
(Photographie : Isa Gelb)
Celle introduite par Franck Amadieu et André Tricot (2015) me semble intéressante. Elle est également plus en phase avec mon vécu d’enseignant en prise avec l’apprentissage parfois défaillant d’élèves.
En voici une synthèse librement adaptée et complétée à partir de la lecture du livre de Yana Weintstein et Megan Sumeracki, Understand How We Learn (2019) :
Un constat de départ
Différentes stratégies d’apprentissage efficaces ont été mises en évidence par la psychologie cognitive et participent à ce que nous pouvons appeler la science de l’apprentissage. Le point positif de ces stratégies est qu’elles peuvent être apprises par les élèves et sont susceptibles d’être enseignées explicitement par les enseignants.
Deux implications en découlent :
- Comprendre quelles stratégies contribuent à un meilleur apprentissage devrait être une compétence commune et essentielle développée lors de la formation initiale des enseignants et enrichie à travers leur développement professionnel.
- Accompagner les élèves dans le développement de leurs compétences cognitives et métacognitives appartenant à ce domaine serait une mission judicieuse à confier aux enseignants.
Elles ne renvoient pas toutes aux mêmes types d’activités mentales :
- Certaines sont plus basiques et stratégiques et donc de bas niveau, elles établissent une compréhension et un premier état de performance encore non durable.
- D’autres stratégies sont dites de niveau élevé, car elles contribuent à un apprentissage profond et dès lors se révèlent plus exigeantes dans leur mise en œuvre.
Les stratégies d’ordre affectif
Les stratégies affectives ne sont pas abordées dans cet article. Nous les avons abordées ici et plus largement là dans le cadre de la motivation.
Elles concernent tout ce qui est de l’ordre du développement de l’intérêt, de la motivation ou de l’auto-efficacité.
Ce sont les plus courantes, car elles sont intuitives et représentent un passage obligé pour une première cartographie des contenus à apprendre.
Ces stratégies de haut niveau consistent à :
Ces stratégies d’ordre métacognitif correspondent à :
La difficulté de mise en place de stratégies métacognitives vient du fait que les élèves n’ont pas forcément une bonne représentation des stratégies d’apprentissage qui sont efficaces ou non. Dès lors, ils tentent de naviguer à l’aveugle ce qui est improductif.
Ce n’est que lorsque les élèves sont capables d’évaluer la pertinence de leurs comportements d’apprentissage qu’ils peuvent les modifier et les améliorer.
Si un comportement ne permet pas d’atteindre efficacement ou rapidement les objectifs, alors il faudra le modifier, voir le remplacer par un autre.
Ces stratégies sont particulièrement essentielles dans les apprentissages autorégulés.
La dimension métacognitive de l’apprentissage a particulièrement un rôle de pilotage de l’apprentissage. Il ne s’agit pas pour l’apprenant de privilégier un type de stratégie par rapport à un autre, mais d’en faire un usage combiné, stratégique et optimisé visant un apprentissage durable sur le long terme.
Terminons sur un point sur l’usage autonome des plateformes numériques. De manière croissante, les enseignants sont invités à donner un accès pour leurs élèves, à des ressources virtuelles mises à disposition sur des plateformes numériques (comme Teams, Classroom Moodle ou Claroline).
L’usage sera plus important chez les élèves qui ont des buts de maîtrise, qui accordent une valeur importante à la tâche et qui emploient des stratégies d’élaboration. Les autres profils d’élèves tendront à la délaisser. Donc une simple mise à disposition sans un certain contrôle et sans une forme de renforcement sur son utilisation serait susceptible d’accroître les écarts entre les élèves.
Une plateforme numérique d’apprentissage, non obligatoire, est principalement utilisée par des élèves en réussite pour une raison simple à comprendre. En tant qu’usage autonome, hors des murs de l’école, elle nécessite un excellent niveau d’autorégulation des apprentissages. Celui-ci repose sur de bonnes compétences en stratégies d’étude et une motivation intrinsèque, qui en règle générale se retrouvent plutôt chez les élèves les plus talentueux.
Pour apprendre sur la durée et espérer pouvoir réinvestir efficacement nos connaissances, il est nécessaire de le mobiliser et de mettre en œuvre des stratégies de haut niveau lors de l’apprentissage.
Les élèves doivent donc organiser l’information, récupérer, élaborer et réguler leur apprentissage.
Les performances obtenues aux examens sont prédites par l’utilisation de stratégies d’élaboration et de stratégies métacognitives. L’usage privilégié de ces stratégies est lui-même prédit par des facteurs d’ordre motivationnel tels que l’auto-efficacité et la valeur accordée à la tâche.
La motivation intrinsèque favorise la mise en œuvre de ces stratégies de haut niveau et l’usage de stratégies de haut niveau par l’efficacité générée stimule à son tour la motivation intrinsèque. À l’inverse, les élèves qui sont essentiellement caractérisés par des buts de performance mettent davantage en œuvre des stratégies de surface pour un apprentissage rapide et souvent à court terme.
Franck Amadieu, André Tricot. Les facteurs psychologiques qui ont un effet sur la réussite des étudiants. Psicologia USP, Universidade de São Paulo, 2015.
Yana Weinstein, Megan Sumeracki, Understand how we learn, David Fulton, 2019.
Les stratégies cognitives de bas niveau
Les stratégies d’entrée dans les contenus
Ce sont les plus courantes, car elles sont intuitives et représentent un passage obligé pour une première cartographie des contenus à apprendre.
Il s’agit pour l’élève :
Ce type de stratégies se caractérise donc par une activité cognitive qui fait peu appel aux connaissances antérieures de l’élève. Elles ne demandent pas un engagement profond et dès lors elles ne développent qu’un traitement cognitif de faible profondeur.
Ce type de stratégie conduit généralement à des apprentissages superficiels, incomplets, peu intégrés et à court terme, particulièrement si ce sont les seules approches pratiquées par l’élève.
Ces stratégies sont généralement très courantes chez les élèves, car intuitives, faciles à maîtriser et à mettre en œuvre. Elles sont parfois utilisées par défaut, pas exemple en début de scolarité. L’élève parcourt ses feuilles, misant sur la réactivation de ce qu’il a déjà retenu en classe.
Elles ont une approche utilitaire immédiate et sont bénéfiques pour des performances à court terme. Le fait que les élèves étudient souvent la veille tend à renforcer leur utilisation. Leur efficacité sera fonction de l’engagement et de l’attention que l’élève arrive à engager, et sur lesquelles il n’a pas toujours de maîtrise.
- De prendre des notes peu structurées.
- D’apprendre par cœur mot à mot.
- De recopier son cours.
- De relire ses notes.
- D’utiliser des moyens mnémotechniques.
- De s’investir dans des activités de drill en absence de discrimination en relisant son cours.
Ce type de stratégie conduit généralement à des apprentissages superficiels, incomplets, peu intégrés et à court terme, particulièrement si ce sont les seules approches pratiquées par l’élève.
Ces stratégies sont généralement très courantes chez les élèves, car intuitives, faciles à maîtriser et à mettre en œuvre. Elles sont parfois utilisées par défaut, pas exemple en début de scolarité. L’élève parcourt ses feuilles, misant sur la réactivation de ce qu’il a déjà retenu en classe.
Elles ont une approche utilitaire immédiate et sont bénéfiques pour des performances à court terme. Le fait que les élèves étudient souvent la veille tend à renforcer leur utilisation. Leur efficacité sera fonction de l’engagement et de l’attention que l’élève arrive à engager, et sur lesquelles il n’a pas toujours de maîtrise.
Nous pouvons considérer qu’il s’agit de stratégies de bas niveau, qui même si elles sont répétées, se révèlent insuffisantes pour un apprentissage profond et durable ou même pour une compréhension approfondie des contenus.
Les stratégies d’organisation consistent à mettre en évidence et à traiter en priorité les principales informations des contenus. Elles amènent les élèves à faire une cartographie fine des contenus à apprendre présents dans leurs supports de cours.
Ces stratégies sont mises en œuvre lors d’activités dans lesquelles les élèves :
Elles sont de plus haut niveau que les stratégies d’entrée dans les contenus, car elles impliquent un traitement cognitif plus conséquent. Elles permettent d’offrir une meilleure structuration des contenus que les stratégies d’entrée dans les contenus.
En effet, bien souvent elles génèrent une production (flashcards, synthèse, notes additionnelles, carte conceptuelle…) qui sera ensuite mobilisée par des stratégies plus performantes ou d’entrée dans les contenus.
Elles contribuent à une activité cognitive de mise en relation des nouvelles informations avec des connaissances préalables et d’organisation de celles-ci de manière à faciliter leur maintien et leur intégration en mémoire.
Ce sont des activités qui développent et enrichissent la compréhension, mais ne sont pas performantes pour installer des apprentissages durables.
Les stratégies cognitives d’organisation et de gestion des ressources
Les stratégies d’organisation consistent à mettre en évidence et à traiter en priorité les principales informations des contenus. Elles amènent les élèves à faire une cartographie fine des contenus à apprendre présents dans leurs supports de cours.
Ces stratégies sont mises en œuvre lors d’activités dans lesquelles les élèves :
- Prennent des notes synthétiques qu’ils relisent et adaptent (par exemple avec la méthode Cornell).
- Remettent leurs cours en ordre et rassemblent des ressources (résumés, exemples de questions, notes de cours).
- Soulignent les éléments importants.
- Réalisent des résumés et synthèses dans lesquels ils reformulent les contenus et identifient les idées principales.
- Réalisent des flashcards.
- Structurent un plan du cours ou réalisent des représentations graphiques comme des cartes mentales ou des organisateurs graphiques.
- Observent, identifient et analysent les procédures de résolution d’exercices et les stratégies de résolution de problèmes.
En effet, bien souvent elles génèrent une production (flashcards, synthèse, notes additionnelles, carte conceptuelle…) qui sera ensuite mobilisée par des stratégies plus performantes ou d’entrée dans les contenus.
Elles contribuent à une activité cognitive de mise en relation des nouvelles informations avec des connaissances préalables et d’organisation de celles-ci de manière à faciliter leur maintien et leur intégration en mémoire.
Ce sont des activités qui développent et enrichissent la compréhension, mais ne sont pas performantes pour installer des apprentissages durables.
Les stratégies cognitives de haut niveau : la récupération et l’élaboration
Ces stratégies de haut niveau consistent à :
- Faire des analogies avec d’autres situations étudiées.
- Relier les nouvelles informations à ses connaissances antérieures.
- Réciter des contenus ou refaire des exercices ou problèmes à cours fermé.
- Reformuler oralement le cours avec ses propres mots en s’auto-expliquant ou en élaborant.
- Produire des liens entre les idées du cours et celles d’autres cours.
Ce processus est progressif, il nous amène à commencer par décrire et expliquer les idées principales, et au fur et à mesure à procéder avec plus de détails et de nuances.
En d’autres termes, ces stratégies concernent l’élaboration de nouvelles connaissances sur la base des connaissances initiales de l’élève. Elles contribuent à donner de la profondeur aux apprentissages et à enrichir nos schémas cognitifs.
En élaborant des relations entre les nouvelles informations et leurs connaissances antérieures, mais aussi en structurant et catégorisant les nouvelles informations, les élèves effectuent des traitements profonds de l’information. Ils obtiennent donc ont une meilleure intégration de leurs connaissances en mémoire à long terme.
En d’autres termes, ces stratégies concernent l’élaboration de nouvelles connaissances sur la base des connaissances initiales de l’élève. Elles contribuent à donner de la profondeur aux apprentissages et à enrichir nos schémas cognitifs.
En élaborant des relations entre les nouvelles informations et leurs connaissances antérieures, mais aussi en structurant et catégorisant les nouvelles informations, les élèves effectuent des traitements profonds de l’information. Ils obtiennent donc ont une meilleure intégration de leurs connaissances en mémoire à long terme.
Ces stratégies d’élaboration sont représentées par le fait de :
Ces techniques tendent régulièrement à être mobilisées de manière insuffisante par les élèves, en comparaison aux autres types de stratégies, car elles sont plus difficiles, fatigantes et moins intuitives.
Ce sont des stratégies qui demandent une implication plus forte et un investissement plus intense. Le bénéfice est lent à s’installer et ne se révèle que sur la distance. Elles marchent très bien à moyen et long terme, mais moins bien à court terme lorsqu’un élève étudie la veille par exemple.
La dimension la plus importante de ces techniques est celle de la récupération. Le fait de s’évaluer permet de mesurer l’écart entre ce que nous savons et ce que nous devrions savoir. Cela permet aussi de récupérer en mémoire des informations et donc de fournir un travail d’élaboration du savoir. Cette activité de récupération en mémoire permet un meilleur ancrage des connaissances.
En d’autres termes, pour apprendre la meilleure technique est de se tester, d’où le nom donné à cet effet, l’effet de test.
L’effet de test est malheureusement méconnu par bon nombre d’élèves. La plupart déclarent se tester pour évaluer ce qu’ils ont compris, plus rares sont ceux qui ont conscience que cela leur permet de mieux apprendre qu’en relisant.
- Faire des exercices variés et de manière entremêlée.
- Résoudre des problèmes.
- Étudier en groupe et s’expliquer mutuellement.
- Récupérer le contenu d’une collection de flashcards.
- Penser à des exemples de la vie de tous les jours ou à des applications concrètes.
- S’évaluer en faisant appel à une forme de pratique de récupération.
Ce sont des stratégies qui demandent une implication plus forte et un investissement plus intense. Le bénéfice est lent à s’installer et ne se révèle que sur la distance. Elles marchent très bien à moyen et long terme, mais moins bien à court terme lorsqu’un élève étudie la veille par exemple.
La dimension la plus importante de ces techniques est celle de la récupération. Le fait de s’évaluer permet de mesurer l’écart entre ce que nous savons et ce que nous devrions savoir. Cela permet aussi de récupérer en mémoire des informations et donc de fournir un travail d’élaboration du savoir. Cette activité de récupération en mémoire permet un meilleur ancrage des connaissances.
En d’autres termes, pour apprendre la meilleure technique est de se tester, d’où le nom donné à cet effet, l’effet de test.
L’effet de test est malheureusement méconnu par bon nombre d’élèves. La plupart déclarent se tester pour évaluer ce qu’ils ont compris, plus rares sont ceux qui ont conscience que cela leur permet de mieux apprendre qu’en relisant.
Ces stratégies permettent un apprentissage en profondeur et une meilleure intégration et appropriation des connaissances. De même, elles favorisent un meilleur transfert de ces connaissances dans de nouvelles situations.
Les stratégies métacognitives : planification et autorégulation
Ces stratégies d’ordre métacognitif correspondent à :
- La planification de l’étude
- L’utilisation régulée de l’autoévaluation
- La préparation de questions à poser
- Des recherches personnelles d’informations et de précisions supplémentaires permettant de clarifier et compléter la compréhension
- Chercher à connaître précisément les modalités et les exigences des évaluations.
Ce n’est que lorsque les élèves sont capables d’évaluer la pertinence de leurs comportements d’apprentissage qu’ils peuvent les modifier et les améliorer.
Si un comportement ne permet pas d’atteindre efficacement ou rapidement les objectifs, alors il faudra le modifier, voir le remplacer par un autre.
Ces stratégies sont particulièrement essentielles dans les apprentissages autorégulés.
La dimension métacognitive de l’apprentissage a particulièrement un rôle de pilotage de l’apprentissage. Il ne s’agit pas pour l’apprenant de privilégier un type de stratégie par rapport à un autre, mais d’en faire un usage combiné, stratégique et optimisé visant un apprentissage durable sur le long terme.
Les limites des plateformes numériques pour l’apprentissage autonome
Terminons sur un point sur l’usage autonome des plateformes numériques. De manière croissante, les enseignants sont invités à donner un accès pour leurs élèves, à des ressources virtuelles mises à disposition sur des plateformes numériques (comme Teams, Classroom Moodle ou Claroline).
L’usage sera plus important chez les élèves qui ont des buts de maîtrise, qui accordent une valeur importante à la tâche et qui emploient des stratégies d’élaboration. Les autres profils d’élèves tendront à la délaisser. Donc une simple mise à disposition sans un certain contrôle et sans une forme de renforcement sur son utilisation serait susceptible d’accroître les écarts entre les élèves.
Une plateforme numérique d’apprentissage, non obligatoire, est principalement utilisée par des élèves en réussite pour une raison simple à comprendre. En tant qu’usage autonome, hors des murs de l’école, elle nécessite un excellent niveau d’autorégulation des apprentissages. Celui-ci repose sur de bonnes compétences en stratégies d’étude et une motivation intrinsèque, qui en règle générale se retrouvent plutôt chez les élèves les plus talentueux.
Conclusions
Les élèves doivent donc organiser l’information, récupérer, élaborer et réguler leur apprentissage.
Les performances obtenues aux examens sont prédites par l’utilisation de stratégies d’élaboration et de stratégies métacognitives. L’usage privilégié de ces stratégies est lui-même prédit par des facteurs d’ordre motivationnel tels que l’auto-efficacité et la valeur accordée à la tâche.
La motivation intrinsèque favorise la mise en œuvre de ces stratégies de haut niveau et l’usage de stratégies de haut niveau par l’efficacité générée stimule à son tour la motivation intrinsèque. À l’inverse, les élèves qui sont essentiellement caractérisés par des buts de performance mettent davantage en œuvre des stratégies de surface pour un apprentissage rapide et souvent à court terme.
Mis à jour le 22/12/21
Bibliographie
Yana Weinstein, Megan Sumeracki, Understand how we learn, David Fulton, 2019.
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