mercredi 3 janvier 2024

Les cinq défis persistants de l’enseignant

Mary Kennedy (2015) propose un cadre pour comprendre les attentes liées au développement professionnel des enseignants.

(Photographie : Alex MacLean)



La difficulté de cerner les compétences des enseignants


Comment des concepts spécifiques peuvent-ils aider les enseignants à atteindre leurs objectifs professionnels ? Comment des procédures spécifiques peuvent-elles les aider à comprendre comment agir face à leurs objectifs professionnels ?

Il est complexe de décrire précisément les corpus de connaissances spécifiques pertinentes pour la pratique de l’enseignement, de définir les pratiques qui composent l’enseignement, ou de préciser les éléments qui constituent un bon enseignement.

Les programmes de formation initiale des enseignants enseignent généralement aux novices des connaissances sur de l’enseignement, un sujet ou une thématique à la fois. Ces cours ne s’intéressent pas à l’objectif ultime de ces éléments de contenu distincts.

L’une des difficultés est de trouver la bonne taille de grain pour analyser la pratique de l’enseignement :
  • Si nous divisons la pratique en très petits segments, les listes deviennent trop longues et encombrées de détails.
  • Si les partitions sont trop grandes, nous pouvons avoir des difficultés à clarifier les différentes parties d’une manière qui aide les novices à les percevoir. 
Un premier problème consiste à donner un sens aux différentes parties, une fois qu’elles sont isolées du reste de l’enseignement. Un deuxième problème consiste à expliquer pourquoi une approche particulière est meilleure qu’une autre. Un troisième problème est d’échapper aux effets de mode. Un quatrième problème est de trouver le bon équilibre entre connaissances conceptuelles et connaissances pratiques.

Face à ces constats, plutôt que d’être exhaustif et dans le détail, Mary Kennedy (2015) avant que l’important est de se centrer sur ce que les enseignants font réellement. Il est utile de s’intéresser aux pratiques visibles de l’enseignement, de les analyser de manière compréhensible et transmissible.



Approcher les pratiques des enseignants en fonction des défis auxquels ils font face


Pour aborder directement le concret, l’optique serait de réfléchir aux pratiques d’enseignement en fonction de leurs objectifs.

L’approche est particulièrement utile pour les novices, car ces derniers ont eux-mêmes des théories d’action naïves sur ce que font les enseignants et sur les raisons qui les motivent. Après avoir été élèves, ils ont une conception de spectateur de ce qu’est le fonctionnement de l’enseignant, partielle et fondée sur des croyances. Leurs théories d’action peuvent être basées sur les perceptions de leurs propres enseignants dans leur enfance.

Le rôle des formateurs d’enseignants et de tous leurs accompagnants est de les aider à développer une compréhension plus sophistiquée de ce que font les enseignants.

L’idée serait de fonctionner en matière d’objectifs plutôt qu’en matière de description des actions d’un enseignant. Mais, nous pouvons facilement nous égarer et générer des centaines de choses que les enseignants s’efforcent de réaliser. 

Dès lors, il est important de clairement délimiter des objectifs essentiels et permanents, significatifs et analytiquement distincts que les actions des enseignants servent.

Mary Kennedy (2015) propose d’analyser les comportements d’enseignement en fonction de cinq défis persistants auxquels sont confrontés dans l’absolu tous les enseignants. La majorité des comportements adoptés par les enseignants qui peuvent être observés sont associés à l’un de ces défis. Ces cinq défis résument ce que vise un enseignant professionnellement.

Dès lors, la démarche consiste à se concentrer sur les défis plutôt que sur les solutions. De cette manière, nous pouvons aider les novices à apprendre à réfléchir stratégiquement à la manière dont leurs actions répondent à un objectif plus large. Ils ne doivent pas uniquement se concentrer sur la manière d’imiter un ensemble d’actions qu’ils observent, les défis restent en ligne de lire.

Ses cinq défis persistants sont :
  • Répondre au programme scolaire
  • Susciter la participation des élèves 
  • Mettre en évidence la pensée des élèves 
  • Contenir le comportement des élèves 
  • Adapter à ses besoins personnels 
Les quatre premiers défis interagissent les uns avec les autres, un enseignant ne peut pas en traiter un en premier, puis passer aux autres, ni traiter les autres en premier, puis passer à celui-ci. 

Les quatre problèmes sont continuellement présents dans les classes et doivent être traités simultanément et en permanence. 

En outre, tous ces éléments sont si profondément ancrés dans le travail d’enseignement que si un enseignant ne parvient pas à relever l’un de ces défis, nous ne serions probablement pas persuadés qu’il enseigne réellement. Il n’enseignerait pas s’il ne présentait pas le contenu du programme, si les élèves n’étaient pas engagés, s’il ne savait pas ce que les élèves pensaient ou si leur comportement n’était pas suffisamment maîtrisé. 

Le cinquième défi est nécessaire pour qu’un enseignant ne cherche pas à changer de profession.



Répondre au programme scolaire


Le premier défi persistant pour tous les enseignants est de représenter le contenu du programme scolaire d’une manière qui le rende compréhensible pour les novices que sont leurs élèves.

Il s’agit de traduire un programme textuel en une activité vivante qui se déroule en classe avec des élèves. Cette activité utilise des supports spécifiques et se produit durant un laps de temps donné.

Le contenu des programmes scolaires se trouve décliné dans des manuels scolaires et des supports de cours développés par des enseignants. Ce contenu des programmes est intrinsèquement inerte.

Si les élèves pouvaient et voulaient apprendre le contenu simplement en lisant ces documents, il n’y aurait pas besoin d’enseignants. 

Les représentations du programme scolaire sont des événements vivants :
  • Les enseignants présentent des démonstrations, des images, des films, des problèmes hypothétiques, des exemples concrets.
  • Les enseignants posent des questions et répondent aux questions des élèves en lien avec ce programme.
  • Les enseignants demandent aux élèves de s’engager dans une variété d’activités d’apprentissage par eux-mêmes en lien avec ce programme. 
Pour de nombreux observateurs de l’enseignement, ces activités sont l’essence même de l’enseignement.

Le processus de représentation du contenu commence avant le début de l’année scolaire, car il est avant tout un objet de conception. Les enseignants divisent d’abord le contenu du programme en segments hebdomadaires et quotidiens, en gardant à l’esprit les périodes de vacances susceptibles d’interférer avec l’apprentissage. Ils déterminent ensuite comment la partie du contenu de chaque jour peut être mise en œuvre en temps réel et dans un espace réel.

Les plans de cours des enseignants sont élaborés autour d’activités plutôt que de sujets (Shavelson, 1983). Lorsque les enseignants entrent dans leur classe, ils ont à l’esprit une séquence spécifique d’événements qui se dérouleront d’une manière spécifique. Clark et Peterson (1986) qualifient ces plans de flux d’activités. 

Kennedy (2006) décrit les plans des enseignants comme des visions. Les enseignants anticipent les événements qui pourraient être intéressants ou ennuyeux, les concepts difficiles à saisir et le type de modifications qui pourraient remédier à ces problèmes. Ils envisagent également l’espace physique, qui s’assoira où, où se trouvera le matériel et si tout le monde pourra assister à une démonstration particulière. 



Se former à la représentation du programme scolaire


Définir la pratique de l’enseignement en termes de défis persistants n’implique pas de comportements visibles particuliers, ni d’activités, de mouvements ou de pratiques de base spécifiques. 

Au départ d’un programme scolaire, il est difficile de déterminer la procédure correcte ou la meilleure pour l’enseignement d’un élément de connaissance particulier.

Si nous observions plusieurs enseignants abordant le même programme scolaire, nous constaterions d’énormes différences dans la manière dont certains concepts sont présentés aux élèves.

Les décisions sur la manière de mettre en œuvre un élément donné du contenu du programme d’études impliquent une grande part de jugement personnel et professionnel. L’enjeu de la formation est alors de faciliter ces jugements.

Un rôle important pour les formateurs d’enseignants est d’aider les novices à réfléchir à la manière dont ces différents concepts curriculaires peuvent être mal compris. Il s’agit d’évaluer les avantages et les inconvénients des différentes manières de représenter des concepts particuliers.



Susciter la participation des élèves 


Le deuxième défi persistant auquel tous les enseignants sont confrontés découle du simple fait que l’école est obligatoire, mais que l’apprentissage ne l’est pas.

Le public scolaire est pour une part un public captif, et parfois réticent. Or, le succès de l’apprentissage dépend essentiellement de la bonne volonté des élèves à fournir les efforts attendus et à s’engager cognitivement. 

Les enseignants ne peuvent réussir que si leurs élèves choisissent d’apprendre. 

Les élèves peuvent réagir à cette contrainte de trois manières :
  • S’engager activement
  • Résister activement
  • S’engager passivement
S’engager passivement indique une attitude superficielle. Les élèves restent silencieux et polis, mais ne s’engagent pas vraiment dans leurs cours. Les conséquences peuvent être désastreuses.

Les enseignants doivent être en mesure de favoriser l’engagement actif par leur pratique en classe. En mobilisant des stratégies de gestion de classe, ils doivent pouvoir inciter les élèves qui résistent à ne plus le faire. 

L’angle mort concerne les élèves qui vont coopérer en surface, être désimpliqués et désintéressés, mais ne pas perturber l’apprentissage. En outre, même les élèves qui sont disposés à participer la plupart du temps peuvent encore résister à l’idée de réfléchir activement à des sujets difficiles à aborder.

En quelque sorte, il s’agit d’enrôler les élèves, car les enseignants sont rarement en mesure de motiver tous les élèves de la classe.

L’apprentissage scolaire requiert ce que Kahneman (2011) appelle une « pensée lente », c’est-à-dire une pensée qui exige de la concentration et des efforts. 

Or, la majeure partie de la vie en dehors de la classe se base plutôt sur une « pensée rapide ». Cette pensée rapide nous permet de tirer des conclusions hâtives, de nous appuyer sur des règles empiriques ou de réutiliser une habitude que nous avons prise dans le passé.

La pensée rapide est plus facile et constitue la méthode par défaut utilisée par la plupart des êtres humains pour la plupart des activités, ce qui rend ce deuxième problème persistant de l’enseignement encore plus difficile à résoudre.



Trois principes d’apprentissages liés à la formation à la participation des élèves


Trois principes d’apprentissage s’appliquent à la tâche qui consiste à obtenir la participation des élèves : 

Un premier principe de l’apprentissage est que pour retenir ce qu’ils apprennent, les élèves doivent le comprendre (Bransford, Brophy et Williams, 2000) et, pour le comprendre, ils doivent y réfléchir activement (Willingham, 2009) :
  • Les enseignants doivent trouver un moyen d’impliquer leurs élèves dans le contenu. Ils ne peuvent pas se contenter de le présenter et laisser leurs élèves passifs.
  • Les enseignants peuvent passer en revue les difficultés potentielles et rencontrées, en accompagnant le processus d’une vérification de la compréhension. 
  • Si les élèves ont déjà de bonnes connaissances dans le domaine considéré, les enseignants peuvent choisir de les engager dans des activités de découverte guidée.

Un deuxième principe de l’apprentissage est que les connaissances tendent à être comprises dans le contexte spécifique dans lequel elles sont apprises (Bransford, Sherwood, Hasselbring, Kinzer, & Williams, 1990) :
  • Les élèves peuvent donc avoir des difficultés à voir la pertinence des connaissances scolaires dans des situations en dehors de la classe. Ainsi, des concepts sont difficilement transférés entre deux disciplines comme s’ils se trouvaient dans un compartiment séparé de son esprit.
  • L’un des facteurs essentiels de l’enseignement est l’élaboration de portraits du contenu qui aident les élèves à « voir » les relations sous-jacentes. Les élèves doivent voir comment des concepts sont liés à une variété de types de problèmes ou de situations. Cela demande de mobiliser ces concepts en classe dans une variété correspondante de contextes utiles.
Un troisième principe de l’apprentissage est que les élèves se souviennent des éléments auxquels ils réfléchissent activement, de sorte que les enseignants doivent s’assurer que les éléments auxquels ils demandent aux élèves de réfléchir sont les bons :
  • Si les activités d’apprentissage ne sont pas choisies avec soin, les élèves passeront leur temps en classe à réfléchir à des questions qui n’ont rien à voir avec les objectifs d’apprentissage.
  • Si une activité d’apprentissage est trop compliquée, par exemple, l’attention des élèves est entièrement accaparée par des détails de procédure plutôt que par des questions de fond. De même, si l’activité d’apprentissage porte sur une question secondaire, les élèves risquent de ne pas se concentrer sur la question principale.



Mettre en évidence la pensée des élèves 


Le troisième défi persistant auquel sont confrontés les enseignants est qu’ils ne peuvent jamais être certains de ce que leurs élèves comprennent, ne comprennent pas ou comprennent mal.

Dès lors, les enseignants doivent continuellement trouver des moyens d’exposer la pensée de leurs élèves et de recueillir des preuves de leur apprentissage.

Si les enseignants ne savent pas ce que les élèves comprennent à un moment donné, ils ne peuvent pas faire de choix éclairé. Faut-il répéter, faut-il développer des connaissances manquantes ou peut-on passer à la suite du cours ? 

Le savoir le plus utile pour les enseignants est celui qu’ils ont dans l’instant, car ce savoir peut guider leurs actions dans l’instant. Les leçons de chaque jour découlent des leçons enseignées la veille, et les élèves doivent saisir les points essentiels de chaque leçon s’ils veulent comprendre les leçons suivantes. 

Les résultats de tests sommatifs en fin d’unité sont moins utiles que des processus d’évaluation formative et de vérification de la compréhension en temps réel.

Un aspect important et relativement moins compris de la nécessité d’exposer la pensée des élèves est que cela devient de plus en plus difficile à mesure que la distance sociale entre l’enseignant et les élèves augmente. Dans tous ces cas, les enseignants doivent redoubler d’efforts pour interpréter les paroles et les actions de leurs élèves et s’assurer qu’ils comprennent comment ces derniers donnent un sens à leurs cours. 

Cette nécessité d’exposer la pensée des élèves est également rendue plus difficile par la variation même de la façon dont les élèves comprennent les nouvelles idées. D’une manière générale, nous comprenons tous les nouvelles idées en les reliant à ce que nous savons déjà. 

Les élèves qui arrivent avec des expériences préalables différentes sont susceptibles d’interpréter le contenu de différentes manières, car ils s’efforcent tous de lui donner un sens et de le relier à leurs propres connaissances et expériences préalables. 

Une classe remplie d’élèves très impliqués est en fait une salle remplie d’idées, de conceptions, de confusions, de questions et de points de vue différents. Dans une telle situation, il est essentiel d’exposer la pensée des élèves. 



Contenir le comportement des élèves 


Le quatrième défi persistant auquel est confronté l’ensemble de l’enseignement est celui de la maîtrise du comportement des élèves. 

Les enseignants doivent contenir le comportement des élèves non seulement pour des raisons de sécurité, mais aussi pour s’assurer que les élèves ne se distraient pas les uns les autres. 

Les classes contiennent des groupes importants d’élèves dans un espace relativement restreint. Les élèves sont plus énergiques et plus agités que les adultes, et moins capables de contrôler leur propre comportement. Ils s’intéressent davantage aux autres qu’au cours.

La promiscuité était une caractéristique centrale de la vie en classe. La promiscuité signifie que les élèves sont susceptibles de s’interrompre continuellement les uns les autres. La plupart des enseignants contiennent le groupe en instaurant un système de règles et de routines standardisées qui définissent le fonctionnement de la classe.

Ce système d’organisation sous-jacent est généralement mis en place au début de l’année et persiste tout au long de l’année. Il permet à des groupes d’élèves agités de coordonner leurs actions sans avoir à demander la permission à l’enseignant pour chaque mouvement qu’ils veulent faire. 

Ce système général de règles et de routines peut s’accompagner d’un processus d’enseignement explicite du comportement. En parallèle, l’exercice d’une vigilance permet de distribuer une rétroaction positive spécifique et d’intervenir selon un continuum d’interventions quand cela est nécessaire.

Kounin (1970) a mis en évidence qu’une grande partie de la gestion de classe d’enseignants efficaces consistait à prévenir les mauvais comportements plutôt qu’à les arrêter une fois qu’ils avaient commencé. Il a remarqué que les enseignants montraient continuellement aux élèves qu’ils étaient conscients de ce que chacun faisait et qu’ils y prêtaient attention. Ces communications elles-mêmes découragent souvent les mauvais comportements.



L’adaptation aux besoins personnels 


Le cinquième défi persistant auquel les enseignants sont confrontés consiste à trouver un moyen de résoudre les quatre premiers problèmes d’une manière compatible avec leur propre personnalité et leurs besoins personnels.

Certains enseignants, par exemple, peuvent ressentir le besoin d’une classe ordonnée, tandis que d’autres préfèrent une classe plus spontanée. Certains peuvent avoir besoin de réduire le volume sonore global des élèves, tandis que d’autres peuvent apprécier un niveau d’énergie plus élevé. Il ne s’agit pas seulement d’une question de goût personnel, mais souvent aussi d’un besoin personnel. 

Si un enseignant ne parvient pas à créer une atmosphère dans laquelle il se sent à l’aise, il est peu probable qu’il continue à enseigner très longtemps. 



Un portrait intégré du travail des enseignants 


L’enseignement peut être vu comme une pratique intégrée dans laquelle chaque leçon représente une solution unique à cinq défis inhérents que tous les enseignants doivent relever. 

Lorsque nous observons une leçon, nous observons une façon particulière de présenter le programme, de contenir le comportement des élèves, de solliciter leur participation et d’exposer leur réflexion. 

Une définition complète de ce que font les enseignants pourrait donc ressembler à : 
  • Les enseignants présentent le contenu du programme d’études d’une manière qui le rend compréhensible pour les esprits naïfs ;
  • Pour des élèves qui ne sont pas nécessairement intéressés par l’apprentissage ; 
  • Et dont la compréhension du contenu n’est pas facilement visible pour l’enseignant ; 
  • Et qui sont agités et facilement distraits ;
  • D’une manière qui rencontre les besoins personnels des enseignants. 
Un aspect essentiel est que ces cinq défis sont en concurrence les uns avec les autres d’une manière qui satisfait les besoins personnels de l’enseignant.

Dès lors, les solutions apportées à l’un d’entre eux peuvent nuire à la réussite d’un autre. Par exemple, si les efforts pour contenir le comportement des élèves deviennent trop lourds et restrictifs, ils peuvent réduire la volonté de participation des élèves. D’un autre côté, si les élèves sont excessivement enthousiastes, ils risquent de devenir plus énergiques et turbulents, ce qui exacerbera le besoin de l’enseignant de contenir leur comportement.

Un autre aspect est que les enseignants doivent continuellement repenser leurs solutions pour relever ces défis aux multiples facettes. Chaque nouvelle classe, chaque nouveau sujet à enseigner exigent des enseignants qu’ils réfléchissent à nouveau à la manière dont ils présenteront le contenu du programme dans cette nouvelle situation. Comment encourageront-ils l’engagement des élèves dans cette nouvelle situation ? Comment exposeront-ils la pensée de leurs élèves ? De quelle manière maîtriseront-ils le comportement des élèves dans cette nouvelle situation ?

Même si les enseignants conçoivent bien leurs cours, ils doivent continuellement les ajuster lorsqu’ils constatent que l’attention des élèves faiblit, qu’ils n’ont pas compris un concept ou que les élèves s’impatientent.

Clark et Peterson (1986) ont montré que les enseignants sont amenés à prendre des décisions toutes les deux ou trois minutes pendant leurs cours. Ils évaluent rarement les différentes possibilités d’action, mais réagissent plutôt spontanément aux événements qui se déroulent.

L’étude de Kennedy (2005) suggère que ces décisions sont généralement des réponses à quelque chose qui est perçu comme anormal. Elle a constaté que les enseignants avaient tendance à surveiller simultanément différents aspects de la leçon. Ils exerçaient une vigilance face à l’ordre dans la classe, à l’attention des élèves, à ce qu’ils semblaient comprendre ou ne pas comprendre. Chaque fois qu’un événement soulevait un drapeau rouge concernant l’un de ces aspects, les enseignants adaptaient immédiatement leur comportement pour répondre à cette préoccupation. 



Les défis d’un enseignant novice


Selon Kennedy (2015), les novices ne peuvent pas persister en tant qu’enseignants s’ils ne trouvent pas un moyen de relever ces cinq défis, qui sont difficiles et inhérents au travail d’enseignant.

Une autre dimension que les novices doivent apprendre, c’est qu’aucune des solutions auxquelles ils peuvent être formés ne peut répondre de manière répétée à tous les défis persistants auxquels ils seront confrontés. 

Ils doivent apprendre à les comprendre individuellement, à comprendre que certaines solutions peuvent fonctionner pour un défi tout en étant contre-productives pour un autre. La tâche d’un enseignant chaque jour, consiste à trouver la solution la plus optimale à leur problème en cinq parties pour les leçons particulières qu’ils enseigneront ce jour-là. 

Les novices doivent apprendre que :
  • La pratique de l’enseignement les oblige à relever simultanément les cinq défis persistants.
  • Les cinq défis persistants sont en concurrence les uns avec les autres.
  • Les enseignants doivent continuellement trouver un équilibre entre les cinq défis tout le long de leur carrière.
  • Des activités spécifiques qui peuvent résoudre un défi peuvent aussi en exacerber d’autres. 
  • Les enseignants doivent apprendre à raisonner sur la pratique d’une manière qui dépasse leurs attentes naïves.

Mis à jour le 25/04/2024

Bibliographie


Kennedy M. (2015) Parsing the practice of teaching. Journal of Teacher Education. 67(1): 6–17.

Bransford, J. D., Brophy, S., & Williams, S. (2000). When computer technologies meet the learning sciences: Issues and opportunities. Journal of Applied Developmental Psychology, 21(1), 59–84.

Bransford, J. D., Sherwood, R. D., Hasselbring, T. S., Kinzer, C. K., & Williams, S. M. (1990). Anchored instruction: Why we need it and how technology can help. In D. Nix & R. Spiro (Eds.), Cognition, education and multimedia: Exploring ideas in high technology (pp. 115–141). Hillsdale, NJ: Lawrence Erlbaum.

Clark, C. M., & Peterson, P. L. (1986). Teachers’ thought processes. In M. C. Wittrock (Ed.), Handbook of research on teaching (3rd ed., pp. 255–296). New York, NY: Macmillan.

Kahneman, D. (2011). Thinking, fast and slow. New York, NY: Farrar, Straus and Giroux.

Kennedy, M. M. (2006). Knowledge and vision in teaching. Journal of Teacher Education, 57, 1–7.

Kounin, J. (1970). Discipline and group management in classrooms. New York, NY: Holt, Rinehart & Winston. 

Shavelson, R. J. (1983). Review of research on teachers’ pedagogical judgments, plans, and decisions. The Elementary School Journal, 83(4), 392–413.

Willingham, D. T. (2009). Why don’t students like school? A cognitive scientist answers questions about how the mind words and what it means for the classroom. San Francisco, CA: Jossey-Bass.

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