(Photographie : Joseph Horton)
Distinguer performance et apprentissage
Nous voulons développer chez nos élèves la rétention et le transfert à long terme. L’objectif principal de l’enseignement est de doter les élèves de connaissances ou de compétences à la fois durables et flexibles :
À l’échelle d’une heure de cours, l’enseignant ne peut observer et mesurer que les performances de ses élèves sur ce qu’il vient de leur enseigner. Ces performances sont une condition nécessaire, mais un indice peu fiable pour déterminer si un apprentissage est en cours .
La performance fait référence aux fluctuations temporaires du comportement ou des connaissances qui peuvent être observées et mesurées pendant ou immédiatement après le processus d’acquisition.
Nous distinguons les comportements qui peuvent être observés pendant la formation, c’est-à-dire la performance, et les comportements relativement permanents, c’est-à-dire l’apprentissage, qui ne peut être réellement établi qu'à moyen ou long terme.
- Durables, signifie que les connaissances restent accessibles aussi longtemps qu’elles sont susceptibles d’être utiles pour un individu.
- Flexibles, signifie que les connaissances sont transférables et accessibles dans les différents contextes où elles sont pertinentes, et pas seulement dans des contextes scolaires qui correspondent à ceux rencontrés pendant l’enseignement.
À l’échelle d’une heure de cours, l’enseignant ne peut observer et mesurer que les performances de ses élèves sur ce qu’il vient de leur enseigner. Ces performances sont une condition nécessaire, mais un indice peu fiable pour déterminer si un apprentissage est en cours .
La performance fait référence aux fluctuations temporaires du comportement ou des connaissances qui peuvent être observées et mesurées pendant ou immédiatement après le processus d’acquisition.
Nous distinguons les comportements qui peuvent être observés pendant la formation, c’est-à-dire la performance, et les comportements relativement permanents, c’est-à-dire l’apprentissage, qui ne peut être réellement établi qu'à moyen ou long terme.
La performance et l'apprentissage sont deux concepts différents qui sont parfois contradictoire dans les faits :
Voici une synthèse d’une première partie d’un article de Nicholas C. Soderstrom et Robert A. Bjork (2015) sur le sujet :
Un apprentissage peut avoir lieu même si aucun changement perceptible dans la performance n’est observé. Autrement dit, parfois en nous focalisant sur certains points précis, nous ne voyons pas toute l’étendue de l’apprentissage des élèves au-delà et autour de ceux-ci.
L’apprentissage latent est défini comme un apprentissage qui se produit en l’absence de tout renforcement évident ou de changements de comportement perceptibles. L’apprentissage est latent, ou caché, car il n’est pas exposé à moins qu’un évènement quelconque ne soit introduit pour le révéler.
Prenons l’exemple d’une personne qui vient d’emménager de la campagne vers une agglomération urbaine dense. Craignant de conduire à cause de la densité de la circulation et de la complexité des trajets, cette personne décide de prendre le bus dans un premier temps pour chacun de ses déplacements. En prenant le bus jour après jour, elle en apprend un peu plus chaque jour sur les configurations urbaines et le mode de conduite. Après un certain temps, cette personne devrait devenir plus confiante pour prendre le volant.
Toute personne qui va utiliser régulièrement les transports en commun va naturellement enrichir ses connaissances sur la configuration et la géographie urbaine. Dans le cas de la personne qui nous intéresse, cet apprentissage peut être renforcé. La personne peut éprouver de la motivation à rapidement prendre le volant pour faire ses courses, rendre visite à des amis ou se rendre à son travail.
Que la personne ait une intention ou pas, le fait de prendre les transports en commun va créer un apprentissage latent ou caché. Celui-ci peut se révéler utile par exemple un jour de grève des transports en commun ou lorsqu’elle utilisera une voiture.
Lors des trajets en bus, nous créons une représentation mentale de l’environnement spatial. Ce processus est naturel, car il correspond à l’acquisition de connaissances primaires selon le modèle de Geary. Une instruction n’est pas nécessaire, nous sommes programmés pour apprendre la configuration spatiale de notre environnement.
Un autre élément intéressant est que l’apprentissage latent remet en question l’hypothèse largement répandue selon laquelle l’apprentissage ne peut se faire qu’en présence d’un renforcement. Dans les cours que nous leur donnons, nos élèves vont acquérir naturellement en classe des connaissances qui ne font pas partir des objectifs définis. Ces connaissances ne sont pas travaillées explicitement. Ils vont pourtant les apprendre pour la simple raison qu’ils assistent au cours et que soit elles les ont marqués, soit qu’elles appartiennent au domaine biologique primaire, soit qu’elles correspondent à un intérêt individuel.
Un autre lien peut être fait entre l’apprentissage latent et l’acquisition de connaissances tacites en sciences.
Tolman, Honzik et Blodgett, trois psychologues américains ont réalisé une série d’expériences à la fin des années 1920. Parmi celles-ci, l’une d’entre elles concernait trois groupes de rats qui avaient été placés dans un labyrinthe en T complexe chaque jour pendant 17 jours au total :
C’est sans surprise le second groupe régulièrement renforcé qui a fait le moins d’erreurs en trouvant la boîte de but et a appris le plus rapidement.
Le groupe qui n’a jamais été renforcé a fait le plus d’erreurs.
Le troisième groupe, celui du renforcement différé a montré le même nombre d’erreurs que le groupe jamais renforcé jusqu’au 11e jour. Le jour où la nourriture a été introduite, une amélioration immédiate s’est produite, ce qui a fait chuter leur taux d’erreur à un niveau comparable à celui du groupe régulièrement renforcé.
Les rats non renforcés du groupe 3 avaient acquis une connaissance du labyrinthe équivalente à celle du second groupe même s’ils ne l’exprimaient pas en rejoignant la boîte de but directement avant le onzième jour.
Le renforcement retardé a révélé que les rats ont effectivement appris le labyrinthe alors qu’aucun renforcement n’était fourni et que leur comportement semblait plutôt sans but.
En d’autres termes, l’apprentissage s’est produit alors que les performances étaient stagnantes.
D’autres études ont affiné ces résultats en montrant que l’apprentissage latent pouvait se produire chez le rat après seulement 30 minutes d’exploration libre. La durée passée dans le labyrinthe sans renforcement était positivement liée à l’apprentissage du labyrinthe.
L’apprentissage latent ne se limite pas aux rats, il est aussi empiriquement démontrable chez l’homme. Il a été mis en évidence dans le cadre d’un comportement exploratoire lié à la recherche d’objets chez un enfant de trois ans. Il a également été constaté que la quantité d’apprentissage latent observée chez les enfants augmente avec l’âge.
Le surapprentissage correspond à la situation où un élève continue à pratiquer une tâche un certain nombre de fois alors même qu’il en a atteint la maîtrise. Sa performance devient asymptotique, c’est-à-dire que tendant vers une asymptote horizontale, elle ne progresse quasiment plus.
On peut estimer la quantité de surapprentissage. Le nombre d’essais post-maîtrise est divisé par le nombre d’essais nécessaires pour atteindre la maîtrise. Par exemple, si un violoniste a répété une nouvelle pièce 5 fois de plus après avoir eu besoin de 10 essais de pratique pour la maîtriser, le degré de surapprentissage serait de 50 %.
De nombreuses études antérieures sur le surapprentissage, notamment par Hermann Ebbinghaus (1850 – 1909), ont démontré le pouvoir du surapprentissage comme méthode pour contribuer à améliorer l’apprentissage à long terme des connaissances et des compétences.
Il serait ainsi utile de poursuivre la pratique au-delà du moment où un critère de maîtrise est atteint dans le but de développer un apprentissage plus durable. Le phénomène a été mis en évidence sur des contenus d’apprentissage simples et complexes.
Un autre avantage est qu’avoir pratiqué du surapprentissage accélère le taux de réapprentissage, c’est-à-dire le temps nécessaire pour réapprendre le matériel après un oubli provoqué par le temps.
Le surapprentissage semble être un outil d’apprentissage efficace pour un large éventail de tâches. Le surapprentissage correspond à un gain d’apprentissage malgré le fait que la performance n’évolue plus. Encore une fois, on voit une déconnexion entre performance et apprentissage.
Les premiers travaux sur la fatigue ont suggéré que l’apprentissage pouvait se faire même après que la fatigue a empêché tout nouveau gain de performance pendant l’acquisition et même lorsque la performance se dégrade.
Ainsi, même lorsque la fatigue limite ou élimine les gains de performance, l’apprentissage peut encore se dérouler.
La performance peut être augmentée par la suite une fois que la fatigue sera dissipée. La fatigue lors d’un entrainement peut entrainer une diminution de performance, mais n’empêche pas l’apprentissage de continuer. Un apprentissage substantiel peut encore avoir lieu alors que la fatigue étouffe tout gain de performance à court terme.
Ainsi une chute dans la performance liée à la fatigue n’empêche pas l’apprentissage de progresser. Paradoxalement, liée au surapprentissage, la fatigue peut jouer le rôle d’une difficulté désirable.
Un élève qui travaille selon une logique de pratique massée peut systématiquement s’y mettre dans la dernière ligne droite sous forme d’une seule session de travail.
Un élève adepte de pratique distribuée va se contenter de revoir la veille d’un examen ou d’une évaluation. Auparavant, il aura réparti son travail dans le temps selon des périodes espacées.
Aucun des deux profils d’élèves n’est susceptible de travailler plus longtemps que l’autre.
Concrètement lors d’une pratique distribuée l’acquisition d’un niveau donné de performance est plus lent à atteindre, mais également plus durable :
L’espacement des sessions d’étude, par rapport à leur regroupement, peut en fait ralentir l’acquisition des connaissances, mais peut toujours conduire à une meilleure rétention.
Pratiquement, on peut recommander une combinaison des deux pratiques pour les élèves. Lorsqu’une nouvelle matière vient d’être vue en classe, il y a intérêt à démarrer avec un peu de pratique massée et de surapprentissage. Par la suite, l’élève peut fournir une pratique distribuée qui aura à ce moment-là plus un rôle d’entretien et d’approfondissement des connaissances.
L’avantage de l’effet d’espacement se retrouve dans tous les types d’apprentissage. La répartition (ou l’espacement) des possibilités d’étude est systématiquement plus bénéfique à l’apprentissage que leur regroupement.
L’effet d’espacement met en évidence une autre distinction entre performance et apprentissage. La performance sera favorisée par une pratique massée. L’apprentissage sera favorisé par une pratique distribuée.
Imaginons qu’un enseignant veuille apprendre à ses élèves trois types de problèmes (A, B et C). Pour chaque type de problème, il dispose de dix énoncés.
Pendant l’acquisition, les élèves affectés à une pratique entremêlée vont obtenir une moins bonne performance que ceux affectés à une pratique massée.
Cependant, les élèves affectés à la pratique entremêlée vont générer plus de gains d’apprentissage à long terme. La performance est moindre à court terme, mais l’apprentissage à long terme est plus important.
Il y a également un avantage en matière de transfert pour l’entremêlement, car celui-ci renforce les capacités de discrimination. L’entremêlement favorise ainsi un meilleur transfert des compétences concernées.
La performance des élèves n’est pas un indicateur fiable de l’apprentissage. Des conditions qui nuisent aux performances comme l’espacement ou l’entremêlement sont favorables à l’apprentissage. Régulièrement, l’apprentissage sera moindre lorsque le degré de performance est élevé.
Dans le cas de la fatigue, la performance se dégrade, mais l’apprentissage continue, ce qui génère une plus grande performance après le repos. Dans le cas du surapprentissage, les performances n’évoluent plus, mais l’apprentissage se renforce. Différentes connaissances s’acquièrent (tacites, latentes, biologiquement primaires) sans qu’une performance soit mise en évidence.
Les performances des élèves lors de l’enseignement ne doivent pas être considérées comme des preuves de l’existence d’un apprentissage durable.
Soderstrom, Nicholas & Bjork, Robert. (2015). Learning Versus Performance: An Integrative Review. Perspectives on psychological science: a journal of the Association for Psychological Science. 10. 176–199. 10.1177/1745691615569000
- L’amélioration des performances à un moment donné peut ne pas entrainer un apprentissage significatif à moyen et long terme. Si un élève maîtrise complètement une procédure à la fin d'une heure de cours, il peut avoir tout oublié un mois plus tard lors d'une évaluation sommative.
- De mauvaises performances ne signalent pas nécessairement l’absence d’apprentissage. Parfois rencontrer des difficultés lors de la phase d'apprentissage qui se traduisent par des erreurs et une performance plus faible peut générer plus de connaissances durables.
- Les pratiques d’enseignement qui favorisent un haut niveau de performance dans les activités entravent souvent l’apprentissage par rapport aux conditions qui induisent davantage d’erreurs et de difficultés lors de la performance.
Ainsi, une bonne performance à un moment donné peut ne pas générer d'apprentissage à moyens ou long terme, alors que celui-ci sera plus présent avec une performance moins convaincante mais qui permet à l'apprenant de se confronter à des difficultés.
Apprendre est une démarche difficile et faire face aux difficultés est ce qui permet de progresser. Des tâches ou des stratégies plus faciles peuvent stimuler les performance sans que cela ne se traduise par de meilleurs apprentissage.
Dès lors nous devons privilégier des stratégies cognitives qui induisent des difficultés désirables bénéfiques pour l'apprentissage même si cela se traduit par des performances moindres à court terme.
Voici une synthèse d’une première partie d’un article de Nicholas C. Soderstrom et Robert A. Bjork (2015) sur le sujet :
La notion d'apprentissage latent ou caché
Un apprentissage peut avoir lieu même si aucun changement perceptible dans la performance n’est observé. Autrement dit, parfois en nous focalisant sur certains points précis, nous ne voyons pas toute l’étendue de l’apprentissage des élèves au-delà et autour de ceux-ci.
L’apprentissage latent est défini comme un apprentissage qui se produit en l’absence de tout renforcement évident ou de changements de comportement perceptibles. L’apprentissage est latent, ou caché, car il n’est pas exposé à moins qu’un évènement quelconque ne soit introduit pour le révéler.
Prenons l’exemple d’une personne qui vient d’emménager de la campagne vers une agglomération urbaine dense. Craignant de conduire à cause de la densité de la circulation et de la complexité des trajets, cette personne décide de prendre le bus dans un premier temps pour chacun de ses déplacements. En prenant le bus jour après jour, elle en apprend un peu plus chaque jour sur les configurations urbaines et le mode de conduite. Après un certain temps, cette personne devrait devenir plus confiante pour prendre le volant.
Toute personne qui va utiliser régulièrement les transports en commun va naturellement enrichir ses connaissances sur la configuration et la géographie urbaine. Dans le cas de la personne qui nous intéresse, cet apprentissage peut être renforcé. La personne peut éprouver de la motivation à rapidement prendre le volant pour faire ses courses, rendre visite à des amis ou se rendre à son travail.
Que la personne ait une intention ou pas, le fait de prendre les transports en commun va créer un apprentissage latent ou caché. Celui-ci peut se révéler utile par exemple un jour de grève des transports en commun ou lorsqu’elle utilisera une voiture.
Lors des trajets en bus, nous créons une représentation mentale de l’environnement spatial. Ce processus est naturel, car il correspond à l’acquisition de connaissances primaires selon le modèle de Geary. Une instruction n’est pas nécessaire, nous sommes programmés pour apprendre la configuration spatiale de notre environnement.
Un autre élément intéressant est que l’apprentissage latent remet en question l’hypothèse largement répandue selon laquelle l’apprentissage ne peut se faire qu’en présence d’un renforcement. Dans les cours que nous leur donnons, nos élèves vont acquérir naturellement en classe des connaissances qui ne font pas partir des objectifs définis. Ces connaissances ne sont pas travaillées explicitement. Ils vont pourtant les apprendre pour la simple raison qu’ils assistent au cours et que soit elles les ont marqués, soit qu’elles appartiennent au domaine biologique primaire, soit qu’elles correspondent à un intérêt individuel.
Un autre lien peut être fait entre l’apprentissage latent et l’acquisition de connaissances tacites en sciences.
Quelques résultats d’expériences sur l’apprentissage latent
Tolman, Honzik et Blodgett, trois psychologues américains ont réalisé une série d’expériences à la fin des années 1920. Parmi celles-ci, l’une d’entre elles concernait trois groupes de rats qui avaient été placés dans un labyrinthe en T complexe chaque jour pendant 17 jours au total :
- Un groupe de rats n’a jamais été renforcé pour atteindre la boîte de but, ils ont simplement été sortis du labyrinthe lorsqu’ils l’ont trouvée.
- Un second groupe a été renforcé avec de la nourriture chaque fois que la boîte de but a été atteinte.
- Un troisième groupe n’a pas été récompensé pour avoir atteint la boîte de but avant le 11e jour, après quoi ils ont été régulièrement récompensés jusqu’au 17e jour.
C’est sans surprise le second groupe régulièrement renforcé qui a fait le moins d’erreurs en trouvant la boîte de but et a appris le plus rapidement.
Le groupe qui n’a jamais été renforcé a fait le plus d’erreurs.
Le troisième groupe, celui du renforcement différé a montré le même nombre d’erreurs que le groupe jamais renforcé jusqu’au 11e jour. Le jour où la nourriture a été introduite, une amélioration immédiate s’est produite, ce qui a fait chuter leur taux d’erreur à un niveau comparable à celui du groupe régulièrement renforcé.
Les rats non renforcés du groupe 3 avaient acquis une connaissance du labyrinthe équivalente à celle du second groupe même s’ils ne l’exprimaient pas en rejoignant la boîte de but directement avant le onzième jour.
Le renforcement retardé a révélé que les rats ont effectivement appris le labyrinthe alors qu’aucun renforcement n’était fourni et que leur comportement semblait plutôt sans but.
En d’autres termes, l’apprentissage s’est produit alors que les performances étaient stagnantes.
D’autres études ont affiné ces résultats en montrant que l’apprentissage latent pouvait se produire chez le rat après seulement 30 minutes d’exploration libre. La durée passée dans le labyrinthe sans renforcement était positivement liée à l’apprentissage du labyrinthe.
L’apprentissage latent ne se limite pas aux rats, il est aussi empiriquement démontrable chez l’homme. Il a été mis en évidence dans le cadre d’un comportement exploratoire lié à la recherche d’objets chez un enfant de trois ans. Il a également été constaté que la quantité d’apprentissage latent observée chez les enfants augmente avec l’âge.
L’importance du surapprentissage
Le surapprentissage correspond à la situation où un élève continue à pratiquer une tâche un certain nombre de fois alors même qu’il en a atteint la maîtrise. Sa performance devient asymptotique, c’est-à-dire que tendant vers une asymptote horizontale, elle ne progresse quasiment plus.
On peut estimer la quantité de surapprentissage. Le nombre d’essais post-maîtrise est divisé par le nombre d’essais nécessaires pour atteindre la maîtrise. Par exemple, si un violoniste a répété une nouvelle pièce 5 fois de plus après avoir eu besoin de 10 essais de pratique pour la maîtriser, le degré de surapprentissage serait de 50 %.
De nombreuses études antérieures sur le surapprentissage, notamment par Hermann Ebbinghaus (1850 – 1909), ont démontré le pouvoir du surapprentissage comme méthode pour contribuer à améliorer l’apprentissage à long terme des connaissances et des compétences.
Il serait ainsi utile de poursuivre la pratique au-delà du moment où un critère de maîtrise est atteint dans le but de développer un apprentissage plus durable. Le phénomène a été mis en évidence sur des contenus d’apprentissage simples et complexes.
Un autre avantage est qu’avoir pratiqué du surapprentissage accélère le taux de réapprentissage, c’est-à-dire le temps nécessaire pour réapprendre le matériel après un oubli provoqué par le temps.
Le surapprentissage semble être un outil d’apprentissage efficace pour un large éventail de tâches. Le surapprentissage correspond à un gain d’apprentissage malgré le fait que la performance n’évolue plus. Encore une fois, on voit une déconnexion entre performance et apprentissage.
La fatigue comme difficulté désirable pour l'apprentissage
Les premiers travaux sur la fatigue ont suggéré que l’apprentissage pouvait se faire même après que la fatigue a empêché tout nouveau gain de performance pendant l’acquisition et même lorsque la performance se dégrade.
Ainsi, même lorsque la fatigue limite ou élimine les gains de performance, l’apprentissage peut encore se dérouler.
La performance peut être augmentée par la suite une fois que la fatigue sera dissipée. La fatigue lors d’un entrainement peut entrainer une diminution de performance, mais n’empêche pas l’apprentissage de continuer. Un apprentissage substantiel peut encore avoir lieu alors que la fatigue étouffe tout gain de performance à court terme.
Ainsi une chute dans la performance liée à la fatigue n’empêche pas l’apprentissage de progresser. Paradoxalement, liée au surapprentissage, la fatigue peut jouer le rôle d’une difficulté désirable.
La pratique distribuée comme difficulté désirable face à la performance
Un élève qui travaille selon une logique de pratique massée peut systématiquement s’y mettre dans la dernière ligne droite sous forme d’une seule session de travail.
Un élève adepte de pratique distribuée va se contenter de revoir la veille d’un examen ou d’une évaluation. Auparavant, il aura réparti son travail dans le temps selon des périodes espacées.
Aucun des deux profils d’élèves n’est susceptible de travailler plus longtemps que l’autre.
Concrètement lors d’une pratique distribuée l’acquisition d’un niveau donné de performance est plus lent à atteindre, mais également plus durable :
- La pratique massée se traduit par une plus haute performance durant la phase de pratique et à court terme. Elle produit un apprentissage moindre à moyen et long terme.
- La pratique distribuée se traduit par une plus faible performance durant la phase de pratique et à court terme. Elle produit un apprentissage supérieur à moyen et long terme.
L’espacement des sessions d’étude, par rapport à leur regroupement, peut en fait ralentir l’acquisition des connaissances, mais peut toujours conduire à une meilleure rétention.
Pratiquement, on peut recommander une combinaison des deux pratiques pour les élèves. Lorsqu’une nouvelle matière vient d’être vue en classe, il y a intérêt à démarrer avec un peu de pratique massée et de surapprentissage. Par la suite, l’élève peut fournir une pratique distribuée qui aura à ce moment-là plus un rôle d’entretien et d’approfondissement des connaissances.
L’avantage de l’effet d’espacement se retrouve dans tous les types d’apprentissage. La répartition (ou l’espacement) des possibilités d’étude est systématiquement plus bénéfique à l’apprentissage que leur regroupement.
L’effet d’espacement met en évidence une autre distinction entre performance et apprentissage. La performance sera favorisée par une pratique massée. L’apprentissage sera favorisé par une pratique distribuée.
La pratique entremêlée comme difficulté désirable face à la performance
Imaginons qu’un enseignant veuille apprendre à ses élèves trois types de problèmes (A, B et C). Pour chaque type de problème, il dispose de dix énoncés.
- Dans le cadre d’une pratique massée, l’enseignant donnerait d’abord à réaliser les dix énoncés de type A, puis les B et enfin les C.
- Dans le cadre d’une pratique entremêlée, l’enseignant donnerait tous les problèmes dans un ordre aléatoire laissant aux élèves la déduction du type de problème présenté.
Pendant l’acquisition, les élèves affectés à une pratique entremêlée vont obtenir une moins bonne performance que ceux affectés à une pratique massée.
Cependant, les élèves affectés à la pratique entremêlée vont générer plus de gains d’apprentissage à long terme. La performance est moindre à court terme, mais l’apprentissage à long terme est plus important.
Il y a également un avantage en matière de transfert pour l’entremêlement, car celui-ci renforce les capacités de discrimination. L’entremêlement favorise ainsi un meilleur transfert des compétences concernées.
La performance n’est pas une preuve suffisante d’un apprentissage
Dans le cas de la fatigue, la performance se dégrade, mais l’apprentissage continue, ce qui génère une plus grande performance après le repos. Dans le cas du surapprentissage, les performances n’évoluent plus, mais l’apprentissage se renforce. Différentes connaissances s’acquièrent (tacites, latentes, biologiquement primaires) sans qu’une performance soit mise en évidence.
Les performances des élèves lors de l’enseignement ne doivent pas être considérées comme des preuves de l’existence d’un apprentissage durable.
Mise à jour le 05/10/2022
Bibliographie
Soderstrom, Nicholas & Bjork, Robert. (2015). Learning Versus Performance: An Integrative Review. Perspectives on psychological science: a journal of the Association for Psychological Science. 10. 176–199. 10.1177/1745691615569000
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