mardi 7 janvier 2020

Maintenir la qualité des relations en classe au fil de l’année scolaire

Une fois celui-ci installé en début d’année scolaire, nous devons tâcher de maintenir un climat positif en classe pour cultiver de bonnes relations avec nos élèves. Une fois les bases des relations établies en classe, certaines stratégies peuvent venir les enrichir sur le long cours.

(Photographie ; Noah Emrich)



Montrer de l’intérêt, de la disponibilité, une ouverture relationnelle au fil du temps


Il peut être utile, particulièrement dans le cadre de classes plus agitées ou moins engagées, de rester en contact avec les intérêts du niveau d’âge des élèves. Que ce soit au niveau des préférences des élèves en matière de lecture, d’émissions de télévision, de films, de jeux, de musique, de sports, d’évènements ou de sites web.

L’idée n’est pas tant de se mettre dans la peau d’un adolescent, que de trouver de temps à autre l’un ou l’autre sujet crédible ou sensible de conversation. Celui-ci gagne à être récurrent de manière à entretenir un lien non uniquement centré sur les contenus de l’enseignement. Nous bénéficions à nous trouver quelques sujets de discussion récurrents, prêts à l’emploi. 

Ceux-ci facilitent l’entretien de rapports sociaux avec les groupes d’élèves, plus particulièrement avec les sous-ensembles qui tendent à sortir du rang ou à se désengager scolairement. Ces démarches permettent de diminuer la distance relationnelle source de quiproquos et d’attributions erronées.

De la même manière, autant que possible, nous montrons de l’intérêt et tâcher de participer à leurs différentes activités ou évènements organisés dans le cadre de l’école ou dans d’autres cours. Celles-ci concernent en premier lieu ces élèves, avec leurs autres enseignants ou leurs parents. De même, discuter avec les parents d’un élève permet potentiellement de mieux le connaître et de faciliter la relation par la suite si nous arrivons à établir les bases d’un climat de collaboration mutuelle.

Autre point important, il ne faut jamais hésiter à avoir des conversations occasionnelles avec les élèves à l’extérieur de la classe, par exemple dans les couloirs et avant ou après un cours. Dans leur même sens, les saluer quand nous les croisons dans la rue ou dans un autre contexte ajoute subtilement de l’authenticité à la relation.

De même, les élèves doivent se sentir bienvenus et attendus positivement lorsqu’ils entrent en classe, d’y arriver un peu plus tôt lorsqu’elle est libre avant le début du cours ou rester quelques minutes après la fin. Ils ne doivent pas hésiter à profiter de l’occasion pour poser une question sur le cours qu’ils n’oseraient pas poser en classe devant les autres. Ils doivent se sentir à leur place et percevoir l’enseignant comme accueillant et ouvert à leurs questions, soucieux de les soutenir et de leur apporter conseil.



Soutenir le développement des compétences relationnelles des élèves


L’enseignant peut mettre en œuvre des pratiques favorisant des moments d’échanges sur la matière entre pairs, des phases d’enseignement réciproque, d’apprentissage coopératif ou de tutorat formel ou informel. L’enseignant soutient et encadre ces pratiques. Il enseigne aux élèves les routines qui en favorisent le succès et justifie leur intérêt en matière d’apprentissage.

Ces compétences en travail collaboratif seront nécessaires dans la vie professionnelle future des élèves, l’école est un lieu idéal pour installer les principes d’un fonctionnement équilibré dans ce cadre. C’est l’occasion de montrer en fonction de quels critères et principes, ces pratiques de collaboration peuvent devenir des outils de productivité partagée et d’apprentissage effectif, parfois plus efficaces que des démarches individuelles.

Ces approches favorisent chez les élèves l’acquisition de compétences en collaboration, en autogestion et en communication efficace. À ce titre, il est nécessaire que ces pratiques collaboratives soient fondées sur des données probantes et des procédures éprouvées. Nous éviterons de lancer les élèves dans un travail de groupe indéfini ou un projet de recherche désordonnée d’où sont susceptibles d’émerger des digressions et des comportements hors tâches.

Dans le cadre d’un contexte efficace et structuré, les élèves bénéficient d’un cadre pour le développement des habiletés sociales, de même qu’en gestion des ressources et des responsabilités. Ils apprennent à développer une communication assertive, tout en respectant les autres et en usant des règles de politesse et du savoir-vivre ensemble.

Il est utile que les élèves prennent conscience que dans ces contextes particuliers, ils sont malgré eux susceptibles de s’exprimer ou d’agir d’une telle manière que certains peuvent se sentir offensés. C’est particulièrement vrai dans des situations où s’ajoutent de l’anxiété, du stress ou des conflits sous-jacents. Nous les aidons à apprendre à développer des routines pour apaiser certaines situations plus tendues, à faire des compromis et à trouver entre eux des solutions partagées.

L’idée est de faire du travail collaboratif un outil à la fois au service d’un enseignement efficace et à celui d’un développement en parallèle de compétences relationnelles. Toutefois, les compétences relationnelles ne sont pas le but en soi, mais se veulent au service des apprentissages.



Prendre le pli de proposer une rétroaction individuelle aux moments opportuns


Lorsqu’un enseignant prend conscience de difficultés d’un élève, qu’elles soient d’ordre comportemental ou scolaire, il est utile de trouver l’occasion d’un moment calme où il n’est pas stressé pour proposer une rencontre. À cette occasion, nous pouvons discuter avec lui de pistes de solution.

Si le problème est d’ordre comportemental, l’objectif est de discuter avec l’élève, de l’écouter pour mieux comprendre ensemble la nature du problème et le guider vers une solution acceptable. Nous visons toujours à ce que l’élève apprenne une façon constructive de faire face aux émotions négatives et d’exprimer positivement ses difficultés et frustrations éventuelles.

Les élèves peuvent ne pas être compétents dans l’utilisation qu’ils font des comportements sociaux, mais ils sont toujours sensibles à l’idée d’agir pour sauver leur face, leur image.

Les élèves sont toujours plus particulièrement susceptibles de réagir négativement à des situations qu’ils interpréteront comme des menaces. C’est le cas lorsqu’ils sont critiqués directement ou lorsqu’ils ont le sentiment d’être ridiculisés en public. C’est d’autant plus le cas que la communication de l’enseignant semble remettre en question l’image publique même que l’élève vise à protéger et entretenir.

En tant qu’enseignant, cela constitue un terrain sur lequel nous gagnons à éviter de nous aventurer. Il y a un potentiel nettement plus important à établir la confiance et à proposer des pistes constructives. Nous pouvons améliorer globalement la relation avec ces élèves lorsque nous nous montrons sensibles à leurs préoccupations.

Nous devons éviter d’embarrasser un élève ou de lui faire perdre la face vis-à-vis d’autres élèves en classe. Tout ce qui pourrait s’apparenter à une lutte de pouvoir publique ou à un règlement de compte face à la classe devrait être court-circuité. Il est judicieux de couper court et postposer le dénouement à une rencontre individuelle ultérieure (fin de cours ou temps de pause, le jour même ou le lendemain).

L’enseignant peut éventuellement demander à l’élève d’écrire sur papier sa version du problème pour avoir un support de discussion ultérieurement. Si la tension est trop forte pour poursuivre le cours normalement, il peut être prudent de prendre la décision d’exclure l’élève de la classe.



Instituer l’erreur comme moteur pour l’apprentissage


Un problème commun en classe est celui d’élèves qui se mettent en retrait, ne participent pas spontanément ou n’osent pas signaler quand ils ne comprennent pas ou se sont trompés. La raison est qu’ils craignent de montrer leur échec en public. Ils appréhendent de paraître stupides, incompétents ou insensés face à leurs camarades.

Ils se donneront beaucoup de mal pour éviter de tels étalages en public. C’est problématique, car ce type d’attitude interfère avec l’engagement et peut sérieusement entraver leurs apprentissages.

Nous devons, en tant qu’enseignants, aider ce profil d’élève à surmonter ce type de crainte. Nous devons clairement et publiquement traiter toute erreur comme une partie utile, comme un moteur de l’apprentissage. La recherche semble d’ailleurs indiquer qu’un taux d’erreur de 15 % et par conséquent de 85 % de réussite est optimal dans une phase d’apprentissage (Robert C. Wilson et coll., 2019).

Nous devons faire comprendre à nos élèves que rencontrer des difficultés ou de l’incompréhension est à la fois courant, normal et bénéfique. Certes, cette situation est peut-être frustrante, mais elle fait partie intégrante de la qualité du processus d’apprentissage. Ne rencontrer aucun problème pourrait signifier paradoxalement que nous n’apprenons que peu.

Le message à faire passer est qu’il est important d’oser affronter ses erreurs et ses difficultés et travailler jusqu’à les surpasser. C’est vouloir tout comprendre pour réellement apprendre. C’est une aptitude d’autogestion et de métacognition très précieuse à cultiver.

Une manière de dédramatiser est de décrire en tant qu’enseignant les difficultés que nous avons eues nous-mêmes à apprendre une matière ou à développer une compétence. Nous devons insister sur le fait que pour y arriver, la solution a été de fournir beaucoup de travail et d’efforts, mais également de demander de l’aide pour surmonter nos obstacles.

Un autre élément important est d’insister sur le fait que personne ne va se moquer de quelqu’un qui a des difficultés. Tout le monde s’est trouvé et se retrouvera dans cette situation à un moment ou un autre. Cela peut provoquer une prise de conscience chez tous les élèves face au respect à accorder aux difficultés des autres.

Oser se tromper et admettre que nous n’y arrivons pas est la meilleure attitude pour recevoir des commentaires et des conseils qui vont nous permettre de sortir de l’impasse et progresser. Arriver à installer ce type de climat dans une classe est le signe d’une confiance partagée qui est un fondement dans le maintien de relations positives.



Toujours garder un état d’esprit positif face aux aléas de la gestion de classe


Quoiqu’il se passe dans une situation où des perturbations ont lieu dans une classe, sauf cas extrêmes, pour l’enseignant, il est important de garder une perspective positive et de rester maitre de ses émotions. Particulièrement lorsqu’une interaction a lieu avec un élève face à son comportement et qu’elle a mené à l’établissement d’une sanction. 

Nous devons clairement laisser signifier par nos attitudes que notre objectif est de rétablir la relation en associant influence et coopération. Notre objectif est de rétablir l’intégration productive de l’élève perturbateur dans la normalité de la classe, selon le cadre précédemment convenu.

Lors de la résolution d’un problème de comportement, la façon dont l’enseignant va gérer la situation, que ce soit au niveau de la communication verbale ou non verbale, aura un impact sur la relation ultérieure. Non seulement cet impact se manifestera vis-à-vis de l’élève fautif, mais également face aux autres élèves, indifféremment de l’issue en matière de sanction attribuée.

Il est important de rester calme, de s’assurer que l’élève comprend la situation et d’appliquer les règles établies, de façon juste et équilibrée, avec neutralité. L’enjeu est de maintenir les relations pendant un conflit et au-delà de celui-ci.

Dans toute perturbation manifestée en classe, un élève à un moment donné pose un choix et prend des décisions sur la façon de se comporter. À ce titre également, au-delà des conséquences, tout le monde peut se tromper et chacun a la possibilité d’apprendre de ses erreurs. C’est d’autant plus vrai, fondamental et essentiel pour les enfants et les adolescents.

Une façon pour l’enseignant de signifier clairement cette croyance est, une fois le problème réglé, de mettre de côté les émotions négatives ressenties lors de l’incident. Il s’agit de conserver un ton positif, respectueux et chaleureux dans nos relations futures avec l’élève. L’enseignant interagit ensuite avec l’élève concerné comme avec n’importe quel autre élève dans la classe. Il lui délivre du renforcement positif en fonction de l’amélioration et comportement et montre de l’attention à ses progrès au niveau des apprentissages.



Mis à jour le 04/04/2024

Bibliographie


Edmund T. Emmer, Carolyn M. Evertson, Classroom Management for middle and high school teachers, pp-20-21, Pearson, 2017

Wilson, R.C., Shenhav, A., Straccia, M., et al. The Eighty Five Percent Rule for optimal learning. Nat Commun 10, 4646 (2019) doi:10.1038/s41467-019-12552-4

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