mardi 5 mai 2020

La métacognition, un processus d'autorégulation qui s’enseigne et s’apprend

L’autorégulation se met en route spontanément lorsque notre attention détecte un élément inattendu et vraisemblablement erroné. Nous sommes susceptibles à ce moment-là de déclencher un processus métacognitif, une démarche de réflexion qui s’extrait du flux automatique de pensée.

(Photographie : Ed Panar)



Les enjeux liés à la métacognition et à l’autorégulation


La métacognition et l’autorégulation ont pour enjeux de nous aider à réduire l’écart entre une situation donnée et une situation souhaitée. Encore faut-il qu’ils se déclenchent au moment opportun et détectent avec efficacité ces écarts, leur cause et nous permettent de les atténuer efficacement. 

Nous devons prendre conscience de l’état de difficulté et posséder les stratégies appropriées pour y répondre adéquatement par la suite.

Par exemple, lors d’un examen, un élève essaie de récupérer en mémoire une information qu’il a étudiée, mais il ne parvient pas à la récupérer directement. Suivant son degré de motivation :
  • Il peut s’avouer vaincu et prétexte un trou de mémoire fatal. 
  • Il peut au contraire contre-attaquer et se lancer une stratégie métacognitive qui consiste à pister des indices. Il cherche une piste, essaie d’activer les bons schémas, fait feu de tout bois et souvent cela peut se révéler être une stratégie gagnante :
    • Où se trouvait cette information dans le cours, entre quels éléments ? 
    • Quand l’a-t-il étudiée et où ? 
    • À quel moment est-ce intervenu dans le cours ? 
    • Quels sont les autres concepts proches dont il pourrait se souvenir ?

Considérons un autre élève qui termine son examen avec quinze minutes d’avance. Suivant ses habitudes, ses objectifs ou son degré de motivation, il a le choix :
  • Soit il baisse les bras, s’estime satisfait et décide de souffler un peu en laissant passer le temps et en se reposant tout en regardant à gauche et à droite. 
  • Soit il décide de relire sa copie, mais en activant l’un ou l’autre mode de détection d’erreur :
    • Soit en vérifiant son orthographe, sa grammaire et la construction des phrases.
    • Soit en passant en revue ses raisonnements.
    • Soit en évaluant la plausibilité et la complétude de ses réponses en fonction des consignes.

L’enjeu de la métacognition, c’est être capable de faire ce pas de côté, prendre du recul et réfléchir à ses propres processus cognitifs, de façon à voir comment optimiser ses investissements mentaux. 

L’élève qui va activer la surveillance et le contrôle de ses processus cognitifs fait preuve d’une plus grande capacité d’autorégulation. Il n’y a aucun doute qu’il réussira mieux et qu’il progressera plus sûrement sur le long terme.



Des processus métacognitifs qui s’enseignent


Comme n’importe quel contenu, les stratégies métacognitives d’autorégulation peuvent faire l’objet d’un enseignement explicite. Elles peuvent être modelées par l’enseignant et suivies d’une pratique guidée puis autonome accompagnée de vérification de la compréhension et de rétroaction. 

Il s’agit d’en prendre conscience en tant qu’enseignant. Il s’agit de le mettre en œuvre chaque fois qu’il est pertinent de les former à une stratégie de ce type. Nous en faisons le modelage. Nous donnons aux élèves des occasions de la pratiquer par les élèves, afin de leur apprendre à maîtriser et à prendre l’habitude d’adopter de telles démarches.

La métacognition est une compétence qui aide à apprendre et à raisonner plus efficacement. Elle permet de mieux sélectionner et de mieux planifier les stratégies cognitives adéquates. Elle nous permet de faire un meilleur usage de nos ressources limitées. De ce fait, elle joue un rôle central dans la réussite et l’excellence scolaire.

La métacognition est essentielle pour toutes sortes de comportements, car elle nous aide à résoudre des problèmes et à atteindre nos objectifs.

La métacognition est une forme de pensée de supervision, qui favorise l’autorégulation de notre cognition dans des domaines spécifiques pour lesquels nous développons une certaine maîtrise.

De cette manière, elle permet de favoriser l’apprentissage ultérieur et d’améliorer les comportements orientés vers la réalisation d’un objectif donné. La composante d’autorégulation est centrale dans la métacognition.



L’idée d’activer notre voix intérieure à travers notre mémoire de travail


Contrôler la qualité de l’action, de notre raisonnement, demande une démarche consciente. Il s’agit d’une certaine façon de prendre le contrôle conscient de notre voix intérieure. Un raisonnement sur soi-même exige de se considérer comme objet d’observation, d’évaluer ses processus et donc, d’une certaine manière de se parler à soi-même.

La voix intérieure est une forme de conscience de soi qui s’active à travers notre mémoire de travail, guide l’attention et oriente les ressources. L’autorégulation en nécessite une utilisation délibérée.

La mémoire de travail comprend le contrôleur exécutif (ou administrateur central) :
  • Nous pouvons l’utiliser pour concentrer notre attention, sur le monde extérieur en sélectionnant les données arrivant dans la mémoire sensorielle. 
  • Nous pouvons également l’orienter vers notre monde intérieur avec la mobilisation de connaissances en mémoire à long terme, créant une représentation épisodique unifiée dans le tampon épisodique.

L’administrateur central intègre et coordonne les actions et informations gérées par le calepin visuospatial, la boucle phonologique et le tampon épisodique.

Il est également responsable des processus d’inhibition qui intervient dans les apprentissages et le comportement social. Il nous permet également de nous projeter dans le futur et est donc au cœur du processus de décision et de planification.

Ainsi, une manière de pratiquer la métacognition consiste à se parler à soi-même en tant qu’apprenant afin d’entamer l’autorégulation de l’apprentissage. Il s’agit de tenir un dialogue intérieur, en matière de contrôle au fur et à mesure que nous assimilons ou traitons des contenus d’apprentissage.



Pistes pour nos questionnements intérieurs en vue de favoriser l’autorégulation


Nous pouvons alors nous poser des questions qui se basent sur différents principes et éléments comme :
  • La vérification :
    • Cette information est-elle complète, fiable, crédible ? 
    • Est-elle récente, dispose-t-elle de données probantes la validant ? 
    • Dois-je consulter une autre source ? 
    • Dois-je chercher de l’aide pour mieux le comprendre ?
  • Nos connaissances préalables :
    • Est-ce la première fois que je rencontre cette connaissance ? 
    • Est-ce que je peux faire des liens avec des contenus dans un autre domaine de connaissance ? 
    • Est-ce que cela se rapporte à autre chose que je connais déjà ? 
    • Où l’ai-je déjà rencontrée, dans quel contexte ?
  • La cohérence :
    • Est-ce que ce concept est en contradiction avec certaines de mes connaissances ? 
    • Qu’est-ce que je connais déjà qui confirme ou infirme la véracité de ce concept ? 
    • Qu’est-ce qui me surprend dans tout cela ? 
    • Quelles questions cela soulève-t-il pour moi ?
  • Les exemples concrets :
    • À quels exemples pratiques de ce concept puis-je penser ? 
    • Où puis-je trouver d’autres exemples de ce concept si je n’en ai pas ?
  • L’utilité :
    • Comment cette information peut-elle être appliquée dans le monde réel ou dans ma vie ? 
    • Pourquoi est-ce important de savoir cela ? 
    • Est-ce que je trouve cela intéressant ? 
    • Si oui, pourquoi ? Suis-je curieux d’en savoir plus à ce sujet ?
  • L’intégration :
    • Quels autres concepts connexes me viennent à l’esprit ? 
    • Comment cela s’intègre-t-il avec les autres connaissances que je possède sur ce sujet ? 
    • Que sais-je d’autre sur ce sujet ? 
    • Que pourrais-je apprendre d’autre sur ce sujet ?
  • La profondeur :
    • Ai-je bien compris le concept ? 
    • Puis-je le décomposer en plus petites parties ? 
    • Est-ce que je peux l’expliquer aisément à n’importe qui ? 
    • Comment pourrais-je résumer cela de manière succincte ? 
    • Quels autres moyens pourrais-je utiliser pour exprimer ce concept ? 
    • Aimerais-je pouvoir me souvenir de cela pour toujours ?
  • La récupération :
    • Est-ce que je peux récupérer aisément ce concept actuellement ? 
    • Est-il fondamental qu’il devienne une connaissance durable ? 
    • Si oui, à quel rythme dois-je le récupérer et de quelle manière ?
  • La rigueur :
    • Est-ce que mon raisonnement respecte les principes de développement du domaine concerné ? 
    • Est-il valide ? 
    • Quels moyens puis-je activer pour le vérifier, pour le tester ? 
    • Est-ce la seule façon de procéder et la plus efficace dans ce contexte ?
  • Les ressources :
    • Ai-je fait un bon usage de tous les outils et de toutes les informations à ma disposition ? 
    • Ai-je utilisé à bon escient toutes les informations pertinentes ?
    • Ai-je utilisé de façon optimale mon temps de travail ?


Mise à jour le 28/10/2024


Bibliographie


David Handel, The Power of Metacognition in Everyday Life, 2020, https://www.learningscientists.org/blog/2020/4/2-1

Pascal Roulois, La mémoire de travail, 2011, https://neuropedagogie.com/memoire-de-travail/organisation-et-fonctions-de-la-memoire-de-travail.html

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