
(Photographie : cornbelt)
Le risque de l’incohérence en gestion de classe à l’échelle de l’école
Comme tout être humain, les élèves fondent une grande part de leur fonctionnement sur des habitudes. Ils aiment que leurs journées scolaires se répètent dans un cadre positif et soutenant, au sein d’une structure prévisible et sécurisante.
Un élément clé pour tout enseignant est de manifester une cohérence dans le soutien au développement et au maintien de telles habitudes.
Des enseignants peuvent faire comme ils le sentent. Ils peuvent modifier les règles de jour en jour ou ne pas réagir toujours de manière conséquente lorsque des élèves manifestent des perturbations mineures. Ce type d’environnement ne sera pas optimal pour des élèves.
Même si un enseignant pense s’en sortir en faisant preuve de tolérance occasionnellement pour maintenir la paix, en réalité, il va finalement rendre l’enseignement et l’apprentissage plus difficile. Ce sera le cas pour tous ses élèves, mais également pour ses collègues avec qui il partage la classe, car des phénomènes de contamination du comportement peuvent avoir lieu. Ces élèves peuvent développer moins facilement de bonnes habitudes et leur comportement peut déborder chez d’autres enseignants.
De plus, l’inconsistance de l’enseignant face aux exigences qu’il impose à ses élèves est susceptible à terme d’évoluer vers des situations proches du chahut.
Soutenir la cohérence en gestion de classe à l’échelle de l’école
Il est essentiel que des enseignants, et plus encore des enseignants débutants, puissent créer un environnement fondé sur des réponses uniformes aux comportements adoptés par les élèves. Leurs élèves doivent être en mesure de comprendre les attentes et de faire des choix positifs.
Dès lors, il est important que le nouvel enseignant comprenne parfaitement la politique de l’école en matière de comportement. Il ne suffit pas pour cela qu’il lise des documents que lui fournit son mentor. Même les politiques les plus claires et les plus simples comportent des nuances et peuvent être interprétées différemment d’un membre du personnel à l’autre.
Celles-ci doivent être clarifiées. Un atelier peut être organisé par des accompagnants pédagogiques ou mentors en école. Il est alors demandé aux enseignants de lire préventivement les documents de l’école en lien avec la gestion du comportement. Différents scénarios typiques de problèmes de comportement au sein de l’école sont présentés aux enseignants sous forme d’études de cas.
Ils leur demandent, après les avoir entendus, d’expliquer comment ils auraient réagi si l’évènement s’était passé dans leur classe et ce qu’ils auraient fait ou quelles conséquences correctives ils auraient attribuées à l’élève. Pour rendre les situations plus concrètes, des jeux de rôles peuvent également être organisés.
Si la politique de gestion du comportement est bien développée et claire au sein de l’école, un consensus s’établira facilement. Si tel n’est pas le cas, la difficulté de certains enseignants peut être imputée en partie au manque de cohérence de l’établissement sur cette question.
Dans la recherche de cohérence en école, il est important qu’il n’y ait pas de nuances entre les enseignants et que les politiques soient suivies à la lettre. Cela n’empêche pas les enseignants d’être sensibles au contexte et de faire appel à leur intelligence émotionnelle et à leur tact pédagogique en examinant les causes sous-jacentes du comportement négatif de leurs élèves. Cependant ces démarches peuvent avoir lieu plus tard, après que le comportement a été désamorcé.
Le fait qu’un enseignant rencontre des difficultés et diverge dans la solution qu’il propose à certains scénarios liés à la gestion de perturbation est un excellent sujet de conversation et de réflexion pour l’accompagnateur pédagogique.
Il s’agit de le faire réfléchir à la manière dont il pourrait mieux contrôler son environnement d’apprentissage. Il peut prendre confiance dans le fait de savoir qu’il dispose de procédures et de démarches utiles qu’il ne doit pas avoir peur d’utiliser face à des perturbations en classe.
Dans le cadre de la nécessité d’être cohérent avec soi-même, la manifestation du respect est importante. Les élèves ont besoin que leurs enseignants leur donnent l’exemple d’un comportement courtois, amical et maîtrisé.
Après une longue journée difficile de cours à la fin d’une semaine, il est facile de laisser transparaître ses sentiments, son agacement et son épuisement. Si nous contribuons nous-mêmes à une atmosphère négative en classe, il y a un faible potentiel que le climat scolaire s’améliore en classe.
Si nous prenons le cas d’un enseignant en début d’années scolaires, cela impose d’être parfaitement préparé à commencer de manière ciblée lorsqu’il commence à enseigner à ses élèves. Lors d’un premier contact avec une classe, une image s’ancre. L’enseignant doit prendre le temps d’installer son cadre et de montrer que son cours est sur les rails et qu’il a tout bien anticipé et n’est pas pris au dépourvu.
Collecter des informations utiles sur ses futurs élèves
Lorsque nous ne connaissons pas les élèves auxquels nous allons enseigner, il est utile de se renseigner auprès de collègues qui les connaissent et de leur demander des informations utiles sur ceux-ci.
Quels sont les élèves qui travaillent le mieux ou ceux qui présentent des difficultés d’engagement ? Quels sont les problèmes auxquels nous devons faire attention ? Quels élèves ne pas asseoir les uns à côté des autres ?
L’utilisation de données antérieures sur les élèves est très utile pour s’assurer qu’il existe des possibilités de différenciation lors de la création du plan de classe. Ce sont les conseils pratiques de collègues qui connaissent les élèves qui sont les plus précieux.
Dans le cas d’un nouvel enseignant, l’accompagner et le soutenir dans cette collecte d’informations et l’introduire auprès des collègues concernés est une bonne tâche d’intégration à soutenir pour un mentor.
Un élément important est d’éviter de tomber dans des préjugés sur ses nouveaux élèves lorsqu’un collège se révèle de manière disproportionnée particulièrement négatif à leur sujet. Ce type d’information peut amener de l’anxiété inutilement et poser des a priori qui risquent de s’ancrer.
Réussir sa rencontre avec ses nouveaux élèves
Réussir sa rencontre avec ses nouveaux élèves a pour objet de favoriser une relation de respect mutuel avec ses classes. Cela passe par l’établissement, lors du premier cours, des règles de base avec les élèves. Il est absolument impératif qu’il commence sur une note déterminée et calme qui pose des limites de base pour sa classe.
Il est utile d’impliquer les élèves dans :
- La discussion sur l’intérêt et le bien-fondé des règles,
- Leurs liens avec les valeurs de l’école
- Et sur les raisons pour lesquelles tout le monde s’en retrouvera bénéficiaires.
Lorsque nous pouvons construire l’adhésion aux règles en établissant un consensus avec les élèves et en montrant une capacité d’écoute, ils deviennent beaucoup plus enclins à les respecter.
En présentant les comportements attendus, l’accent est mis sur le positif et les élèves se concentrent sur la valeur ajoutée pour tous plutôt que sur le comportement lui-même.
La piste du co-enseignement et des observations réciproques
Deux enseignants partagent la même classe ou un enseignant va observer un collègue et lui donner une rétroaction, sont deux démarches où les enseignants peuvent s’observer mutuellement. La démarche est particulièrement utile pour les enseignants novices qui observent leur mentor, car elle les aide à créer un environnement de travail utile et à gérer les comportements.
Par exemple, l’enseignant plus expérimenté peut montrer comment il crée une relation de respect mutuel avec ses élèves. Durant une discussion ultérieure, il peut compléter cette démonstration d’explications pour offrir un réel modelage du comportement attendu. En observant en retour un enseignant novice procéder de même, nous nous trouvons alors en situation de pratique autonome avec la possibilité d’offrir ensuite une rétroaction. En procédant de cette manière, un enseignant expérimenté peut enseigner et montrer à un enseignant novice comment il peut le faire.
Être en mouvement et vigilant lors de la pratique autonome
Un facteur clé auquel nous devons être attentifs dans le cadre de l’expression d’attentes élevées est d’être toujours attentif, vigilant, en mouvement et en interaction potentielle durant les heures de cours.
Pour un enseignant ayant une charge de travail particulièrement élevée, il peut être tentant de s’asseoir à son bureau devant son ordinateur et de s’atteler à des tâches administratives, à de la planification ou à des corrections. Pendant ce temps, les élèves peuvent effectuer des tâches en autonomie. C’est à éviter.
En circulant dans la classe pendant le cours, nous montrons aux élèves que nous sommes disponibles pour les soutenir et les aider en cas de besoin ou pour les encourager en cours de route. De plus, nous nous assurons de leur engagement. Si nous ne le faisons pas, ils ont tout le loisir de ne rien faire de ce que nous leur demandons.
Si un nouvel enseignant voit un enseignant expérimenté le faire et attirer son attention sur ce point, il pourra constater par lui-même qu’il s’agit d’une approche efficace. Il peut inviter le nouvel enseignant à assister à son cours. Il lui demande de se concentrer sur la façon dont les élèves réagissent à la manière bienveillante, mais ferme utilisée en classe pour interagir avec eux.
Nous pourrons ensuite discuter des effets de cette routine d’action que nous adoptons dans nos classes, lors d’une rencontre après le cours. Il est important de se rappeler que les enseignants ont tous des approches et des méthodes de travail qui diffèrent et nous ne devons pas de créer une copie conforme de nos pratiques et stratégies. Durant la période où un nouvel enseignant développe son identité professionnelle ou dans le cadre d’un développement professionnel ciblé, il est utile d’observer les stratégies utilisées en classe par un praticien expérimenté qui ont une influence positive.
Trouver la bonne distance avec les élèves
Pour certains nouveaux enseignants, il peut être difficile de trouver l’équilibre entre l’autorité et l’amitié avec les élèves. Le risque est réel pour un jeune enseignant du secondaire qui n’a que quelques années de plus que ses élèves de fin de secondaire.
Être trop proche en voulant être apprécié pour qui on est, en faisant de l’humour et en recourant parfois au sarcasme pour obtenir un rire est dangereux. Cela peut donner l’impression d’une coopération, mais constitue surtout à un piège dont il est compliqué par la suite de sortir, car les limites et le cadre en ressortent floutés.
Mettre en œuvre un climat d’apprentissage en classe
La gestion du comportement est un élément crucial de l’apprentissage de l’enseignement :
- La façon dont les élèves se comportent est étroitement liée aux résultats qu’ils obtiendront par la suite à l’école.
- Un meilleur comportement équivaut à un meilleur apprentissage et à la possibilité pour les élèves d’obtenir de meilleurs résultats scolaires.
Parallèlement, l’enseignement doit également être stimulant. Les élèves doivent avoir la possibilité, lors de chaque cours, de s’appuyer sur leurs connaissances antérieures. Ils doivent se sentir stimulés et encouragés à s’engager dans des tâches plus difficiles.
La mise en place d’un environnement stimulant et exigeant dans une classe prend du temps. En début de carrière, c’est une dimension dans laquelle il est utile d’aider un enseignant débutant dans le cadre du mentorat.
Il existe certains fondamentaux :
- Il est important que le nouvel enseignant reconnaisse que l’apprentissage est par nature difficile :
- Des élèves peuvent légitimement être attentifs, de bonne volonté et ne pas comprendre rapidement ou automatiquement le contenu de l’enseignement.
- Il faut pouvoir gérer ces moments délicats où les élèves posent une question sur ce qui vient d’être expliqué ou lorsqu’il s’agit de réexpliquer un concept d’une manière différente.
- Ce sont des passages obligés par lesquels les nouveaux enseignants doivent accepter de passer et qui fait partie intégrante de l’enseignement et permet de développer notre capacité à bien enseigner notre matière.
- Si nous ne relevons pas ce défi qui consiste à dissiper l’incompréhension, nous plaçons une barrière entre nous et nos élèves. Nous les perdons face aux attentes élevées que nous voulons exprimer.
- Il est important que le nouvel enseignant prenne le temps de connaître suffisamment bien ses élèves :
- L’enjeu est d’intégrer des défis dans l’enseignement et leur faire comprendre que nous avons la conviction qu’ils peuvent réussir s’ils fournissent les efforts nécessaires.
- Cette connaissance permet de planifier les types d’activités et de contenus qui les mettront à l’épreuve sur le plan scolaire.
- Cela peut s’avérer extrêmement difficile au début de l’année scolaire pour un nouvel enseignant qui n’a jamais enseigné ce cours ou dans cette école. Il a donc intérêt à consulter à la fois ses collègues qui donnent le même cours et le collègue qui enseignait à ces élèves l’année précédente. Ils peuvent mettre à disposition des ressources développées au sein de l’école.
- Être bien informé au début de l’année scolaire permet de prendre un bon départ et de perdre moins de temps au début de l’année scolaire.
- La possibilité pour un nouvel enseignant de planifier des activités plus personnalisées pour ses propres classes constitue une bonne base pour créer des plans à moyen terme plus tard au cours de l’année scolaire.
- Il est important que le nouvel enseignant comprenne l’importance des objectifs d’apprentissage :
- Les objectifs d’apprentissage sont l’un des moyens les plus importants dont disposent les enseignants pour communiquer à leurs élèves qu’ils sont tous censés réfléchir de manière approfondie et critique.
- Un accompagnement pour une rédaction d’objectifs d’apprentissage efficaces qui prennent la forme de défis ou de questions pour les élèves peut se révéler très utile pour un nouvel enseignant.
- Définir des objectifs d’apprentissage efficaces aide à planifier des cours dont les activités et les contenus sont précis et ciblés. Cela permet également d’ancrer solidement l’apprentissage des élèves, en leur donnant le sentiment d’avoir accompli quelque chose en étant capables de relever le défi grâce à leur apprentissage.
- Si les élèves savent clairement où va leur parcours d’apprentissage et à quoi il mène, ils sont beaucoup plus susceptibles d’en assumer la responsabilité.
- Il est important de soutenir le nouvel enseignant l’importance de soutenir des buts de maîtrise chez ses élèves :
- L’objectif est de créer en classe un climat positif d’apprentissage valorisant la persévérance, la résilience et la vision des erreurs comme opportunités d’apprentissage.
- Il s’agit d’encourager les nouveaux enseignants à utiliser leur planification pour soutenir chez les élèves le développement de buts de maîtrise, même si cela peut être difficile. Les élèves doivent avoir confiance en eux pour s’appuyer sur des stratégies spécifiques à la matière et sur leurs connaissances antérieures, afin de pouvoir les utiliser pour accomplir les tâches et progresser dans leur apprentissage.
Mis à jour le 04/07/2025
Bibliographie
Haili Hughes, Mentoring in schools, Crown House, 2021
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