vendredi 2 décembre 2022

Think-pair-share, une stratégie de vérification de la compréhension en enseignement explicite

Les pratiques d’enseignement visant un apprentissage génératif augmentent les performances des élèves. La stratégie think-pair-share correspond à cette définition.

(Photographie : Rebecca Marino)




Cette stratégie d’apprentissage génératif et collaboratif a été décrite pour la première fois par le professeur Frank Lyman de l’Université du Maryland en 1981. Elle est mobilisée dans le cadre de la vérification de la compréhension en enseignement explicite.



Principe de la stratégie think-pair-share


Cette stratégie consiste à faire en sorte que
  1. Les élèves réfléchissent dans un premier temps seuls à une question sur un sujet donné (think)
  2. Dans un deuxième temps, les élèves échangent en binôme sur leurs idées respectives (pair)
  3. Les élèves restituent au groupe-classe leur réflexion (ou leur production) (share). 

Cette technique peut être couplée à celle des ardoises effaçables ou à la technique Cold Call dans le cadre de la vérification de la compréhension en enseignement explicite.

L’enseignant joue le rôle de facilitateur dans la démarche :
  • L’enseignant pose une question ou soumet un problème à ses élèves. 
  • L’enseignant laisse suffisamment de temps aux élèves pour réfléchir et rassembler leurs pensées de manière autonome. Les élèves travaillent d’abord sur une activité individuellement en prenant des notes. 
  • L’enseignant leur demande d’échanger par paires et de partager leurs pensées et leurs productions. Typiquement, les élèves sont installés deux par deux sur leurs bancs.
  • L’enseignant demande à l’un ou l’autre élève de partager sa réflexion et la production de son binôme avec la classe.



Objectifs de la stratégie think-pair-share


Le partage en binôme n’est peut-être pas la meilleure approche si l’objectif d’apprentissage est simplement d’amener les élèves à apprendre des informations factuelles. La seule exception est lorsque les évaluations sommatives qui suivent utilisent des questions similaires de l’activité de partage en binôme.

La stratégie think-pair-share est utilisée pour apprendre, développer la compréhension et créer des liens, car le processus se veut génératif. Il ne s’agit pas d’une simple récupération d’information ou une simple application de procédures déjà en voie d’automatisation.

Le partage en binôme est mieux utilisé lorsque l’objectif va au-delà de l’apprentissage de connaissances factuelles. Le partage en binôme est plus efficace lorsque l’objectif est une réflexion de haut niveau qui demande de la manipulation d’informations et de l’élaboration.

L’objectif est d’améliorer l’apprentissage des élèves par la formation et l’articulation d’une idée avec d’autres informations à partir de différentes perspectives sur le même thème. 

La stratégie de réflexion par paire et de partage donne également aux élèves l’occasion de mettre en pratique leurs compétences en matière de communication et de résolution de problèmes dans le domaine considéré. 

Cette technique d’enseignement a comme autre effet d’accroître l’engagement et la compréhension des élèves. Elle demande une formation des élèves à la routine attendue.

Bien que d’apparence simple, il nous faut tenir compte de nombreux facteurs pour décider de la meilleure façon de mettre en œuvre cette technique afin d’atteindre des objectifs pédagogiques spécifiques. C’est à cette question que s’est attelée Kristine Prahl (2017) dans la cadre d’une étude menée dans des cours de biologie de premier cycle, à l’Université de Wisconsin-Marathon County à Wausau, Wisconsin.



Une conception à rebours des questions 


Principe de la conception à rebours


Les questions de l’exercice de réflexion en binôme doivent être alignées sur l’objectif pédagogique de l’activité, selon la logique de l’alignement constructif ou curriculaire. 

Par conséquent, une approche de conception à rebours peut être utilisée pour faciliter cet alignement. Dans l’approche de conception à rebours prônée par l’enseignement explicite, l’enseignant considère d’abord l’objectif pédagogique, puis conçoit les évaluations, et enfin développe des stratégies d’enseignement basées sur les résultats d’apprentissage souhaités.

Les questions et les problèmes conçus ou sélectionnés participent à une démarche d’évaluation formative. En effet, le partage par paires et la mise en commun impliquent une discussion en classe et une rétroaction. Par conséquent, les facteurs qui contribuent à une discussion formative riche doivent être pris en compte lors de la rédaction des questions.

Une des conditions est que les questions ou les problèmes sur lesquels les élèves travaillent doivent avoir plusieurs réponses ou manières de répondre possibles. Les élèves ne doivent pas penser que l’enseignant cherche une réponse spécifique. En ce sens, les questions ouvertes ou les problèmes sans buts spécifiés sont idéaux pour de telles discussions en classe.

Une bonne discussion en classe va au-delà des concepts, des éléments factuels et des applications procédurales basiques. Elle se concentre sur des éléments qui implique une réflexion et un traitement plus profonds, comme les hypothèses qui doivent être faites pour répondre à la question et comment la réponse pourrait s’appliquer à d’autres scénarios.


Une prise en compte des identités d’apprentissage


L’enseignant, lorsqu’il prépare des questions pour une discussion en classe, doit être attentif aux identités d’apprentissage de chaque apprenant. 

Dans les types d’identités d’apprentissage, nous pouvons distinguer :
  • Le savoir reçu : 
    • L’élève reçoit des informations de l’enseignant dans une posture descendante ce qui n’inclut pas nécessairement un traitement génératif. 
  • Le savoir connecté : 
    • L’élève comprend l’apprentissage par la prise en compte des perspectives des autres face aux siennes, en particulier de ses pairs. 
    • L’apprentissage en réseau est souhaitable, car il favorise une compréhension plus large des idées complexes. Les élèves sont amenés à s’engager dans un traitement génératif de l’information.

Notre objectif en tant qu’enseignant est de faire passer les élèves d’une attitude de réception de l’information vers une conception de traitement de l’information en réseau et en interaction. L’approche think-pair-share est un moyen pour y arriver.

Par conséquent, nous devons concevoir des questions et des problèmes qui favorisent le plus d’interaction entre des apprenants ayant des identités d’apprentissage différentes. Le but est de promouvoir la discussion et de faciliter l’apprentissage par les pairs.



Introduire des contraintes métacognitives et au niveau du vocabulaire employé dans l’élaboration des réponses


Un étayage temporaire dans la stratégie think-pair-share



Lorsqu’il conçoit des questions pour une discussion de type think-pair-share, l’enseignant doit également réfléchir aux consignes à imposer aux réponses dans le champ de la discussion. 

Un exemple de consignes consiste à demander aux élèves d’utiliser certains termes de vocabulaire propres à la matière dans leurs réponses. 

Les consignes peuvent servir d’étayage pour guider les élèves dans leur discussion et la construction de leurs réponses. Comme tout étayage, ces contraintes doivent être enlevées au fur et à mesure que progressent les élèves. 

Des consignes trop strictes pour une question particulière créent une forme de dépendance ou activent l’effet d’inversion de l’expertise.



Inclure une dimension métacognitive dans la stratégie think-pair-share



Dans un cours de sciences comme de mathématiques dans l’enseignement secondaire, l’inclusion de questions métacognitives va exiger des élèves qu’ils expliquent leur processus de réflexion.

Une activité de partage par paires se prête bien à ce processus. L’idée est de combiner une activité de réflexion et une activité métacognitive qui pose un regard sur le trajet juste emprunté. Dans ce cadre, les élèves peuvent expliquer à leur partenaire, puis à l’ensemble de la classe, pourquoi ils ont répondu comme ils l’ont fait. 

De cette manière, les élèves sont libres de faire circuler leurs idées et leurs stratégies de réflexion entre eux et avec la classe. L’instructeur peut documenter ce qui a été dit au cours des discussions métacognitives afin de découvrir les conceptions erronées ou les stratégies inadéquates et y remédier.



Gérer le niveau de difficulté des questions dans la stratégie think-pair-share


L’enseignant doit décider de la manière d’interagir avec les élèves pendant la partie de partage de la stratégie think-pair-share. 

Cette décision est influencée par le niveau de difficulté de la question. Une question plus difficile exige une plus grande implication de la part de l’enseignant. 

Toutefois, l’apprentissage dans le cadre des interactions se produit lorsque l’enseignant participe davantage en tant que partenaire de discussion plutôt qu’en tant que figure d’autorité qui délivre des connaissances.

L’enseignant doit décider si les élèves peuvent utiliser leurs notes ou d’autres ressources comme guides pendant les trois phases de la stratégie think-pair-share. L’enseignant peut limiter l’utilisation de ces ressources, en fonction de l’objectif d’apprentissage. Dans l’optique d’une pratique de récupération lors des dernières phases de l’enseignement, la consultation des notes de cours devrait être limitée. Dans le cadre d’un. Dans l’optique d’une compréhension du cours et d’un premier apprentissage, la consultation des cours peut avoir valeur d’étayage.



Liens entre la stratégie think-pair-share et la préparation à l’évaluation sommative



Les questions de l’évaluation sommative utilisées après une activité de réflexion en binôme doivent être similaires, sans les répéter, aux questions utilisées dans l’activité de réflexion en binôme. 

Cela signifie qu’une activité de partage en binôme et l’évaluation sommative qui s’ensuit doivent être axées sur le même objectif d’apprentissage et le même sujet de cours pour être bénéficiaires. 

L’observation de la participation et des performances des élèves permet à l’enseignant d’évaluer leur niveau lors de l’usage de la stratégie think-pair-share. Les résultats de l’évaluation sommative permettront en retour de mesurer l’impact de la stratégie think-pair-share.


Mis à jour le 28/10/2023

Bibliographie


Prahl, K. (2017). Best Practices for the Think-Pair-Share Active-Learning Technique. The American Biology Teacher, 79(1), 3 8. https://doi.org/10.1525/abt.2017.79.1.3

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