samedi 13 février 2021

Une introduction à l'enseignement explicite

Pour beaucoup d’enseignants, bon nombre de principes de l’enseignement explicite sont familiers parce qu’ils les appliquent déjà, du moins en partie. Ce que propose l’enseignement explicite, c’est de les développer, de les optimiser et de les appliquer de manière plus systématique.

(Photographie : Stanley Bloom


Voir l’enseignement comme un ensemble de pratiques pour soutenir l’apprentissage des élèves


Comme l’écrit Tim Surma (et coll., dans la préface de Wijze Lessen, 2019) : l’enseignement est considéré comme l’ensemble des pratiques conscientes ou des méthodes de travail que l’enseignant utilise pour soutenir l’apprentissage des élèves

L’apprentissage signifie qu’il y a un effet plus ou moins permanent dans la mémoire à long terme de l’élève. Ainsi, l’enseignement sert un objectif à long terme. L’enseignant joue un rôle crucial dans le processus d’apprentissage en tant qu’expert qui dirige les processus d’apprentissage de ses élèves.




S’engager dans une démarche d’enseignement explicite


L’enseignement explicite peut retrouver certaines de ses racines dans la tradition pédagogique telle que définie historiquement par les Frères des Écoles chrétiennes (enseignement simultané, classe de niveau, etc.). À ce titre, les principes de méthode et les conseils sur la manière de vérifier la compréhension des élèves en classe tels que décrits en 1862 par le Frère Philippe (« Essai de Conduite ») sont surprenants d’actualité. Ils posent nombre de bases de ce que Barak Rosenshine développera bien plus tard sous forme de principes d’instruction à l’aube du XXIe siècle (2010, 2012).

L’enseignement explicite n’est pas un modèle arrêté et strictement délimité. L’enseignement explicite est un ensemble de nombreuses composantes dont les limites peuvent parfois sembler floues. Le modèle de l’enseignement explicite améliore progressivement ses propres composantes en prenant en compte les résultats de la recherche en sciences cognitives, pour les rendre plus efficaces. 

Si le guidage de l’enseignant est souvent lis en avant, une dimension tout aussi cruciale est la volonté d’une haute interactivité en impliquant les élèves dans un traitement cognitif et actif soutenu et continu.

Ainsi, nous n’arrivons pas à l’enseignement explicite en un jour, nous y arrivons de manière régulière, étape par étape, par pratique délibérée et il y a probablement toujours moyen de progresser. 

Un point fort est que l’enseignement explicite ne présente pas de rupture brutale avec un enseignement traditionnel dont il est avant tout une évolution et une optimisation dans une perspective d’éducation basée sur des données probantes. Souvent par tâtonnements, dans le but de s’adapter aux besoins d’apprentissage de leurs élèves de nombreux enseignants se sont déjà approchés de nombre de ses principes. Il s’agit alors de systématiser, d’associer et d’optimiser les pratiques efficaces.

L’enseignement explicite n’est pas non plus un modèle statique ou figé. Il est une approche qu’il faut adapter aux spécificités de chaque matière, aux caractéristiques des élèves qui forment le groupe classe et à la culture de l’établissement scolaire.

La méthode de l’enseignement explicite est soutenue par la théorie de la charge cognitive qui explique pourquoi elle fonctionne si bien en tenant compte des caractéristiques de notre système cognitif. Plus largement, s’intéresser à l’enseignement explicite amène également à s’intéresser à ses fondements théoriques issus de la psychologie cognitive.

De même, la volonté de rencontrer l’efficacité associée à la mise en œuvre de l’enseignement explicite implique un cadre plus large. Celui-ci prend en compte l’acceptation et la promotion et le soutien de normes de comportement, d’engagement et d’attention chez les élèves. Celles-ci sont d’un niveau souvent plus élevé que celui auquel les enseignants et leurs élèves ont pu s’habituer. De même, l’enseignement explicite se retrouve en concordance avec le concept d’évaluation soutien d’apprentissage.



Le modèle P.I.C. de l’enseignement explicite


Clermont Gauthier, Steve Bissonnette et Mario Richard (2013), à partir des travaux de Rosenshine et Stevens (1986) et d’autres travaux sur l’efficacité de l’enseignement, ont décrit le modèle de l’enseignement explicite. Celui-ci comporte trois temps : la préparation (P) ; l’interaction avec les élèves (I) ; la consolidation (C).

P = Préparation et planification
I = Interaction et déroulement
C = Consolidation et révision

Chacun de ces trois temps est associé à une série d’actions concrètes proposées.

Lors de la phase de préparation et de planification :
  1. L’enseignant précise les connaissances préalables, détermine ses objectifs d’apprentissage et ses critères de réussite.
  2. L’enseignant sélectionne et conçoit les contenus de son cours et les tâches d’apprentissage dans le cadre d’un alignement curriculaire et d’une planification à rebours.
  3. L’enseignant planifie les dispositifs de soutien à l’apprentissage et de révision.

Lors de la phase d’interaction :
  1. L’enseignant précise l’objectif d’apprentissage et active les connaissances préalables des élèves.
  2. L’enseignant maximise l’attention et l’engagement des élèves dans un traitement cognitif des contenus à apprendre, en vérifiant leur compréhension ce qui lui permet d'adapter son enseignement.
  3. L’enseignant conduit la leçon en transférant progressivement la responsabilité des apprentissages vers ses élèves : 
    1. Modelage (I do) : l’enseignant explicite les contenus avec un haut-parleur sur sa pensée.
    2. Pratique guidée (We do) : l’enseignant mobilise et applique les contenus avec les élèves.
    3. Pratique autonome (You do) : les élèves travaillent de manière indépendante et l’enseignant fournit un soutien.
  4. L’enseignent assure l’objectivation des apprentissages réalisés. 

Lors de la phase de consolidation :
  1. L’enseignant continue à faire récupérer et appliquer par ses élèves les contenus précédemment enseignants dans le but d’approfondir et de rendre durables les apprentissages. 
  2. L’enseignant procède par des devoirs, des quiz, des auto-évaluations ou de la découverte guidée, tout en appliquant les principes de la pratique de récupération espacée et de l’entremêlement.
  3. L’enseignant met en œuvre une évaluation soutien d’apprentissage dans ses différentes fonctions formatives et sommatives. 

1) Préparation et planification


Lors du premier temps, de préparation (P) et de planification, l’enseignant doit notamment :
  • Cerner les idées maitresses du programme et les connaissances préalables nécessaires à l’apprentissage.
  • Préciser les objectifs d’apprentissage nécessaires à l’alignement curriculaire.
  • Sélectionner les activités d'apprentissage en lien.
  • Déterminer comment présenter la nouvelle matière par étapes réduites pour tenir compte de la charge cognitive des élèves.

La qualité de l’enseignement est en correspondance directe avec la qualité de l’apprentissage qui en résulte (Archer & Hughes, 2011) telle qu’elle sera évaluée. 

Un enseignement explicite, efficace et efficient exige de s’occuper des détails de l’enseignement. L’attention aux éléments clés et aux processus fait une différence significative lors de la prestation d’un enseignement de qualité, favorisant le progrès et la réussite des élèves.

Dès lors, il est utile de considérer la planification des contenus d’un cours comme un processus et non comme un produit. Le processus s’adaptera en fonction de la progression des élèves, plutôt que comme un produit, ce que sera le plan du cours, la table des matières sous une forme plus figée.

Dans la perspective du produit, le risque est de concevoir la planification comme une opération d’occupation du temps disponible en fonction des contenus à enseigner. Le plan en tant que tel n’est qu’un sous-produit utile, la planification quant à elle dessine la trame sur laquelle l’enseignement va venir stimuler l’apprentissage des élèves.

Un principe important à garder à l’esprit quand nous considérons la planification est le principe de Pareto. Selon celui-ci, dans de nombreux domaines de la vie, 80 % de notre impact provient de 20 % de nos actions. La planification de l’enseignement rentre dans cette logique. Il s’agit de faire moins, mais de le faire mieux. La qualité peut être atteinte en ayant des attentes élevées en ce qui concerne les élèves et en leur fournissant le soutien nécessaire en tant qu’enseignant.

Une majeure partie de notre impact, en tant qu’enseignant, est dû à une petite fraction des actions et activités préparées lors de la planification. Certaines parties de notre mode de planification sont plus productives que d’autres. L’impact de nos efforts en lien avec les bénéfices escomptés n’est pas réparti de manière égale. 

Il s’agit donc dans une planification d’identifier les parties qui génèrent les meilleurs résultats, celles qui font la différence et leur consacrer plus d’attention, de temps et une plus grande fréquence. Tout cela se fait en gardant une flexibilité en fonction du contexte, pour pouvoir concrétiser des attentes élevées.



2) Interaction et déroulement


Lors de la phase d’interaction en enseignement explicite (I), l’enseignant met en œuvre, en classe, ce qu’il a précédemment conçu lors la phase de préparation (P). Pour ce faire, il mobilise toute une panoplie de stratégies générales efficaces (et de microstratégies sélectionnées à l’intérieur de celles-ci), qu’il adapte et affine en fonction de son contexte.

Nous pouvons mettre en évidence :
  • Un accent mis sur le fait d’enseigner avec clarté, en utilisant un langage limpide, économe et précis, tout en combinant les modalités verbales et visuelles.
  • La réactivation des connaissances préalables :
    • Lorsque dans son cours l’enseignant souhaite introduire un nouvel élément de contenu, il s’assure de la réactivation auprès de ses élèves des savoirs et savoir-faire qui en sont des prérequis.
    • Dans cette optique, il réalise préalablement une évaluation diagnostique. En fonction du retour d’information obtenu, il décide d’aller de l’avant, de procéder à un nouvel enseignement de certains éléments en classe ou de fournir du soutien à quelques élèves pour les aider à combler leurs manques éventuels.
    • L’objet de cette démarche de réactivation des connaissances antérieures est de les renforcer et de les rendre aisément disponibles en mémoire de travail. L’enjeu est de faciliter ensuite chez ses élèves, le traitement et l’intégration de nouveaux éléments de connaissance propres au nouvel enseignement.
  • Le déroulement du cours en classe qui répond à trois aspects caractéristiques d’une pratique efficace définis par Anita Archer (2019) : 
    • Une pratique délibérée : 
      • Les élèves pratiquent dans un but défini grâce à un objectif d’apprentissage partagé sous forme et explicité par l’enseignant en l’accompagnant de l’expression d’attentes élevées. 
      • L’apprentissage guidé fait sens et se connecte aux connaissances antérieures réactivées des élèves.
    • Une pratique distribuée dans le temps : 
      • L’élève a de multiples occasions d’exercer, espacées dans le temps à des intervalles de plus en plus éloignés, ce qui est favorable au développement d’un apprentissage durable. 
    • Une pratique de récupération : 
      • Des échanges ont lieu entre la mémoire à long terme et la mémoire de travail, ce qui induit des difficultés désirables favorables à un apprentissage en profondeur. 
  • La vérification de la compréhension qui est un ingrédient fondamental en enseignement explicite :
    • L’idée générale derrière la vérification de la compréhension est qu’on ne peut pas voir l’apprentissage en cours de formation chez les élèves. 
    • Nous pouvons toutefois rechercher des indices de cet apprentissage en cours en posant des questions ciblées aux élèves en en analysant leurs réponses.
    • La rétroaction permise par la vérification de la compréhension est essentielle pour piloter l’enseignement et guider les élèves.

    Un cours en enseignement explicite comporte trois moments clés codifiés : l’ouverture, la conduite et la clôture qui comprend l'objectivation des apprentissages.

    Lors de l’ouverture du cours, l’enseignant capte l’attention de tous les élèves, présente l’objectif, justifie l’intérêt de celui-ci. Il peut résumer le contenu de la leçon et en donner le plan. De même, il active les connaissances préalables.

    L’enseignant passe alors à la conduite du cours. Lors de l’enseignement d’une compétence ou d’une stratégie basée sur des concepts et sur des règles, la structure de la leçon comprend généralement trois phases :
    • Le modelage, durant lequel l’enseignant montre aux élèves comment exécuter l’habileté après avoir enseigné les concepts et les règles.
    • La pratique guidée, durant laquelle l’enseignant guide les élèves dans l’exécution de l’habileté.
    • La pratique autonome, durant laquelle les élèves exécutent la compétence sans l’aide de l’enseignant qui circule et fournit du soutien si nécessaire.
    Ces trois phases peuvent être résumées selon le principe du « je fais, nous faisons, tu fais » ou « I do, we do, you do ».



    L’objectivation des apprentissages


    L'objectivation intervient lors de la clôture de l'enseignement explicite. Elle a lieu après la modelage, la pratique autonome et la pratique guidée. Elle inclut un retour sur l'objectif d’apprentissage afin de bien en préciser l’étendue et s’assurer de leur bonne interprétation par les élèves une fois que celui-ci a été enseigné.

    L’enseignant incite les élèves à nommer les éléments importants à partir de l’activité d’apprentissage qui a été réalisée. Lors de la clôture d’une phase d’enseignement ayant développé le contenu d’un ou plusieurs objectifs pédagogiques, il s’agit de prendre le temps pour que les élèves puissent expliquer et formuler ce qu’ils ont appris. Ils saisissent les points essentiels et leur utilité et les situent dans le cadre plus global de la matière.

    L’objectivation représente un temps privilégié pour extraire formellement, préciser et identifier, parmi ce qui a été vu, entendu et réalisé durant une situation d’apprentissage, les concepts, les stratégies ou les attitudes qui sont essentiels à retenir. 

    C’est un moment clé, où l’enseignant peut également introduire ce vers quoi les apprentissages vont se tourner par la suite, en lien avec ce qui vient d’être enseigné, et comment ces savoirs seront réinvestis.

    Par la sélection et la synthèse des éléments essentiels à retenir, cette étape favorise l'apprentissage, l’intégration et l’organisation des apprentissages en mémoire. L’objectivation des apprentissages a deux fonctions :
    1. La prise de conscience de ce qui est en voie d'apprentissage : 
      • Si les élèves saisissent bien ce qu’ils ont appris, ils seront plus efficaces pour encadrer leur travail d’étude à domicile et se préparer en vue des évaluations.
    2. L’intégration à d’autres connaissances en mémoire : 
      • Ces éléments essentiels pourront être présentés sous forme de tableaux, de schémas, de réseaux, idéalement sous la forme d'un organisateur graphique.



    3) Consolidation et reconsolidation


    En sciences cognitives, la consolidation de la mémoire comprend des processus qui stabilisent une trace mnésique après son acquisition initiale, c’est-à-dire après sa mémorisation.

    Une fois que les souvenirs et connaissances subissent le processus de consolidation, ils deviennent partie intégrante de la mémoire à long terme. Ils sont alors considérés comme stables.

    Concrètement, la consolidation se divise en trois processus spécifiques : 
    • La consolidation synaptique se produit à petite échelle dans les connexions synaptiques et les circuits neuronaux au cours des premières heures suivant l’apprentissage.
    • La consolidation systémique se produit à une échelle beaucoup plus grande dans le cerveau. Elle rend les souvenirs dépendant de l’hippocampe indépendants de l’hippocampe sur une période allant de quelques semaines à quelques années.
    • La reconsolidation, dans laquelle des souvenirs précédemment consolidés peuvent être maintenus, renforcés et modifiés. La reconsolidation est spécifiquement provoquée par la récupération.
    Dans le cadre de l’enseignement explicite ou de l’apprentissage autonome, la consolidation et la reconsolidation prennent essentiellement trois formes : 
    • Apprendre pour consolider ce qui ne l’est pas encore.
    • Récupérer pour reconsolider et renforcer les apprentissages
    • Réviser pour vérifier ce qui est déjà connu et ce qui ne l’est pas.
    Plutôt que de parler selon l’angle de la consolidation, l’enseignant va plutôt réfléchir dans l’optique de révision ou d’évaluation formative. Il cherche à vérifier là où en sont ses élèves, pour ensuite soutenir, renforcer, adapter ou compléter leurs apprentissages.

    Pour ce faire, l’enseignant ou l’élève peuvent faire appel à différentes stratégies d’apprentissage qui idéalement auront une forte composante associée à la pratique de récupération.

    Spécifiquement, dans un contexte d’enseignement explicite, les processus de consolidation vont démarrer dès que la pratique autonome se termine. L’objectif de cette dernière a été d’assembler, d’unifier, d’automatiser et de globaliser un ensemble de savoirs, de savoir-faire et de compétences dans différents contextes.

    Dans un contexte d’apprentissage autonome, les processus de consolidation vont démarrer après un apprentissage initial.

    L’objectif de la consolidation est d’aboutir à un apprentissage durable, intégré et approfondi en tenant compte des caractéristiques de la cognition humaine en matière de mémorisation.

    Dans un contexte scolaire, la consolidation est également associée à l’enrichissement et à l’approfondissement des connaissances. On complète généralement la récupération par des processus d’élaboration et de rétroactions. Les processus d’élaboration soutiennent la création de nouveaux liens. Les processus de rétroaction permettent de mettre en évidence certaines faiblesses afin de les compenser ensuite.



    De mauvais indicateurs pour l’apprentissage en classe lors de l’observation d’un cours


    Lorsque nous observons un cours, il y a de mauvais indicateurs pour l’apprentissage en classe comme le rapporte Robert Coe (2015) :
    • Les élèves sont occupés : beaucoup de travail est fait (surtout à l’écrit)
    • Les élèves sont engagés, intéressés, motivés
    • Les élèves reçoivent de l’attention : rétroaction, explications. 
    • La classe est ordonnée, calme, sous contrôle
    • Tout le programme a été vu (c’est-à-dire présenté aux élèves sous une forme ou une autre)
    • Des élèves ont donné des réponses correctes à des questions même s’ils :
      • N’ont pas forcément tout compris
      • N’ont pas pu le faire seul
      • Auront tout oublié d’ici le prochain cours
      • Connaissaient les réponses avant le cours


    L’importance de distinguer performance et apprentissage en classe


    Il n’est pas difficile d’identifier les situations vraiment mauvaises en classe et de savoir quand les élèves n’apprennent rien. Il est nettement moins aisé de déterminer dans quelles situations les élèves apprennent beaucoup.

    L’un des concepts les plus utiles et les plus importants à comprendre pour un enseignant est la distinction entre apprentissage et performance.

    Robert Bjork l’écrit dans la préface du livre « What if everything you knew about education was wrong » de David Didau (2015). Le point clé quand on considère la question de l’évaluation est qu’il existe une distinction critique apprentissage et performance.

    La performance est ce que les élèves peuvent faire. C’est tout ce que nous pouvons observer à un moment donné :
    • Performance à court terme : c’est ce que nous pouvons observer et mesurer pendant l’enseignement, c’est le rendement.
    • Performance à long terme : c’est l’apprentissage réel, qui correspond au maintien et au transfert à long terme des compétences et des connaissances.
    Les enseignants fournissent des indices et des indications pour améliorer les performances des élèves pendant les cours et les élèves sont capables d’imiter ce qu’ils pensent que les enseignants veulent voir et entendre. Cette imitation peut permettre d’apprendre, mais ce n’est souvent pas le cas.

    La conséquence immédiate est que l’apprentissage n’est jamais immédiat et ne peut pas avec certitude s’évaluer à l’échelle de l’heure de cours. Ce que les élèves peuvent faire au cours d’une leçon — ou en réponse à une rétroaction — nous dit très peu de choses sur ce qu’ils pourraient faire ailleurs et plus tard.

    L’utilisation d’une séance de questions en groupe ou sous forme de quiz à la fin des cours peut avoir pour enjeu de montrer que les élèves ont fait des progrès durant le cours. Elle est une mesure imparfaite. Tout ce qu’on mesure est un apprentissage superficiel, ou une performance, plutôt qu’un apprentissage profond. Nous vérifions la force de récupération sans grand impact sur une force de stockage qui reste faible si les contenus sont récents. Tout ce qu’on fait à ce moment-là c’est vérifier la compréhension à un moment donné et non l’apprentissage. Poser ces mêmes questions a beaucoup plus de sens en introduction du cours suivant.

    Nous pouvons faire des déductions sur l’apprentissage en nous basant sur les performances que nous voyons, mais les performances au moment de l’enseignement sont un très mauvais prédicteur de l’apprentissage. L’apprentissage a lieu dans l’esprit de l’élève et ne peut donc pas être observé directement. 

    Le risque à ce moment-là c’est que si les élèves répondent correctement, l’enseignant peut se dire ce que c’est gagné, il peut se féliciter d’avoir été clair et efficace. Il peut penser que sa mission est accomplie pour ces points de matière. Le rendement observé en classe peut n’être qu’un guide très peu fiable pour déterminer si l’apprentissage a eu lieu.

    Lorsque nous mesurons la performance à un moment donné, nous pouvons risquer de considérer l’apprentissage comme acquis et ensuite de ne plus y revenir. La réalité est que si l’enseignant ne revient pas régulièrement sur ce sujet au cours des semaines et des mois suivants, pour la majorité de ces élèves, toutes ces connaissances auront disparu.

    Il s’agit donc de ne pas se laisser berner par des performances immédiates d’élèves. Le risque serait de choisir des conditions d’apprentissage et d’enseignement moins efficaces plutôt que des conditions plus efficaces.

    Interroger les élèves à la fin d’un cours sur ce qui vient d’avoir été vu révèle une performance superficielle, et non un apprentissage.

    L’apprentissage que nous recherchons et que nous vérifiions doit toujours être pensé de manière macroscopique. Il vaut toujours mieux interroger les élèves sur des matières antérieures, au début du cours, que sur la matière en cours à la fin de celui-ci, en matière de rendement et de représentativité de l’apprentissage.


    Mise à jour le 19/07/2023

    Bibliographie


    David Didau and Nick Rose, What every teacher needs to know about psychology, 2016, John Catt

    David Didau, What if everything you knew about education was wrong?, 2016,  Crown House

    Chris Runeckles, Making Every History Lesson Count, 2018, Crown House

    Carl Hendrick, Five Things I Wish I Knew When I Started Teaching, 2017, https://chronotopeblog.com/2017/05/06/five-things-i-wish-i-knew-when-i-started-teaching/

    Gauthier, C., L’Enseignement explicite. Fondements et pratiques. Symposium Efficacité de l’enseignement. Fondements et pratiques. HEP Bejune, Suisse (2013)

    Clermont Gauthier, Steve Bissonnette & Marie Bocquillon, l’enseignement explicite : une approche pédagogique efficace pour favoriser l’apprentissage des contenus et des comportements en classe et dans l’école, apprendre et enseigner aujourd’hui, vol 8, n° 2, printemps 2019

    Céline Guilmois, Efficacité de l’enseignement socioconstructiviste et de l’enseignement explicite en éducation prioritaire : Quelle alternative pour apprendre les mathématiques ? Thèse présentée en vue de l’obtention du doctorat en sciences de l’éducation (2019)


    Anita L. Archer et Charles A. Hughes, Explicit Instruction, 2011

    Memory consolidation, https://en.wikipedia.org/w/index.php?title=Memory_consolidation&oldid=1214804885 (last visited Apr. 10, 2024).

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