dimanche 16 décembre 2018

Conceptions, stratégies, processus cognitifs et déterminants liés à un apprentissage efficace

Si l’apprentissage de l’élève peut se résumer à une acquisition de connaissances et au développement des schémas cognitifs attenants, alors l’enseignement en est le processus médiateur. Les connaissances scolaires étant avant tout biologiquement secondaires, au sens que David C. Geary leur donne, nous pouvons postuler que si un enseignant ne peut enseigner sans élèves, alors une élève ne peut réellement apprendre efficacement sans enseignant.

(photographie : Masato Ninomiya)





Déterminants de l’efficacité de l’apprentissage chez l’élève


L’intérêt personnel et situationnel ou le sentiment d’efficacité personnelle :
  • Ces facteurs peuvent être liés à l’engagement des élèves, à leur motivation ou à leur persévérance face à des difficultés. 
  • Ils peuvent être liés au fait que développer des connaissances dans une matière scolaire donnée peut rencontrer un souhait propre, suscité ou entretenu. 
  • Si l’élève rencontre un intérêt (individuel) qui lui appartient et qui lui est intrinsèque, il aura de meilleures chances de réussite dans ses apprentissages. 
  • Un élève dont la volonté d’apprendre est conditionnée principalement par une pression externe (parents, nécessité de réussir par conformité, etc.) aura moins de probabilité de réussite dans ses apprentissages. 
  • Si l’intérêt de l’élève est essentiellement situationnel et donc fonction de caractéristiques de la tâche qui lui sont extérieures, il est plus fragile et temporaire et sa motivation est essentiellement extrinsèque. Il sera moins porteur de réussite. 

Le sentiment d’appartenance de l’élève :
  • L’appartenance se traduit par la compréhension et l’adoption des codes culturels propres à l’école.
  • Un apprentissage réussi demande une appropriation et une adhésion aux règles et normes qui régissent le milieu scolaire afin d’y évoluer efficacement et de s’y épanouir. 
  • Il s’agit d’adopter les conduites et routines comportementales attendues, de se conformer aux attentes et normes des enseignants et de l’institution. 
  • La constitution d’un réseau de pairs et les interactions au sein de la classe participent également à ce registre  

L’apprentissage autonome : 
  • Il trouve son expression la plus directe dans le travail à domicile qui est un facteur de réussite d’autant plus important que nous progressons dans le parcours scolaire.
  • Il regroupe toutes les activités d’apprentissage qu’effectue l’élève sans la supervision de l’enseignant. Son engagement dépend de son intérêt pour les études, des stratégies cognitives adoptées, de l’influence des parents et de sa capacité à se fixer de manière autonome des objectifs de travail. 
  • L’élève doit apprendre progressivement à maîtriser son temps, à s’organiser, à planifier, à s’évaluer et à partager les moments consacrés aux études et ceux dévolus aux loisirs. 

Les caractéristiques personnelles de l’élève et sa culture familiale :
  • Les facilités à étudier
  • Les connaissances préalables.
  • Le soutien parental. 



Conceptions de l’apprentissage chez l’élève et réussite scolaire


La façon dont les élèves vont concevoir l’apprentissage conditionne les stratégies qu’ils choisissent de mettre en place et développent. Les élèves qui ont une conception plus élaborée de l’apprentissage obtiennent généralement une meilleure réussite.

Ci-dessous, une gradation en cinq points des conceptions de l’apprentissage, de la plus basique à la plus élaborée :

1) L’élève perçoit que l’apprentissage consiste en un accroissement de ses connaissances et que ceci passe préférentiellement par de la compréhension. 
  • Savoir c’est comprendre et l’usage de ce savoir est inscrit dans un immédiat dont la portée est temporaire. 
  • Dans cette perspective, les élèves vont concentrer leur temps de travail spécifiquement avant une évaluation de manière à optimiser leur compréhension. 
  • Les limites se manifestent lorsque l’élève ne comprend pas tout, le but est ici essentiellement de restituer les connaissances dans un bref délai. 
  • La mémorisation n’est pas un réel enjeu.

2) L’élève perçoit l’utilité de la mémorisation afin d’augmenter le temps de mémorisation. L’élève cherche à conserver durablement ses connaissances en les stockant en mémoire à long terme en vue de l’examen. 
  • Les élèves mémorisent et étudient avec un savoir scolaire pour pouvoir restituer les connaissances le jour de l’examen. 
  • Le travail de mémorisation est concentré dans la dernière ligne droite avant l’évaluation, précédée d’une étape de compréhension. 
  • Les connaissances établies sont souvent superficielles et peu intégrées, peu de liens sont faits. 
  • La compréhension elle-même peut rester partielle puisqu’une étude par cœur ne l’impose pas. 
  • L’objectif est de réussir l’évaluation à un temps donné.

3) L’élève conçoit l’apprentissage comme une forme de stockage de connaissances susceptibles d’être utiles ultérieurement, que ce soit dans leur scolarité à venir ou dans la vie professionnelle projetée. 
  • L’usage de stratégies de mémorisation devient plus pertinent pour les élèves, parce qu’au-delà de la réussite d’une évaluation à un moment précis, les connaissances ont comme finalité d’être réutilisées par la suite.

4) L’élève conçoit le savoir comme un ensemble cohérent, il s’inquiète du sens donné aux apprentissages et à leur intégration. 
  • Il entreprend des démarches de synthèse au-delà de ses stratégies de mémorisation. 
  • Il vise une certaine abstraction qui lui permet de réaliser des liens au sein de la matière et avec d’autres matières.

5) L’élève conçoit l’apprentissage comme un processus d’interprétation ayant pour but de lui permettre de mieux comprendre la réalité qui l’entoure. 
  • Il opère des modifications de son propre fonctionnement à partir des nouvelles connaissances acquises qu’il utilise et transfère plus aisément dans de nouveaux apprentissages.



Types de stratégies d’apprentissage autonome


Les stratégies d’apprentissage ont pour but de favoriser la compréhension, la mémorisation, la récupération, l’application et l’acquisition des connaissances en jeu. Nous pouvons en distinguer quatre types.

1. Les stratégies affectives ou motivationnelles
  • Elles ont pour but de maintenir une motivation et de développer des attitudes positives chez les élèves.
  • Elles visent à les aider à gérer le stress et à favoriser la persévérance face à des difficultés liées à l’apprentissage ou au contexte d’enseignement.

2. Les stratégies cognitives
  • Elles visent à traiter, acquérir, organiser, approfondir et consolider les connaissances.
  • Elles ont été mises en évidence par la science de l’apprentissage.

3. Les stratégies d’organisation et de gestion des ressources
  • Elles concernent le maintien en ordre des cours et les démarches liées à l’organisation, la planification, l’utilisation des objectifs ou la distinction entre l’essentiel et l’accessoire.
  • Elles incluent l’accès à des sources d’aide potentielles dans l’élaboration, la vérification et l’obtention des réponses.
  • Elles prennent en compte la gestion du temps en matière de priorités et l’environnement de travail en matière d’atmosphère de travail.

4. Les stratégies métacognitives : 
  • Elles regroupent toutes les démarches d’autoévaluation et d’autorégulation qui permettent de piloter efficacement et avec souplesse, les trois autres types de stratégies. 
  • Elles incluent aussi une forme de gestion du bien-être : un excès ou un déficit en temps de travail se révèlent défavorables à l’apprentissage et à la réussite. 
  • Elles sont révélatrices de difficultés en matière de motivation ou de performance.



Trois processus cognitifs liés à l’apprentissage


L’acquisition de ces connaissances se fait par une gamme de processus qui vont de la répétition à l’élaboration, et passe également par la réorganisation des schémas cognitifs :
  • À un extrême, nous trouvons la répétition de maintien :
    • Elle est l’activité qui consiste à se répéter à soi-même une information, nous parlons en fait d’autorépétition. 
    • Elle permet de maintenir active l’information en mémoire de travail. Si elle permet également de transférer l’information en mémoire à long terme, cette mémorisation reste incertaine, car très contextuelle. 
    • Elle ne s’accompagne que de peu de sens, ce qui la rend sensible à l’oubli. Cela correspond à l’apprentissage par cœur le plus basique
    .
  • À l’autre extrême, nous trouvons l’élaboration : 
    • L’élaboration s’appuie sur un traitement des informations en mémoire de travail en lien avec d’autres informations déjà présentes en mémoire à long terme. 
    • L’enjeu est de créer des liens entre les nouvelles connaissances et des connaissances préalables.
    • L’élaboration traduit un niveau de traitement conscient de l’information plus approfondi qui va permettre une meilleure mémorisation.

Nous devons être bien conscients qu’un apprentissage durable et profond va dépendre de la nature et de l’organisation des connaissances au sein des schémas en mémoire à long terme. Ce processus nécessite la création de liens entre les connaissances déjà acquises et les nouvelles informations. Il aboutit à la réorganisation des schémas qui est un processus qui échappe à la conscience directe des individus, elle a lieu notamment lors du sommeil.



L’importance des évaluations intermédiaires


L’évaluation sommative des élèves est un événement ponctuel qui intervient au terme des apprentissages alors que l’enseignement présente un caractère distribué sur une période plus ou moins longue.

Une régularité et une distribution de l’apprentissage et de leur révision, sur une période large de temps, peuvent ne pas être plus avantageuses à court terme pour les élèves qu’une étude en masse juste avant les examens. 

Le problème est que des élèves qui distribuent leurs apprentissages risquent ainsi de ne pas se démarquer en matière de réussite à un examen sur ceux qui privilégient une étude en masse dans la dernière ligne droite.

Ceci sera d’autant plus vrai que les examens privilégient la restitution d’un savoir sans attendre un apprentissage plus en profondeur qui vérifierait la réflexion et la capacité à faire des liens.

Une évaluation certificative unique en fin de parcours peut ainsi inciter les élèves à opter pour un apprentissage superficiel. À l’opposé, l’inclusion d’une évaluation formative ou sommative régulière, cumulative et distribuée, d’un contrôle continu, peut contribuer à inverser la tendance. 





Mis à jour le 24/02/22

Bibliographie


Marielle Lambert–Le Mener, « La performance académique des étudiants en première année universitaire : influence des capacités cognitives et de la motivation », Université de Bourgogne
Faculté de lettres et sciences humaines, Thèse (2012)

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