vendredi 18 octobre 2024

Améliorer la vérification de la compréhension en enseignement explicite

Les processus liés à la vérification de la compréhension sont centraux dans la mise en œuvre effective d’un enseignement explicite. Leur plein niveau d’impact est fonction de multiples paramètres dont en voilà certaines sur l’angle comportemental, tels que mis en évidence par Adam Boxer (2022).

(Photographie : Cycles & Seasons)



Suivre et interpréter la qualité des réponses lors de la vérification de la compréhension


Lorsqu’un élève ne répond pas, se trompe ou répond à la question, nous devons être attentifs à l’information que cela nous offre en retour sur l’état d’attention, de compréhension ou d’engagement des élèves dans la classe. Il est important de mesurer si la difficulté ne concerne que l’élève ou si elle se retrouve chez bon nombre d’entre eux. 

Avant de considérer la responsabilité des élèves, nous devons considérer si le problème n’est pas dû à l’enseignement et non aux élèves. Dans tous les cas, si une difficulté se présente, il vaut mieux faire revenir toute la classe en arrière et rectifier le problème directement avant d’avancer puis de devoir rétropédaler ou bifurquer en catastrophe par la suite.

Avant toute chose, il existe un biais cognitif dont nous devons tenter de nous prémunir. Nous avons tendance à penser que notre communication en lien avec la matière enseignée est parfaitement claire, car nous en sommes l’émetteur. Dès lors, nous avons souvent tendance à penser que ce que les élèves nous disent est leur est intrinsèquement lié, au fait qu’ils comprennent ou non quelque chose.

Nous devons être attentifs à une dimension supplémentaire de leurs réponses, une dimension qui nous renseigne sur leur engagement, sur ce à quoi ils font attention et sur ce à quoi ils pensent. Nous n’avons pas un contrôle total sur les processus attentionnels des élèves. Cependant, en prenant de bonnes habitudes, en nous engageant dans des routines adaptées et en écoutant attentivement les informations qu’ils nous donnent, nous pouvons les aider à avancer plus sûrement dans la bonne direction. 



Un premier diagnostic immédiat quand un élève ne sait pas répondre


Imaginons que dans le cadre d’une vérification de la compréhension utilisant la technique Cold Call, nous posons la question à toute la classe puis nous désignons un peu plus tard un élève pour répondre.

Celui-ci, de toute bonne foi, annonce qu’il ne connaît pas la réponse avec un « je ne sais pas ! ».

Lorsqu’un élève dit qu’il ne sait pas :
  • Cela peut être le cas parce qu’il ne connaît pas ou ne comprend pas. Cela va nécessiter toute une série de réponses et d’actions typiques de la part de l’enseignant.
  • C’est peut-être également parce qu’il n’a pas écouté. Cela va nécessiter une autre catégorie de réponses. 
L’enseignant doit directement dissiper un malentendu. La meilleure réponse à donner à l’élève serait de lui demander de répéter la question :
  • S’il peut la répéter, nous sommes plus sûrs qu’il ne connaît pas ou ne comprend pas le contenu. 
  • S’il ne peut pas la répéter, c’est qu’il n’était probablement pas attentif.
Si la situation est rare et exceptionnelle, elle n’est pas motif d’inquiétude. Par contre, si elle tend à se répéter, elle envoie un message d’alerte pour l’enseignant.



La situation où des élèves n’écoutent pas les questions


Les élèves peuvent ne pas écouter les questions posées par l’enseignant dans le cadre de la vérification de la compréhension. Après avoir posé la question à la classe et laissé un temps d’attente avant de désigner un élève, ce type de scénario peut se produire pour un enseignant. Certains élèves vont lui demander régulièrement de répéter la question.

Dans ce cas, nous sommes sûrs que l’élève concernait n’écoutait pas. Il n’est pas nécessaire de demander ensuite « quelle question ai-je posée ? », car sa réponse nous indique qu’il n’écoutait pas. Le second message est que l’élève assume comme normal le fait de ne pas avoir écouté la question de l’enseignant adressée à la classe.

C’est un phénomène observable qui nous donne des informations claires et sans ambiguïté sur ce à quoi les élèves pensent ou ne pensent pas. L’enseignant doit y être attentif.

La répétition de de comportement par un élève gagne à être considérée comme une perturbation mineure en gestion du comportement et doit être traitée telle quelle.



Le symptôme des élèves qui ne saisissent qu’à moitié les questions


Il peut arriver que l’élève réponde à côté de la question parce qu’il n’a pas été assez attentif. 

Sa réponse est correcte ou intéressante, mais n’est pas directement en lien avec la question d’origine. Cette situation amène l’enseignant à devoir répéter la question pour obtenir une réponse pleinement adéqate de l’élève. 

Un choix se pose à l’enseignant :
  • Soit il embraye face à la réponse inattendue de l’élève, la développe et revient plus tard au sujet initial.
  • Soit, il ne traite pas la réponse de l’élève et le recentre sur le contenu de la question posée qu’il lui redonne. L’élève lui donne alors la réponse attendue.
La deuxième option semble en général à privilégier. Avec la première option, nous favorisons l’élève qui est hors sujet face aux autres élèves qui avaient pensé à la réponse de la question d’origine. En bifurquant, nous risquons en outre de donner l’impression que notre cours est décousu et difficile à suivre pour les élèves.

Toutefois, l’enseignant doit prendre en considération que l’élève est passé à côté de la question posée, ce qui donner une information sur sa compréhension ou sur son degré d’attention.

Le scénario peut être relativement typique. L’enseignant pose des questions. Un élève dit quelque chose qui fait partie du sujet ou du cours dans son ensemble, mais qui n’est pas directement lié à ce que l’enseignant vient de dire. C’est symptomatique du degré de compréhension ou d’implication de l’élève.

Il importe également de tenir compte de l’information transmise, qui est que l’élève ne suit pas correctement cette partie de la leçon. S’il avait prêté toute son attention à cette partie de la leçon, il aurait probablement répondu à la question directement. 

La question à se poser est de savoir ce qui est à l’origine du manque d’attention de l’élève. L’origine peut se trouver dans la pratique de l’enseignant. Par exemple, l’enseignant peut noter toutes les réponses avec détail au tableau, que les élèves doivent traiter en comparant, en complétant, en validant ou en corrigeant les leurs. 

Tout en écoutant les interactions en classe, les élèves regardent consciencieusement le tableau pour voir s’il correspond à ce qu’ils avaient écrit. Ils ajoutent des éléments à leurs réponses ou les ajustent en fonction de ce qu’ils voient au tableau.

Les élèves se retrouvent par conséquent en situation multitâche. Lorsqu’ils sont concentrés sur cette tâche du tableau vers leurs notes, ils n’écoutent pas complètement ce que l’enseignant énonce. Les élèves vont alors des suppositions mentales sur ce que l’enseignant leur dit et qui leur a échappé, ce qui explique la confusion apparente dans leurs réponses.

Ce qui est probable est que cet élève pris sur le fait par l’enseignant est loin d’être le seul dans le cas. De multiples autres ne doivent que prêter attention partiellement aux échanges.

Une dimension fondamentale de la vérification de la compréhension est que nous devons inclure un maximum d’élèves dans la réflexion. 



Éviter le multitâche dans le cadre de la vérification de la compréhension


Pour engager les élèves, nous avons tendance à adopter un tempo rapide qui malheureusement peut se révéler contreproductif si :
  • Nous ne laissons pas suffisamment de temps aux élèves pour développer leur pensée.
  • Nous amenons les élèves à s’engager dans un mode multitâche où ils vérifient leurs réponses et prennent note de tout en écoutant les interactions.
Il est important d’être vigilant et de remarquer quand nous induisons ce type de difficultés. Nous normalisons le fait que les élèves se préoccupent surtout de leur prise de notes et négligent leur engagement dans la réflexion en classe.

Nous devons par conséquent ralentir le rythme et induire des routines qui facilitent la synchronisation de l’attention vers l’enseignant lorsqu’une question se pose.

Cet objectif peut imposer de demander aux élèves de cesser d’écrire et de poser leurs crayons et de regarder vers l’enseignant ou vers l’élève qui répond lors d’une interaction. Cela peut passer par le fait de demander aux élèves explicitement de ne pas noter lors de ces échanges et leur donner le temps suffisant pour écrire ensuite. Cela implique également de leur expliquer pourquoi nous mettons en œuvre ces démarches. Nous avons peur d’aller trop vite et de leur en demander trop. Nous pouvons leur expliquer pourquoi le multitâche dans lequel ils s’engagent leur est néfaste. Or, nous voulons surtout soutenir leurs apprentissages.

Cela implique également d’être vigilant face aux élèves qui ne respectent pas la routine et de renforcer les autres.


Mis à jour le 20/20/2024

Bibliographie


Adam Boxer, The unexpected answer, 2022, https://achemicalorthodoxy.wordpress.com/2022/11/10/the-unexpected-answer/

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