mercredi 11 mars 2020

Une vue d’ensemble du soutien au comportement positif

Le soutien au comportement positif propose la mise en place d’un système de soutien sur le plan de la gestion des comportements à l’échelle d’un établissement scolaire. L’objectif est de créer et de maintenir un milieu propice à l’apprentissage.


(Photographie : Anne Desplantez)



Démarche générale de mise en œuvre du soutien au comportement positif


Chaque établissement scolaire s’inscrivant dans cette démarche suit un processus précisément établi et bénéficie d’un soutien extérieur en matière d’expertise (voir liens pour le Québec et pour la Belgique).

Ce processus nécessite notamment de définir des valeurs propres à l’école et d’obtenir l’adhésion d’une large majorité du personnel (80 %) avant un démarrage effectif.

En se définissant trois à cinq valeurs communes et en s’engageant à les promouvoir, les enseignants posent les bases de l’amélioration. Il s’agit alors de déterminer les actions, les comportements, l’organisation et les engagements nécessaires à la mise en œuvre de leur vision et au succès de leurs missions.

Une équipe de pilotage est constituée pour le suivi et la mise en route du projet. Elle doit être représentative des différentes fonctions et niveaux dans l’école et doit regrouper des personnes aux compétences complémentaires.

Cette équipe va déterminer les besoins propres à l’établissement concerné. Des données sur les problèmes comportementaux qui sont vécus et ressentis seront relevées et analysées de façon systématique. L’idée est d’obtenir des mesures objectives d’une situation à un temps donné pour mesurer ensuite l’impact de la mise en place du soutien au comportement positif.

Autre élément fondamental à ce stade : il est crucial de bien prendre en compte les caractéristiques spécifiques des élèves qui fréquentent l’école. Nous devons déterminer quels facteurs sont susceptibles d’influencer le comportement des élèves et ce que l’établissement scolaire peut faire pour y remédier. Si les écoles suivent le même processus de mise en place, sa nature, ses priorités et ses spécificités peuvent varier de manière notable.

Une approche cohérente et positive de la discipline dans l’école est développée et mise en place par la suite avec la collaboration à des degrés divers de tout le personnel. Ces derniers travaillent en équipe selon le principe des communautés d’apprentissage professionnelles.

Une fois l’approche définie, nous devons consacrer du temps pour l’appliquer à l’échelle de l’école. Le processus complet prend normalement trois ans. Un pilotage basé sur des données avec ajustements éventuels se déroule parallèlement.



Une approche informée par la recherche


Le soutien au comportement positif offre un cadre de mise en œuvre, de support et de maintien de pratiques fondées sur des données probantes à l’échelle de l’école, de la classe et pour chaque élève. Il s’agit d’une approche qui s’inscrit pleinement dans la perspective d’une éducation informée par la recherche.

Le SCP contrebalance les modèles traditionnels de gestion de la discipline qui visent à résoudre les problèmes lorsqu’ils se manifestent en détaillant les infractions et les sanctions à la clé.

Dans le cadre du SCP, les démarches axées sur la prévention et le renforcement positif sont au centre du dispositif de façon à limiter les interventions nécessaires. Au plus la prévention joue un rôle central, au plus les bons comportements sont reconnus et mis en évidence adéquatement, au moins des perturbations seront susceptibles de se manifester et de nécessiter un suivi.

Un des fondements est que les comportements souhaités et les compétences comportementales attendues en classe et hors classe doivent être définis précisément. Ils sont par la suite enseignés explicitement au même titre que les contenus, et sont renforcés régulièrement lors de leurs manifestations. L’enseignement explicite des comportements est le pendant de l’enseignement explicite des contenus pour la gestion de classe.

Compte tenu de la diversité des élèves, du personnel et des milieux scolaires, les pratiques fondées sur des données probantes doivent être sélectionnées en fonction de leur pertinence. Elles seront mises en œuvre et ajustées pour s’assurer qu’elles sont culturellement et contextuellement pertinentes.



Une approche orientée résultats 


Le soutien au comportement positif est une démarche orientée résultats. Les résultats sont des énoncés d’objectifs déterminés localement, pertinents sur le plan contextuel et culturel, observables et mesurables. Ils décrivent les indicateurs de réussite de la mise en œuvre du SCP pour les élèves et le personnel encadrant. Le SCP ne se construit pas sur des objectifs flous ou subjectifs. Le principe est que ce qui est décidé est mis en place effectivement, et qu’il est évalué qualitativement et quantitativement de manière régulière pour pouvoir être ajusté en fonction des besoins identifiés.

Par exemple, une école peut vouloir réduire le pourcentage d’élèves exclus des classes, le nombre d’élèves qui ont des jours de renvoi ou sont exclus définitivement, ou œuvrer sur l’absentéisme. Pour cela, une marge de progrès attendue est déterminée dans des délais définis.

D’autres exemples peuvent être liés à la réalisation des devoirs, à la mise en rangs dans la cour, à la disponibilité du matériel scolaire, aux déplacements dans les couloirs, à la propreté dans la cour de récréation, etc.

Nous visons à éviter des critères et appréciations subjectives et nous déterminons quels résultats sont réellement pertinents et prioritaires. Nous nous fixons des critères de réussite réalistes et évaluables objectivement. Par la suite, nous procédons à une récolte et à une analyse de données chiffrées et à un suivi de ceux-ci. Nous ne pouvons pas non plus agir sur tous les paramètres et toutes les dimensions en même temps. La résolution d’une problématique prioritaire permet alors de se concentrer ensuite sur une problématique moins immédiatement urgente.



Installer une culture du suivi et de l’amélioration


Le soutien au comportement positif met l’accent sur l’évaluation de la mise en œuvre et des résultats de ces soutiens. Les données récoltées fidèlement et régulièrement fournissent des indicateurs quantitatifs de l’obtention des résultats attendus et de l’efficacité de la mise en œuvre.

De fait, au sein de l’école, les enseignants collectent régulièrement des données sur le comportement des élèves. Il s’agit par exemple, du nombre d’exclusions de classe, de la fréquence de tel ou tel comportement perturbateur ou du pourcentage d’élèves dans les rangs. La même approche peut servir à suivre des paramètres reliés du domaine de l’apprentissage comme les résultats scolaires, le décrochage et les difficultés scolaires ou l’assiduité. En effet, l’apparition d’écarts de comportements de certains élèves est régulièrement corrélée à des difficultés scolaires et souvent leur résolution le sera également.

La récolte de données permet également de mesurer la fidélité de la mise en œuvre afin de s’assurer que les interventions sont mises en œuvre comme prévu. En examinant régulièrement les données, les équipes scolaires peuvent décider de sélectionner, d’ajuster, d’étendre ou de cesser certaines pratiques à certains niveaux ou à tous les niveaux.

L’utilisation de données sert de guide à la décision pour 
  • Améliorer ou maintenir la mise en œuvre.
  • Déterminer par anticipation s’il est nécessaire d’apporter des interventions supplémentaires pour les élèves (ou le personnel) qui ont besoin de plus de soutien pour réussir.
  • Déterminer quelles interventions doivent être fournies et pilotées et évaluer ensuite leur mise en place pour favoriser la réussite.



Un accent sur l’organisation du système et la gestion des ressources


Le soutien au comportement positif vise la prestation d’un continuum de soutien pour tous les élèves et les enseignants. Il vise également une transparence et une équité des processus, la définition de protocoles précis. Il s’agit de savoir qui fait quoi, à quel moment et en fonction de quels critères. 

Le soutien au comportement positif s’inscrit pleinement dans le cadre d’une approche de réponse à l’intervention (RàI).


Nous devons promouvoir la mise en œuvre durable des pratiques avec fidélité. Nous entendons par là la mise en œuvre cohérente des pratiques telles qu’elles sont conçues. De fait, les écoles doivent investir dans des systèmes de soutien au personnel et de développement professionnel cohérent.

Nous devons développer des compétences en interne à différents niveaux. Tout le personnel encadrant les élèves doit être formé aux différentes approches. Une équipe à l’échelle de l’établissement doit soutenir l’implantation du système à l’échelle de l’école. Nous parlons de niveau 1.

Quelques enseignants ou éducateurs doivent développer des compétences plus larges pour traiter les problématiques qui échappent au niveau 1. Ils vont accompagner les élèves et conseiller les enseignants concernés par ces situations. Nous parlons alors d’un niveau 2.

Si un élève est responsable d’un écart majeur de comportement, tout un arbre décisionnel doit décrire la marche à suivre et les responsabilités diverses qui visent la résolution. De même, l’un ou l’autre enseignant ou éducateur doit disposer de compétences plus spécialisées dans l’accompagnement individuel d’élèves pour lesquels les niveaux 1 et 2 ont été impuissants. Nous parlons alors de niveau 3.

Nous pouvons le voir, le soutien au comportement positif pose donc la nécessité de soutenir le développement professionnel des équipes de manière continue et évolutive. Il suppose également la reconnaissance et la mise en valeur des compétences acquises, de même que la facilitation des collaborations.

Le système organisationnel de soutien collaboratif au sein du personnel est à la fois crucial et critique. Sans un environnement de travail positif et des membres du personnel qui sont engagés, positifs et dévoués, le système ne peut tourner efficacement.

Nous allons maintenant passer en revue les spécificités des trois niveaux :
(source Steve Bissonnette, https://scp-pbis.com/)


Soutien de niveau 1


Tous les membres du personnel offrent un soutien de niveau 1 à tous les élèves dans tous les environnements de l’école. Il regroupe des pratiques communes et universelles :

Mise en place : 


  • Identifier trois à cinq attentes positives (valeurs) qui seront connues de tous à l’échelle de l’école (p. ex. : sécurité, respect et responsabilités). Ces valeurs doivent être clairement définies en matière d’attentes et de relations.
  • Définir et enseigner explicitement les comportements attendus dans l’ensemble de l’école et dans les classes, de telle manière qu’elles deviennent des routines adoptées par tous (p. ex. « Comment montrer du respect en entrant dans la classe ? »). Il s’agit également d’enseigner des compétences sociales et de traiter systématiquement les erreurs sociales.
  • Aménager l’école et l’environnement de la classe de manière à : 
    • Promouvoir un comportement qui respecte les attentes.
    • Prévenir les comportements qui les enfreignent (p. ex. des affiches, adapter l’environnement physique, assurer une supervision active dans tous les lieux.).


Pratiques générales :


  • Soutenir le comportement positif : mettre en œuvre un continuum de stratégies pour reconnaître les élèves qui ont un comportement conforme aux attentes.
  • Interventions préventives et correctives : mettre en œuvre un continuum de stratégies pour répondre aux élèves qui ont un comportement contraire aux attentes. 
  • Évaluer et adapter : utiliser les données pour guider et évaluer la mise en œuvre des mesures de soutien pour tous les élèves.


Mise en œuvre : 


Pour mettre en œuvre le soutien de niveau 1, une équipe représentative du personnel de l’école est créée. Elle comprend des intervenants (c.-à-d. la direction, des enseignants représentatifs des années d’études ou des domaines de contenus, des éducateurs, et à titre consultatif de manière occasionnelle, le personnel non enseignant, les élèves et les parents). Cette équipe de niveau 1 va :
  1. Participer à des activités de formation
  2. Élaborer un plan d’action pour guider la mise en œuvre
  3. Offrir un développement professionnel continu à tout le personnel de l’établissement. 

Cette équipe se réunit régulièrement pour planifier, surveiller et évaluer la mise en œuvre du soutien de niveau 1 dans tous les lieux de l’école (en classe et hors classe). 

Cette équipe élabore également des systèmes pour soutenir et reconnaître les efforts de mise en œuvre du personnel.

Lorsque le soutien de niveau 1 est mis en œuvre avec fidélité (c.-à-d. comme prévu), les écoles peuvent s’attendre à ce que la plupart des élèves (environ 80 %) parviennent à s’y conformer.

Toutefois, certains élèves (environ 20 %) continueront d’avoir besoin d’un soutien supplémentaire. 



Soutien de niveau 2 


Public concerné :


Les élèves (au maximum 20 %) qui continuent à manifester un comportement à risque dans tous les milieux peuvent bénéficier d’un soutien de niveau 2, en groupes de besoin. Cela correspond par exemple à des perturbations répétées de faible niveau et autres infractions mineures.


Pratiques générales :


En général, on peut considérer que le niveau 2 intensifie chacune des pratiques du niveau 1 :
  1. Augmenter le nombre et l’importance des incitations
  2. Intensifier l’enseignement (c.-à-d. donner des explicitations de manière plus méthodique avec plus d’étapes et de pratique, réduire la taille du groupe, cibler des habiletés particulières)

Comme l’intensification ne représente pas de solution universelle, celle-ci peut se compléter d’autres interventions appuyées par des données probantes (par exemple Check In/Check Out).

De nouveau, tous ces processus sont évalués et sont le sujet d’une récolte de données.


Mise en œuvre :


Pour mettre en œuvre les soutiens de niveau 2, chaque école devrait identifier une équipe de membres du personnel ayant une expertise en matière d’éducation et de comportement qui aurait pour missions :
  1. Examiner les données existantes sur les élèves et les retours d’enseignants pour identifier les élèves ayant besoin d’un soutien de niveau 2.
  2. Identifier un « jumelage » d’intervention de niveau 2 approprié pour chaque élève identifié.
  3. Regrouper les élèves en fonction de leurs besoins.
  4. Planifier et assurer la mise en œuvre de l’intervention sélectionnée.
  5. Examiner régulièrement les données (chaque semaine ou toutes les deux semaines) pour surveiller la réponse de chaque élève à l’intervention de niveau 2.
  6. Prendre des décisions concernant l’intervention continue de chaque élève (p. ex : diminuer le soutien et revenir au niveau 1, maintenir ou ajuster le soutien au niveau 2, augmenter le soutien au niveau 3). 

Bien que la plupart des élèves qui ont besoin d’un soutien supplémentaire répondront au palier 2, certains élèves auront besoin d’un soutien encore plus intensif et individualisé au palier 3.



Soutien de niveau 3 


Public concerné :


Les élèves qui ont un comportement à risque élevé ou un comportement problématique chronique sont des candidats au soutien intensif et individualisé offert au niveau 3.

Il ne s’agit plus d’une simple gestion de classe. Il s’agit de comprendre les besoins et les antécédents de ces élèves. Nous leur donnons ensuite la possibilité d’acquérir les compétences pour parvenir à exprimer les comportements attendus, de manière socialement valable.

Ce qui est important, c’est qu’au sein de la classe, l’élève formé qui commence ensuite à exprimer le comportement attendu soit renforcé et récompensé ensuite dans l’utilisation de ses nouvelles compétences.

Il s’agit par exemple d’adolescents dont les aptitudes sociales sont faibles. Dès lors, ils utilisent régulièrement des modes des moyens inappropriés pour communiquer avec leurs pairs. Cela peut prendre la forme d’intimidation, de perturbation de la classe ou de l’usage de la force. Pour ces élèves, ces comportements répondent à une fonction. Ils trouvent que c’est la meilleure façon d’obtenir la reconnaissance de leurs pairs.

Pour d’autres élèves, la façon dont ils échappent à certains contextes difficiles (le travail, l’ennui ou la confrontation à des faiblesses) peut être extrêmement problématique et dysfonctionnelle. Elle persiste et elle s’est installée, car elle est efficace à court terme pour l’élève.

Nous accompagnons l’élève dans l’apprentissage d’autres stratégies et comportements efficaces pour communiquer avec ses pairs ou obtenir une reconnaissance sociale. Il peut être notamment difficile pour un élève de progresser dans un contexte où il est entouré de ses pairs qui risquent de stimuler ses mauvais comportements. C’est pourquoi au niveau 3, il s’agit de passer à des démarches individualisées.


Mise en œuvre :


Pour mettre en œuvre le soutien de niveau 3 et pour guider le processus d’évaluation et d’intervention, il faut former une équipe individualisée, dont les membres possèdent :
  • Une expertise en matière de comportement (p. ex. : psychologue scolaire, conseiller scolaire ou éducateur spécialisé), 
  • Une expertise en matière d’élèves et de relation avec les parents 
  • Une expertise en matière d’éducation. 

Les membres de l’équipe doivent planifier, mener et examiner les résultats de démarches portant sur l’analyse fonctionnelle du comportement.


Une fois qu’est identifiée la fonction du comportement problématique d’un élève, l’équipe travaille à l’élaboration d’un plan de soutien au comportement positif individualisé.

Celui-ci devrait comprendre :
  1. Des stratégies liées aux antécédents :
    • Modifier l’environnement pour susciter ou occasionner un comportement approprié
    • Éliminer les éléments déclencheurs d’un comportement inapproprié
  2. Des stratégies pédagogiques pour enseigner explicitement des comportements appropriés qui remplacent le comportement problématique et qui façonnent les comportements souhaités à long terme,
  3. Des stratégies de conséquences qui font en sorte que les comportements appropriés fonctionnent pour l’élève (c.-à-d. qu’ils entraînent un renforcement) et que les comportements problématiques ne le font plus. 

L’équipe de niveau 3 devrait s’assurer que tous les membres du personnel qui soutiennent l’élève sont informés sur la façon de mettre en œuvre le plan. Il s’agit également de surveiller la mise en œuvre, les résultats et ajuster le plan, au besoin, en fonction des données.

En plus des interventions en milieu scolaire documentées, certains élèves auront besoin de soutiens qui s’étendent au-delà des murs de l’établissement. L’école ne peut avoir réponse à tout.



Mis à jour le 24/07/2022

Bibliographie


Greg Ashman, 2019, It’s time to tackle Australia’s entrenched behaviour crisis, https://gregashman.wordpress.com/2019/12/05/it-is-time-to-tackle-australias-entrenched-behaviour-crisis/

Clermont Gauthier, Steve Bissonnette & Marie Bocquillon, L’enseignement explicite : une approche pédagogique efficace pour favoriser l’apprentissage des contenus et des comportements en classe et dans l’école, Apprendre et enseigner aujourd’hui, vol 8, n° 2, printemps 2019

Improving Behaviour in Schools, Guidance Report, Education Endowment Foundation, 2019

Brandi Simonsen & Diane Myers, Classwide positive behavior interventions and supports, Guilford, p 1–9, 2015

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