vendredi 27 décembre 2019

Établir des relations constructives et positives avec ses élèves

L’espèce humaine est éminemment sociale. Un enseignement efficace repose sur de nombreuses interactions. Nous empruntons presque toujours nos connaissances à d’autres. Par conséquent, la question de la relation joue un rôle central dès que nous abordons le sujet de la gestion de classe.

(Photographie : Robert Darch)



Facteurs généraux influençant la relation et la communication entre enseignants et élèves


La façon dont le relationnel et la communication entre un enseignant et ses élèves se mettent en place est influencée par de multiples facteurs tels que :
  • La culture et les caractéristiques de l’établissement scolaire.
  • Le profil, l’âge, l’origine et des caractéristiques des élèves telles que leur motivation, leurs intérêts ou leur sentiment d’efficacité.
  • Le profil professionnel et personnel de l’enseignant : ses pratiques pédagogiques, son expérience, ses croyances, ses convictions, sa personnalité ou ses conceptions.



Influence de la qualité des relations en classe avec les enseignants sur les résultats affectifs et cognitifs des élèves


Les classes sont des groupes sociaux. L’une des caractéristiques inhérentes aux groupes sociaux est la formation de relations.

Les relations peuvent être décrites comme ayant à la fois des dimensions positives et négatives.

La qualité des relations entre enseignants et élèves a une incidence sur les résultats scolaires. Les facteurs relationnels positifs des enseignants axés sur la personne sont associés à des résultats cognitifs et affectifs souhaitables chez les élèves :
  • Une association moyenne modérée à forte a été observée dans l’ensemble des études entre les indicateurs de relations positives et les résultats d’engagement des élèves
  • Une relation moyenne modérée à faible (mais toujours positive) a été observée entre indicateurs de relations positives et les résultats de rendement des élèves. 
  • Des résultats similaires ont également été obtenus pour l’association d’indicateurs de relations négatives et de résultats des élèves, mais dans une direction négative.

Voir article : Influence du comportement interpersonnel de l’enseignant sur les résultats de ses élèves.



Facteurs relationnels positifs et négatifs reliés aux relations en classe


Parmi les facteurs relationnels positifs, nous pouvons citer :
  • L’empathie et la sensibilité 
  • L’encouragement et le soutien
  • L’établissement de relations et les expressions de proximité, de chaleur humaine associée
  • L’intérêt manifesté de l’enseignant pour les autres activités des élèves et la participation de l’enseignant à des activités hors classe.

Parmi les facteurs relationnels négatifs, nous pouvons citer :
    • La négligence, l’indifférence et le manque d’empathie 
    • Le rejet et la négativité
    • La colère et les conflits

    Une conclusion raisonnable est qu’il est essentiel que les enseignants établissent des relations solides et positives avec leurs élèves. Les axes majeurs sont l’influence et la proximité.

    Ne pas tenir compte de l’établissement de relations est susceptible de miner l’efficacité de l’enseignant.



    Facteurs d’évolution des relations entre enseignants et élèves propres aux personnes


    Les relations entre un enseignant et ses élèves évoluent réciproquement :
    • Les enseignants ont sans doute l’influence la plus importante sur la qualité de la relation au début et celle-ci se maintient, avec les élèves les plus timides. 
    • Toutefois, ce sont les élèves avec le plus d’assurance qui ont le plus d’influence, par leurs interactions avec l’enseignant et par leurs autres comportements en classe.

    Il existe également une faible proportion d’élèves susceptibles de faire preuve de négativité relationnelle : 
    • Leur profil peut être préoccupant, car ils sont plus susceptibles de développer des relations conflictuelles avec leurs enseignants, de manifester de la colère et d’être exposés, en conséquence indirecte, à de moins bons résultats scolaires. 
    • Si de tels comportements se manifestent, ils gagnent à bénéficier d’un accompagnement comme le recommande une approche du type soutien au comportement positif.

    Un objectif raisonnable et utile est pour l’enseignant d’œuvrer à établir des relations positives, à la fois constructives et de soutien, avec tous ses élèves. Il s’agit ensuite de les maintenir tout au long de l’année scolaire en faisant preuve de vigilance.

    La recherche a mis en évidence une variété de stratégies propices. Les enseignants peuvent les utiliser pour encourager les élèves à adopter une attitude constructive et positive à l’égard de leurs apprentissages et poser les bases de relations saines.



    Influences des attributions et des interprétations que se font les élèves en lien avec les relations en classe


    Les relations se définissent à travers les interprétations et attributions que les élèves et les enseignants attachent à leurs interactions.

    Une relation se développe à partir d’une série d’interactions qui sont interprétées, additionnées et s’agrègent en une signification personnelle générale.

    Lorsqu’un enseignant critique le travail scolaire d’un élève, l’élève peut décrire l’enseignant comme étant antipathique. Il peut interpréter l’intention de l’enseignant comme étant hostile en raison des interactions antérieures, du langage de la critique ou de la communication non verbale de l’enseignant.

    Un autre élève peut croire que l’enseignant veut qu’il réussisse bien sur le plan scolaire et qu’il en a la capacité. L’enseignant manifeste des attentes élevées et a démontré des antécédents d’encouragement et de soutien. L’élève pourrait décrire l’interaction comme utile et l’enseignant comme constructif.

    Avec le temps, le premier élève peut se mettre en retrait volontaire de tout contact avec l’enseignant, devenir moins coopératif et recevoir dès lors un contact moins positif.

    Le deuxième élève peut avoir tendance à rechercher le contact avec l’enseignant, à s’efforcer davantage et à recevoir une attention plus soutenue de la part de l’enseignant.

    La première relation de l’élève avec l’enseignant est de l’évitement et ne présente pas de proximité. La deuxième relation de l’élève avec l’enseignant est plus positive et proche.



    Influence des états affectifs sur la communication


    Une interaction peut s’accompagner d’émotions qui témoignent de l’authenticité d’une relation de soutien.

    Ainsi lors de deux interventions au contenu identique, la forme peut changer à la fois en fonction de l’état d’esprit de l’enseignant et de celui de l’élève. En effet, l’enseignant peut tout aussi bien paraitre solidaire, attentionné, ennuyé, agacé, négatif, patient, positif ou impatient.

    L’interaction ne se limite pas à une communication, mais reflète également la relation entre les interlocuteurs et les états affectifs qu’ils vivent. Elle est un mélange d’explicite et d’implicite coloré par les interactions passées.

    La relation entre l’enseignant et ses élèves est ainsi un mélange d’expériences accumulées, faites de communications, d’émotions et d’attributions en fonction de leur histoire d’interactions.



    Différences entre les relations individuelles à l’échelle d’un élève et d’une classe


    Les enseignants passent une grande partie de leur temps en classe à interagir avec le groupe. La relation avec le collectif peut être différente des relations avec les individus. Elle n’en est pas la somme.

    Par exemple, il est tout à fait plausible qu’un enseignant puisse avoir des interactions généralement amicales et positives avec certains élèves dans une classe. Par contre, il devient plus distant et critique lorsqu’il s’adresse à toute la classe.

    Les relations individuelles ne posent généralement que peu de problèmes. Les relations avec le groupe classe sont quant à elles moins naturelles. Elles demandent un apprentissage pour l’enseignement débutant, elles ne s’improvisent pas.

    Les relations entre un enseignant et une classe évoluent à la suite d’une série d’interactions et d’interprétations faites par l’enseignant et les élèves au fil du temps. Elles se caractérisent par de nombreux spectateurs.



    Les dimensions de l’influence et la proximité en lien avec les relations interpersonnelles en classe


    Deux dimensions fondamentales définissent les comportements interpersonnels utilisés pour décrire les relations.

    Pour une présentation plus détaillée de ces deux dimensions, voir l’article :


    L’influence


    • L’influence fait référence à la manière avec laquelle les comportements interpersonnels dans la relation font preuve de directivité, d’assertivité, d’assurance, de contrôle ou de leadership. 
    • Les comportements d’influence d’un enseignant agissent sur, donnent une direction ou contrôlent dans une large mesure le comportement des élèves en classe. 
    • La dimension de l’influence a des extrêmes hauts et bas :
      • Les comportements interpersonnels à influence plus élevée comprennent l’établissement d’objectifs, la communication d’informations, l’explication, l’expression d’opinions, l’exercice d’un contrôle et la prise d’initiatives. 
      • À l’extrémité inférieure de la dimension de l’influence se trouvent les comportements de l’enseignant qui reflètent la soumission ou l’impuissance. C’est par exemple le fait de garder pour soi ses opinions ou ses sentiments, de se mettre en retrait, d’éviter la confrontation et de céder. 
    • D’autres comportements interpersonnels ont une influence plus moyenne, comme l’écoute, l’observation ou l’engagement dans des actions de routine.


    La proximité (ou affect)


    • L’affect décrit les relations interpersonnelles. Il représente l’étendue de la sociabilité ou du lien présent dans l’interaction. 
    • La dimension de la proximité a des extrêmes négatifs et positifs :
      • À l’extrémité positive de cette dimension se trouvent les comportements qui reflètent l’agréabilité ou l’affect positif. C’est par exemple le fait d’exprimer de l’affection, de rassurer, d’approuver, d’encourager, de complimenter et de montrer de l’empathie. 
      • À l’extrémité négative de la dimension de la proximité se trouvent le désagrément, l’hostilité, la critique, le discrédit, la désapprobation, l’opposition et le sarcasme.



    Combinaisons de l’influence et de la proximité


    La combinaison de ces deux dimensions produit des styles interpersonnels qui caractérisent la relation entre l’enseignant et les élèves.

    Si l’influence est élevée et la proximité est largement négative :
    • Les enseignants s’attendent à voir leurs élèves respecter leurs directives, mais n’offrent pas de soutien émotionnel ni d’acceptation. Leur style peut être qualifié d’autocratique. 
    • Les élèves tendent à s’y conformer, mais ils sont moins enclins à faire preuve d’initiative et d’enthousiasme. 
    • Leurs relations avec les élèves sont plus susceptibles d’être distantes et subies. 

    Si l’influence est élevée et la proximité largement positive :
    • Les enseignants ont un style semblable à celui d’un style parental que l’on pourrait qualifier d’autoritaire. 
    • Ces enseignants sont exigeants et chaleureux.
    • Leurs relations avec les élèves sont plus susceptibles d’être amicales.

    Si l’influence est basse et la proximité largement négative
    • L’enseignant ne donne pas d’orientations très claires à ses élèves.
    • Les relations ne sont pas bonnes avec les élèves et inspirent de la négativité de leur part.

    Si l’influence est basse et la proximité est largement positive
    • Le style de l’enseignant est qualifié d’incertain/tolérant
    • L’enseignant parait peu structuré et n’impose que peu d’attentes.
    • Il est tolérant et se préoccupe des élèves.
    • Les élèves tendent à tester fréquemment les limites et à tirer profit de la situation.



    Établir de bonnes relations avec un groupe d’élèves


    La plupart des enseignants veulent avoir de bonnes relations avec leurs élèves. L’atteinte de cet objectif n’est pas simplement une question de chaleur, de soutien et de bienveillance. L’enseignant qui ne viserait que ces aspects ne traiterait que de la dimension affective des comportements relationnels. Ce n’est pas suffisant pour établir de bonnes relations.

    Le contexte de la classe et le rôle de l’enseignant exigent que l’ordre soit établi afin qu’une vingtaine ou une trentaine d’élèves ou plus puissent travailler ensemble lors de temps prolongés.

    Pour gérer les comportements des individus et des groupes d’élèves, l’influence de l’enseignant doit être élevée. Il doit mener, diriger et organiser les élèves dans diverses activités de classe. Ce rôle n’est pas un passif, mais proactif, car il demande de l’anticipation.

    Néanmoins, la proximité est également une caractéristique essentielle des relations. La plupart des recherches s’entendent pour dire que les comportements des enseignants caractérisés comme étant chaleureux, influents, encourageants, acceptés et bienveillants sont associés à des relations positives avec les élèves et à des résultats souhaitables pour ceux-ci.

    Une manière de faciliter le processus est de poser des questions ouvertes aux élèves. Nous devons pouvoir établir une discussion et de trouver l’un ou l’autre sujet de conversation récurrent dont l’enseignant sait qu’il concerne les élèves, particulièrement ceux susceptibles de poser problème dans le cadre du cours.

    En définitive, toutes les interactions avec les élèves n’ont pas une grande influence et une grande incidence. Le contexte de l’interaction dictera souvent ce qui est approprié. De nombreuses interactions de routine qui se produisent tout au long de la journée sont essentiellement neutres.

    Il est important de garder à l’esprit que l’établissement de bonnes relations avec les élèves dépendra surtout d’une accumulation d’interactions. Au cours de celles-ci, l’enseignant crée des attentes, il donne des directives et établit des limites, tout en offrant soutien et encouragement aux élèves. La relation demande une constance de la part de l’enseignant pour s’établir, se maintenir et s’approfondir.



    Mise à jour le 07/03/2024

    Bibliographie


    Edmund T. Emmer, Carolyn M. Evertson, Classroom Management for middle and high school teachers, pp-11-17, Pearson, 2017

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