dimanche 1 septembre 2024

Apprendre mieux avec le principe multimédia

Le principe multimédia est la porte d’entrée de la théorie cognitive de l’apprentissage multimédia qui ouvre la voie vers la prise en compte de nombreux autres principes liés à cette approche.

(Photographie : Mostly the Marsh)



Définition du principe multimédia


Le principe multimédia signifie que les gens apprennent mieux avec des mots et des images qu’avec des mots seuls.

Par exemple, une présentation multimédia pourrait se composer d’une animation décrivant les étapes de la formation d’un éclair et d’une narration concomitante décrivant les étapes de sa formation d’un éclair. Une présentation à support unique se composerait uniquement d’une narration.


(source


Le principe multimédia se base sur la justification théorique que :
  • Lorsque des mots et des images sont présentés ensemble : 
    • Les apprenants ont la possibilité de construire des modèles mentaux verbaux et visuels et d’établir des liens entre eux.
  • Lorsque des mots seuls sont présentés : 
    • Les apprenants ont la possibilité de construire un modèle mental verbal. 
    • Les apprenants sont moins susceptibles de construire un modèle mental visuel et d’établir des liens entre le modèle mental verbal et le modèle mental visuel.
Diverses recherches ont été menées par Mayer et ses collaborateurs. Systématiquement, les apprenants du groupe d’intervention ont reçu du texte et des illustrations ou de la narration et des animations (groupe à double représentation). Ils ont obtenu de meilleurs résultats aux tests de transfert que les apprenants des groupes de contrôle qui ont reçu du texte seul ou de la narration seule (groupe à représentation unique). La taille d’effet médiane obtenue a été de d = 1,35. 

D’autres recherches corroborent cet effet. Le principe du multimédia peut s’appliquer plus fortement aux apprenants à faible niveau de connaissances qu’aux apprenants à haut niveau de connaissances. De même, il s’applique plus fortement lorsque les images sont pertinentes pour la leçon et coordonnées avec les mots de la leçon.



Mobiliser le principe multimédia au service d’un apprentissage génératif


Le principe multimédia repose sur l’idée fondamentale que les apprenants comprennent et retiennent mieux les informations lorsqu’elles sont présentées à la fois sous forme de mots (texte ou parole) et d’images (illustrations, graphiques, vidéos).

Le modèle SOI (Sélectionner, Organiser, Intégrer) de Richard E. Mayer, également connu sous le nom de modèle de sélection, d’organisation et d’intégration, décrit les processus cognitifs impliqués dans un apprentissage significatif génératif. 

Les trois processus cognitifs clés du modèle SOI sont :
  • Sélection (S) :
    • L’apprenant prête attention aux informations pertinentes sous forme d’images et de sons. Il les sélectionne à partir du matériel présenté.
  • Organisation (O) :
    • Une fois les informations sélectionnées, l’apprenant doit les organiser mentalement en une représentation cohérente ou modèle.
    • Cela implique de construire des liens entre les informations et de créer une structure mentale qui facilite la compréhension.
  • Intégration (I) :
    • L’apprenant intègre la nouvelle représentation mentale avec ses connaissances antérieures.
    • Il se construit une compréhension plus profonde du sujet.
Une approche simple permettant un bon usage du principe multimédia dans un enseignement consiste à : 
  • Présenter les mots et les images qui se correspondent afin d’encourager l’apprenant à sélectionner les informations pertinentes
  • Organiser les contenus dans des représentations à la fois verbales et picturales
  • Établir des liens entre les représentations, ainsi qu’avec des connaissances pertinentes activées à partir de la mémoire à long terme. 
Les présentations multimédias sont destinées à favoriser le traitement génératif. Elles aident l’apprenant à conserver simultanément les représentations verbales et picturales correspondantes dans sa mémoire de travail et à établir des liens entre elles. 

Lorsque les apprenants s’engagent dans un traitement approprié pendant l’apprentissage, ils sont plus susceptibles de comprendre le matériel, ce qui favorise la performance ultérieure lors de tests de transfert. 

En revanche, lorsque les apprenants reçoivent uniquement des mots, il est peu probable qu’ils soient en mesure de construire une représentation picturale précise. De même, il y a moins de chances qu’ils la relient mentalement de manière appropriée à une représentation verbale, en particulier si les apprenants sont inexpérimentés. 

Dans ce cas, il est plus probable qu’ils construisent et stockent uniquement une représentation verbale en mémoire. Celle-ci sera moins susceptible de favoriser une compréhension qui soutient la performance lors de tests de transfert. Leur apprentissage se réduit à se souvenir de certains fragments verbaux de la leçon. Cela se reflètera dans leurs apprentissages et dans leur évaluation par de plus faibles résultats en transfert. 



Appliquer le principe multimédia à l’enseignement en classe

 
Selon le principe multimédia, développé par Richard Mayer dans sa théorie cognitive de l’apprentissage multimédia, les élèves apprennent mieux à partir de mots et d’images qu’à partir de mots uniquement. 
Il existe une opposition entre la théorie de la transmission de l’information et la théorie cognitive de l’apprentissage multimédia au sujet des mots et des images.

Selon la théorie de la transmission de l’information, les mots et les images sont simplement deux moyens différents de présenter la même information. 

Selon la théorie cognitive de l’apprentissage multimédia, les mots et les images amorcent deux systèmes de représentation des connaissances qualitativement différents chez les apprenants. Il existe un canal verbal et un canal visuel. 

Ce principe est directement pertinent dans le cadre d’un cours donné par un enseignant face à une classe. 
L’enseignant va accompagner ses explications verbales de la projection de schémas, d’organisateurs graphiques, de diagrammes, d’illustrations, de photos ou de vidéos.

Typiquement, le principe multimédia s’illustre lors d’une brève explication sur le fonctionnement d’un système physique, mécanique ou biologique. Par exemple, lors d’un cours de biologie sur la cellule, l’enseignant montre une image annotée d’une cellule et en décrit l’ultrastructure. 

Le principe multimédia en classe est très directement associé à l’usage d’un projecteur qui permet de partager des éléments visuels contigus aux explications orales. 

Ce processus a pour enjeux cognitifs de : 
  • Par une meilleure mobilisation des ressources de l’attention en combinant la mémoire sensorielle, sous ses formes orale et visuelle.
  • Faciliter la compréhension des élèves par un meilleur usage des ressources limitées de la mémoire de travail.
  • En optimisant l’activation de connaissances en mémoire à long terme sous formes visuelles et verbales.
Globalement, le processus permet de mieux : 
  • Maintenir l’attention
  • Clarifier des concepts abstraits
  • Faciliter la mémorisation.
Certains pièges sont à éviter : 
  • Selon le principe de redondance, l’enseignant doit éviter de projeter un texte équivalent à ses explications orales. Tout au plus va-t-il reprendre quelques mots ou points clés. 
  • Selon les principes de contiguïté spatiale et de contiguïté temporelle, l’enseignant va placer les mots et les images correspondants à proximité les uns des autres et simultanément
  • Selon le principe de cohérence, l’enseignant va éviter d’inclure des éléments visuels ou verbaux distrayants ou non pertinents. Il s’agit de choisir des éléments pertinents qui viennent compléter et renforcer l’explication verbale.
  • Selon le principe de modalité, l’enseignant va privilégier la narration audio pour accompagner les images plutôt que du texte à l’écran.
L’efficacité du principe multimédia repose sur l’idée que notre cerveau traite les informations visuelles et verbales par des canaux différents. En présentant l’information par les deux canaux, on sollicite davantage de ressources cognitives, ce qui peut conduire à une meilleure compréhension et une mémorisation plus durable.

Le principe multimédia s’applique lorsque l’enseignant combine de manière réfléchie mots et images pour faciliter la compréhension et renforcer la mémorisation.

L’objectif sous-jacent au principe multimédia est d’apprendre mieux plus que d’apprendre plus. L’enjeu ne se situe pas au niveau d’une question quantitative de l’apprentissage, mais sur la dimension de la qualité. Le principe multimédia se concentre plus spécifiquement sur la recherche d’un impact au niveau du transfert.



Dépasser la perspective de la théorie de la transmission de l’information pour l’esprit humain


La perspective de la théorie de la transmission de l’information


La théorie de la transmission de l’information, aussi appelée théorie de l’information, appartient au domaine des mathématiques et de l’ingénierie fondé par Claude Shannon en 1948. Elle étudie comment l’information peut être représentée, transmise et traitée de manière efficace, fiable et quantifiable, notamment dans les systèmes de communication (téléphones, Internet, radios, etc.).

En psychologie cognitive, la théorie de la transmission de l’information est utilisée comme modèle de base pour comprendre le fonctionnement mental de l’humain — en particulier la manière dont il perçoit, traite, stocke et restitue l’information.

Dans les années 1950-60, influencée par la théorie de Shannon, la psychologie cognitive a conceptualisé l’esprit humain comme un ordinateur :
  • Entrée : informations perçues par les récepteurs sensoriels
  • Traitement : attention, perception, mémoire, raisonnement
    • L’attention agit comme un filtre qui sélectionne certaines informations (car la capacité est limitée).
    • Le cerveau transforme les stimuli sensoriels (sons, images, mots) en représentations mentales.
    • Les informations sont stockées
      • à court terme (mémoire de travail — limitée)
      • ou à long terme (illimitée, mais sensible à l’oubli).
    • L’information peut être compressée mentalement (ex. : chunking ou regroupement)
  • Sortie : comportement, parole, décision, action
    • Lorsqu’on veut restituer l’information, on doit la récupérer et la reconstruire.
Ce modèle est séquentiel. Le modèle modal de la mémoire (Atkinson & Shiffrin) est directement inspiré de la théorie de l’information.


Le traitement des images


Selon la théorie de la transmission de l’information, les mots et les images sont équivalents sur le plan de l’information. Les différents formats de présentation, tels que les mots et les images, sont des moyens de présenter la même information. 

L’information est vue comme une marchandise objective qui peut être transportée du monde extérieur à l’intérieur de l’esprit humain. Ce transport peut se faire par des mots ou par des images. Le résultat est le même. L’information est stockée dans ce grand entrepôt que nous appelons la mémoire à long terme.

Dans cette perspective, les présentations multimédias ne seraient pas nécessaires, car la même information est transmise deux fois.

L’argument en faveur d’une présentation exclusivement verbale est que les mots sont le moyen le plus courant de présenter l’information parce que les messages verbaux sont efficaces et faciles à créer. La redondance visuelle peut être un gaspillage d’efforts.

Dans l’optique de la transmission de l’information, le rôle de l’enseignant est de transmettre l’information et celui de l’apprenant est de la stocker dans sa mémoire. Tant que l’information est transmise, le travail de l’enseignant est terminé, de sorte que l’enseignant n’a qu’à présenter une explication verbale complète.

Nous pouvons faire une interprétation stricte du concept de transmission de l’information. Les élèves qui reçoivent des présentations sous forme de mots devraient obtenir d’aussi bons résultats aux tests de transfert que les élèves qui reçoivent des présentations sous forme de mots et d’images. La condition est que l’apprenant reçoive pleinement la transmission des mots.

Les recherches portant sur le principe multimédia sont venues invalider ce point de vue théorique de la transmission de l’information chez l’être humain.



La perspective de la théorie cognitive de l’apprentissage multimédia sur l’usage des images


La théorie cognitive de l’apprentissage multimédia (Mayer, 2009) propose que les apprenants apprennent mieux lorsqu’ils sont exposés à des contenus multimodaux (texte, images et sons), à condition que ces éléments soient intégrés de manière cohérente avec le fonctionnement cognitif humain. 

L’usage des images est central dans cette théorie, mais il doit être soigneusement conçu pour maximiser les effets positifs sur l’apprentissage. 


Trois hypothèses pour la théorie cognitive de l’apprentissage multimédia


Mayer (2009) a avancé trois hypothèses fondamentales pour sa théorie :
  1. Un double canal : les individus traitent les informations par deux canaux cognitifs distincts — un canal visuel/pictural et un canal auditif/verbal (Paivio, 1986).
  2. Une capacité limitée : chaque canal a une capacité limitée de traitement en mémoire de travail. Trop d’informations visuelles ou verbales simultanément peuvent surcharger le système cognitif de l’apprenant. Nous avons par conséquent intérêt à utiliser parallèlement les deux canaux.
  3. Un traitement actif/génératif : les apprenants doivent activement sélectionner, organiser et intégrer les informations (modèle SOI) pour construire des représentations mentales (modèles mentaux).


Différences entre représentations picturales et verbales


Les représentations mentales picturales et les représentations mentales verbales sont qualitativement différentes. Par nature, les représentations visuelles et verbales ne peuvent pas être équivalentes sur le plan de l’information :
  • Le langage est l’un des outils cognitifs les plus importants jamais inventés par l’homme. En utilisant des mots, nous pouvons décrire un contenu d’une manière interprétée ou abstraite qui nécessite un certain effort mental pour le traduire.
  • Les images sont probablement le premier mode de représentation des connaissances chez l’homme. En utilisant des images, nous pouvons dépeindre le contenu sous une forme plus intuitive et plus proche de notre expérience sensorielle visuelle.
Bien que le même contenu puisse être décrit par des mots et représenté par des images, les représentations verbales et picturales qui en résultent ne sont pas équivalentes sur le plan de l’information. Bien que les représentations verbales et picturales puissent se compléter, elles ne peuvent pas se substituer l’une à l’autre. 



Rôle des images dans l’apprentissage multimédia


Les images peuvent améliorer l’apprentissage lorsqu’elles complètent le texte verbal, en facilitant la formation de connexions entre représentations verbales et picturales (Mayer & Moreno, 2003). Cela favorise une intégration conceptuelle plus riche.

De multiples effets et principes ont été mis en évidence : 
  • Le principe multimédia stipule que les apprenants apprennent mieux à partir de mots et d’images qu’à partir de mots seuls. 
    • Mayer et Gallini (1990) ont montré que les apprenants à qui l’on présentait des explications scientifiques avec des illustrations pertinentes obtenaient de meilleurs résultats aux tests de résolution de problèmes que ceux qui ne recevaient que du texte. 
  • Le principe de contiguïté spatiale stipule que les apprenants apprennent mieux lorsque les mots et les images correspondants sont présentés à proximité l’un de l’autre sur la page ou l’écran. 
    • Chandler et Sweller (1991) ont mis en évidence les effets négatifs de la séparation spatiale, montrant que lorsque les apprenants doivent diviser leur attention pour relier des éléments distants, cela impose une charge cognitive extrinsèque inutile, entravant l’apprentissage. Le rapprochement physique des mots et des images facilite l’intégration des informations dans la mémoire de travail.
  • Le principe de contiguïté temporelle stipule que les apprenants apprennent mieux lorsque les mots et les images correspondants sont présentés simultanément plutôt que séquentiellement. 
    • Mayer et Moreno (2002) ont montré que l’apprentissage est amélioré lorsque l’audio descriptif est synchronisé avec l’animation visuelle, par opposition à une présentation séquentielle. La présentation simultanée permet aux apprenants de construire plus facilement des connexions référentielles entre les représentations verbales et visuelles.
  • L’effet de redondance précise que des images mal utilisées ou combinées à des textes redondants peuvent surcharger la mémoire de travail
    • Chandler & Sweller (1991) ont montré que l’introduction de matériel explicatif apparemment utile, mais non essentiel peut avoir des effets néfastes sur l’apprentissage.
  • L’effet de signalisation indique que les images sont plus efficaces lorsqu’elles sont accompagnées d’indices visuels (comme des flèches ou des couleurs) qui attirent l’attention de l’apprenant sur les éléments pertinents ( de Koning et coll., 2009).
    • Johnson et ses collègues (2015) montrent que pour les élèves à faibles connaissances préalables, la signalisation visuelle (flèches ou gestes) améliore significativement l’apprentissage, réduit la difficulté perçue et rend la compréhension des graphiques plus facile.
  • L’effet de cohérence : L’ajout d’images décoratives, de sons ou de textes non pertinents peut nuire à l’apprentissage (effet de distraction ou de cohérence), car elles mobilisent inutilement la mémoire de travail (Mayer, 2009).
    • Sundararajan et Adesope (2020) ont réalisé une méta-analyse qui confirme les effets négatifs des éléments décoratifs, montrant que ces éléments peuvent interférer avec la sélection et l’organisation des informations pertinentes. Les images doivent être fonctionnelles et contribuer directement à la compréhension du matériel.
  • Le principe de modalité explique que les apprenants apprennent mieux à partir d’animations et de narration qu’à partir d’animations et de texte à l’écran.
    • Ce principe met en évidence la distribution de la charge cognitive entre les deux canaux. Lorsque les informations visuelles sont présentées avec une narration (son), le canal auditif est utilisé pour le texte, laissant le canal visuel libre pour les images. Si le texte est également présenté à l’écran, le canal visuel peut être surchargé. Mayer (2009) a fourni des preuves substantielles de ce principe, suggérant que le canal auditif est plus adapté au traitement du texte parlé en conjonction avec des informations visuelles dynamiques.


Le défi de l’apprentissage multimédia


Le travail de l’enseignant ne consiste pas seulement à présenter le contenu, mais aussi à guider l’apprenant dans le traitement cognitif du contenu présenté. 

On attend des apprenants qu’ils construisent des représentations verbales et picturales et qu’ils établissent des liens entre elles. Des messages multimédias soigneusement conçus peuvent favoriser ces processus chez les apprenants. 

Selon la théorie cognitive de l’apprentissage multimédia, les présentations multimédias ont le potentiel d’entraîner un apprentissage et une compréhension plus profonds que les présentations qui ne sont présentées que dans un seul format. Les présentations multimédias peuvent favoriser le traitement génératif. Elles permettent aux apprenants d’établir plus facilement des liens entre les mots et les images. Elles encouragent les apprenants à établir des liens entre les représentations verbales et picturales.

Dès lors, les élèves qui apprennent avec des mots et des images devraient obtenir de meilleurs résultats aux tests de transfert que les élèves qui n’apprennent qu’avec des mots. 

Une présentation multimédia guide l’apprenant dans la construction d’un modèle mental verbal et d’un modèle mental imagé, et dans l’établissement de liens entre les deux.

La présentation multimédia permet aux apprenants de conserver les représentations verbales et picturales correspondantes dans la mémoire de travail en même temps, augmentant ainsi les chances que les apprenants soient capables de construire des connexions mentales entre elles.

Selon la théorie cognitive de l’apprentissage multimédia, l’établissement de connexions entre les modèles mentaux verbaux et picturaux est une étape importante de la compréhension conceptuelle.


Implications pédagogiques


La théorie cognitive de l’apprentissage multimédia fournit un cadre solide pour la conception d’environnements d’apprentissage multimédia efficaces qui intègrent des images : 
  • Choisir des images pertinentes et fonctionnelles :
    • Éviter les images décoratives qui ne contribuent pas directement à la compréhension. Les images doivent illustrer des concepts clés, des processus ou des relations.
  • Assurer la contiguïté temporelle et spatiale :
    • Placer les images à proximité immédiate du texte ou de l’audio qu’elles illustrent.
  • Éviter la redondance inutile :
    • Ne pas répéter verbalement ce qui est déjà clairement montré visuellement, et vice-versa, à moins qu’il n’y ait une justification pédagogique spécifique (ex. support pour des apprenants spécifiques).
  • Utiliser la signalisation :
    • Guider l’attention des apprenants vers les informations importantes au sein des images à l’aide de techniques de signalisation visuelle.
  • Considérer la modalité : 
    • Préférer la narration aux textes à l’écran lorsque des images complexes sont présentées, afin d’optimiser l’utilisation des deux canaux cognitifs.
  • Adapter à l’expertise de l’apprenant :
    • Certains principes (comme la redondance) peuvent interagir avec le niveau d’expertise. Ce qui est redondant pour un expert peut être utile pour un novice.


Limites et conditions d’efficacité


L’impact des effets et principes de la théorie cognitive de l’apprentissage multimédia est fonction de : 
  • L’expertise de l’apprenant :
    • Les novices bénéficient plus des images que les experts, qui peuvent trouver certaines aides redondantes, c’est l’effet d’inversion de l’expertise  (Kalyuga et coll., 2003).
  • La motivation : 
    • Des images engageantes peuvent stimuler l’intérêt des élèves.
  • La complexité des contenus 
    • Selon Kalyuga et Sweller (2004), il est important de ne pas dupliquer l’information d’une manière qui impose une charge cognitive inutile. Cependant, il convient de noter que le texte à l’écran peut être bénéfique dans certaines conditions (par exemple, pour des apprenants ayant des difficultés auditives ou lorsque le rythme de la narration est rapide).




L’impasse de l’effet du média


Plutôt que de s’intéresser à la combinaison d’informations sous formes verbales et visuelles, ce que fait l’effet multimédia, nous pourrions nous interroger sur l’impact du média utilisé.

Il peut être utile de faire une distinction entre l’effet multimédia et l’effet du média :
  • Imaginons qu’une recherche s’intéresse à l’effet multimédia :
    • La question est de déterminer si les élèves apprennent plus profondément lorsque le contenu est présenté sous deux formes — telles que des mots et des images, plutôt que sous une seule forme — tels que des mots seuls. 
  • Imaginons qu’une recherche s’intéresse à l’effet du média :
    • La question est de déterminer l’effet comparé de médias différents sur l’apprentissage. Les élèves apprennent-ils plus profondément lorsque le contenu est présenté par le biais d’un média plutôt qu’un autre ? Par exemple, l’animation et la narration sur ordinateur pourraient être meilleures que les illustrations et le texte d’un livre.
La recherche sur l’effet du média fait face à différentes difficultés :
Premièrement, la question de recherche concernant les effets des médias n’a pas été productive avec des résultats empiriques peu concluants (Clark, 2001 ; Clark & Salomon, 1986 ; Mayer, 1997).

Il n’y a aucune différence significative dans les résultats des tests pour les élèves des différentes conditions. Certains ont reçu une explication présentée sous forme d’animation et de narration. D’autres ont reçu une explication du même système à l’aide d’illustrations et de texte (Mayer, 1997). 

De même, il n’y a pas de preuve cohérente que l’animation était plus efficace que les diagrammes statiques dans les cours multimédias (Mayer, Hegarty, Mayer, & Campbell, 2005). De même, un jeu informatique interactif ne parait pas plus efficace qu’une présentation sous forme de diaporama (Adams, Mayer, MacNamara, Koening, & Wainess, 2012).

Deuxièmement, la comparaison de l’apprentissage à partir de deux médias présente de sérieux problèmes méthodologiques. Il n’est pas possible de déterminer si les différences entre ce que les étudiants apprennent à partir de présentations textuelles et informatiques sont dues au support. Elles pourraient être dues au contenu et aux conditions d’étude qui sont indissociables du support. 

Troisièmement, l’apprentissage dépend de la qualité du message pédagogique plutôt que du support en tant que tel. Il est possible de concevoir un manuel de manière à ce que les étudiants aient de grandes difficultés à comprendre le contenu. De même, il est possible de concevoir un manuel de manière à ce que les étudiants puissent comprendre le contenu présenté plus facilement. De même, il est possible de concevoir une présentation informatisée de manière à entraver ou à promouvoir un apprentissage significatif.

Les facteurs qui améliorent la compréhension des étudiants dans un environnement livresque favorisent également la compréhension des étudiants dans un environnement informatique.

Quatrièmement, le problème de la recherche sur les médias concerne la théorie qui la sous-tend. La recherche sur les effets des médias repose sur une conception de l’apprentissage fondée sur la transmission de l’information, selon laquelle les médias sont des systèmes de transmission de l’information de l’enseignant à l’apprenant. 

Cette théorie est en contradiction avec la théorie cognitive de l’apprentissage multimédia et avec plusieurs idées clés de la psychologie cognitive — notamment les idées de traitement à double canal, de capacité limitée et de traitement actif.

La théorie cognitive de l’apprentissage multimédia repose sur une vision de la construction des connaissances selon laquelle les apprenants construisent activement des représentations mentales pour tenter de donner un sens à leurs expériences. Plutôt que de se demander quel est le meilleur support, nous pourrions nous demander quelles sont les techniques d’enseignement qui aident à guider le traitement cognitif du contenu présenté à l’apprenant. 



L’organisateur graphique préalable, une application du principe multimédia


La recherche sur les organisateurs graphiques offre une ligne de recherche importante qui complète la recherche sur l’effet multimédia. 

Un organisateur graphique préalable est un support d’apprentissage impliquant généralement une combinaison de graphiques et de texte. Il est présenté avant un passage du texte. Il est destiné à favoriser la compréhension du texte.

Les organisateurs graphiques préalables sont des modèles de compréhension (Mayer, 1989). L’organisateur a pour but d’amorcer chez l’apprenant des connaissances préalables pertinentes — y compris des structures de connaissances visuelles et verbales — que l’apprenant peut intégrer au texte entrant. 

Dans une étude (Mayer, 1983), des étudiants ont reçu un court passage sur le fonctionnement d’un radar et ont ensuite passé des tests de rétention et de transfert :
  • Pour le test de mémorisation, les étudiants devaient écrire tout ce dont ils se souvenaient du passage.
  • Pour le test de transfert, les étudiants devaient écrire des réponses à des problèmes qui nécessitaient des solutions créatives, telles que l’invention d’un moyen d’augmenter la zone surveillée par les radars.
Certains élèves ont été invités à étudier un organisateur graphique pendant 60 secondes avant d’écouter le passage. L’organisateur graphique contenant cinq dessins légendés représentait les éléments clés du contenu.

Les dessins avaient pour but d’amorcer les connaissances préalables de l’apprenant sur le sujet.

Les élèves qui ont reçu l’organisateur graphique préalable ont généré 80 % de solutions utiles en plus lors du test de transfert, que les élèves qui n’ont pas reçu le tableau d’organisation graphique. 

Des résultats similaires ont été obtenus lors de plus d’une douzaine d’autres tests expérimentaux. Ceux-ci portaient notamment sur des sujets tels que la loi d’Ohm, le cycle de l’azote et le fonctionnement d’un appareil photo (Mayer, 1989). 

L’ajout d’un organisateur graphique préalable soigneusement conçu à un passage du texte peut considérablement améliorer la compréhension de l’élève. 



Les limites à l’application du principe multimédia


Selon Fletcher et Tobias (2005), le principe multimédia est bien étayé par les résultats de la recherche empirique. Il suggère que l’apprentissage et la compréhension sont améliorés par l’ajout d’images au texte plutôt que par la présentation du texte seul.

Les graphiques jouent un rôle important dans l’enseignement, qu’il s’agisse de livres ou d’ordinateurs. Malheureusement, ils ne sont souvent pas utilisés de manière à favoriser l’apprentissage. Il existe des limites à l’efficacité du principe multimédia. 

Une analyse l’utilisation de l’espace dans les manuels de sciences de sixième année (fin du primaire, début du secondaire) a été réalisée par Mayer (1993). Il a constaté qu’environ la moitié de l’espace de la page était consacrée aux illustrations et l’autre moitié aux mots. Il les a classées sur la base d’une taxonomie élaborée par Levin et Mayer (1993). Les résultats ont montré que l’écrasante majorité des illustrations n’avait pas d’objectif pédagogique important : 23 % étaient décoratives et 62 % étaient figuratives. En revanche, seule une petite minorité d’illustrations renforçait le message pédagogique : 5 % étaient organisationnelles et 10 % étaient explicatives. Ce type d’analyse permet de conclure que le potentiel des graphiques n’est pas exploité.

De même, une analyse de manuels de mathématiques de cinquième année (primaire) a montré que si environ 30 % de l’espace était utilisé pour les illustrations. Cependant, la majorité d’entre elles n’avaient rien à voir avec l’objectif de la leçon (Mayer, Sims, & Tajika, 1995). Les auteurs de manuels n’exploitent pas au maximum le potentiel des graphiques pour améliorer l’apprentissage humain.



L’expertise comme condition limite au principe multimédia 


Il existe des preuves préliminaires que le principe multimédia peut être plus fort pour les apprenants ayant peu de connaissances préalables que pour ceux ayant des connaissances préalables élevées. 

Mayer et Gallini (1990) ont demandé à des étudiants de lire un livret expliquant le fonctionnement des freins, des pompes ou des générateurs électriques, puis de passer un test de transfert. Pour les élèves ayant déclaré de faibles connaissances préalables en mécanique, on a observé un fort effet multimédia. Les élèves ont obtenu de meilleurs résultats au test de transfert si leur livret contenait à la fois du texte et des diagrammes plutôt que du texte seul. 

En revanche, pour les élèves ayant déclaré des connaissances préalables élevées en mécanique, il n’y a pas eu d’effet multimédia important. Ces élèves ont obtenu des résultats presque aussi bons lorsqu’ils ont appris à partir d’un texte imprimé que lorsqu’ils ont appris à partir d’un texte imprimé avec des diagrammes. 

Des résultats assez similaires ont été rapportés dans une série d’expériences menées par Kalyuga, Chandler et Sweller (1998, 2000) sur l’apprentissage de la résolution de problèmes d’ingénierie.
  • Les apprenants ayant peu de connaissances préalables ont obtenu de meilleurs résultats aux tests de transfert lorsqu’ils apprenaient à partir d’un texte et de diagrammes plutôt que d’un texte seul. De même, ils étaient meilleurs lorsqu’ils apprenaient à partir d’une narration audio et de diagrammes plutôt que de diagrammes seuls.
  • Le schéma inverse a été obtenu pour les apprenants ayant beaucoup de connaissances préalables. C’est une manifestation de l’effet d’inversion de l’expertise. Les manipulations pédagogiques qui sont efficaces pour les apprenants ayant peu de connaissances peuvent être contreproductives pour les apprenants ayant beaucoup de connaissances.
Apparemment, les apprenants à haut niveau de connaissances étaient capables de générer une explication verbale à partir des diagrammes par eux-mêmes. Les apprenants à faible niveau de connaissances préalables avaient besoin de plus de conseils pour établir des liens entre les représentations picturales et verbales.


Mis à jour le 01/09/2024

Bibliographie


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