récupération et s’y fier.
Par contre si la personne avait pris un jugement immédiat, le poids des arguments contraires dont elle va se rappeler plus tard sera nettement amoindri. Le fait que des personnes qui s’étaient formées un jugement se souviennent d’arguments déformés ou aient oublié des arguments favorables, ne va que peu affecter leur avis. Celui-ci sera fortement influencé par la mémoire de leur jugement immédiat. S’ils ont adopté une attitude positive à l’égard d’une question présentée, ils conserveront cette attitude, peu importe ce dont ils se souviennent.
L’effet des mécanismes de retour de flamme est de même amoindri si un jugement immédiat a été posé en formation.
L’importance d’amener les apprenants à prendre position en formation
Il y a une divergence de qualité entre un jugement immédiat et un jugement basé sur la mémoire. Dès lors, il est utile et pertinent d’amener les apprenants qui suivent une formation à former un jugement lors de celle-ci, après qu’ils ont été confrontés au contenu de la réfutation.
La réfutation de conceptions erronées demande d’argumenter et d’amener les apprenants à se saisir des informations pour étayer leur position. Il est donc nécessaire qu’ils soient placés dans une démarche active.
Le gain en ce qui concerne l’efficacité de l’information est que la trace du jugement immédiat est stable et solide en mémoire. Cela reste le cas même quand la plupart des arguments qui y auront mené lors de la formation auront été oubliés. Dès lors, le moment de la formation continuée est le moment idéal pour construire un jugement avec tous les arguments pertinents disponibles immédiatement.
Lorsque nous demandons plus tard aux apprenants qui ont appliqué cette stratégie quelle est leur position par rapport au contenu de la formation, ils se souviennent de la position qu’ils ont arrêtée. Ils ne se rappellent plus forcément des détails de la réflexion et des arguments qui y ont mené.
Mise à jour le 28/04/2023
Bibliographie
Peter, C., & Koch, T. (2016). When Debunking Scientific Myths Fails (and When It Does Not): The Backfire Effect in the Context of Journalistic Coverage and Immediate Judgments as Prevention Strategy. Science Communication, 38(1), 3–25.
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